PARIS: Dans toute campagne électorale, des mots surnagent parmi le flot ininterrompu de la parole des candidats, et finissent par s'imposer. Petit tour d'horizon de vocables qui auront marqué la campagne présidentielle 2022.
Barrages
Front contre front. « Faire barrage à l'extrême droite en déposant dans l'urne un bulletin Emmanuel Macron » a été dès le soir du premier tour l'appel du candidat écologiste Yannick Jadot. A rebours du traditionnel front républicain, le candidat Debout la France Nicolas Dupont-Aignan a lui demandé de « tout faire pour faire barrage » au président sortant.
« Grand remplacement »
Ce terme qui décrit un remplacement supposé de la population européenne par une population non européenne, issu de groupuscules identitaires, a été repris à son compte par Eric Zemmour. En février, Valérie Pécresse trébuche en meeting en affirmant qu’il n'y a « pas de fatalité, ni au grand remplacement, ni au grand déclassement ». « Un Rubicon de plus » franchi par la candidate LR, dénonce la socialiste Anne Hidalgo.
Dédiabolisation, rediabolisation
Tout au long de la campagne, Marine Le Pen a lissé son discours et mis en avant son programme sur le pouvoir d'achat au détriment de ses propositions contre l'immigration et l'islam. Elle poursuivait ainsi une stratégie de dédiabolisation engagée dès 2012. « Si le système met en œuvre une telle diabolisation c'est qu'il a peur », s'est-elle agacée face aux manifestations organisées contre l’extrême droite dans l'entre-deux tours.
« Vote efficace »
Le candidat Insoumis Jean-Luc Mélenchon a appelé les électeurs de gauche au « vote efficace » pour le hisser au second tour de la présidentielle et éviter le duel Macron-Le Pen, refusant d'employer le terme de « vote utile », qui serait un vote de stratégie et non de conviction. Les réponses à gauche ne se sont pas fait attendre : L'écologie, « c'est un vote d'efficacité », a prôné Yannick Jadot (EELV) tandis que le communiste Fabien Roussel a affirmé que « voter efficace, c’est voter les jours heureux », son programme, avant de terminer à respectivement 4,6% et 2,3% des voix, loin derrière l'Insoumis.
Facture
Alors que la campagne s'est lancée sur fond d'inflation et de prix à la pompe records, le pouvoir d'achat s'est affirmé comme la préoccupation numéro un des électeurs. Tous les candidats ont tenté d'apporter dans leurs programmes une aide aux Français frappés par la forte augmentation des factures d'énergie et de carburant. Baisse la facture énergétique des Français de « 600 à 700 euros » pour Yannick Jadot, remise sur les prix du carburant proposée par Emmanuel Macron ou encore hausse du Smic pour Valérie Pécresse et Jean-Luc Mélenchon : les factures des particuliers se sont retrouvées au cœur des programmes.
Eoliennes
Les éoliennes sont soudainement devenues un marqueur de l'opposition entre les deux finalistes. Lors d’un meeting à Marseille aux accents écolo prononcés, le président candidat a fustigé « l’extrême droite (qui) est un projet climato-sceptique qui veut détruire les éoliennes ». Alors qu’Emmanuel Macron défend « l’implantation de 50 parcs éoliens en mer d’ici 2050 », Marine Le Pen propose dans son programme « un moratoire sur la construction de toute nouvelle éolienne, sur terre ou mer », dès ce printemps. « Les éoliennes sont un saccage économique et écologique », affirme-t-elle.
McKinsey
L'enquête du parquet national financier sur l'« optimisation fiscale » de McKinsey a permis aux concurrents d’Emmanuel Macron de dénoncer à quelques jours du premier tour « une affaire d'État ». L’Insoumis Mélenchon a fustigé un président qui « fait entrer le privé dans l’État ». Pour le chef du RN Jordan Bardella, le président sortant est devenu « le prête-nom d’intérêts privés ». En cause: le montant des contrats de l'État avec McKinsey qui a « plus que doublé » en trois ans.
Poutine
Depuis le début de la guerre en Ukraine, l’ombre de Vladimir Poutine plane sur la campagne présidentielle. Pour certains candidats, comme Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen ou encore Eric Zemmour, qui rêvait il y a plusieurs années « d’un Poutine Français », leur proximité avec le président russe s’est transformée en véritable tabou. Résultat, des prises de distance plus ou moins forcées au fil des semaines. « Nous avons un problème énorme avec cet homme » a assuré le chef des Insoumis, quand la candidate RN a reconnu des « crimes de guerre », après la découverte de centaines de corps de civils dans la région de Kiev.
60 ou 65 ans
« Je suis prêt à bouger », sur la réforme des retraites, totem de son programme, a annoncé Emmanuel Macron dès le lendemain du premier tour. « On ne fait pas forcément une réforme jusqu'en 2030 si je ressens trop d'angoisse chez les gens » a-t-il ajouté en visite dans les Hauts-de-France. « En réalité la retraite à 65 ans c'est son obsession », a riposté Marine Le Pen. « Tous les Français sont extrêmement intelligents, tous ont compris que c'est la manœuvre d'Emmanuel Macron pour tenter de récupérer, ou en tout cas d'atténuer, l'opposition des électeurs de gauche », a-t-elle estimé.