Le Liban suspend le renouvellement des passeports, craignant un exode de sa population

La Sûreté générale au Liban a déclaré suspendre le renouvellement des passeports à partir de cette semaine, expliquant que son stock de passeports disponibles ne pourra couvrir que les demandes actuelles. (AFP/dossier)
La Sûreté générale au Liban a déclaré suspendre le renouvellement des passeports à partir de cette semaine, expliquant que son stock de passeports disponibles ne pourra couvrir que les demandes actuelles. (AFP/dossier)
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Publié le Samedi 30 avril 2022

Le Liban suspend le renouvellement des passeports, craignant un exode de sa population

  • Les autorités sont « incapables de répondre à la demande », les demandes de passeports étant dix fois plus nombreuses que les années précédentes
  • La Banque mondiale prévient que la crise économique forcera des centaines de milliers de personnes à partir à la recherche d'un emploi ou d'une formation

BEYROUTH : Les autorités libanaises ont cessé d'accepter les demandes de renouvellement de passeport, affirmant ne pas être en mesure de répondre à la demande, alors que l'aggravation de la crise économique pousse les gens à quitter le pays.

La Sûreté générale libanaise a déclaré qu'elle suspendrait les renouvellements de passeports à partir de cette semaine et que son stock de passeports ne couvrirait que les demandes actuelles.

Cette annonce a suscité des craintes quant à une volonté des autorités d’empêcher les gens de quitter le Liban, en limitant leur liberté de mouvement.

Le Général Abbas Ibrahim, directeur général de la Sûreté générale, a déclaré : « La plateforme de demande de passeport a accordé des rendez-vous jusqu'en avril 2023, et les passeports seront délivrés à tous ceux qui ont déjà déposé une demande jusqu'à cette date. »

Les Libanais se pressent pour obtenir des passeports biométriques depuis 2020, les demandes de renouvellement étant 10 fois plus nombreuses que les années précédentes.

Les Libanais ont anticipé une hausse des frais de passeport et se sont donc précipités pour obtenir de nouveaux documents, tandis que les expatriés ont profité de leurs vacances au Liban pour renouveler leur passeport pour environ 35 dollars, évitant ainsi de débourser les 200 ou 300 dollars exigé dans les ambassades libanaises à l'étranger.

Une étude de la Direction générale de la sûreté générale a révélé que 69 % des personnes ont obtenu un passeport sans l'utiliser, et qu'environ 20 000 citoyens ont renouvelé leur passeport en 2021, alors qu'ils disposaient de deux années supplémentaires avant l'expiration de leurs documents.

L'étude a également révélé que plus de 15 000 passeports ont été traités, mais n'ont jamais été réclamés par leurs propriétaires.

La Sûreté générale a déclaré : « À compter de 2020, nos centres principaux et régionaux ont reçu 10 fois plus de demandes de passeport que les années précédentes, ce qui a affecté notre stock de passeports disponibles ».

Le général Mounir Akiki, de la Sûreté générale, a déclaré à Arab News que l'augmentation du nombre de demandes et la diminution du stock ont contraint les autorités à agir.

Les nouvelles conditions émises en février pour le renouvellement des passeports ont été jugées impossibles à remplir par certains citoyens.

Entre autres conditions imposées : une résidence valide à l'étranger, un visa valide apposé sur le passeport à renouveler, un rendez-vous à l'ambassade dans un délai d'un mois à compter de la date de dépôt de la demande, ou une preuve de la poursuite des études à l'étranger, ou des rapports médicaux si le but du renouvellement du passeport est de poursuivre un traitement à l'étranger, ou de présenter un contrat de travail signé et les documents nécessaires si le but est de travailler à l'étranger.

En outre, les frais de passeport biométrique ont été portés de 300 000 livres libanaises (200 dollars) à 600 000 livres libanaises (validité de cinq ans) et de 500 000 livres libanaises à 1,2 million de livres libanaises (validité de dix ans).

Akiki a déclaré que d’autres problèmes relatifs aux passeports étaient également à l'origine de la décision de la Sûreté générale.

« En 2021, nous avons constaté les répercussions de la crise économique au Liban et avons signé un contrat avec la société française qui imprime les passeports libanais d'une valeur de 12 millions de dollars en échange de l'impression d'un million de passeports, mais la société a demandé de transférer un certain montant comme crédit documentaire pour commencer l'impression, et selon le code de la monnaie et du crédit au Liban, les contrats doivent être signés en livres libanaises et non en dollars. »

Akiki poursuit : « Lorsque nous avons signé le contrat avec la société française, le taux de change du dollar était basé sur le taux officiel, soit 1 500 livres libanaises pour un dollar, et il n'y avait pas de plateforme de change affiliée à la Banque centrale qui fixe les taux en fonction des mouvements des marchés financiers. »

Cela a affecté la continuité des travaux. Le général affirme qu’Abbas Ibrahim a exhorté en vain plusieurs politiciens à mettre fin à la crise.

Selon Akiki, il n'y aura plus de passeports disponibles après avril 2023 si la question n'est pas résolue d'ici là.

Commentant la possibilité de renouveler les anciens passeports comme alternative, Akiki a déclaré : « Nous ne pouvons pas faire cela. L'ancien passeport a été annulé et ne peut plus être utilisé. Cette décision est prise par l'Organisation de l'aviation civile internationale. »

Akiki a déclaré que le contrat avec la société française valait environ 22 milliards de livres libanaises, sur la base du taux de change officiel.

Mais il a précisé que la valeur passe à environ 300 milliards de livres libanaises selon le taux de la plateforme Sayrafa de la banque centrale (environ 22 000 livres libanaises pour un dollar).

L'Observatoire de la crise au Liban de l'Université américaine de Beyrouth a prédit une vague d'émigration du Liban dans les années à venir.

Un indicateur clé est que 77 % des jeunes envisagent d'émigrer, tandis que les spécialistes et les professionnels partent également à la recherche de meilleures conditions de travail et de revenus.

Des milliers de Libanais, dont des enseignants, des médecins, des infirmières et des diplômés universitaires, ont quitté le pays il y a deux ans, et le nombre de départs a augmenté après l'explosion du port de Beyrouth.

La Banque mondiale estime que le Liban aura besoin d'au moins 12 ans pour retrouver le niveau du produit intérieur brut de 2017.

Cela poussera des centaines de milliers de personnes à quitter le pays pour investir, travailler, étudier et prendre leur retraite à l'étranger, selon la banque.


Liban: quatre morts dans un raid israélien, riposte du Hezbollah et des factions alliées

Cette photo prise depuis le kibboutz de Malkia, au nord d'Israël, le long de la frontière avec le sud du Liban, montre de la fumée s'échappant du village libanais de Mays al-Jabal lors des bombardements israéliens le 5 mai 2024 (Photo, AFP).
Cette photo prise depuis le kibboutz de Malkia, au nord d'Israël, le long de la frontière avec le sud du Liban, montre de la fumée s'échappant du village libanais de Mays al-Jabal lors des bombardements israéliens le 5 mai 2024 (Photo, AFP).
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  • Les blessés ont été transportés vers des hôpitaux de la région
  • En près de sept mois de violences transfrontalières, au moins 389 personnes parmi lesquelles 255 combattants du Hezbollah et plus de 70 civils ont été tuées au Liban

BEYROUTH: «Quatre personnes d'une même famille» ont été tuées dans un «raid de l'armée israélienne» sur le village de Mays al-Jabal, a déclaré l'agence officielle d'information libanaise (ANI), actualisant un précédent bilan faisant état de trois victimes.

Il s'agit d'un homme, d'une femme et de leurs enfants âgés de 12 et 21 ans, d'après l'ANI, qui a précisé que deux autres personnes ont été blessées.

Depuis le début de la guerre à Gaza, le Hezbollah libanais, un allié du Hamas palestinien, échange quasi-quotidiennement avec l'armée israélienne des tirs à la frontière libano-israélienne. Des factions palestiniennes et autres groupes alliés ont aussi revendiqué des attaques depuis le Liban contre Israël.

Blessés transportés 

Selon ANI, des habitants du village inspectaient leurs maisons et magasins endommagés dans de précédents bombardements au moment du raid.

Les blessés ont été transportés vers des hôpitaux de la région.

Samedi soir, le Hezbollah a revendiqué des tirs sur des positions militaires dans le nord d'Israël.

Le Hezbollah a déclaré dans un communiqué avoir tiré « des dizaines de roquettes de types Katioucha et Falaq » sur Kiryat Shmona, dans le nord d'Israël, «en réponse au crime horrible que l'ennemi israélien a commis à Mays al-Jabal », qui, selon lui, a tué et blessé des civils.

En près de sept mois de violences transfrontalières, au moins 389 personnes parmi lesquelles 255 combattants du Hezbollah et plus de 70 civils ont été tuées au Liban, selon un décompte de l'AFP. Au moins 11 combattants du Hamas ont été tués selon ce même décompte.

Côté israélien, 11 soldats et neuf civils ont été tués, selon un bilan officiel.


Le forum de Riyad examine le rôle de la traduction dans la promotion de l'identité saoudienne

L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
L'Université Princesse Noura bent Abdelrahman accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ». (SPA)
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  • La conférence vise à contribuer à un objectif clé de la Vision 2030 du Royaume, à savoir la promotion des valeurs islamiques et de l'identité nationale, en encourageant les Saoudiens à traduire ces concepts dans d'autres langues et cultures
  • Le rôle de la traduction dans la promotion d'une image positive du Royaume sera également discuté, ainsi que la promotion de la reconnaissance internationale et la mise en évidence de l'impact culturel du Royaume

RIYAD : Le Collège des langues de l'Université Princesse Noura bent Abdelrahman de Riyad accueillera le 15 mai une conférence intitulée « Traduire l'identité saoudienne à travers d'autres langues et cultures ».

L'événement, dont le slogan est « Nous traduisons notre identité », aura lieu au département des conférences et des séminaires et est parrainé par le ministre saoudien de l'Éducation, Yousef Al-Benyan.

Il se concentrera sur le partage du patrimoine culturel, historique, littéraire et intellectuel du Royaume avec un public mondial, a rapporté l'agence de presse saoudienne.


L'interminable attente des proches de jeunes migrants tunisiens perdus en mer

El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
El Hencha fait actuellement face à un exode de jeunes en quête de mieux comme en Europe. (X : @ClimateActionG1)
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  • Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants
  • Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans

EL HENCHA: La plupart avaient gardé le secret: une quarantaine de migrants tunisiens, très jeunes, ont embarqué clandestinement en janvier en quête du "paradis européen" et depuis plus de quatre mois, leurs proches désespèrent de recevoir des nouvelles des disparus.

Ils sont partis vraisemblablement de Sfax (centre), épicentre en Tunisie de l'émigration irrégulière vers l'Italie, la nuit du 10 au 11 janvier sur une mer démontée, selon les familles.

Les occupants du bateau étaient surtout des jeunes de 17 à 30 ans, originaires d'El Hencha, bourgade agricole de 6.000 habitants à 40 kilomètres au nord de Sfax. Une mère et son bébé de quatre mois étaient aussi du voyage.

Inès Lafi n'avait aucune idée des intentions de son frère Mohamed, presque 30 ans, qui gagnait sa vie en conduisant la camionnette familiale de "louage" (taxi collectif).

"Il est sorti vers 22H00 avec son téléphone, sans rien dire à mes parents, sans vêtements de rechange ni sac, comme s'il allait retrouver ses amis", raconte à l'AFP cette ouvrière de 42 ans, qui souffre d'insomnies depuis.

Yousri, 22 ans, est aussi parti en cachette. "La majorité des jeunes n'ont pas informé leur famille, ils se sont débrouillés pour avoir un peu d'argent", confirme M. Henchi, son oncle instituteur.

Meftah Jalloul, poissonnier de 62 ans, savait lui "depuis un certain temps" que son fils Mohamed, 17 ans, "voulait migrer en Europe" et le lui avait déconseillé "mais c'est devenu une idée fixe".

La nuit fatidique, il a tenté d'empêcher son unique garçon de sortir, l'implorant d'attendre une meilleure météo, mais "il m'a embrassé sur la tête et il est parti", relate M. Jalloul.

«Désespérance»

Le commerçant culpabilise: "chaque jour, il créait des problèmes à la maison, il voulait de l'argent pour migrer. C'est moi qui lui ai donné l'argent, donc je suis responsable".

Les Tunisiens ont représenté la deuxième nationalité des migrants illégaux arrivés en Italie (17.304) en 2023, après les Guinéens, selon des statistiques officielles.

"Cette immigration irrégulière ne s'explique pas seulement par des motifs économiques et sociaux", analyse Romdhane Ben Amor, porte-parole de l'ONG FTDES. Il y a aussi "le facteur politique (le coup de force du président Kais Saied à l'été 2021, NDLR) et le sentiment de désespérance des Tunisiens qui ne croient pas dans l'avenir du pays".

Les disparus d'El Hencha, issus de la classe moyenne, pas particulièrement pauvres, partageaient cette "sensation d'horizon bouché".

Le frère d'Inès avait un travail mais "avec 20 dinars par jour (trois euros environ), une fois payé ses cigarettes, il disait qu'il ne pouvait pas faire de projets, ni construire une maison, ni se marier".

Mohamed l'instituteur pointe du doigt "les jeunes déjà en Italie qui publient sur les réseaux sociaux (...) leur quotidien". Les autres "voient ça et veulent changer leur avenir. Ils imaginent l'Europe comme un paradis", souligne-t-il. C'était, pense-t-il, le cas de Yousri qui travaillait dans un café internet pour 10/15 dinars par jour après avoir quitté le lycée avant le bac.

Meftah Jalloul était lui d'accord pour que son fils, également décrocheur scolaire, émigre, mais légalement et seulement après avoir fait une formation. "Il pouvait apprendre un métier: plombier, menuisier, mécanicien", souligne le père de famille.

Aujourd'hui, M. Jalloul lutte pour garder espoir.

«Temps très mauvais»

"Quatre mois se sont écoulés et je pleure mon fils. Ma famille et moi, nous sommes épuisés", dit-il en fondant en larmes.

Lui et d'autres familles se raccrochent à l'idée que l'embarcation aurait pu dériver vers la Libye voisine. Des contacts ont été pris, des recherches menées, en vain.

Inès Lafi et Mohamed Henchi redoutent le pire. Plus de 1.300 migrants sont morts ou ont disparu dans des naufrages l'an passé près des côtes tunisiennes, selon le FTDES.

"Le temps était très mauvais. Même les pêcheurs qui connaissent la mer sont rentrés, lui est sorti", explique Inès, furieuse contre le passeur, connu de tous pour son activité clandestine, qui n'est pas non plus revenu de cette dernière traversée.

Aux autorités, les familles demandent la poursuite des recherches et davantage d'opportunités à El Hencha.

"Il faut enrichir la zone industrielle avec d'autres unités de production, fournir des emplois aux jeunes", estime M. Henchi.

Il faudrait aussi, dit l'instituteur, "construire un état d'esprit différent" avec des programmes éducatifs pour donner envie de bâtir son avenir en Tunisie. Sinon les jeunes "se contentent d'un tour au café, d'un peu de ping-pong ou volley-ball".