PARIS: Le gouvernement, qui espère effacer d'ici deux ans les effets de la crise sanitaire sur l'économie française, a dévoilé lundi un projet de budget 2021 donnant clairement la priorité à la dépense, dans un contexte d'incertitude croissante avec la reprise de l'épidémie de Covid-19 ces dernières semaines.
Après plus de 460 milliards d'euros mis sur la table cette année pour faire face à la crise sanitaire, le projet de loi de finances pour 2021 adopté lundi en Conseil des ministres est centré sur le plan de relance de 100 milliards annoncé début septembre.
« Ce n'est pas parce que les difficultés sanitaires ont repris qu'il faut abandonner l'idée de la relance économique », a défendu le ministre de l'Economie Bruno Le Maire lors d'une conférence de presse.
Sur les 100 milliards prévus sur deux ans, 42 milliards doivent être injectés dans l'économie d'ici la fin de l'année prochaine, selon le projet de budget. « Nous allons veiller attentivement au décaissement rapide » de ces crédits, a promis le ministre de l'Economie, au moment où des critiques pointent le manque de mesures de court terme.
Au total, un gros tiers du plan servira à améliorer la compétitivité des entreprises et à favoriser la ré-industrialisation du pays, notamment via une baisse de 10 milliards d'euros des impôts de production pesant sur les entreprises.
Ce sera la principale mesure fiscale de ce budget, qui illustre l'axe stratégique choisi par le gouvernement: soutenir les entreprises afin qu'elles passent le cap de la crise et recommencent à embaucher après 800.000 suppressions d'emplois attendues cette année.
Environ 30 milliards doivent permettre d'accélérer la transition écologique, via des aides à la rénovation des logements ou aux transports propres. Enfin, 35 milliards d'euros serviront à financer des mesures de solidarité et de soutien à l'emploi (formation, etc.).
Grâce à ce plan, le gouvernement table sur un rebond du produit intérieur brut (PIB) de 8% l'année prochaine, après une contraction historique attendue à 10% cette année.
Cette prévision pour l'an prochain a été qualifiée de « volontariste » par le Haut conseil des finances publiques (HCFP), dans un avis rendu lundi. Il a aussi souligné les « très fortes incertitudes » que fait peser l'épidémie de Covid-19 et appelé à la vigilance sur l'endettement du pays.
« Qu'est-ce qu'on dirait d'un gouvernement qui ne serait pas volontariste? Si nous mettons en place un plan de relance c'est pour qu'il soit décaissé rapidement et pour qu'il ait un impact le plus fort possible sur la croissance », a répondu Bruno Le Maire.
La reprise de l'épidémie de Covid-19 depuis plusieurs semaines risque de menacer l'ambition du gouvernement si aucun vaccin ne vient rassurer entreprises et ménages, dont la confiance pour investir et consommer est cruciale pour sortir de la crise économique.
Peu d'économies
A côté de ce volet exceptionnel de dépenses, dont plus de 37 milliards d'euros seront toutefois financés par l'Union européenne, le gouvernement a décidé de maintenir plusieurs engagements pris avant la crise.
Après un début de polémique, la baisse de la taxe d'habitation débutera bien l'an prochain pour les ménages les plus aisés. La réduction de l'impôt sur les sociétés est aussi maintenue.
Les crédits promis aux ministères de la Défense, de l'Intérieur ou de l'Education sont également confirmés. Celui de la Justice va connaître une hausse importante de 8%, a annoncé M. Castex.
La chasse aux petites taxes jugées obsolètes va se poursuivre, avec la suppression de sept d'entre elles l'an prochain, pour l'équivalent de 25 millions d'euros, comme celle sur les émetteurs radio cibi ou sur la production d'oeuvres réservées aux adultes pour le minitel.
Au total, depuis le début du quinquennat, 45 milliards d'euros de baisses d'impôts ont été décidées pour les ménages et les entreprises.
Car si les finances publiques sont déjà mises à rude épreuve cette année, en particulier celles de la Sécurité sociale, avec un déficit public attendu à 10,2% du PIB, la priorité va à la reprise économique. Avec le blanc-seing de Bruxelles qui a suspendu les règles budgétaires européennes.
Ainsi, avec l'objectif de ramener le déficit à 6,7%, peu d'économies sont à attendre: les effectifs de la fonction publique devraient ainsi être stabilisés, ou diminués mais légèrement, a prévenu Bercy, après un amaigrissement déjà remis en cause après le mouvement des « gilets jaunes ».
Le gouvernement a assuré qu'il n'y aurait pas de hausse d'impôts, mais pour dégager quelques recettes supplémentaires, il a prévu de ponctionner l'organisme de financement du logement social Action logement à hauteur de 1,3 milliard d'euros, et les complémentaires santé vont payer une surtaxe Covid d'un milliard d'euros l'an prochain (puis 500 millions en 2022).