Amnesty dénonce le mauvais traitement des migrantes employées de maison au Qatar

La corniche de Doha, au Qatar, le 15 juin 2017 (Reuters)
La corniche de Doha, au Qatar, le 15 juin 2017 (Reuters)
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Publié le Mercredi 21 octobre 2020

Amnesty dénonce le mauvais traitement des migrantes employées de maison au Qatar

  • Le rapport documente des cas de passages à tabac réguliers subis par 15 des femmes, dont 40 déclarent avoir été giflées, crachées dessus ou même tirées par les cheveux
  • Quatre-vingt-sept des 105 personnes interrogées révèlent que leurs passeports ont été confisqués par leurs employeurs, les empêchant ainsi de rentrer chez elles

LONDRES: Les travailleuses migrantes au Qatar sont régulièrement victimes d'abus extrêmes, et sont souvent surchargées de travail, selon un rapport publié mardi par Amnesty International.

Le rapport, étudie les expériences de 105 travailleuses domestiques migrantes au Qatar. Certaines sont forcées de travailler des heures excessives, ne sont pas adéquatement payées, se voient refuser de la nourriture, et subissent des traitements physiques affreux de la part de leurs employeurs. Des agressions sexuelles aussi.

Le rapport documente des cas de passages à tabac réguliers subis par 15 des femmes, dont 40 déclarent avoir été giflées, crachées dessus ou même tirées par les cheveux. La plupart sont souvent insultées; l'une d’elles a déclaré avoir été traitée « comme une chienne » par son employeur.

Une autre a affirmé que son employeur avait menacé de lui couper la langue et de la tuer. « Je ne suis qu'une simple domestique, je ne peux rien faire », a-t-elle déclaré à Amnesty.

87 des 105 femmes interrogées révèlent que leurs passeports ont été confisqués par leurs employeurs, ce qui les empêche de rentrer chez elles. Les autorités qatariennes ne leur offre aucune protection.

Quatre-vingt-dix des femmes interrogées déclarent travailler plus de 14 heures par jour, et la moitié affirment que des journées de travail de 18 heures sont tout à fait normales - le double des heures usuelles inscrites dans leurs contrats. Plusieurs d’entre elles n'avaient jamais reçu de jours de congé.

Cinq des femmes interrogées par Amnesty déclarent avoir subi des abus sexuels de la part de leurs employeurs, ou de membres de leur famille.  L’une d'entre elles raconte avoir vu, de ses propres yeux, le fils de son employeur violer une autre collègue.

Elle et sa collègue se sont vu offrir de l'argent par l'employeur pour se taire. Quand elles sont allées faire un rapport de police, elles ont été accusées d'inventer toute l'histoire, a-t-elle dit.

On estime que le Qatar compte environ 173 000 travailleuses domestiques migrantes, et jusqu'à 2,7 millions travailleurs étrangers au total, ce qui représente près de 90% de la population du pays. La plupart viennent de l’Inde, du Népal, du Bangladesh et des Philippines.

Le Qatar est ébranlé depuis des années par les accusations de mauvais traitements systématiques à l'encontre de ces travailleuses. On leur refuse notamment le droit de créer des syndicats ou de rentrer chez elles sans l'autorisation de leurs employeurs.

La communauté internationale a attiré l'attention sur la manière dont le pays traite les travailleurs migrants depuis que le Qatar a obtenu le droit d'accueillir la Coupe du Monde de la FIFA 2022.

Ces problèmes persistent encore, notamment les retards de paiement, le non-paiement des salaires, les logements inadéquats ainsi que les pratiques d'exploitation de la part des employeurs.

Des mesures ont été prises pour introduire des réformes telles que le salaire minimum et la loi de 2017 sur les travailleurs domestiques, et qui garantissent officiellement des droits tels que les heures de travail, les pauses, les jours de congé et les vacances. Mais la plupart de ces mesures ne sont pas appliquées, et les travailleuses domestiques migrantes en particulier ont vite été délaissées, a déclaré Amnesty.

«Les femmes à qui nous avons parlé sont résilientes et indépendantes - elles ont quitté leurs maisons et voyagé à l'autre bout du monde. Au lieu d’être isolées et réduites au silence, ces femmes devraient avoir une voix pour défendre leurs droits», a déclaré Steve Cockburn, responsable de la justice économique et sociale d’Amnesty.

«Les travailleuses domestiques nous ont dit qu'elles travaillent en moyenne 16 heures par jour, tous les jours de la semaine, bien plus que la loi ne le permet. Presque toutes ont vu leurs passeports confisqués par leurs employeurs, et d'autres ont révélé qu’elles n’ont pas perçu de salaires, en plus d’être victimes d'insultes et d'agressions cruelles», a-t-il ajouté.

«La vue d'ensemble est celle d'un système qui continue de permettre aux employeurs de traiter les travailleurs domestiques, non pas comme des êtres humains, mais comme des biens. Malgré les efforts visant à réformer la législation du travail, le Qatar ne parvient toujours pas à trouver les meilleurs méthodes pour bien traiter les femmes les plus vulnérables du pays».

Un communiqué du gouvernement qatari a déclaré que les allégations soulevées par le rapport feront l'objet d'une enquête pour s'assurer que « tous les coupables » soient tenus de rendre des comptes.

« Si elles sont exactes, les allégations des personnes interrogées… constituent de graves violations de la loi qatarie et doivent être traitées en conséquence », a ajouté le communiqué.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Au Liban, le monastère du Saint des miracles attend le pape

"Saint Charbel m'a sauvé la vie". Comme de nombreux pèlerins, Charbel Matar se recueille sur la tombe du saint patron des Libanais, auquel sont attribués de nombreux miracles, avant la venue du pape Léon XIV. (AFP)
"Saint Charbel m'a sauvé la vie". Comme de nombreux pèlerins, Charbel Matar se recueille sur la tombe du saint patron des Libanais, auquel sont attribués de nombreux miracles, avant la venue du pape Léon XIV. (AFP)
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  • La visite du monastère qui abrite la tombe de Saint Charbel, au nord de Beyrouth, sera un moment fort de la visite du pape américain, attendu au Liban le 30 novembre
  • Saint Charbel Makhlouf (1828-1898), un moine-ermite maronite, canonisé en 1977, est populaire parmi les Libanais de toutes les communautés qui croient en ses miracles

ANNAYA: "Saint Charbel m'a sauvé la vie". Comme de nombreux pèlerins, Charbel Matar se recueille sur la tombe du saint patron des Libanais, auquel sont attribués de nombreux miracles, avant la venue du pape Léon XIV.

La visite du monastère qui abrite la tombe de Saint Charbel, au nord de Beyrouth, sera un moment fort de la visite du pape américain, attendu au Liban le 30 novembre.

"Ma famille et moi avons une grande foi en Saint Charbel et nous lui rendons toujours visite", déclare Charbel Matar, 69 ans, entouré de son épouse et ses amis.

"J'ai failli mourir quand j'avais cinq ans. Il a accompli un miracle, il m'a sauvé de la mort et m'a maintenu en vie pendant 64 années de plus", ajoute l'homme dont les parents ont changé le prénom de Roger à Charbel en l'honneur du saint.

Saint Charbel Makhlouf (1828-1898), un moine-ermite maronite, canonisé en 1977, est populaire parmi les Libanais de toutes les communautés qui croient en ses miracles.

Les portraits du saint, avec sa longue barbe blanche, ornent maisons, voitures, mêmes bureaux, et les visiteurs affluent au monastère, qui porte le nom de Saint Maron, en toutes saisons.

"J'étais certaine que le pape allait visiter Saint Charbel (..) car Rome ne peut pas nier les miracles qu'il accomplit", dit Randa Saliba, une femme de 60 ans. "Saint Charbel est un message d'amour (..), il garde vivant le message chrétien".

La dernière visite d'un souverain pontife au Liban avait été celle de Benoit XVI en 2012.

Toutes les confessions 

En prévision de l'arrivée du pape, des ouvriers appliquent une couche d'asphalte sur la route menant au paisible monastère, dans les montagnes boisées d'Annaya qui surplombent la mer.

Des visiteurs, dont des femmes musulmanes voilées, se promènent sur le site, où la cellule monacale de Saint Charbel a été gardée intacte. Certains allument des bougies et récitent des prières.

Fils de bergers, le moine originaire du nord du Liban était entré dans les ordres à l'âge de 23 ans, avant de mener une vie d'ermite.

L'abbé Tannous Nehmé, vice-recteur de Saint Maron, affirme que le monastère attire environ trois millions de visiteurs chaque année.

"Ce ne sont pas seulement des chrétiens - beaucoup de musulmans, ou des personnes non croyantes, viennent. Des gens arrivent de partout: d'Afrique, d'Europe, de Russie", affirme-il.

Au milieu des effluves d'encens, seul le bruit des travaux de restauration de la tombe de Saint Charbel troublent la quiétude du monastère.

C'est là que, lorsque la tombe a été ouverte en 1950, des représentants du clergé ont constaté que le corps du saint était intact, plus d'un demi-siècle après sa mort.

Le monastère a recensé des dizaines de milliers de personnes qui ont affirmé avoir été guéries par Saint Charbel.

La miraculée la plus célèbre est une Libanaise, Nohad Chami, diagnostiquée avec une maladie en phase terminale en 1993.

Elle affirme avoir eu une vision de Saint Charbel qui l'a guérie. Elle est décédée cette année, à l'âge de 75 ans.

"L'espoir" 

Le Liban, un pays multiconfessionnel, est le seul Etat arabe où le président de la République est un chrétien maronite, en vertu du partage du pouvoir entre les communautés.

"La visite du pape est très importante pour le Liban. Elle apporte du bien et la bénédiction", se réjouit Claude Issa, une mère de trois enfants âgée de 56 ans.

Le Liban est sorti d'une guerre meurtrière il y a près d'un an entre le Hezbollah et Israël, qui continue de mener des frappes dans le pays, disant viser des membres ou infrastructures du mouvement pro-iranien.

Secoué par une crise économique inédite depuis 2019, il a également connu en août 2020 une énorme explosion, qui a fait plus de 220 morts et dévasté une partie de Beyrouth.

Le pape doit tenir le 2 décembre une prière silencieuse sur le site de l'explosion, au port de Beyrouth, et célébrer une messe publique.

"Sa visite donnera un élan aux gens, leur fera sentir qu'il y a toujours de l'espoir au Liban", affirme Claude Issa.

 


L'ONU s'alarme «pour la survie de Gaza»

La "survie de Gaza est en jeu", s'alarme l'ONU mardi dans un rapport, appelant la communauté internationale à élaborer un "plan de redressement d'ensemble" et à intervenir "sans délai" et de manière coordonnée. (AFP)
La "survie de Gaza est en jeu", s'alarme l'ONU mardi dans un rapport, appelant la communauté internationale à élaborer un "plan de redressement d'ensemble" et à intervenir "sans délai" et de manière coordonnée. (AFP)
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  • Les opérations militaires israéliennes à Gaza "ont rongé tous les piliers de la survie", de la nourriture au logement en passant par les soins de santé, "nui à la gouvernance et plongé" le territoire palestinien "dans un abîme créé par l'homme"
  • "Compte tenu des destructions incessantes et méthodiques dont elle a fait l'objet, on peut douter sérieusement de la capacité de Gaza de se reconstruire, en tant qu'espace de vie et société", ajoute le rapport

GENEVE: La "survie de Gaza est en jeu", s'alarme l'ONU mardi dans un rapport, appelant la communauté internationale à élaborer un "plan de redressement d'ensemble" et à intervenir "sans délai" et de manière coordonnée.

Les opérations militaires israéliennes à Gaza "ont rongé tous les piliers de la survie", de la nourriture au logement en passant par les soins de santé, "nui à la gouvernance et plongé" le territoire palestinien "dans un abîme créé par l'homme", dénonce un rapport de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced).

"Compte tenu des destructions incessantes et méthodiques dont elle a fait l'objet, on peut douter sérieusement de la capacité de Gaza de se reconstruire, en tant qu'espace de vie et société", ajoute le rapport.

La guerre à Gaza a été déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas en Israël le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.221 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Plus de 69.756 Palestiniens ont été tués par la campagne militaire israélienne de représailles, selon le ministère de la Santé de Gaza, contrôlé par le Hamas. Ces données, jugés fiables par l'ONU, ne précisent pas le nombre de combattants tués mais indiquent que plus de la moitié des morts sont des mineurs et des femmes.

Selon le rapport de la Cnuced, les opérations militaires israéliennes ont fait passer Gaza "d'une situation de sous-développement à celle d'une ruine totale".

L'ONU estime qu'environ 70 milliards de dollars seront nécessaires pour reconstruire le territoire palestinien.

"Même dans un scénario optimiste, dans lequel la croissance atteint un taux à deux chiffres et l'aide étrangère afflue, il faudra plusieurs décennies pour que Gaza retrouve le niveau de qualité de vie d'avant octobre 2023", souligne le rapport.

La Cnuced appelle à la mise en oeuvre "d'un plan de redressement d'ensemble" qui associe "une aide internationale coordonnée, le rétablissement des transferts fiscaux" d'Israël vers Gaza "et des mesures visant à alléger les contraintes qui pèsent sur le commerce, les déplacements et l'investissement".

Cette agence onusienne appelle à instaurer, dans ce cadre, un revenu de base universel à Gaza, pour pourvoir à la subsistance de tous les habitants, sous forme d'un programme d'aide en espèces, "reconductible et sans conditions" et qui serait versé mensuellement.

La Cnuced note également qu'en Cisjordanie occupée, "la violence, l'expansion accélérée des colonies et les restrictions à la mobilité de la main-d'oeuvre" sont à l'origine du pire déclin économique depuis que l'agence a commencé à tenir des registres en 1972.


Au Soudan, les paramilitaires annoncent une trêve unilatérale de trois mois

L'émissaire du président américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a présenté récemment une proposition de trêve au nom des Etats-Unis, des Emirats arabes unis, de l'Arabie saoudite et de l'Egypte, pays médiateurs, dont les détails n'ont pas été divulgués. (AFP)
L'émissaire du président américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a présenté récemment une proposition de trêve au nom des Etats-Unis, des Emirats arabes unis, de l'Arabie saoudite et de l'Egypte, pays médiateurs, dont les détails n'ont pas été divulgués. (AFP)
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  • L'émissaire du président américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a présenté récemment une proposition de trêve au nom des Etats-Unis, des Emirats arabes unis, de l'Arabie saoudite et de l'Egypte, pays médiateurs, dont les détails n'ont pas été divulgués
  • "En réponse aux efforts internationaux, notamment à l'initiative du président américain Donald Trump et des médiateurs (...), nous annonçons une trêve humanitaire prévoyant une cessation des hostilités pour trois mois", a déclaré lundi Mohamed Daglo

PORT-SOUDAN: Les paramilitaires soudanais des Forces de soutien rapide (FSR) ont annoncé lundi une trêve humanitaire unilatérale de trois mois, au lendemain du rejet par l'armée rivale d'une proposition internationale de cessez-le-feu dans le pays ravagé par plus de deux ans d'un conflit meurtrier.

Le Soudan est le théâtre depuis avril 2023 d'une guerre pour le pouvoir, opposant l'armée du général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du pays, aux FSR de son ancien bras droit Mohamed Hamdane Daglo.

Le conflit, marqué par des exactions dans les deux camps et auquel plusieurs médiateurs internationaux tentent de mettre un terme, a fait plusieurs dizaines milliers de morts et forcé le déplacement de millions de personnes, plongeant le pays dans ce que l'ONU qualifie de "pire crise humanitaire" au monde.

L'émissaire du président américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a présenté récemment une proposition de trêve au nom des Etats-Unis, des Emirats arabes unis, de l'Arabie saoudite et de l'Egypte, pays médiateurs, dont les détails n'ont pas été divulgués.

"En réponse aux efforts internationaux, notamment à l'initiative du président américain Donald Trump et des médiateurs (...), nous annonçons une trêve humanitaire prévoyant une cessation des hostilités pour trois mois", a déclaré lundi Mohamed Hamdane Daglo, dans une allocution vidéo enregistrée.

Les paramilitaires avaient indiqué début novembre accepter le principe d'une trêve humanitaire proposée par les médiateurs, à laquelle l'armée n'avait pas répondu, et les combats entre les deux camps n'ont pas cessé depuis.

Le chef de l'armée a lui jugé dimanche "inacceptable" la nouvelle proposition de trêve, appelé les citoyens désireux de défendre leur pays à "rejoindre immédiatement les lignes de front" et accusé la médiation de partialité.

Frères musulmans? 

"Encore une fois, le général (Abdel Fattah) al-Burhane refuse les offres de paix. Dans son rejet de la proposition américaine pour le Soudan, dans son refus obstiné d'un cessez-le-feu, il fait sans cesse preuve d'un comportement d'obstruction", a réagi lundi la ministre d'Etat à la coopération internationale des Emirats, Reem al Hashimy.

Le général Burhane a estimé que la dernière proposition envoyée par l'émissaire américain était "la pire", car, selon lui elle "élimine les forces armées, dissout les agences de sécurité et maintient les milices là où elles sont" au lieu de les désarmer.

Il a également rejeté les "récits" selon lesquels les islamistes des Frères musulmans contrôleraient l'armée, accusant M. Boulos de reprendre les éléments de langage des Emirats.

"Où sont ces soi-disant membres des Frères musulmans au sein de l'armée soudanaise? Nous ne les connaissons pas. Nous entendons seulement de telles affirmations dans les médias", a-t-il dit.

Dans son discours diffusé lundi, le chef des FSR a réaffirmé son "engagement en faveur d'un processus politique auquel participent tous les acteurs, à l'exception du mouvement islamiste terroriste des Frères musulmans et du Congrès national (parti désormais interdit du général Omar el-Béchir au pouvoir de 1989 à 2019, NDLR), car ils sont responsables de toute la tragédie que vit notre peuple depuis trois décennies".

Au cours des deux dernières années, les parties belligérantes au Soudan ont violé tous les accords de cessez-le-feu, entraînant l'échec des efforts de négociation.