PARIS: Déficit inédit et dépenses de santé exponentielles, mais aussi allongement du congé paternité et lancement d'une cinquième branche dédiée à la dépendance : voici les principaux traits du projet de budget de la Sécu 2021, qui arrive mardi devant l'Assemblée nationale.
Un déficit hors norme
Pour l'année en cours, le déficit de la Sécu est estimé à 44,4 milliards d'euros (contre un peu plus de 5 milliards en 2019), avec 30 milliards pour la branche maladie et 7,9 milliards pour la branche retraite.
Depuis l'arrivée du Covid-19 en France, le retour à l'équilibre a été relégué au statut d'objectif de « la vie d'avant » pour deux raisons : les dépenses de santé ont, en toute logique, explosé (+ 10 milliards) et les ressources de la Sécurité sociale, pour une large part composées des cotisations sociales, ont été largement affectées par la forte hausse du chômage et le maintien au chômage partiel de nombreux salariés (- 27 milliards).
Et selon le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), en l'état, le déficit pour 2021, « encore très fortement marqué par la crise sanitaire », s'élèverait encore à 27,1 milliards d'euros. Il faudra y ajouter l'impact des couvre-feux depuis vendredi minuit pour 20 millions d'habitants des grandes métropoles.
Une crise sanitaire de plus en plus coûteuse
Achats de masques, remboursements de tests, arrêts de travail, soutien au personnel soignant et à l'hôpital... Le coût de l'épidémie de Covid-19 n'en finit pas de grimper et dépassera les 10 milliards d'euros cette année. Une somme à laquelle s'ajoute un peu plus d'un milliard dédié à financer les premiers engagements du « Ségur de la Santé ».
Soit une hausse de l'Ondam (Objectif national des dépenses d'assurance maladie) de 7,6% pour cette année, contre +2,45% dans le PLFSS initial, voté fin 2019.
Et comme ni l'année ni l'épidémie ne touchent à leur fin, une révision à la hausse de ces dépenses est encore probable.
Même chose pour 2021 : 4,3 milliards d'euros ont été budgétés pour notamment les masques, les tests et l'éventuelle campagne de vaccination, si vaccin il y a.
S'ajoutent pour l'année prochaine 7,9 milliards d'euros pour financer les « accords de Ségur », signés en juillet.
Au total, le gouvernement prévoit un Ondam en hausse de 3,5% en 2021.
Un congé paternité boosté
Emmanuel Macron a déjà vendu la mèche : à partir de juillet prochain, la durée du congé pour un père - ou le second parent - d'un enfant à naître ou adopté passera de 14 à 28 jours, dont 7 obligatoires.
Les trois jours du congé de naissance seront toujours à la charge de l'employeur, et les 25 jours restants seront indemnisés par la Sécurité sociale. Comme c'est déjà le cas, sept jours supplémentaires seront ajoutés dans le cas d'une naissance multiple.
Le coût de la mesure pour la branche famille est de 260 millions d'euros l'an prochain, puis 520 millions en 2022, en année pleine.
La dépendance obtient sa branche, à défaut de financement
Le PLFSS acte la création d'une cinquième branche de la Sécurité sociale, dédiée à la prise en charge de la perte d'autonomie.
Elle doit venir s'ajouter aux quatre branches existantes : maladie, retraite, famille, accidents du travail.
Elle est pour 2021 uniquement financée par les crédits de solidarité pour l'autonomie (CNSA), ainsi que ceux dédiés à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, AEEH.
Le ministre des Solidarités, Olivier Véran, avait promis « au moins un milliard d'euros » en plus pour cette branche, loin des 9 milliards qu'il faudrait ajouter d'ici 2030 au vu de l'augmentation du nombre de personnes âgées.
Autres mesures
Les passages aux urgences ne nécessitant pas d'hospitalisation feront l'objet à partir de l'an prochain d'un « forfait » d'un montant fixe, qui remplacera l'actuel « ticket modérateur » laissant à la charge du patient 20% du coût de ses soins.
Douze nouvelles maisons de naissance vont être créées en France, avec une enveloppe de 2 millions d'euros, portant à vingt le nombre de ces lieux qui permettent des accouchements sans hospitalisation.
Le provisoire s'inscrit dans la durée : les téléconsultations, multipliées par 100 au mois d'avril, resteront encore prises en charge à 100% par la Sécu pendant 2 ans.
L'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI) sera augmentée pour passer en 2021 à 800 euros par mois (contre 750 euros actuellement).