WANGELS: L'Union européenne s'est engagée vendredi à apporter une aide supplémentaire d'un demi-milliard d'euros pour soutenir le combat de l'Ukraine face à l'invasion russe tandis qu'un de ses membres, la Suède, inquiète pour sa sécurité, faisait un pas de plus, après la Finlande, vers une adhésion à l'Otan.
A l'occasion d'une réunion en Allemagne des sept puissances les plus riches de la planète, l'Union européenne a annoncé qu'elle allait porter son financement de l'effort militaire ukrainien "à 2 milliards d'euros au total" en ajoutant 500 millions d'euros.
La recette est "claire", a déclaré le chef de la diplomatie de l'UE Josep Borrell: il faut "plus de la même chose", à savoir plus de sanctions économiques contre la Russie, plus de soutien à Kiev, et aussi "continuer de travailler à isoler la Russie".
Sur le sujet des sanctions, les 27 membres de l'UE n'ont cependant toujours pas réussi à se mettre d'accord pour arrêter progressivement leurs achats de pétrole russe, la Hongrie, pays enclavé dépendant des hydrocarbures de Moscou, ayant jugé insuffisante une dérogation qu'elle avait obtenue.
L'absence d'un embargo sur le pétrole russe dans le prochain paquet de sanctions de l'UE constituerait une rupture de l'unité dans son soutien à Kiev, a averti vendredi le chef de la diplomatie ukrainienne.
Son homologue français Jean-Yves Le Drian a assuré de son côté Kiev du soutien du G7 "jusqu'à la victoire de l'Ukraine". "Nous ne sommes pas en guerre contre la Russie, c'est la Russie qui est en guerre contre l'Ukraine: il y a un agresseur et un agressé et nous soutenons l'agressé", a-t-il souligné.
Le Royaume-Uni a demandé "plus d'armes" pour l'armée ukrainienne et de nouvelles sanctions contre Moscou.
Les ministres des Affaires étrangères du G7 (Allemagne, France, Italie, Canada, Etats-Unis, Japon et Royaume-Uni), rejoints par leurs homologues ukrainien Dmytro Kouleba et moldave Nicu Popescu, sont réunis jusqu'à samedi.
Suède et Finlande aux portes de l'Otan
Vendredi, un rapport officiel suédois a ouvert la voie à une adhésion du pays à l'Otan, en multipliant les conclusions favorables avant la décision de ce pays nordique et de son voisin finlandais dans les prochains jours.
"Une adhésion de la Suède à l'Otan relèverait le seuil (de déclenchement) de conflits militaires et aurait ainsi un effet dissuasif en Europe du Nord", conclut le rapport préparé ces dernières semaines par le gouvernement et les partis au Parlement.
Conséquence directe de l'invasion russe de l'Ukraine, Suède et Finlande, deux membres de l'UE restés des décennies hors des alliances militaires, doivent annoncer d'ici le début de la semaine prochaine leur candidature à l'Otan.
Dans une bascule historique de sa position, le parti social-démocrate au pouvoir en Suède doit décider dimanche s'il soutient une adhésion à l'Otan. Un feu vert ouvrirait la voie à une annonce rapide de candidature suédoise.
La Finlande doit officialiser sa décision dimanche, mais son président et sa Première ministre se sont déjà dits favorables jeudi à une adhésion "sans délai" à l'alliance.
La Russie a mis en garde Helsinki. Et vendredi, la filiale locale du fournisseur russe d'électricité InterRAO a annoncé suspendre à partir de samedi ses livraisons à ce pays, invoquant des problèmes de paiement.
Quant au président turc Recep Tayyip Erdogan, il a exprimé vendredi son hostilité à l'adhésion de ces deux pays à l'Otan, au risque de bloquer l'ensemble du processus qui requiert l'unanimité des membres de l'Alliance atlantique.
"Nous n'avons pas un avis positif", a déclaré M. Erdogan. Il a expliqué reprocher à Stockholm et Helsinki de servir "d'auberge aux terroristes du PKK", le Parti des Travailleurs du Kurdistan classé comme organisation terroriste par la Turquie, mais aussi l'Union européenne et les Etats-Unis.
Suède et Finlande ont immédiatement annoncé prévoir de discuter avec la Turquie samedi à Berlin.
Premier procès pour crime de guerre
Les accusations de crimes s'accumulaient vendredi contre l'armée russe sur le sol ukrainien à la 12e semaine de guerre, notamment pour le déplacement de force de milliers de personnes dans des "camps de filtration".
Les chaînes américaine CNN et britannique BBC ont diffusé jeudi des images de vidéosurveillance, les décrivant comme la preuve du meurtre de deux civils ukrainiens, sans armes, abattus par des soldats russes dans la banlieue de Kiev, mi-mars.
Cette vidéo s'ajoute aux nombreux témoignages sur les exactions dont sont accusées par Kiev les troupes russes en Ukraine.
Le parquet de la région de Kharkiv, dans l'est du pays, et des témoins interrogés par l'AFP, ont accusé jeudi les forces russes d'avoir tiré depuis un char le 27 mars sur une maison dans un village près de la deuxième ville d'Ukraine, tuant plusieurs civils.
Le premier procès pour crime de guerre depuis l'invasion russe de l'Ukraine débutera le 18 mai à Kiev: celui d'un jeune soldat russe suspecté d'avoir tué un homme de 62 ans. L'audience préliminaire s'est déroulée vendredi à Kiev.
Les actes de l'armée russe feront l'objet d'investigations, notamment de la commission spéciale du Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, qui en a reçu le feu vert jeudi, de la Cour pénale internationale et des autorités ukrainiennes.
"Choqué par les atrocités commises par les occupants russes sur notre terres, le monde libre a fixé un nouvel objectif conjoint: non d’arrêter mais de vaincre le Kremlin", a commenté vendredi le ministre ukrainien de la Défense, Oleksiï Reznikov, sur Facebook, notant néanmoins que les armes lourdes que son pays commence à recevoir mettraient du temps à égaliser les forces face à l'armée russe.
Réponse de Zelensky à Macron
Sur cette question de l'attitude envers le Kremlin, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé que le président français Emmanuel Macron essayait "en vain" de dialoguer avec son homologue russe Vladimir Poutine. "Il ne faut pas chercher une porte de sortie pour la Russie, et Macron le fait en vain", a regretté M. Zelensky jeudi soir sur la chaîne de télévision italienne RAI 1, selon une vidéo diffusée vendredi sur sa chaîne Telegram.
M. Macron avait affirmé lundi que, pour mettre fin à la guerre menée en Ukraine par l'armée russe, la paix devrait se construire sans "humilier" la Russie. "Nous aurons demain une paix à bâtir, ne l'oublions jamais. Nous aurons à le faire avec autour de la table l'Ukraine et la Russie (...)", avait-il dit.
Pour M. Zelensky toutefois, "Macron n'a pas besoin de faire des concessions diplomatiques (à la Russie) maintenant".
"Le président de la République n'a jamais rien discuté avec Vladimir Poutine sans l'accord du président Zelensky. Il a toujours dit que c'était aux Ukrainiens de décider des termes de leur négociation avec les Russes", s'est défendu de son côté l'Elysée vendredi.