RAMALLAH: Les universitaires palestiniens font part de leur profonde inquiétude face aux nouvelles restrictions israéliennes visant les travailleurs et les étudiants étrangers, qui entravent l’enseignement dans les universités.
Les autorités israéliennes ont limité le nombre de professeurs et d’étudiants étrangers qui peuvent résider en Cisjordanie et enseigner dans ses universités, ont déclaré des sources universitaires palestiniennes à Arab News.
Des sources israéliennes ont déclaré le 8 mars qu’Israël suivrait une approche stricte pour le recrutement de maîtres de conférences étrangers dans les universités palestiniennes de Cisjordanie et l’admission d’étudiants étrangers. Ainsi, Israël n’autorisera les universités palestiniennes à recruter des maîtres de conférences étrangers que s’ils enseignent dans des domaines spécifiques et s’il y a une pénurie de professeurs au niveau national.
Les maîtres de conférences qui souhaitent enseigner en Cisjordanie doivent également faire vérifier leur doctorat par les consulats israéliens de leur pays d’origine, les autorités décidant du nombre professeurs qui recevront un visa d’entrée.
Israël n’autorisera pas non plus la présence de plus de 150 étudiants internationaux dans les universités palestiniennes et ces derniers seront tous tenus de passer un entretien avec le bureau de représentation israélien dans leur pays d’origine.
Huit universités de Cisjordanie et de Jérusalem-Est enseignent diverses matières académiques et professionnelles. Toutes délivrent des diplômes de licence et de master, mais seulement quelques-unes délivrent des doctorats.
Les universités palestiniennes de Cisjordanie comptent quelque 120 000 étudiants, dont 20 000 obtiennent un diplôme chaque année. «Cela signifie que la politique consiste davantage à restreindre la possibilité de faire venir des professeurs invités qui peuvent être des Palestiniens, mais qui n’ont pas de résidence en Palestine. Au lieu de leur donner des visas de travail pour un an, ils leur fournissent des visas de tourisme pour une période allant d’une semaine à trois mois au maximum, et ils refusent souvent de les renouveler», explique Ghassan Khatib, vice-président de l’université de Beir Zeit, à Arab News.
«Aucun professeur invité n’accepte de quitter son emploi pour enseigner dans une université palestinienne sans garantie de résidence, au moins pour un semestre de cinq mois», ajoute M. Khatib. Les représentants des universités palestiniennes ont avoué être limités par ces restrictions qui restreignent les possibilités d’échanges universitaires dans le monde.
Selon M. Khatib, les universités palestiniennes manquent de personnel enseignant en raison de la fuite des cerveaux. Lorsqu’une nouvelle filière universitaire est créée, elle a du mal à trouver des talents locaux pour enseigner et est donc obligée de faire appel à des maîtres de conférences internationaux. Il cite l’exemple de l’ancien président de l’université de Beir Zeit, Khalil al-Hindi, qui a dirigé l’université pendant cinq ans, mais qui devait voyager pour renouveler son visa une fois tous les trois mois.
Les nouvelles restrictions israéliennes ont été émises à la fin du mois dernier et entreront en vigueur en mai. Ces règles exigent que les documents des étudiants et des professeurs postulants comprennent une invitation officielle de l’Autorité palestinienne. Les visas primaires ne sont valables que pour un an, sous réserve de renouvellement. La durée maximale d’enseignement autorisée pour les professeurs est de cinq années non consécutives. La période maximale pour un étudiant est de quatre ans jusqu’à l’obtention de son diplôme.
Les nouvelles procédures israéliennes ne s’appliquent qu’aux citoyens des pays ayant des relations diplomatiques avec Israël, à l’exception de la Jordanie, de l’Égypte et des Émirats arabes unis. Toutefois, ces pays entretiennent également des liens diplomatiques avec Israël et leurs citoyens peuvent demander un séjour beaucoup plus court.
L’université de Beir Zeit accueille entre 10 et 15 professeurs invités, et tous sont confrontés au problème du renouvellement des visas, qui oblige certains d’entre eux à quitter la faculté. «Nous devons recruter davantage d’enseignants, mais nous ne pouvons pas. Lorsque l’université de Beir Zeit a obtenu une licence pour ouvrir une filière de soins infirmiers il y a sept ans, le lancement de la spécialisation a été retardé de plusieurs mois en raison de l’incapacité de l’université à recruter des enseignants», confie M. Khatib.
À l’instar des universités israéliennes, les universités palestiniennes doivent avoir le droit de faire appel au personnel universitaire international qualifié dont elles manquent, indique M. Khatib. Souhad Bishara, directrice juridique du bureau qui représente l’université de Beir Zeit dans cette affaire auprès des autorités israéliennes, explique à Arab News que «les restrictions israéliennes limitent les possibilités des universités palestiniennes de bénéficier de diverses expériences académiques internationales. Ces restrictions sont en contradiction avec le droit international et doivent être levées définitivement afin de permettre aux universités palestiniennes de faire venir autant de professeurs et de spécialistes qu’elles le souhaitent».
L’université de Beir Zeit a lancé une campagne internationale pour faire pression sur les autorités israéliennes afin qu’elles lèvent leurs restrictions après en avoir lourdement souffert durant l’année universitaire 2018-2019.
Certains universitaires palestiniens ont signalé à Arab News que les nouvelles procédures portaient atteinte aux droits des Palestiniens et de leurs institutions à travailler en fonction de leurs choix et de leurs besoins pour entretenir des relations économiques, commerciales et universitaires avec d’autres pays.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com