La récente série d'attentats en Israël et la réponse violente qui y a été apportée, notamment le recours aux exécutions extrajudiciaires contre des Palestiniens sur des terres palestiniennes, sont très tristes. Mais les personnes au pouvoir ont l'obligation de trouver des moyens de donner de l'espoir aux gens afin de briser ce cycle de violence sans fin. Cela ne peut se faire avec des accusations, mais plutôt en changeant l'état d'esprit de la population, qui doit passer du désespoir et de l'impuissance à l'espoir et à l'anticipation d'un avenir meilleur.
Au cours de toutes les réunions que les hauts responsables palestiniens ont tenues avec les responsables israéliens, la question d'un horizon politique a été constamment évoquée. Nous ne pouvons pas nous contenter de parler de questions économiques et de permis de travail. Notre peuple veut savoir où nous allons. C'est la première chose que des responsables comme Hussein al-Sheikh m'ont répétée, ainsi qu'à d'autres journalistes, après avoir rencontré leurs homologues israéliens.
Les Américains ont avancé le même argument et Washington a également parlé haut et fort des dangers causés par la violence des colons juifs et la terreur qu'ils font peser sur les Palestiniens. Mais il n'y a pas eu de réponse israélienne aux appels lancés par les Palestiniens et les Américains.
La nécessité d'un horizon politique n'est pas venue de nulle part et n'est pas une question théorique. Le Premier ministre israélien se vante à la Maison-Blanche et devant les groupes juifs américains de son insistance à ne pas rencontrer le président palestinien, Mahmoud Abbas, et à ne pas parler du processus politique. En refusant tout processus politique, le gouvernement israélien signale aux 5,5 millions de Palestiniens des territoires occupés (qui comprennent Gaza et Jérusalem-Est) qu'ils doivent abandonner tout espoir de liberté, que l'occupation israélienne se poursuivra à jamais et qu'ils seront éternellement contrôlés par un gouvernement qui pratique la discrimination entre Palestiniens et non-Palestiniens, entre le fleuve et la mer.
Les dirigeants palestiniens et israéliens sont divisés en deux catégories. Il y a ceux qui veulent réellement la paix, qui comprennent que la paix implique un compromis politique profond et qui ne sont pas découragés par les radicaux et leurs actions odieuses. D'un autre côté, il y a ceux qui croient au jeu à somme nulle et n'ont aucun intérêt pour un quelconque compromis. S'ils sont sincères dans leurs convictions, ceux qui appartiennent au premier groupe doivent refuser de laisser les radicaux les influencer. La situation actuelle nous montre, malheureusement, que le second groupe utilise les radicaux de l'autre camp pour atteindre ses objectifs absolutistes.
Qu'on le veuille ou non, nous avons aujourd'hui à Ramallah un dirigeant palestinien du premier groupe, tandis qu'à Tel-Aviv, il y a malheureusement un dirigeant du second groupe. Pendant une courte période, il y a eu des dirigeants en Israël qui appartenaient au premier groupe, mais ils ne sont plus au pouvoir.
Le dirigeant palestinien Abbas a refusé une forte pression interne pour changer. On l'a pressé de mettre fin à la coopération en matière de sécurité avec Israël, mais il a refusé. Quelle a été la récompense de cet acte courageux? Il a été perçu comme faible et il a été exploité par la droite israélienne pour réaliser de nouveaux gains en termes de terres et de droits palestiniens. Il y a eu une augmentation de la violence des colons et les provocations à Cheikh Jarrah et à la mosquée Al-Aqsa continuent.
En Israël, désormais, il y a un gouvernement de coalition dirigé par une personnalité qui s'est publiquement vantée de ne même pas être intéressée par une rencontre avec les dirigeants palestiniens, sans parler de négocier un compromis sérieux. Ainsi, lorsque les radicaux agissent, les dirigeants israéliens redoublent d'efforts et aggravent encore la situation.
En arabe, il existe un dicton qui dit: «Fil harakeh barakah» («dans le mouvement, il y a une bénédiction»). Le mouvement politique et diplomatique du processus de paix serait certainement une bénédiction. Bien sûr, cela ne signifie pas que ce qu'il faut, c'est une action tronquée du processus de paix, comme il y en a eu pendant des années sous Benjamin Netanyahou.
Dans une atmosphère aussi politiquement chargée, dans laquelle les gens ont peu à perdre, il est nécessaire de comprendre que rien ne se passe sans raison. Les Israéliens ne savent manifestement pas ce qui se passe dans les territoires occupés, où Israël est responsable de tous les aspects de la vie des Palestiniens.
Dans une atmosphère aussi politiquement chargée, où les gens ont peu à perdre, il est nécessaire de comprendre que rien ne se passe sans raison.
Daoud Kuttab
Pour mémoire et selon l'Organisation des nations unies (ONU), pour la seule année 2022, quinze Palestiniens, dont des enfants, ont été tués et mille sept cent trente-trois blessés par les forces israéliennes; cent vingt-huit structures appartenant à des Palestiniens ont été démolies; quatre-vingt-quinze Palestiniens ont été déplacés; il y a eu trois incursions israéliennes dans la bande de Gaza; et des colons israéliens ont commis quatre-vingt-treize attaques contre des Palestiniens. Pour le seul mois dernier, les forces israéliennes ont tué par balle trois Palestiniens, dont deux enfants. La vie des Palestiniens continue à être dominée par l'occupation israélienne.
Mais il ne faut pas laisser ce cycle de violence continuer à échapper à tout contrôle. Nous avons besoin d'hommes politiques courageux, prêts à prendre des décisions difficiles pour l'avenir des deux peuples.
Ce dont nous avons besoin, c'est d'un véritable effort pour faire avancer le processus de paix vers sa conclusion naturelle, à savoir la fin de l'occupation israélienne et de la colonisation illégale qui rogne les terres palestiniennes. Les Palestiniens voient les colonies s'étendre et les colons devenir plus violents, tandis que les politiciens israéliens évitent tout effort de paix, ce qui frustre les Palestiniens. L'absence d'espoir est la motivation la plus puissante pour la radicalisation.
Daoud Kuttab est un journaliste palestinien primé et ancien professeur de journalisme Ferris à l'université de Princeton. Twitter : @daoudkuttab
NDLR : L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.