LODEVE: Le grand orgue symphonique de Notre-Dame de Paris, bien que largement épargné par l'incendie de 2019, fait l'objet d'une restauration complète afin de lui rendre toute sa splendeur lors de la réouverture de la cathédrale, prévue en 2024.
Voix de l'emblématique église parisienne depuis 1733, le grand orgue a été transformé à plusieurs reprises depuis sa reconstruction en 1868. Ses 8 000 tuyaux, répartis en 115 "jeux" --ensemble de tuyaux de même type correspondant à un timbre-- en font le plus grand instrument de France en nombre de jeux.
"Il n'a pas directement souffert de l'incendie, c'est en quelque sorte l'opportunité de lui rendre sa beauté originelle, on va retrouver un son merveilleux", a expliqué mardi le général Jean-Louis Georgelin, président de l’Etablissement public chargé de la conservation et de la restauration de Notre-Dame, lors d'une visite dans l'Hérault, dans le sud de la France, où l'orgue est en partie restauré.
L'instrument a été démonté en 2020. Un groupement de trois petites entreprises françaises a ensuite été désigné, sur appel d'offres, pour son nettoyage approfondi et sa remise à neuf.
L'atelier Quoirin, à Saint-Didier (Vaucluse, sud), s'est chargé de la décontamination des pièces de l'instrument, qui avait été recouvert de poussière de plomb.
Les 19 "sommiers", pièces centrales qui distribuent l'air sous pression aux tuyaux en fonction des touches actionnées et des registres choisis par l'organiste, sont eux restaurés à la Manufacture Languedocienne des Grandes Orgues, aux portes de Lodève (Hérault), tandis que les travaux de décontamination et de révision de la console et des 8.000 tuyaux ont lieu à l'atelier Cattiaux-Chevron, à Liourdres (Corrèze, sud).
Centaines d'heures de travail
"Pour démonter, nettoyer, recoller les pièces, placer des peaux d'agneaux assurant l'étanchéité, il faut à deux ouvriers environ 450 heures de travail pour restaurer deux sommiers", explique Charles Sarelot, patron de la Manufacture de Lodève, dont l'atelier aux poutres apparentes, situé en bord de rivière, fleure bon les petites fabriques d'autrefois.
Cet été, l'atelier Quoirin se chargera de la pose de 850 électro-aimants, qui permettront d'ouvrir les soupapes, car si le grand orgue de Notre-Dame est "typique des instruments" du XIXe siècle, il mérite de bénéficier des avancées techniques, souligne M. Sarelot.
La restauration des tuyaux de façade de l'orgue, restés sur place car trop fragiles pour être transportés, aura lieu en octobre, puis l'instrument sera remonté dans la cathédrale, accordé et harmonisé en 2023, afin d'être fin prêt un an plus tard, lorsque fidèles et visiteurs du monde entier devraient retrouver le monument.
"Nous sommes très contents de voir que cette affaire de la restauration de la cathédrale n'est pas une affaire de Parisiens, c'est une affaire de la France entière. C'est vrai pour les orgues, c'est vrai pour les chênes des charpentes, c'est vrai pour les pierres, etc.", s'est réjoui le général Georgelin.
Le sciage de huit chênes de dimension exceptionnelle, destinés à la flèche de Notre-Dame, s'est ainsi déroulé fin 2021 à la scierie des Géants en Mayenne, dans l'ouest de la France.
La restitution de la flèche de l'architecte français Viollet-le-Duc, dont l’ossature est entièrement en bois de chêne massif, et des charpentes du transept et de ses travées adjacentes nécessite environ un millier de chênes, issus pour moitié de forêts publiques, pour moitié de près de 150 forêts privées.
La restauration de Notre-Dame, l'un des bâtiments les plus emblématiques de France, a bénéficié de dons d'un total de 844 millions d'euros apportés par 340 000 donateurs issus de 150 pays, selon l'établissement public spécialement créé pour conduire ces travaux.
Il sera possible rencontrer les facteurs d'orgues à l'oeuvre dans ce projet dans le cadre du Village des métiers d'art du chantier de restauration de Notre-Dame que l'établissement public organise le 2 avril au Collège des Bernardins, à Paris.