Un crime sans corps : Nicolas Zepeda jugé pour l'assassinat de Narumi Kurosaki

Le Chilien Nicolas Zepeda (3e G), soupçonné de la disparition et du meurtre présumé d'une étudiante japonaise en décembre 2016 dans la ville française de Besançon, est conduit vers une voiture alors qu'il quitte le palais de justice de Besançon, le 24 juillet 2020. (AFP)
Le Chilien Nicolas Zepeda (3e G), soupçonné de la disparition et du meurtre présumé d'une étudiante japonaise en décembre 2016 dans la ville française de Besançon, est conduit vers une voiture alors qu'il quitte le palais de justice de Besançon, le 24 juillet 2020. (AFP)
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Publié le Dimanche 27 mars 2022

Un crime sans corps : Nicolas Zepeda jugé pour l'assassinat de Narumi Kurosaki

  • Selon l'accusation, le jeune Chilien qui ne supportait pas la rupture serait venu la retrouver à Besançon et l'aurait tuée dans sa chambre universitaire
  • Cette nuit-là, plusieurs témoins entendent des «hurlements de terreur» et un bruit sourd «comme si on frappait». Personne toutefois n'appelle la police

BESANCON: Une histoire d'amour sur plusieurs continents, Besançon comme théâtre d'une dernière rencontre et un corps introuvable: le Chilien Nicolas Zepeda répondra à partir de mardi devant la cour d'assises du Doubs de l'assassinat qu'il a toujours nié de son ex-petite amie japonaise Narumi Kurosaki, disparue depuis décembre 2016.


Avec des traductions simultanées en espagnol et en japonais et des témoins interrogés en visioconférence depuis le Japon ou le Chili, l'audience qui s'ouvrira mardi à 09H30 donnera le coup d'envoi d'un procès hors du commun, prévu pour se prolonger jusqu'au 12 avril.


Etudiante boursière brillante, arrivée à Besançon à l'été 2016 pour apprendre le français, Narumi Kurosaki, 21 ans à l'époque, a disparu depuis le 4 décembre 2016. Son ex-petit ami, Nicolas Zepeda, avec qui elle avait rompu l'automne précédent, est le dernier à l'avoir vue vivante.


"Ses parents savent, au bout de cinq ans, que leur fille n'a pu ni disparaître ni se donner la mort. (...) Ils n'ont aucun doute que monsieur Zepeda l'a tuée", affirme Me Sylvie Galley, avocate de la famille de Narumi, dont la mère et la plus jeune soeur feront le voyage depuis Tokyo.


Selon l'accusation, le jeune Chilien qui ne supportait pas la rupture serait venu la retrouver à Besançon et l'aurait tuée dans sa chambre universitaire, avant de se débarrasser du cadavre dans les vastes forêts du Jura, où serpente le Doubs.

Meurtres sans cadavre: plusieurs précédents retentissants avant l'affaire Zepeda

Des procès pour meurtre se tiennent parfois en l'absence de cadavre, comme celui du Chilien Nicolas Zepeda, accusé de l'assassinat de l'étudiante japonaise Narumi Kurosaki, qui s'ouvre mardi à Besançon. 


Voici trois précédentes affaires retentissantes, dans lesquelles le corps de la personne disparue n'a jamais été retrouvé et l'accusé a toujours clamé son innocence. 

Jacques Viguier acquitté: Suzanne Viguier, professeure de danse de 38 ans, disparaît le 27 février 2000 à Toulouse. Son amant est le dernier à l'avoir vue vivante, à l'aube, quand il l'a raccompagnée au domicile conjugal.

Rapidement soupçonné, le mari de la jeune femme, Jacques Viguier, professeur d'université, fait neuf mois de détention provisoire. Jugé pour meurtre, il est acquitté à deux reprises, en 2009 puis en appel en 2010.

Dans le livre "Innocent" publié en 2010, Jacques Viguier est revenu sur "10 ans de souffrance et de combat", le sous-titre de l'ouvrage.

Un film a été tiré de cette affaire, "Une intime conviction", avec Marina Foïs et Olivier Gourmet dans le rôle de l'un des avocats du mari, Eric Dupond-Moretti, aujourd'hui ministre de la Justice.

Maurice Agnelet condamné

La disparition à 29 ans d'Agnès Le Roux, héritière d'un des plus prestigieux casinos niçois, pendant le week-end de la Toussaint 1977, marque le début d'un feuilleton judiciaire à rebondissements.

L'avocat Maurice Agnelet, qui fut un temps son amant et était proche du patron d'un casino concurrent, est soupçonné mais bénéficie d'un non-lieu en 1985. Renvoyé aux assises après le revirement de sa seconde femme qui lui avait fourni un alibi, il est acquitté en 2006 mais condamné en appel à vingt ans de réclusion l'année suivante pour assassinat. 

En 2013, la Cour européenne des droits de l'Homme estime que ce procès n'a pas été équitable, le verdict n'ayant pas été motivé. Au terme d'un troisième procès, Maurice Agnelet est de nouveau condamné en 2014 à vingt ans de prison. La Cour de cassation rejette son pourvoi.

Il meurt à 82 ans en janvier 2021, en Nouvelle-Calédonie où il avait rejoint son fils après sa libération moins d'un mois plus tôt pour raisons médicales.

Cette affaire a inspiré un film d'André Téchiné en 2014, "L'homme qu'on aimait trop", avec Guillaume Canet, Catherine Deneuve et Adèle Haenel.

Guillaume Seznec condamné puis gracié: L'affaire Guillaume Seznec reste l'une des grandes énigmes judiciaires du XXe siècle. 

Négociant en bois à Morlaix, Seznec quitte Rennes le 25 mai 1923 avec son ami Pierre Quémeneur, conseiller général du Finistère, pour faire du négoce à Paris. Trois jours plus tard il revient seul, affirmant avoir laissé près de Paris Quémeneur, qui préférait terminer le voyage en train. Ce dernier ne donnera plus signe de vie.

Le 4 novembre 1924, Seznec est condamné aux travaux forcés à perpétuité pour assassinat. Il passera 20 ans au bagne en Guyane.

Gracié par le général de Gaulle en 1946 pour bonne conduite, il rentre en métropole le 1er juillet 1947, à 69 ans. Renversé à Paris en novembre 1953 par une camionnette qui prend la fuite, il meurt trois mois plus tard.

Sa famille a poursuivi son combat pour sa réhabilitation, mais quatorze demandes de révision du procès ont été rejetées, la dernière en 2006.

Dernière nuit ensemble 
Nicolas Zepeda, 31 ans désormais, est en détention provisoire à Besançon depuis juillet 2020, après son extradition par le Chili, obtenue de haute lutte par les magistrats français. 


Défendu notamment par Me Jacqueline Laffont, connue pour avoir été l'avocate de l'ex-présentateur star de TF1 Patrick Poivre d'Arvor ou de l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy, le jeune homme, tombé amoureux de Narumi sur les bancs de l'université japonaise de Tsukuba, nie catégoriquement toute responsabilité dans sa disparition.


Emprisonné à l'isolement en raison de la médiatisation de cette affaire, "il arrive presque soulagé de pouvoir enfin s'expliquer, d'être enfin entendu, il arrive déterminé", affirme la défense.


Nicolas Zepeda a reconnu avoir passé cette dernière nuit de décembre avec Narumi, retrouvée, selon lui, par hasard lors d'un passage en France. Mais cette nuit-là, plusieurs témoins entendent des "hurlements de terreur" et un bruit sourd "comme si on frappait". Personne toutefois n'appelle la police.


Dans les jours qui suivent, les proches de Narumi Kurosaki reçoivent, via les comptes de la jeune femme sur les réseaux sociaux, des messages jugés parfois incohérents. Les enquêteurs de la police judiciaire de Besançon les attribueront par la suite à l'accusé.


Ce n'est que le 13 décembre qu'un responsable de l'Université de Franche-Comté déclare la disparition de l'étudiante. Nicolas Zepeda est alors reparti au Chili, après avoir passé plusieurs jours en Espagne chez un cousin.

Dossier délicat 
Quand l'enquête débute, aucune trace de sang ni de lutte n'est constatée dans la chambre de l'étudiante. Ses effets personnels sont tous présents, à l'exception d'une valise et d'une couverture. 


Nicolas Zepeda se présente spontanément à la police chilienne, explique avoir quitté Narumi vivante après une nuit passée ensemble. Mais ses agissements, comme un détour par une forêt ou l'achat d'allumettes et d'un bidon de produit inflammable, en font rapidement le principal suspect.


"Une accusation biaisée sans aucune preuve scientifique" et "une enquête menée sur la foi de suspicions et de suppositions", a contesté le père de l'accusé, Humberto Zepeda, en février dans une interview au JDD.


Le procureur de la République de Besançon Etienne Manteaux, qui sera avocat général au procès, a au contraire estimé en janvier 2021 que le dossier présentait "énormément de données techniques" (téléphonie, géolocalisation de son véhicule, achats par carte bancaire...). 


L'accusation, dit-il, s'appuie aussi sur les "témoignages de proches mettant en défaut la version de M. Zepeda" d'une rencontre fortuite à Besançon et d'une dernière nuit d'amour.


En dépit des nombreuses investigations, le corps de la victime reste introuvable. "Comme dans tout dossier criminel où il n'y a pas de corps, c'est un dossier délicat", observe Me Randall Schwerdorffer, avocat du nouveau petit ami que Narumi Kurosaki fréquentait au moment de sa disparition, lui aussi partie civile.


Macron dira à Trump qu'entre alliés on ne peut pas "faire souffrir l'autre" avec des droits de douane

Le président français Emmanuel Macron (C) et la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard (D) écoutent des artisans du cuir lors de la journée d'ouverture et de l'inauguration par le président français du 61e Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 22 février 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron (C) et la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard (D) écoutent des artisans du cuir lors de la journée d'ouverture et de l'inauguration par le président français du 61e Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 22 février 2025. (AFP)
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  • "Entre alliés, on ne peut pas faire souffrir l'autre avec des tarifs" douaniers, a déclaré Emmanuel Macron samedi au premier jour de l'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris
  • Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a annoncé la mise en place de droits de douane réciproques

PARIS: "Entre alliés, on ne peut pas faire souffrir l'autre avec des tarifs" douaniers, a déclaré Emmanuel Macron samedi au premier jour de l'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris alors que Donald Trump menace d'imposer des droits de douane sur de multiples produits européens.

"Je vais (lui) en parler parce qu'on a besoin d'apaiser tout ça", a relevé le président français qui doit rencontrer son homologue américain lundi à Washington.

"La filière agricole et agroalimentaire (française), c'est une grande filière d'exportation, donc il faut la défendre pour la rendre encore plus compétitive", a-t-il ajouté.

Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a annoncé la mise en place de droits de douane réciproques, c'est-à-dire que les États-Unis appliqueront le même niveau de droits de douane sur les produits en provenance d'un pays que le niveau appliqué dans ce pays aux produits américains.

Il a également annoncé le retour de droits de douane sur l'acier et l'aluminium. Et, s'il a déjà visé le Canada, le Mexique et la Chine, il a régulièrement assuré que les pays européens étaient également menacés.

En France, les viticulteurs sont particulièrement inquiets d'un retour des droits de douane américains sur le cognac et le vin, qu'ils exportent en masse vers les États-Unis, d'autant que le cognac souffre déjà d'un différend commercial entre l'UE et la Chine, son premier marché en valeur.

"Je suis déterminé sur tous les sujets pour avoir un échange" avec Donald Trump, a encore dit Emmanuel Macron. "On partagera nos accords, nos désaccords et j'espère surtout qu'on trouvera des solutions sur la question de l'Ukraine".

Le président américain est reparti à la charge vendredi contre son homologue ukrainien. Tout en estimant que Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine allaient "devoir se parler", pour "mettre fin au massacre de millions de personnes", il a jugé que la présence de l'Ukrainien n'était "pas importante" dans des négociations avec la Russie.

Il a ciblé par ailleurs Emmanuel Macron, et Keir Starmer, qui n'ont selon lui "rien fait" pour mettre un terme à la guerre. Le Premier ministre britannique est attendu jeudi à Washington.


Au Salon de l'agriculture, Macron attendu au tournant

Une femme marche devant une affiche sur laquelle on peut lire "Fiers et unis avec nos agriculteurs" à la veille de l'ouverture du 61e Salon international de l'agriculture (SIA), au parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris, le 21 février 2025. (AFP)
Une femme marche devant une affiche sur laquelle on peut lire "Fiers et unis avec nos agriculteurs" à la veille de l'ouverture du 61e Salon international de l'agriculture (SIA), au parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris, le 21 février 2025. (AFP)
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  • Le 61e Salon de l'agriculture est inauguré samedi à Paris par Emmanuel Macron, attendu au tournant par des agriculteurs toujours remontés et par des organisateurs aux aguets après sa visite chaotique de l'an dernier
  • Plus de 600.000 visiteurs sont attendus sur les neuf jours du Salon

PARIS: Visites politiques encadrées et les vaches seront bien gardées? Le 61e Salon de l'agriculture est inauguré samedi à Paris par Emmanuel Macron, attendu au tournant par des agriculteurs toujours remontés et par des organisateurs aux aguets après sa visite chaotique de l'an dernier.

Pas d'incitation à chahuter cette année, mais des appels au calme ambivalents de la part des principaux syndicats agricoles, qui doivent être reçus l'un après l'autre en début de matinée avant la traditionnelle coupe de ruban et la déambulation présidentielle.

Plus de 600.000 visiteurs sont attendus sur les neuf jours du Salon, qui ouvre ses portes au public à 09H00. En 2024, des milliers de personnes avaient été bloquées à l'extérieur pendant plusieurs heures en raison de heurts entre manifestants et CRS en marge de la venue d'Emmanuel Macron, entre huées, insultes, bousculades et violences.

Sécurité renforcée, commissariat mobile, chartes pour encadrer les visites politiques... Les organisateurs sont sur les dents pour ne pas voir se répéter le scénario catastrophe de l'an dernier.

L'entourage d'Emmanuel Macron lui a conseillé d'éviter une visite marathon, à l'image des 13 heures de déambulation de 2024 parmi les plus de 1.400 exposants et 4.000 animaux accueillis chaque année.

"Le président sera très probablement pris à parti", a averti Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, syndicat historique, qui l'attend sur les dossiers internationaux.

Cet automne, c'est l'opposition à l'accord de libre-échange UE-Mercosur qui a servi de cri de ralliement pour relancer les manifestations d'agriculteurs, qui dénoncent aussi les taxes douanières chinoises et craignent des mesures similaires de la nouvelle administration américaine.

"Je souhaite qu'il en parle à Donald Trump (...): arrêter les importations massives qui ne respectent pas nos normes, lever les contraintes qui nous empêchent d'être compétitifs", renchérit Pierrick Horel des Jeunes Agriculteurs, alliés de la FNSEA.

Pour Patrick Legras, porte-parole de la Coordination rurale, forte de sa percée aux élections professionnelles de janvier, "ça va être tendu". Selon lui, Emmanuel Macron va aussi avoir du mal à "expliquer qu'on négocie encore un accord pour importer du sucre ou du poulet d'Ukraine" — l'accord d'association UE-Ukraine, en cours de révision — évoquant des produits érigés en symboles d'une "concurrence déloyale".

Coutumière des actions coup de poing, la Coordination rurale a toutefois passé à ses sympathisants un message d'apaisement, dans l'espoir qu'Emmanuel Macron "aura vraiment quelque chose" à leur dire, selon sa président Véronique Le Floc'h.

- "Où sont les promesses?" -

Plus d'un an après la mobilisation qui avait bloqué routes et autoroutes, l'heure est au bilan des mesures obtenues par les agriculteurs qui réclament un revenu "décent", plus de considération et moins d'injonctions.

Pour le gouvernement, ses engagements ont été "honorés": "500 millions d'euros d'allégement de charges fiscales prévus dans le budget", "soutien à la trésorerie pour les agriculteurs en difficulté", "indemnisations à hauteur de 75 millions d'euros aux propriétaires du cheptel touché par les épizooties" ou encore "la mise en place du contrôle administratif unique en octobre dernier".

Surtout, deux jours avant le Salon, le Parlement a adopté la loi d'orientation agricole, attendue depuis trois ans par la profession. Ce texte érige l'agriculture au rang "d'intérêt général majeur", facilite les installations, la construction de bâtiments d'élevage et le stockage de l'eau, tout en dépénalisant certaines infractions environnementales.

"Un an après, où sont passés les prix plancher et ses promesses? Au Salon 2024, nous demandions des prix minimum garantis pour les producteurs: non seulement on n'a pas du tout avancé, mais la situation est pire aujourd'hui", s'indigne Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération paysanne, troisième syndicat.

Elle estime que les demandes de l'alliance FNSEA-JA et de la CR ont été privilégiées, au détriment d'une "réelle transition agroécologique". Un argument repris par la gauche à propos de la loi d'orientation agricole.

Les personnalités politiques de tous bords devraient se succéder auprès de la vache limousine Oupette, égérie de l'édition 2025. Le Premier ministre François Bayrou est attendu lundi.

Malgré la volonté des organisateurs de limiter les visites à une journée pour chaque parti, Jordan Bardella (RN) a prévu de s'y rendre dimanche et lundi avec une délégation, comme en 2024, où les demandes de "selfies" avec le chef du parti d'extrême droite avaient contrasté avec la visite présidentielle.

En novembre, à la veille de nouvelles mobilisations paysannes, il s'était affiché dans le Lot-et-Garonne avec des cadres de la Coordination rurale, qui faisait campagne de son côté pour "dégager la FNSEA" des chambres d'agriculture.


France: face à des familles en colère, un maire annonce que les corps de 60 harkis ont été transférés en 1986

Des membres de familles harkies se tiennent près d'une stèle commémorative énumérant 146 noms de Harkis décédés, dont 101 enfants, à Rivesaltes, dans le sud-ouest de la France, le 21 février 2025. (AFP)
Des membres de familles harkies se tiennent près d'une stèle commémorative énumérant 146 noms de Harkis décédés, dont 101 enfants, à Rivesaltes, dans le sud-ouest de la France, le 21 février 2025. (AFP)
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  • Le maire André Bascou, en poste depuis 1983, a présenté vendredi ses excuses aux familles qui cherchent à savoir où ont été enterrés une soixantaine de corps et à leur offrir une "sépulture digne"
  • "Entre le 15 et le 19 septembre 1986, les corps ont été exhumés et inhumés au cimetière Saint-Saturnin. Je ne sais pas précisément où ils se trouvent", a déclaré le maire octogénaire, regrettant de ne pas avoir contacté les familles "à l'époque"

RIVESALTES: Les ossements de 60 harkis décédés et inhumés sans sépulture au camp de Rivesaltes, dans le sud de la France, entre 1962 et 1964, ont été transférés en 1986 dans un cimetière de la ville, a révélé vendredi le maire, face à des familles, en colère, à la recherche de corps, dont ceux de 52 bébés.

Après l'indépendance de l'Algérie en 1962, 21.000 harkis - ces Français musulmans recrutés comme auxiliaires de l'armée française pendant la guerre - et leurs familles ont transité par le camp de Rivesaltes, près de Perpignan.

A l'automne dernier, des tombes d'enfants harkis décédés entre 1962 et 1964 ont été découvertes lors de fouilles demandées par les familles, mais elles étaient dépourvues d'ossements.

Le maire André Bascou, en poste depuis 1983, a présenté vendredi ses excuses aux familles qui cherchent à savoir où ont été enterrés une soixantaine de corps et à leur offrir une "sépulture digne".

"Entre le 15 et le 19 septembre 1986, les corps ont été exhumés et inhumés au cimetière Saint-Saturnin. Je ne sais pas précisément où ils se trouvent", a déclaré le maire octogénaire, regrettant de ne pas avoir contacté les familles "à l'époque".

Dans la salle de la mairie de Rivesaltes, une trentaine de proches de ces enfants défunts ont montré colère et incompréhension, ont constaté des journalistes de l'AFP.

La ministre déléguée en charge de la Mémoire et des Anciens combattants, Patricia Mirallès, qui avait réclamé en octobre 2023 la tenue de fouilles sur le camp de Rivesaltes, a salué la tenue de cette réunion mais réclamé que le maire fasse "la lumière sur tout ce qui s'est passé, avec des archives que nous avons nous-mêmes retrouvées au ministère des Armées".

"Les dépouilles sont aujourd'hui dans le cimetière de Rivesaltes", a-t-elle ajouté devant la presse, "je crois qu'on est dans la reconnaissance".

Entre 1962 et 1965, environ 90.000 harkis et leurs familles ont fui les massacres de représailles en Algérie et ont été accueillis en France. Plusieurs dizaines de milliers furent parqués dans des "camps de transit et de reclassement" gérés par l'armée, aux conditions de vie déplorables et théâtre d'une surmortalité infantile.