TUNIS: Un ancien opposant sous la dictature de Zine el Abidine Ben Ali a annoncé mardi la création d'un front regroupant plusieurs partis pour "sauver" la Tunisie de sa profonde crise après le coup de force du président Kais Saied.
Figure politique de gauche, Ahmed Néjib Chebbi, 78 ans, s'oppose à ce qu'il décrit comme un "coup d'Etat" du président Saied qui accapare les pouvoirs depuis le 25 juillet.
Lors d'une conférence de presse à Tunis, ce vétéran de la scène politique a annoncé la création du "Front de salut national" avec l'objectif d'unir toutes les forces politiques, afin de rétablir le processus démocratique et constitutionnel garantissant les libertés et les droits dans le pays.
"Nous voulons le retour à la légitimité et à la démocratie", a-t-il dit.
La priorité de ce Front est de sauver une économie "en profonde récession" en raison d'une situation politique "pourrie" qui repousse les investisseurs, a ajouté M. Chebbi.
Composé de cinq partis politiques parmi lesquels le mouvement d’inspiration islamiste Ennahdha, bête noire de M. Saied, et de cinq associations, cette coalition ambitionne d'attirer d'autres formations politiques et des personnalités "influentes" avant de lancer un dialogue national sur des réformes destinées à "sauver le pays", selon M. Chebbi.
Il a préconisé la mise en place d'un "gouvernement de salut" pour diriger la Tunisie pendant une "période de transition" jusqu'à la tenue de nouvelles élections.
Washington critique le président tunisien et appelle au retour à une «gouvernance démocratique»
"Les Etats-Unis sont profondément préoccupés par la décision du président tunisien de restructurer unilatéralement l'Instance supérieure indépendante pour les élections en Tunisie", a déclaré à la presse le porte-parole du département d'Etat, Ned Price.
Washington "n'a cessé de communiquer aux dirigeants tunisiens l'importance de maintenir l'indépendance des principales institutions démocratiques et de garantir le retour de la Tunisie à une gouvernance démocratique", a-t-il ajouté.
Le 22 avril, il s'est arrogé le droit de nommer le chef de l'Autorité électorale, à quelques mois d'un référendum et un scrutin législatif que cette instance doit superviser.
L'administration du président Joe Biden s'était d'abord montrée prudente au moment du coup de force du chef de l'Etat tunisien l'été dernier, quand il avait suspendu le Parlement et limogé le Premier ministre.
Washington a affirmé fin mars être "profondément préoccupé" par la décision de Kais Saied de dissoudre le Parlement, en appelant à un retour rapide à un "gouvernement constitutionnel".
Après des mois de blocage politique, M. Saied, élu fin 2019, s'est arrogé les pleins pouvoirs fin juillet en limogeant le Premier ministre et en suspendant le Parlement avant de le dissoudre en mars.
En février, le président tunisien avait dissous le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) pour le remplacer par un organe de supervision judiciaire "temporaire" dont il a nommé les membres.
Ses détracteurs l'accusent d'instaurer une nouvelle autocratie dans le pays, seul rescapé du Printemps arabe dont il fut le berceau en 2011.
Outre l'impasse politique, la Tunisie se débat dans une profonde crise socio-économique et est en pourparlers avec le Fonds monétaire international (FMI) pour obtenir un nouveau prêt.