CANNES: Cinq ans après "The Square", le Suédois Ruben Östlund a raflé samedi une deuxième Palme d'or au 75e Festival de Cannes avec "Sans filtre", satire jouissive des super-riches et du luxe, sans conteste le film le plus divertissant de la compétition.
Euphorique sur la scène du Grand théâtre Lumière, le Suédois à l'humour grinçant rejoint, à 48 ans, le club très fermé des doubles palmés, parmi lesquels les frères Dardenne et Ken Loach.
"Tout le jury a été extrêmement choqué par ce film", a annoncé Vincent Lindon, le président du jury.
"Lorsque nous avons commencé ce film, nous n'avions qu'un but: essayer de faire un film qui intéresse le public et qui le fasse réfléchir avec provocation", a déclaré le Suédois, en recevant son prix.
Cannes: le Sud-coréen Song Kang-ho remporte le prix d'interprétation masculine
La star sud-coréenne Song Kang-ho, 55 ans, a remporté samedi soir le prix d'interprétation masculine à Cannes pour son rôle dans "Les bonnes étoiles" du Japonais Hirokazu Kore-Eda.
Acteur fétiche de son compatriote Bong Joon-ho, et star de son film "Parasite", Palme d'Or 2019, il joue dans ce film de Kore-eda un homme impliqué dans un trafic de bébés, qui va former une petite famille de bric et de broc autour de lui.
"Je suis très heureux pour toute ma famille", a-t-il sobrement déclaré en recevant son prix à Cannes.
Dans le film, son personnage criblé de dettes découvre un bébé abandonné et se porte volontaire pour lui trouver une nouvelle famille, en échange d'argent.
Autour de lui, gravitent un autre homme qui l'aide dans la "transaction" et la jeune mère, dont les motivations restent longtemps opaques.
La vente du bébé va se transformer en voyage entre Busan et Séoul, dans un van décati.
Song Kang-ho s'attendait à une direction d'acteurs "méticuleuse et calculée" de Kore-eda. "Mais il nous a vraiment respectés et a fait ressortir nos émotions d'une manière qui soit vraiment libre, bienveillante et inépuisable", a-t-il raconté début mai à Séoul.
En 25 ans de carrière, Song Kang-ho a tourné avec nombre de réalisateurs sud-coréens dont Park Chan-wook ("Thirst, ceci est mon sang", 2009, "Sympathy for Mr. Vengeance" 2003) et Bong Joon-ho ("Memories of a Murder" 2004, "the Host" 2006, avant "Parasite").
"Sans filtre" suit l'aventure de Yaya et Carl, un couple de mannequins et influenceurs en vacances sur une croisière de luxe. Un voyage qui tourne à la catastrophe.
Dans une sorte de "Titanic" inversé, où les plus faibles ne sont pas forcément les perdants, le film décortique les ressorts de classe de fond en comble: les riches contre les pauvres, mais aussi les hommes contre les femmes, et les Blancs contre les Noirs.
Le réalisateur livre une critique sans concession du capitalisme et de ses excès.
Elevé par une mère communiste, se définissant lui-même comme "socialiste", le Suédois n'a pas cédé à la facilité de "décrire les riches comme méchants" mais plutôt à "comprendre leurs comportements", dit-il.
Après "Play" (2011), "Snow therapy" (2014) et "The Square" (2017), Ruben Östlund continue de disséquer les conventions sociales, les petites lâchetés et les dilemmes moraux.
Dans "Sans filtre", le casting est anglophone: Östlund a mélangé nouveaux venus (la mannequin sud-africaine Charlbi Dean, notamment) et acteurs confirmés, comme l'Américain Woody Harrelson.