La dette publique évacuée de la campagne présidentielle

Le rétablissement des finances publiques n'est pas au centre des enjeux de la campagne présidentielle, mais tous les candidats mettent en avant le sérieux budgétaire de leurs programmes. (AFP)
Le rétablissement des finances publiques n'est pas au centre des enjeux de la campagne présidentielle, mais tous les candidats mettent en avant le sérieux budgétaire de leurs programmes. (AFP)
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Publié le Jeudi 07 avril 2022

La dette publique évacuée de la campagne présidentielle

  • Après le «quoi qu'il en coûte», la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine conduit les candidats à la présidentielle à défendre des investissements massifs dans l'énergie ou la défense
  • Dans leur discours, les candidats semblent transmettre l'idée «qu'on peut repousser à demain - et plutôt à après-demain - le remboursement des dettes»

PARIS: Fini le débat enflammé sur la gestion de la "dette Covid" ou sa possible annulation: à l'approche de l'élection présidentielle, la question du rétablissement des comptes publics ne fait pas recette dans la campagne, au moment où les enjeux de pouvoir d'achat et de sécurité dominent.


"La guerre en Ukraine nous a rappelé, avec honte, qu’il y a bien plus important que la réduction de la dette et des déficits publics". Cette déclaration début mars de la députée européenne et économiste Aurore Lalucq est symptomatique du climat ambiant.


Après le "quoi qu'il en coûte" pour lutter contre la Covid-19, la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine conduit les candidats à la présidentielle à défendre des investissements massifs dans l'énergie ou la défense. Sans s'inquiéter outre mesure du financement de ces investissements et de leur impact sur des finances publiques très dégradées.


La dette publique française atteignait 112,9% du PIB en 2021, et le déficit public 6,5%, selon les chiffres publiés mardi par l'Insee.


Une absence de débat dans la campagne qui rejoint les préoccupations exprimées par les Français. Selon un sondage du 16 mars Opinionway-Kéa Partners pour Les Echos et Radio classique, 22% des électeurs citent la dette et les déficits comme un sujet qui comptera pour eux au moment de voter. Loin derrière le pouvoir d'achat (63%), la protection sociale (37%) ou la sécurité (37%) notamment. 


Le sujet "a disparu parce que je pense que les Français ont été étonnés du +quoi qu'il en coûte+ et maintenant ils se disent que les gouvernants ont l'air de trouver de l'argent, qui est en fait de la dette, sans trouver cela très problématique", analyse l'économiste Alain Trannoy.


Dans leur discours, les candidats semblent transmettre l'idée "qu'on peut repousser à demain - et plutôt à après-demain - le remboursement des dettes", en mettant en avant les dépenses nécessaires pour la santé, la défense, l'éducation, etc, ajoute-t-il.

Dette, déficit: les positions des principaux candidats à la présidentielle

Le rétablissement des finances publiques n'est pas au centre des enjeux de la campagne présidentielle, mais tous les candidats mettent en avant le sérieux budgétaire de leurs programmes. Tour d'horizon de leurs positions sur la dette et le déficit publics.

Emmanuel Macron: Lors de la présentation de son programme mi-mars, le président-candidat a assuré vouloir "garder nos ancres de finances publiques" en confirmant la trajectoire d'évolution du déficit et de la dette publique transmise l'an dernier à la Commission européenne.


S'il est réélu, Emmanuel Macron prévoit donc de "commencer à rembourser la dette en 2026 et repasser sous les 3% (de déficit) en 2027".

Loin du volontarisme affiché en 2017, les mots +dette+ et +déficit+ ne sont toutefois pas présents dans le document de 17 pages synthétisant le programme du candidat. 

Marine Le Pen: En présentant le chiffrage de son programme la semaine dernière, Marine Le Pen a défendu un budget "à l'équilibre" entre recettes supplémentaires et nouvelles dépenses sur le quinquennat si elle était élue. 


Son programme ne mentionne pas expressément ses objectifs en matière de finances publiques, mais dans un récent entretien à Acteurs Publics, elle disait prévoir "de faire passer le déficit budgétaire en dessous de 3% du PIB dès 2026", avec "une réduction du déficit budgétaire d’une quinzaine de milliards d’euros par an".

Jean-Luc Mélenchon:Jean-Luc Mélenchon règle la question de l'endettement public en promettant de faire "annuler" la dette française.


Pour cela, il souhaite notamment faire racheter par la BCE la dette publique qui circule sur les marchés, pour qu'elle soit convertie en dette perpétuelle à taux d'intérêt nul. Encore faudra-t-il convaincre le reste de l'Union européenne d'accepter une telle mesure.


En matière de déficit, à l'issue d'une de ses interventions mi-mars, son entourage avait assuré que son programme réduirait le déficit public de 2,6 points sur le quinquennat.

Eric Zemmour: Fustigeant le quinquennat qui "n'a fait qu'alourdir ce boulet" de la dette, le candidat fait de la "maîtrise" des finances publiques une "priorité".

Le "plan d'économies" qu'il prévoit permettrait, selon son programme, "d’amorcer une réduction du déficit public dès 2023" et de repasser sous les 3% "dès 2025".

Prudent, il souligne que cette trajectoire sera "très dépendante de l'évolution de la conjoncture économique internationale", en particulier de l'évolution des prix de l'énergie et des taux d'intérêt.

Valérie Pécresse: Très virulente contre le président Emmanuel Macron, accusé d'avoir "cramé la caisse", Valérie Pécresse promet de "stabiliser" et "faire baisser" la dette.

L'enjeu est d'ailleurs haut placé dans son programme, dans lequel elle annonce "des décisions courageuses qui ne plairont peut-être pas forcément aux Français". 

Son programme mentionne notamment une "règle d'or budgétaire" et "deux fois plus d’économies que de dépenses" à horizon 2027, pour réduire le déficit public de 42 milliards d'euros en 2027, quand il atteignait fin 2021 un peu moins de 200 milliards d'euros.

Yannick Jadot: Le candidat écologiste assure que "loin de créer davantage de déficit", son programme "améliore la situation budgétaire de la France en 2027 par rapport à la trajectoire budgétaire actuellement prévue par le gouvernement". Même chose pour la dette publique


Il présente toutefois une trajectoire de déficit, hors dépenses liées à la transition écologique.


Dans un entretien à l'AFP, Yannick Jadot part du principe que ces investissements verts seraient faits "par emprunt auprès de la BCE". "C'est maintenant qu'il faut agir, en ayant une dette qui se refinance quasiment à 0% aujourd'hui sur 60 ans", défendait-il.

Dans leurs programmes, les principaux candidats évoquent bien la situation des finances publiques, promettant à droite, à l'extrême droite et du côté d'Emmanuel Macron, de ramener le déficit à 3% du PIB ou en dessous durant le prochain quinquennat, Valérie Pécresse étant la plus offensive en la matière. 


Jean-Luc Mélenchon règle lui la question en projetant de faire annuler la dette publique détenue par la Banque centrale européenne, tandis que Yannick Jadot assure que son projet "améliore la situation budgétaire" en 2027 "par rapport à la trajectoire budgétaire" actuelle du gouvernement.


"On retrouve un discours sur la nécessité de réduire le déficit et de reprendre le contrôle de la dette à droite et chez Emmanuel Macron, mais ça n'est qu'un discours, avec des programmes qui ne permettront jamais d'atteindre cet objectif", estime ainsi François Ecalle, ancien magistrat de la Cour des comptes et fondateur du site Fipeco.


"Tout le monde a intérêt à mettre le sujet sous la table" car, pour réduire drastiquement le déficit public, "il faudrait une politique d'austérité", alors que "l'enjeu principal aujourd'hui c'est d'engager la transition écologique", estime Henri Sterdyniak, membre du collectif Les Economistes Atterrés.

Milliards qui «tombent du ciel»
Les candidats tablent sur la croissance pour créer de l'emploi et davantage de recettes. "C'est à chaque fois le même argument, déjà employé par François Hollande, Nicolas Sarkozy. Mais ce sont des scénarios toujours optimistes", juge Alain Trannoy, qui pointe aussi l'imprécision des promesses récurrentes de lutte contre la fraude ou de simplification de l'administration.


Le "quoi qu'il en coûte" a changé la perception des Français comme de la classe politique depuis le précédent scrutin du 2017. "On a pris l'habitude de voir les milliards tomber du ciel", souligne aussi François Ecalle.


Symptôme évident: les effectifs de la fonction publique. Quand François Fillon promettait en 2017 d'en couper 600.000, Valérie Pécresse ne promet plus qu'une baisse de 150.000 et Emmanuel Macron ne s'engage plus sur un objectif en la matière.


Le "quoi qu'il en coûte a été compris maintenant par une grande partie de gens comme le fait que l'argent il y en a, il suffit de demander", critique de son côté Philippe Ansel, économiste pour la Fondation Concorde, think tank libéral et pro-entreprise. 


"On voit mal comment maintenant un gouvernement pourra résister à des demandes de telle ou telle catégorie de la population", ajoute-t-il.


"L'enjeu de la dette lui-même n'est pas forcément majeur tant que la zone euro fait preuve d'un esprit de coopération. Ce qui est plus ennuyeux, c'est d'avoir un déficit si élevé", nuance toutefois Alain Trannoy.


Rouen: un homme armé tentant de mettre le feu à une synagogue tué par la police

"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", écrit M. Darmanin sur X. (Reuters).
"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", écrit M. Darmanin sur X. (Reuters).
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  • Selon une source proche du dossier, l'homme était armé «d'un couteau et d'une barre de fer»
  • «Il aurait menacé un policier d’un couteau et ce dernier a fait usage de son arme et l’individu est décédé», a précisé le procureur

ROUEN: Des policiers ont abattu vendredi matin un homme armé notamment d'un couteau qui tentait de mettre le feu à une synagogue à Rouen et les menaçait, a annoncé le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.

Vers 6h45, les policiers sont "intervenus sur un signalement de dégagement de fumée près de la synagogue", située rue des Bons enfants dans le centre historique de Rouen, a détaillé une source policière à l'AFP.

"Un individu a mis le feu à la synagogue de Rouen. Il aurait pris à partie les policiers et les pompiers", a pour sa part indiqué à l'AFP le procureur de Rouen, Frédéric Teillet.

Selon une source proche du dossier, l'homme était armé "d'un couteau et d'une barre de fer".

"Ensuite, il aurait menacé un policier d’un couteau et ce dernier a fait usage de son arme et l’individu est décédé", a précisé le procureur.

Une première enquête a été ouverte pour "incendie volontaire" visant un lieu de culte, "violences volontaires sur personnes dépositaires de l’autorité publique confiée à la DGPN, a fait savoir le parquet.

Un autre enquête a été ouverte sur les circonstances du décès de l'individu armé pour "violences volontaires avec armes ayant entrainé la mort sans intention de la donner", confiée à l'Inspection générale de la police nationale (IGPN).

"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", a écrit M. Darmanin sur X.

L'homme abattu par les forces de l'ordre n'a pas été immédiatement identifié, a-t-on précisé de source policière.

Sollicité par l'AFP, le Parquet national antiterroriste indique être en train d'évaluer s'il se saisit du dossier.

De nombreux pompiers et policiers étaient déployés sur place vendredi matin, a constaté un journaliste de l'AFP.

«Sous le choc»

Selon le maire de Rouen, Nicolas Mayer-Rossignol, les pompiers maîtrisaient vendredi matin le départ de feu et il n'y aurait "pas d'autres victimes que l'individu armé".

"A travers cette agression et cette tentative d'incendie de la synagogue de Rouen, ce n'est pas seulement la communauté israélite qui est touchée. C'est toute la ville de Rouen qui est meurtrie et sous le choc", a réagi  le maire sur X.

"Tenter de brûler une synagogue, c'est vouloir intimider tous les Juifs. Une nouvelle fois, on veut faire peser un climat de terreur sur les Juifs de notre pays. Combattre l'antisémitisme, c'est défendre la République", a affirmé sur X le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) Yonathan Arfi.

Gérald Darmanin avait demandé le 14 avril dernier aux préfets de renforcer la sécurité devant les lieux de culte juifs ainsi que devant les écoles confessionnelles, au lendemain de l'attaque menée par l'Iran contre Israël.

Les opérations militaires lancées par l'Etat hébreu contre la bande de Gaza, qui ont causé la mort de plus de 35.000 personnes, en représailles à l'attaque des combattants du Hamas contre Israël le 7 octobre dernier ont provoqué une forte hausse des actes d'antisémitisme en France.

Début mai, le Premier ministre Gabriel Attal avait annoncé que "366 faits antisémites" avaient été enregistrés au premier trimestre 2024, soit "une hausse de 300% par rapport aux trois premiers mois de l'année 2023".

Face à cette hausse, "pas un acte ne doit rester impuni, pas un antisémite ne doit avoir l'âme tranquille", avait affirmé le chef du gouvernement en promettant de "faire preuve d'une fermeté exemplaire à chaque acte".


Des Français musulmans s'exilent à l'étranger, fuyant la « morosité ambiante »

Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes". (AFP).
Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes". (AFP).
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  • Une étude de sociologie publiée le mois dernier rapporte que des Français de culture musulmane, hautement qualifiés, souvent issus de l'immigration, quittent la France pour un nouveau départ
  • Ses amis, sa famille, la culture française lui manquent, mais il raconte avoir fui "l'islamophobie" et le "racisme systémique" entraînant des contrôles policiers à répétition à son encontre

PARIS: Après avoir échoué à 50 entretiens d'embauche pour un job de consultant, en dépit de ses qualifications et diplômes, Adam, Français de confession musulmane, a fait ses valises pour commencer une nouvelle vie à Dubaï.

"Je me sens beaucoup mieux ici qu'en France", estime désormais ce trentenaire d'origine nord-africaine.

"Ici on est tous égaux. On peut avoir comme patron une personne indienne, une personne arabe, un Français", témoigne-t-il à l'AFP, ajoutant que sa religion est "plus acceptée".

Une étude de sociologie publiée le mois dernier rapporte que des Français de culture musulmane, hautement qualifiés, souvent issus de l'immigration, quittent la France pour un nouveau départ dans des villes telles que Londres, New York, Montréal ou Dubaï.

Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes".

En France, "vous devez faire deux fois plus d'efforts quand vous venez de certaines minorités", reprend Adam, qui ne donne pas son nom de famille, comme tous ceux interrogés par l'AFP.

Ses amis, sa famille, la culture française lui manquent, mais il raconte avoir fui "l'islamophobie" et le "racisme systémique" entraînant des contrôles policiers à répétition à son encontre.

'Plafond de verre'

La France, ancienne puissance coloniale et pays d'immigration, compte une importante population d'origine maghrébine et africaine.

Les enfants d'immigrés venus chercher une vie meilleure ou appelés à constituer une main d'oeuvre bon marché dans les années 60 sont Français. Mais nombre d'entre eux se sentent étrangers dans leur propre pays, considérés comme des "citoyens de seconde zone". En particulier depuis les attentats jihadistes de 2015 en France.

"Le climat en France s’est largement dégradé. En tant que musulman on est pointé du doigt", estime sous couvert de l'anonymat un banquier franco-algérien de trente ans, qui s'apprête à quitter son pays en juin, direction Dubaï.

Il évoque notamment certaines chaînes d'info et éditorialistes assimilant tous les musulmans à des extrémistes religieux ou des fauteurs de troubles.

Ce fils d'une femme de ménage algérienne, titulaire de deux masters, estime en outre s'être heurté à un "plafond de verre" dans son parcours professionnel en France.

En France, les statistiques ethniques et religieuses sont interdites. Mais de nombreuses enquêtes documentent depuis des années les discriminations frappant les personnes d'origine immigrée dans la recherche d'emploi, de logement, les contrôles policiers...

Un candidat au nom français a près de 50% de chances supplémentaires d’être rappelé par un employeur par rapport à un candidat au nom maghrébin, rappelle ainsi l'Observatoire des inégalités dans son rapport 2023.

'Morosité'

Le rapport très particulier de la France à la laïcité, les polémiques récurrentes sur le voile musulman, provoquent aussi le malaise chez certains.

"Il y a une vraie spécificité française sur cette question. Dans notre pays, une femme qui porte le voile est reléguée à la marge de la société et il lui est notamment très difficile de trouver un emploi. Des femmes portant le hidjab qui veulent travailler sont donc assez logiquement amenées à quitter la France", explique Olivier Esteves, l'un des auteurs de l'étude, au Monde.

"On étouffe en France", raconte à l'AFP un Français de 33 ans d'origine marocaine, qui s'apprête à émigrer en Asie du sud-est avec sa femme enceinte, "pour vivre dans une société plus apaisée et où les communautés savent vivre ensemble".

Cet employé dans la tech veut fuir "la morosité ambiante" et les "humiliations" du quotidien liées à son patronyme et ses origines.

"On me demande encore aujourd’hui ce que je fais dans ma résidence", où il vit depuis plusieurs années. "Et c’est pareil pour ma mère quand elle me visite. Mais ma femme qui est blanche de peau n’a jamais eu cette question", raconte-t-il.

"Cette humiliation constante est d’autant plus frustrante que je contribue net à cette société en faisant partie des hauts revenus qui paient plein pot", s'insurge-t-il.

Paradoxalement, la société française est pourtant "plus ouverte qu'il y a vingt ans" et "le racisme recule", souligne le dernier rapport annuel de l'Observatoire des inégalités, notant que 60% des Français déclarent n'être "pas du tout racistes", soit deux fois plus qu'il y a 20 ans.

Et la part de ceux qui pensent qu’il y a des "races supérieures à d’autres" a été divisée par trois, de 14% à 5%.


Les députés érigent l'agriculture en « intérêt général majeur »

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  • "La protection, la valorisation et le développement de l'agriculture et de la pêche sont d'intérêt général majeur en tant qu'ils garantissent la souveraineté agricole et alimentaire de la Nation, qui contribue à la défense de ses intérêts fondamentaux"
  • L'engagement avait été pris par Emmanuel Macron au salon de l'Agriculture, alors que la colère des agriculteurs battait son plein

PARIS: Les députés ont approuvé jeudi un article du projet de loi agricole qui prévoit de conférer à l'agriculture un caractère "d'intérêt général majeur", une innovation juridique censée répondre à une demande des agriculteurs, mais dont les oppositions contestent la portée.

"La protection, la valorisation et le développement de l'agriculture et de la pêche sont d'intérêt général majeur en tant qu'ils garantissent la souveraineté agricole et alimentaire de la Nation, qui contribue à la défense de ses intérêts fondamentaux", énonce cet article-clé du projet de loi.

L'engagement avait été pris par Emmanuel Macron au salon de l'Agriculture, alors que la colère des agriculteurs battait son plein. "Sur le plan juridique, ça positionne l'agriculture en équilibre avec l'environnement", avait approuvé Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, premier syndicat agricole.

"Cela va venir produire, sur le long terme, des effets dans la manière dont vont pouvoir être pondérés différents objectifs de politiques publiques, et dans la manière dont, sur le terrain, des projets agricoles pourront être évalués, réalisés et développés", a affirmé le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau.

Plusieurs députés -- à l'instar de juristes --, doutent cependant de sa portée.

La mesure "crée le fantasme d'une remise en cause de la charte de l'environnement" et "donne l'illusion au monde paysan qu'on a répondu de façon démagogique à toutes ces attentes d'être au-dessus du reste des normes, du droit", a fustigé Dominique Potier (PS).

Nicole Le Peih, rapporteure Renaissance, a admis qu'il s'agissait d'une "innovation juridique" qui ne "modifie pas la hiérarchie des normes".

"Il n'y a pas de remise en cause du principe constitutionnel de la protection de l'environnement" mais "lorsque plusieurs dispositions législatives seront en présence, voire seront contradictoires, l'agriculture fera désormais l'objet d'une attention spécifique", a-t-elle soutenu.

« Intentions »

L'article propose également une longue définition de la souveraineté alimentaire et agricole de la France, reposant notamment sur sa capacité à "produire, transformer et distribuer" les produits nécessaires à "une alimentation suffisante, saine (et) sûre".

Il pose aussi le principe "d'ici au 1er juillet 2025 puis tous les dix ans d'une programmation pluriannuelle de l'agriculture".

Le reste consiste surtout en une longue liste de bonnes pratiques que les politiques publiques sont censées suivre pour assurer cette "souveraineté alimentaire".

L'article a surtout permis à chaque groupe de faire valoir sa vision de l'agriculture, et au camp présidentiel de jouer la carte de la co-construction.

Il a intégré certains objectifs proposés par Les Républicains (justifier et évaluer les surtranspositions avant de les mettre en place, valoriser les agricultrices) ou la gauche (améliorer les conditions de travail des agriculteurs, développer la prévention sanitaire).

Mais l'article "n'a aucune valeur normative" et n'apporte "aucune contrainte", a déploré Sébastien Jumel (PCF). Aurélie Trouvé (LFI), a dénoncé l'absence de mesures pour des "prix planchers".

"C'est caricatural", a rétorqué Henri Alfandari (Horizons), estimant que les agriculteurs demandaient aussi de la clarté sur leurs missions. L'article pose des "intentions qui encouragent", pour Julien Dive (LR).

Les députés RN ont eux fustigé le manque de soutien à leurs amendements.

Les règles de la procédure parlementaire ont aussi donné lieu à une fin de séance kafkaïenne, les députés passant près d'une heure et demie à voter ou rejeter près de 560 amendements, dont certains avaient été débattus de nombreuses heures auparavant.

"C'était complètement dingue", soupirait une députée en sortant, mi-amusée, mi-fatiguée.