PARIS: Le premier volet du budget 2021 accoste à l'Assemblée lundi: il acte des baisses d'impôts des entreprises pour tenter de faire face à la crise du Covid-19, mais la gauche critique l'absence de « contreparties » écologiques ou sociales.
Le plan de relance de 100 milliards d'euros ne sera examiné qu'à partir de la fin octobre, lors de la deuxième partie de ce projet de loi de finances (PLF) 2021.
C'est un nouveau budget hors normes sur lequel vont plancher les députés, avec les dépenses qui filent pour relancer l'activité. Le gouvernement espère ainsi un rebond de 8% du PIB en 2021 - une prévision jugée « volontariste » par le Haut Conseil des finances publiques - après une contraction historique attendue à 10% cette année.
L'exécutif table sur un déficit de - 6,7% du PIB et un endettement toujours vertigineux à - 116,2 % du PIB en 2021.
Le premier volet du PLF consacre surtout la baisse de 10 milliards d'euros des impôts de production, dans une optique de « compétitivité des entreprises », souligne le rapporteur général Laurent Saint-Martin (LREM).
« Ce ne sont pas des cadeaux » mais pour « préserver 300.000 emplois dans le secteur industriel », affirme le patron des députés LREM Christophe Castaner.
Alors que ces impôts étaient affectés aux collectivités, le gouvernement assure qu'il compensera « à l'euro près ». Sur le qui-vive, l'Association des maires de France a critiqué un budget « calamiteux ».
La gauche et quelques voix LREM comptent réclamer des contreparties écologiques et sociales aux aides accordées aux entreprises. Aux yeux du PS, ces baisses d'impôts n'auront « aucun impact à court terme » et ne « répondent pas à l'urgence de la crise ».
« La pauvreté explose »
« Rien n'est prévu contre la pauvreté alors que ça explose », critique aussi l'Insoumis Eric Coquerel.
Les ex-« marcheurs » du petit groupe écolo EDS contestent également « l'absence d'engagements en matière de protection de l'environnement ».
« Les entreprises, il faut déjà qu'elles s'en sortent », rétorque un élu LREM. Et « les contreparties, on sait très bien que ça ne fonctionne pas les trois quarts du temps ».
Le rapporteur Laurent Saint-Martin rappelle son « objectif principal » : « l'emploi et la préservation de la relance ». « Aucune mesure portée par la majorité n'aura vocation à le ralentir ou le mettre en cause ».
Contre la pauvreté, il plaide pour de nouvelles mesures lors du dernier budget rectifié de 2020 (PLFR) en novembre, en rappelant ce qui a déjà été fait via le chômage partiel ou les aides aux « plus fragiles ».
De son côté, la droite a prévu de voter le plan de relance mais pas l'ensemble du budget. Eric Woerth (LR) juge le tout « assez confus », avec une « fuite en avant » dans les dépenses et l'endettement. Il aurait souhaité du gouvernement « différents scénarios » économiques « en fonction de l'évolution de l'épidémie ».
Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire vient déjà d'annoncer de nouvelles mesures de soutien : l'accès au Fonds de solidarité va être élargi à de nouvelles activités comme les loueurs de voitures et les fleuristes, ainsi qu'aux entreprises jusqu'à 50 salariés, contre 20 jusqu'ici.
Hors Palais Bourbon, l'ex-LR Xavier Bertrand, président des Hauts-de-France, réclame d'aller « plus vite et plus fort » dans la baisse des impôts de production. Il propose à titre expérimental un « levier fiscal » régional pour favoriser les relocalisations.
Ce premier volet du PLF n'a pas suscité d'énormes modifications en commission.
Laurent Saint-Martin (LREM) continue sa chasse aux petites taxes, obsolètes ou peu rentables, comme celle sur le « Minitel rose ».
Les députés ont appuyé le rapporteur pour aider les petites et moyennes entreprises (PME) en relevant le plafond du chiffre d'affaires de celles éligibles aux « taux réduit PME » pour l'impôt sur les sociétés.
Contre l'avis de Laurent Saint-Martin, les députés se sont par ailleurs prononcés pour éviter aux chambres de commerce une baisse de ressources de 100 millions d'euros.
Autant de mesures qui devront être revotées dans l'hémicycle où le débat est prévu pour durer une semaine complète, sur près de 3.000 amendements, jusqu'au vote mardi 20 octobre.
La gauche compte réclamer à nouveau le rétablissement de l'impôt sur la fortune. Une revendication « hors sujet » pour nombre de « marcheurs » qui assument une « politique de l'offre ».