Ankara et Téhéran s'efforcent de combler le «vide» laissé par Moscou en Syrie

Un soldat russe monte la garde dans le nord-est de la province de Hasakeh, en Syrie (Photo, AFP).
Un soldat russe monte la garde dans le nord-est de la province de Hasakeh, en Syrie (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 21 mai 2022

Ankara et Téhéran s'efforcent de combler le «vide» laissé par Moscou en Syrie

  • La crise ukrainienne risque d'accroître la dépendance du régime de Damas vis-à-vis de Téhéran, déclare un analyste à Arab News
  • Ankara et Téhéran soutiennent des camps rivaux dans le conflit syrien, l'Iran soutenant le régime d'Assad, tandis que la Turquie soutient l'opposition syrienne

ANKARA: Le retrait de dizaines de milliers de soldats russes de Syrie pour renforcer les troupes russes en Ukraine pourrait marquer un tournant dans le conflit syrien et conduire à une course entre Téhéran et Ankara pour combler le vide laissé par Moscou dans le pays, selon d’éminents analystes. 

La Russie, l'Iran et la Turquie sont les pays garants des pourparlers d'Astana sur la Syrie, qui visent à négocier un accord de paix permanent en réunissant les parties en conflit.

Cependant, la Russie a été la force d'équilibre dans ce trio, empêchant l’enracinement incontrôlé des milices soutenues par l'Iran.

Mais aujourd'hui, les bases russes abandonnées auraient été transférées au corps paramilitaire iranien des gardiens de la révolution (CGRI) et au Hezbollah, tandis que Téhéran devrait envoyer davantage de troupes en Syrie pour combler le vide laissé par le personnel militaire russe à destination de l'Ukraine.

EN BREF

Début avril, Luna Chebel, l'une des principales conseillères du président syrien Bachar Assad, a déclaré à la BBC que l'assistance et l'expertise des forces iraniennes étaient les bienvenues, laissant entendre que l'Iran pourrait avoir une plus grande influence en Syrie.

Début avril, Luna Chebel, l'une des principales conseillères du président syrien Bachar Assad, a déclaré à la BBC que l'assistance et l'expertise des forces iraniennes étaient les bienvenues, laissant entendre que l'Iran pourrait avoir une plus grande influence en Syrie.

L'Iran aurait créé une nouvelle milice, semblable à ses forces d'élite, afin d'assumer les missions précédemment confiées aux troupes russes. Cette nouvelle force, sous le contrôle du Hezbollah et du CGRI, stocke des drones, des armes chimiques et des missiles balistiques.

Ankara et Téhéran soutiennent des camps rivaux dans le conflit syrien, l'Iran soutenant le régime d'Assad tandis que la Turquie soutient l'opposition syrienne. 

Le ravitaillement maritime des forces russes en Syrie a été compliqué ces derniers mois par la décision d'Ankara, dans le cadre de la convention de Montreux, de restreindre l'utilisation des détroits turcs par les navires de guerre russes basés en mer Noire.

Toutefois, Mehmet Emin Cengiz, chargé de recherche à Al-Shark Strategic Research, estime qu'il est peu probable que la Russie abandonne sa présence en Syrie.

«La Russie a beaucoup investi en Syrie au fil des ans, et il existe une rivalité de longue date entre la Russie et l'Iran pour l'influence en Syrie. Même si la Russie relocalise certains de ses soldats ou les retire de Syrie, elle ne laissera pas le terrain entièrement à l'Iran», a-t-il expliqué à Arab News. 

Cengiz estime que la crise ukrainienne permettant à l'Iran de combler certains des vides laissés par la Russie en Syrie, il est probable que le conflit accroisse la dépendance du régime vis-à-vis de l'Iran.

«Après la crise ukrainienne, les contacts entre les responsables syriens et iraniens se sont multipliés. Récemment, Bachar Assad a effectué une visite à Téhéran. Il pourrait recevoir une aide économique de Téhéran face à la profonde crise économique que traverse la Syrie», a indiqué Cengiz.

Selon Aron Lund, membre du think tank Century Foundation basé à New York, la guerre en Ukraine a bouleversé l'équilibre entre la Turquie et la Russie en faveur de la Turquie, ce qui pourrait avoir des conséquences pour la Syrie.

«Cela pourrait finir par déstabiliser une situation gelée depuis longtemps, mais cela ne conduira pas nécessairement à un nouveau conflit», a-t-il révélé à Arab News.

Et Lund d’ajouter: «Même sous pression en Ukraine, la Russie pourrait être en mesure de dissuader les avancées des forces soutenues par la Turquie en Syrie, et Ankara pourrait toujours vouloir la coopération de la Russie afin de préserver ses propres intérêts.»

Lund pense que les deux pays pourraient échanger des concessions et des faveurs de manière à éviter d'échanger des territoires, ou de faire la guerre, à Idlib.

Il a signalé: «Par exemple, la Russie pourrait accepter d'être plus flexible sur les questions humanitaires, notamment sur un prochain vote au Conseil de sécurité des Nations unies en juillet que la Turquie souhaite vraiment faire passer. Ou encore, la Russie pourrait apporter son soutien aux opérations transfrontalières turques contre les forces kurdes, ce qu'elle s'est montrée réticente à faire par le passé.»

La semaine dernière, Geir O. Pedersen, émissaire spécial des Nations unies pour la Syrie, a récemment envoyé des invitations au régime syrien et à l'opposition pour le huitième cycle de pourparlers qui débutera fin mai.

Lund s'attend à de nouveaux accords concernant le comité constitutionnel syrien négocié par l'ONU.

Il a ajouté: «Mais la reprise des combats à Idlib reste un risque vivant, soit en raison d'une rupture de l'équilibre, soit comme un moyen de tester la force et la détermination de l'autre partie».

L’expert de l'université de Georgetown, Noah Ringler, estime que si Ankara et Téhéran ont coopéré par le passé contre des groupes affiliés au PKK pour lutter contre une menace commune, cette fois-ci, l'Iran pourrait reconnaître le Parti de l'union démocratique kurde, affilié syrien du Parti des travailleurs du Kurdistan, comme une faction différente et être ouvert à l'idée d'assumer le rôle de la Russie dans la négociation et la coordination entre le régime d’Assad et les autorités administratives du nord-est de la Syrie.

Ringler a déclaré à Arab News: «Alors que l'Iran élargit son rôle en Syrie, la Turquie cherchera probablement des occasions d'affronter les forces du régime d'Assad et leurs partenaires pour accroître le territoire ou le commerce près de Manbij ou de Tal Rifaat, voire près d'Ayn Issa, d'autant plus que les opérations précédentes du président turc Recep Tayyip Erdogan se sont avérées populaires et que le soutien public au retour forcé des réfugiés en Syrie a augmenté.»

Il a soutenu: «Les forces d'Assad cherchent toujours à lancer une autre phase de l'opération d'Idlib, et l'Iran pourrait envisager d'en soutenir une à l'avenir pour déstabiliser le flanc sud de l'OTAN, en fonction des négociations nucléaires et d'autres facteurs, mais l'Iran n'est pas prêt à le faire à ce stade.»

Toutefois, les désaccords actuels entre la Turquie et l’Iran ne se limitent pas à la Syrie. Les différends concernant les eaux transfrontalières et la construction de barrages viennent encore tendre les relations bilatérales.

Les projets de barrages de la Turquie sur les fleuves Tigre et Aras ont provoqué la colère de Téhéran, qui craint que ces projets ne réduisent le débit du Tigre et de l'Euphrate et ne constituent une menace pour l'environnement, comme l'ont montré les récentes tempêtes de poussière.

Le ministère turc des Affaires étrangères a toutefois déclaré qu'Ankara était ouverte à toute «coopération rationnelle et scientifique» avec Téhéran.

Le transit illégal de réfugiés afghans vers la Turquie depuis sa frontière avec l'Iran a également suscité la colère d'Ankara, qui affirme que Téhéran a facilité ce passage incontrôlé.

«Les relations entre l'Iran et la Turquie sont de plus en plus tendues sur un certain nombre de dossiers : La construction du barrage, la reprise des relations d'Ankara avec Israël, les tensions avec les milices soutenues par l'Iran en Irak, et maintenant le déplacement des ressources russes de la Syrie vers l'Ukraine vont ajouter des complications supplémentaires», a déclaré Jason Brodsky, directeur politique de United Against a Nuclear Iran.

Un nouveau rapport du Pentagone affirme que les milices soutenues par l'Iran ont coordonné avec le PKK pour attaquer les troupes turques dans le nord de l'Irak.

«Tous ces développements ont le potentiel de modifier l'équilibre en Syrie, étant donné son paysage encombré. En 2020, le centre consultatif de l'Iran dans le nord de la Syrie a averti les forces turques qu'elles pourraient être prises pour cible après qu'elles aient riposté à la mort de 33 soldats turcs, dans une frappe aérienne syrienne à Idlib», a affirmé Brodsky à Arab News.

La Russie ayant tenté par le passé de réduire les tensions entre la Turquie et le gouvernement syrien dans la région, Brodsky estime que le retrait des troupes russes pourrait renforcer le régime d'Assad ainsi que la présence iranienne à Idlib.

Et de soutenir: «Cela ne veut pas dire que la Russie sera entièrement absente de la Syrie, mais si elle déplace des forces pour faire face à l'Ukraine, cela pourrait brouiller la dynamique du champ de bataille à Idlib.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Les États-Unis débloquent 117 millions de dollars pour les Forces libanaises

Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
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  • Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».
  • C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

WASHINGTON : Lles États-Unis ont annoncé  samedi le transfert de 117 millions de dollars destinés à soutenir les forces de l'ordre et l'armée libanaises, à l'issue d'une réunion de donateurs internationaux, jeudi.

Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».

C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

Un cessez-le-feu a pris effet fin novembre entre le mouvement islamiste pro-iranien Hezbollah et Israël, après plus d'un an de bombardements de part et d'autre, ainsi qu'une incursion des forces israéliennes en territoire libanais à partir de fin septembre.

L'enveloppe annoncée samedi par le département d'État « démontre son engagement à continuer à travailler avec ses partenaires et alliés pour s'assurer que le Liban bénéficie du soutien nécessaire pour renforcer la sécurité du pays et de la région ».

Samedi, le président libanais, Joseph Aoun, a réclamé le retrait de l'armée israélienne « dans les délais fixés » par l'accord de cessez-le-feu.

Ce dernier prévoit le déploiement de l'armée libanaise aux côtés des Casques bleus dans le sud du pays et le retrait de l'armée israélienne dans un délai de 60 jours, soit d'ici au 26 janvier.

Le Hezbollah doit, pour sa part, retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 km de la frontière libano-israélienne. 


Manifestation pour revendiquer la libération de l'opposante Abir Moussi

Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
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  • Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.
  • Soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

TUNIS : Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.

Brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Liberté pour Abir » ou « Nous sommes des opposants, pas des traîtres ! », ils étaient entre 500 et 1 000, selon des journalistes de l'AFP. Beaucoup portaient des drapeaux tunisiens et des photos de la dirigeante du PDL.

Ils ont critiqué virulemment à la fois le président Kaïs Saied et le parti islamo-conservateur d'opposition Ennahdha. Mme Moussi, ex-députée de 49 ans, est en détention depuis son arrestation le 3 octobre 2023 devant le palais présidentiel, où, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de M. Saied.

Mme Moussi fait l'objet de plusieurs accusations, dont celle particulièrement grave de tentative « ayant pour but de changer la forme de l'État », soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

Les manifestants ont dénoncé le décret 54 sur les « fausses nouvelles », en vertu duquel Mme Moussi est poursuivie dans cette affaire, et dont l'interprétation très large a entraîné l'incarcération depuis septembre 2022 de dizaines de politiciens, d'avocats, de militants ou de journalistes.

Pour Thameur Saad, dirigeant du PDL, emprisonner Mme Moussi pour des critiques envers l'Isie « n'est pas digne d'un pays se disant démocratique ». « Les prisons tunisiennes sont désormais remplies de victimes du décret 54 », a renchéri à l'AFP Karim Krifa, membre du comité de défense de Mme Moussi.

D'autres figures de l'opposition, dont le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, sont également emprisonnées.

Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, l'opposition et les ONG tunisiennes et étrangères ont déploré une régression des droits et des libertés en Tunisie. Le chef de l'État a été réélu à une écrasante majorité de plus de 90 % des voix le 6 octobre, lors d'un scrutin marqué toutefois par une participation très faible (moins de 30 %).


L'Égypte annonce que 50 camions-citernes de carburant entreront chaque jour dans la bande de Gaza

Le ministère palestinien de la Santé a déclaré qu'une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée, a tué cinq personnes mardi, l'armée israélienne confirmant avoir mené une attaque dans la région. (Photo d'archives de l'AFP)
Le ministère palestinien de la Santé a déclaré qu'une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée, a tué cinq personnes mardi, l'armée israélienne confirmant avoir mené une attaque dans la région. (Photo d'archives de l'AFP)
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  • Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a annoncé samedi que 50 camions-citernes chargés de carburant devaient entrer dans la bande de Gaza à partir de dimanche, marquant le début du cessez-le-feu.
  • M. Abdelatty, dont le pays, le Qatar et les États-Unis ont servi de médiateur, a déclaré que l'accord prévoyait « l'entrée de 600 camions par jour dans la bande, dont 50 de carburant ».

LE CAIRE : Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a annoncé samedi que 50 camions-citernes chargés de carburant devaient entrer dans la bande de Gaza à partir de dimanche, marquant le début du cessez-le-feu.

M. Abdelatty, dont le pays, le Qatar et les États-Unis ont servi de médiateur, a déclaré que l'accord prévoyait « l'entrée de 600 camions par jour dans la bande, dont 50 de carburant ».

La trêve devrait entrer en vigueur dimanche à 13 h 30 GMT, ouvrant ainsi la voie à un afflux massif d'aide, selon les médiateurs.

Des centaines de camions sont garés du côté égyptien du poste frontière de Rafah, un point d'entrée autrefois vital pour l'aide humanitaire, fermé depuis mai, lorsque les forces israéliennes ont pris le contrôle du côté palestinien du point de passage.

Au cours d'une conférence de presse conjointe avec son homologue nigérian, M. Abdelatty a déclaré : « Nous espérons que 300 camions se rendront au nord de la bande de Gaza », où des milliers de personnes sont bloquées dans des conditions que les agences humanitaires qualifient d'apocalyptiques.

Les travailleurs humanitaires ont mis en garde contre les obstacles monumentaux qui pourraient entraver les opérations d'aide, notamment la destruction des infrastructures qui traitaient auparavant les livraisons.