PARIS: Les candidats ont jeté jeudi leurs dernières forces dans la bataille à trois jours d'un premier tour incertain, l'écart se réduisant de plus en plus entre les deux favoris de la présidentielle, Emmanuel Macron et Marine Le Pen.
Pour les 12 prétendants à l'Elysée, deux grands défis s'imposent avant la fin officielle de la campagne vendredi à minuit: mobiliser leurs partisans alors que l'abstention pourrait approcher ou dépasser le record de 2002 (28,4%) et aller chercher les nombreux indécis, qui représentent un tiers des personnes sûres d'aller voter.
Dans un entretien avec les lecteurs du Parisien à paraître vendredi, le président-candidat Emmanuel Macron s'en est pris frontalement à sa rivale d'extrême droite en l'accusant de "mentir aux gens" avec un programme social qu'elle ne pourra financer.
La soirée électorale du candidat Macron aura finalement lieu dans le sud-ouest parisien
L'équipe de campagne du président sortant a mis en avant "des contraintes pratiques" pour justifier de ce changement, à trois jours de la soirée.
C'est dans ce même parc des expositions, situé porte de Versailles, dans le XVe arrondissement, que le candidat Macron de 2017 avait tenu sa soirée électorale du premier tour. Après l'annonce des résultats qui l'avaient porté en tête du scrutin, il s'était affiché sur scène le temps d'une allocution aux côtés de son épouse, Brigitte Macron.
«Programme raciste»
Selon lui, Marine Le Pen s'est "banalisée", mais "ses fondamentaux n’ont pas changé" avec "un programme raciste, qui vise à cliver la société et d’une grande brutalité".
Tardivement entré en campagne et après avoir été très mobilisé par la situation en Ukraine, le candidat Macron est toujours donné favori avec environ 26/27% des intentions de vote au premier tour, et donné victorieux au second tour par les sondages, mais jour après jour son avance se réduit face à Marine Le Pen (23/24%).
"On voit la dynamique de Marine Le Pen, il faudra mettre le turbo au 2e tour", a reconnu à l'AFP un conseiller de la campagne Macron. "Notre objectif est d’abord de conforter notre avance, éviter qu’elle soit devant au premier tour", a renchéri un membre de la majorité présidentielle.
De son côté, la candidate d'extrême droite, qui a beaucoup oeuvré pour lisser son image même si son projet reste aussi "radical" sur le plan migratoire et institutionnel, a tenu son dernier meeting dans le plus grand fief du RN, à Perpignan.
En pleine dynamique dans les sondages ces derniers jours, autour de 23/24%, Mme Le Pen veut mobiliser un électorat largement populaire, face à la menace de l'abstention, qui pourrait être particulièrement importante dans les classes modestes.
Reprenez le contrôle
"Je vous conjure d’aller voter", a déclaré la candidate du RN devant quelque 4.000 partisans selon les organisateurs, qui scandaient "Marine présidente", ou "on est chez nous".
"A la présidentielle, on ne s’abstient pas, reprenez le contrôle!" car "aucun résultat n’est acquis tant que vous n’avez pas voté", a insisté Marine Le Pen.
Bien décidé à s'inviter au second tour, le candidat insoumis Jean-Luc Mélenchon, en hausse autour de 16%, met également les bouchées doubles. LFI multiplie les réunions publiques, au moins une dans chaque département.
Un cran en dessous, autour de 6%, l'écologiste Yannick Jadot espère que "les Français s'empareront de l'élection" après une "campagne confisquée".
Le "vote écologiste est toujours efficace", a-t-il martelé en meeting à Nantes, tentant de dissuader les électeurs de gauche de voter "utile" pour Jean-Luc Mélenchon. Il a appelé "à un sursaut des consciences, à la mobilisation générale pour le climat, pour la nature, pour nos enfants".
La candidate LR Valérie Pécresse et son rival d'extrême droite Eric Zemmour (Reconquête!), tous deux autour de 8/9% après être partis de bien plus haut, se livrent une bataille acharnée en vue d'une recomposition dans leur camp.
En déplacement dans le Rhône, Mme Pécresse a appelé les Français à ne choisir "ni immobilisme, ni extrémisme". "Les Français veulent un programme de droite" mais "Emmanuel Macron n'est pas de droite", a assuré la candidate dont l'électorat est très courtisé par le président-candidat mais aussi par l'extrême droite.
«Impuissance publique»
A l'issue de son meeting lyonnais, elle s'est rendue dans le quartier populaire de La Guillotière pour y parler des problèmes d'insécurité avec des habitants, qui déploraient l'"impunité grandissante".
"Les Français n'en peuvent plus de l'impuissance publique, c'est elle qui va conduire à avoir les extrêmes au pouvoir", a-t-elle affirmé, en se présentant comme l'"alternance, celle qui ramènera de l'ordre".
Lors de son dernier meeting à Paris, Eric Zemmour a pour sa part balayé les grands thèmes de sa campagne, fustigeant les "racailles", dénonçant l'écologie de "Greta Thunberg", des "éoliennes" ou de la "décroissance", et critiqué le "néoféminisme" comme "indifférenciation sexuelle".
Autour ou sous la barre fatidique des 5%, qui détermine le remboursement des frais de campagne, le communiste Fabien Roussel, en meeting à Lille, a anticipé "le début d'une renaissance" pour la gauche après la présidentielle, ajoutant que ce scrutin ne serait pas "son dernier combat".
En meeting à Toulouse, Philippe Poutou (NPA) se projette aussi dans l'après, appelant à "reconstruire le plus large possible" une gauche divisée et affaiblie.
"On lâche rien", a lancé à des militants lors d'une visite à Rouen Anne Hidalgo, qui commence aussi à travailler à la recomposition de la gauche.