ALGER: Le baccalauréat algérien fait à nouveau l’objet d’une polémique. Mohamed Ouadjaout, ministre de l’Éducation nationale, a annoncé dimanche et à quelques jours de la publication des résultats, la réduction de la moyenne de passage cette année. Ouadjaout a invoqué la situation sanitaire exceptionnelle vécue par le pays depuis mars 2020 pour fixer à 9/20 la moyenne pour l’obtention du diplôme.
Bonne ou mauvaise décision? Les avis divergent. Cette annonce inattendue a suscité, il faut le dire, un déluge de réactions sur la toile. Les candidats de la « promotion Covid-19 », comme ils sont surnommés en Algérie, n’ont pu cacher leur joie et leur satisfaction face à cette nouvelle. « Cette session a été marqué par l’interruptions des cours en raison de la pandémie du Coronavirus. Nous n’avons pas eu une année scolaire normale, cette décision est justifiée », nous a confié Wael, 18 ans avec enthousiasme.
Même état de satisfaction chez la jeune Inès « avec l'arrivée de ce fichu virus nous avons été très perturbés. Beaucoup craignaient l’annulation de l’examen, mais ça n'a heureusement pas été le cas, et notre pays a pris toutes les mesures nécessaires pour assurer la réussite du bac 2020 », a-t-elle déclaré, avant d’ajouter que Le « contexte sanitaire exceptionnel » exige cette « décision exceptionnelle ».
Les associations des parents d’élèves ont pour leur part qualifié cette décision de « sage » et courageuse ». Selon eux, cette décision permettra d’éviter la déperdition scolaire et d’encourager les élèves à redoubler d’efforts dans le futur.
Le syndicaliste et conseiller de l’éducation Nabil Ferguenis n’est pas du même avis. Il estime qu’il s’agit d’une décision « irréfléchie » qui « n'a pas été soumise au débat avec l'ensemble des acteurs du secteur de l'éducation ». Cette décision risque selon lui de nuire à l’image de l’éducation en Algérie, et « ne manquera pas de se répercuter sur la capacité d’accueil des futurs bacheliers aux écoles supérieures, ainsi que sur le niveau de l'université Algérienne dans le classement mondial », a-t-il déclaré à arabnew.fr.
« Une décision qui touche à la crédibilité de l’examen »
Dr Katia Boukhari, enseignante universitaire, se questionne sur l’impact qu’aura cette décision sur la crédibilité de l’examen. « Je me demande si c'est vraiment une bonne chose. Ce qui est sûr c'est que nous allons devoir redoubler d'efforts pour pouvoir dispenser nos cours correctement et dans les règles de l'art », a-t-elle regretté.
Le choix des spécialités pose un autre dilemme. Selon Mme Boukhari, il faudrait placer les lauréats ayant obtenu des moyennes en dessous de 10/20 dans des spécialités de catégorie Technicien supérieur. « Il faudrait que les étudiants ayant droit à la gratuité universitaire suivent des spécialités intéressantes, mais avec des débouchés concrets sur le marché du travail », estime notre interlocutrice.
Nombreux sont ceux qui, sur les réseaux sociaux, qualifient cette décision de « purement politique », motivée par des préoccupations plus sociales qu’éducatives. « Cette décision politique donne le coup de grâce à l'éducation nationale en Algérie. Aucun pays ne peut déroger aux règles pour faciliter la réussite à un examen. C’est du jamais vu, surtout pour le baccalauréat, un diplôme d'état reconnu dans la plupart des pays » commente un internaute sur Facebook.
En somme, les algériens dénoncent une mesure « populiste » prise à la veille d’un référendum sur la révision de la Constitution, prévu le 1 er novembre prochain.