PARIS: C'est la réponse du gouvernement à la « pire récession économique depuis 1945 » : l'Assemblée nationale doit examiner lundi soir le plan de relance de 100 milliards d'euros pour tenter de rebondir face à la crise du Covid-19.
La droite, malgré des « réserves », compte soutenir ce plan. A gauche, PS et communistes prévoient de s'abstenir et LFI pourrait voter contre.
« Le grand défi, c'est de déployer les crédits. Il faut que les territoires, les citoyens, les entreprises et les associations ressentent les effets du plan de relance. Et dès les six premiers mois », insiste le rapporteur du budget Laurent Saint-Martin (LREM).
Le débat intervient alors que les perspectives économiques s'assombrissent encore pour la fin 2020, en raison du couvre-feu étendu. « Au quatrième trimestre, nous aurons probablement un chiffre de croissance négatif », a prévenu vendredi le ministre de l'Economie Bruno Le Maire.
Avec ce plan de relance, l'Assemblée entame la deuxième partie du projet de loi de finances (PLF 2021) consacrée aux dépenses de l'Etat.
Le vote solennel de l'ensemble du budget est prévu le 17 novembre à l'issue de cette première lecture, pour une adoption définitive au Parlement au plus tard le 18 décembre.
Sur les 100 milliards annoncés pour la période 2020-2022, la mission « plan de relance » au menu lundi vise à débloquer 22 milliards d'euros de crédits en 2021.
D'autres investissements figurent ailleurs, comme la revalorisation des carrières hospitalières, intégrée dans le budget de la Sécu, ou la baisse de 10 milliards des impôts de production des entreprises, votée en première partie de ce PLF 2021.
La mission « relance » se décline en trois « piliers » : « écologie », « compétitivité » et « cohésion des territoires ».
Parmi les mesures phares, les nouveaux crédits accordés à la rénovation énergétique des bâtiments : près de 3 milliards d'euros en 2021, dont 1,6 milliard pour les bâtiments publics.
En faveur des énergies propres, 205 millions de crédits sont fléchés en 2021 vers le développement de la « filière hydrogène vert », régulièrement mise en avant par le gouvernement.
« Saupoudrage »
Dans son volet compétitivité, le plan est marqué par la crise sanitaire et les difficultés d'approvisionnement en masques ou principes actifs de médicaments, et insiste sur les « relocalisations ».
Il promet 240 millions d'euros en 2021 afin de « sécuriser des approvisionnements critiques » : « produits de santé, intrants pour l'industrie, électronique, agroalimentaire et télécommunications ». Et 205 millions seront alloués en soutien à la relocalisation de projets industriels dans les territoires.
Enfin, pour le volet cohésion, toujours en 2021, 5 milliards d'euros visent la « sauvegarde de l'emploi » (chômage partiel, formation) et 4 milliards sont à destination des « jeunes », notamment pour leur faciliter l'entrée dans la vie professionnelle grâce à la prime à l'embauche.
Chez LR, Eric Woerth appuie globalement ces « investissements » mais regrette « pas mal d'illisibilité et beaucoup de saupoudrage ».
« Plusieurs mesures n'ont aucun lien réel avec la relance profonde de l'économie », estime-t-il, comme les crédits « affectés aux jardins partagés, à la plantation de haies ou encore à l'accueil d'animaux en fin de vie », dans la partie « écologie ».
La socialiste Christine Pires Beaune déplore de son côté des mesures insuffisantes « pour les ménages les plus modestes ».
Pour Sabine Rubin (LFI), le plan est « largement insuffisant » et « même ridicule ». La députée insoumise dénonce à nouveau l'absence de « contreparties » écologiques ou sociales demandées aux grandes entreprises aidées par l'Etat.
Dans la majorité, certains députés comme Laurianne Rossi plaident aussi pour des contreparties. Le gouvernement évoque lui les « engagements » des entreprises aidées en matière d'émissions de gaz à effet de serre, égalité femmes-hommes ou dialogue social.
En matière d'écologie, l'exécutif avance à un « rythme de petits pas, pas de grandes enjambées », regrette le député à la sensibilité écolo Matthieu Orphelin (non inscrit).
Pour financer cette relance, le gouvernement insiste sur les 40 milliards de l'Union européenne obtenus grâce à l'accord de juillet. Pour le reste, le pays devra encore s'endetter dans la logique du « quoi qu'il en coûte », défendue par Emmanuel Macron dès le 12 mars.