L'invasion russe de l'Ukraine a déjà rebattu les cartes des relations internationales

L'offensive de Moscou marque un tournant mondial. (Photo, AFP)
L'offensive de Moscou marque un tournant mondial. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 02 mars 2022

L'invasion russe de l'Ukraine a déjà rebattu les cartes des relations internationales

  • L'invasion russe de l'Ukraine a rebattu en profondeur les cartes sur la scène internationale, avec une Russie plus isolée que jamais
  • Le Vieux Continent et les Etats-Unis ont dénoncé d'une même voix une violation flagrante des principes au coeur du système international instauré après la Seconde Guerre mondiale

WASHINGTON : Une semaine seulement, et déjà des bouleversements géopolitiques en cascade: l'invasion russe de l'Ukraine a rebattu en profondeur les cartes sur la scène internationale, avec une Russie plus isolée que jamais, un camp occidental ressoudé mais aussi le retour de la menace nucléaire.

La Russie, Etat «paria»

L'offensive de Moscou marque un tournant mondial.

Tout d'abord, elle a "fait voler en éclats l'espoir que l'Europe post-Guerre froide pourrait être épargnée d'une guerre majeure", relève Ali Wyne, du cabinet d'analyse des risques Eurasia Group.

Le Vieux Continent et les Etats-Unis, mais aussi le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, ont dénoncé d'une même voix une violation flagrante des principes au coeur du système international instauré après la Seconde Guerre mondiale.

Surtout, la riposte a été aussi "massive" et "rapide" que le promettaient les dirigeants occidentaux.

Du système financier aux oligarques jusqu'au président Vladimir Poutine, en passant par un véritable blocus aérien européen et l'exclusion des grandes compétitions sportives, un déluge de sanctions sans précédent s'est abattu sur cette grande puissance.

"A l'avenir, la Russie sera un paria et il est difficile d'imaginer comment elle pourra rétablir un semblant de normalité dans ses interactions internationales", prévient Sarah Kreps, professeure à la Cornell University.

L'Otan sort de sa «mort cérébrale»

Le président français Emmanuel Macron avait décrété fin 2019 la "mort cérébrale" de l'Alliance atlantique, minée par les mésententes et malmenée par Donald Trump.

Arrivé à la Maison Blanche, Joe Biden a réconforté l'Otan, tout en tentant de la réorienter pour participer à son bras de fer avec la Chine -- provoquant de nouveaux tiraillements chez les Etats qui jugeaient que ce n'était pas là sa raison d'être.

Née au début de la Guerre froide pour placer l'Europe sous le parapluie nucléaire des Américains face à l'Union soviétique, cette alliance transatlantique retrouve aujourd'hui cette raison d'être -- et son meilleur ennemi -- en se dressant à nouveau face à Moscou.

Pour Ali Wyne, "l'invasion russe a renforcé l'Otan et resserré l'alignement transatlantique", même si rien n'assure que cette "cohésion" retrouvée débouchera sur une "approche de long terme partagée" pour contrer la Russie.

Accélération de l'Europe de la défense

Jean Monnet l'avait écrit dans ses mémoires: "L'Europe se fera dans les crises et elle sera la somme des solutions apportées à ces crises".

L'adage de ce père fondateur de l'Europe est une nouvelle fois confirmé.

Dans un coup d'accélérateur à cette Europe de la défense voulue par Paris mais longtemps dans les limbes, ses vingt-sept Etats membres ont décidé de consacrer, en commun, un demi-milliard d'euros à des achats d'armements pour l'Ukraine. La décision a surpris, tant elle contraste avec les atermoiements traditionnels.

Le déclic le plus spectaculaire s'est joué à Berlin: rompant avec sa doctrine, l'Allemagne a décidé de livrer des armes létales à Kiev -- un tournant suivi par la Suède et la Finlande.

Le chancelier allemand Olaf Scholz a accompagné cette rupture par une autre annonce fracassante, à savoir une augmentation très importante des dépenses militaires pour moderniser son armée, mauvaise élève de l'Otan par son budget et cible récurrente, à ce titre, des critiques américaines.

Des neutres qui choisissent leur camp

"La neutralité, ce n'est pas l'indifférence."

Le président de la Confédération helvétique Ignazio Cassis a eu cette formule pour justifier un autre basculement d'ampleur: la Suisse, place bancaire internationale mais aussi pays neutre qui accueillait il y a quelques jours encore les face-à-face tendus entre diplomates américains et russes, a choisi d'endosser "l'intégralité" des sanctions économiques drastiques de l'UE contre Moscou.

Cette entorse au statut de non-aligné n'est pas la seule.

La Finlande et la Suède n'ont jamais été aussi proches de franchir le pas d'une demande d'adhésion à l'Otan.

"Des pays comme le Japon, la Corée du Sud, l'Australie et Singapour ont fait front uni contre l'invasion", note aussi Sarah Kreps.

D'autres, comme l'Inde ou les Emirats arabes unis, malgré les pressions diplomatiques américaines, se sont toutefois abstenus de se joindre au choeur des condamnations frontales.

L'embarras chinois

La Russie garde aussi des alliés, comme le Venezuela de Nicolas Maduro.

Ainsi que la Chine, dont le président Xi Jinping avait offert son soutien à Vladimir Poutine peu avant l'offensive russe.

La position de Pékin est maintenant scrutée à la loupe, notamment pour savoir à quel point la superpuissance asiatique pourra compenser les effets des sanctions occidentales.

Or, sans condamner l'invasion, la Chine se montre prudente, choisissant l'abstention plutôt que le veto lorsque le Conseil de sécurité de l'ONU "déplore" l'agression russe, appelant à des négociations, et exprimant auprès de Kiev son "profond regret" face à cette guerre.

Ali Wyne estime que les autorités chinoises sont "dans l'embarras". "Plus le conflit s'installera dans la durée et sera sanglant, plus il sera difficile pour la Chine de trouver l'équilibre entre son soutien aux exigences russes" et "sa volonté d'éviter de s'attirer encore plus l'opprobre transatlantique", dit-il.

L'arme atomique un peu moins taboue

Le président Poutine a ordonné dimanche, devant les caméras, la mise en alerte de la force de dissuasion de l'armée russe, ce qui comprend son immense arsenal nucléaire.

"Les dirigeants russes ont fait de manière pas si voilée des références répétées à leur arsenal nucléaire dans l'espoir de dissuader l'Occident de renforcer les défenses ukrainiennes", explique Sarah Kreps. "Le problème", c'est que "cela érode le tabou nucléaire en vigueur depuis des décennies".


Israël : Netanyahu revient sur son choix pour la direction du Shin Bet

Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien (Photo AFP)
Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien (Photo AFP)
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  • La nomination de l'amiral Sharvit a été critiquée aux États-Unis par le sénateur républicain Lindsey Graham, proche du président américain Donald Trump. 
  • M. Netanyahu avait annoncé la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet lundi, malgré le gel par la Cour suprême du limogeage du directeur en exercice de l'agence, Ronen Bar.

JERUSALEM : Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annoncé mardi être revenu sur son choix pour le nouveau directeur de l'Agence de la sécurité intérieure (Shin Bet) après que son candidat a été critiqué à Washington par un influent sénateur.

« Lundi, M. Netanyahu a de nouveau rencontré le vice-amiral [Eli] Sharvit à propos de sa nomination à la tête du Shin Bet », indique un communiqué du Bureau du Premier ministre.

Il l'a « remercié [...] d'avoir répondu à l'appel du devoir, mais l'a informé qu'après plus ample considération, il avait l'intention d'examiner d'autres candidatures », a indiqué un communiqué du bureau de M. Netanyahu.

Ce revirement soudain survient après que la nomination de l'amiral Sharvit a été critiquée aux États-Unis par le sénateur républicain Lindsey Graham, proche du président américain Donald Trump. 

« S'il est vrai que l'Amérique n'a pas de meilleur ami qu'Israël, la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet est plus que problématique », a écrit M. Graham sur X.

« Mon conseil à mes amis israéliens est de changer de cap et d'examiner plus minutieusement le passé de leur candidat », a-t-il ajouté, notant que des « déclarations » de l'amiral Sharvit « sur le président Trump et sa politique créeraient des tensions inutiles à un moment critique ».

M. Netanyahu avait annoncé la nomination d'Eli Sharvit comme nouveau chef du Shin Bet lundi, malgré le gel par la Cour suprême du limogeage du directeur en exercice de l'agence, Ronen Bar.

La décision de démettre M. Bar de ses fonctions, en qui M. Netanyahu dit ne plus avoir confiance, est fortement critiquée en Israël où les manifestations se multiplient contre le gouvernement et contre ce qui est perçu par ses opposants comme une dérive dictatoriale du Premier ministre.


Ukraine : Poutine « reste ouvert à tout contact » avec Trump, après ses critiques selon le Kremlin

Zelensky, Trump et Poutine (Photo AFP)
Zelensky, Trump et Poutine (Photo AFP)
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  • « Le président reste ouvert à tout contact avec le président Trump », a indiqué le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.
  • Ce changement de ton a tranché avec la dynamique de rapprochement impulsée par Donald Trump et Vladimir Poutine depuis le retour du premier à la Maison Blanche en janvier.

MOSCOU : Vladimir Poutine « reste ouvert à tout contact » avec son homologue américain Donald Trump, a affirmé lundi le Kremlin, après les critiques du locataire de la Maison Blanche à l'encontre du président russe malgré leur rapprochement entamé depuis plusieurs semaines.

« Le président reste ouvert à tout contact avec le président Trump », a indiqué le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, lors de son briefing quotidien, précisant qu'« aucun » nouvel appel entre les deux dirigeants n'était « prévu pour l'instant ».

Donald Trump a dit à la chaîne américaine NBC être « très énervé, furieux » envers son homologue russe, après que ce dernier eut évoqué l'idée d'une « administration transitoire » en Ukraine, sans son président actuel, Volodymyr Zelensky.

Ce changement de ton a tranché avec la dynamique de rapprochement impulsée par Donald Trump et Vladimir Poutine depuis le retour du premier à la Maison Blanche en janvier.

Ces dernières semaines, Moscou et Washington ont convenu d'une remise à plat de leurs relations bilatérales, très fortement dégradées par des années de tensions, qui ont culminé depuis 2022 avec le déclenchement de l'assaut russe contre l'Ukraine, soutenue par les États-Unis.

Donald Trump, qui souhaite mettre fin au conflit le plus rapidement possible, a également menacé la Russie de nouvelles taxes sur le pétrole russe si aucun accord n'était trouvé.

Or, la manne financière issue de la vente de son or noir est vitale pour Moscou, qui doit financer son offensive en Ukraine, particulièrement coûteuse.

Le président russe Vladimir Poutine a rejeté plus tôt ce mois-ci la proposition de cessez-le-feu inconditionnel de Donald Trump en Ukraine, que Kiev avait pourtant acceptée sous pression américaine.

Lundi, Dmitri Peskov a martelé que la Russie continuait à travailler « tout d'abord sur l'établissement de relations bilatérales et nous travaillons également sur la mise en œuvre de certaines idées liées au règlement ukrainien ».

« Le travail est en cours. Il n'y a pas encore de détails précis. Il s'agit d'un processus qui prend du temps, probablement en raison de la complexité du sujet », a-t-il poursuivi.


Lutte contre l'immigration clandestine : plus de 40 pays réunis à Londres

Des sauveteurs britanniques aident une vingtaine de migrants sur un bateau semi-rigide essayant de traverser la Manche depuis la France (Photo, AFP).
Des sauveteurs britanniques aident une vingtaine de migrants sur un bateau semi-rigide essayant de traverser la Manche depuis la France (Photo, AFP).
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  • Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, accueille ce lundi à Londres les représentants d'une quarantaine de pays pour un sommet de deux jours dédié à la lutte contre l'immigration illégale.
  • Les trois premiers mois de l'année ont toutefois été marqués par un nouveau record d'arrivées, avec un total de 5 840 personnes ayant traversé la Manche à bord de ces embarcations de fortune.

LONDRES : Le Premier ministre britannique, Keir Starmer, accueille ce lundi à Londres les représentants d'une quarantaine de pays pour un sommet de deux jours dédié à la lutte contre l'immigration illégale, un dossier prioritaire pour Londres.

Le dirigeant travailliste, qui a pris ses fonctions en juillet dernier, a promis, comme ses prédécesseurs conservateurs, d'endiguer le phénomène des « small boats » (petits bateaux) en luttant contre les réseaux de passeurs.

Les trois premiers mois de l'année ont toutefois été marqués par un nouveau record d'arrivées, avec un total de 5 840 personnes ayant traversé la Manche à bord de ces embarcations de fortune.

Keir Starmer donnera le coup d'envoi de ce « premier grand sommet international organisé au Royaume-Uni pour faire face à l'urgence de l'immigration clandestine », qui se tiendra sous la houlette de la ministre de l'Intérieur Yvette Cooper.

Le ministre français Bruno Retailleau et son homologue allemande Nancy Faeser sont attendus, de même que des représentants du reste de l'Europe, d'Asie, du Moyen-Orient, d'Afrique et d'Amérique du Nord, y compris des États-Unis.

Les discussions porteront sur la collaboration entre les États pour démanteler les réseaux de passeurs de migrants, notamment vers le Royaume-Uni et les pays de l'Union européenne.

« Je ne crois tout simplement pas qu'il soit impossible de s'attaquer à la criminalité organisée liée à l'immigration », a déclaré le dirigeant travailliste dans un communiqué diffusé dimanche par le ministère de l'Intérieur.

- « Consensus mondial » -

« Nous devons combiner nos ressources, partager nos renseignements et nos tactiques, et nous attaquer au problème en amont », doit-il ajouter.

Ce sommet s'inscrit dans le prolongement des discussions que Mme Cooper avait eues en décembre avec ses homologues belge, allemand, français et néerlandais.

Les cinq pays avaient alors signé un plan d'action commun destiné à renforcer la coopération pour lutter contre ces réseaux de passeurs de migrants.

Le sommet de cette semaine réunira des représentants de pays de départ de migrants, comme le Vietnam ou l'Irak, ainsi que de pays de transit, comme ceux des Balkans.

Il réunira également le directeur de la Border Force, l'agence responsable des opérations de contrôle de la frontière au Royaume-Uni, ainsi que des représentants d'Interpol, d'Europol et d'Afripol.

Selon le ministère britannique de l'Intérieur, les ministres discuteront de l'équipement, de l'infrastructure et des faux papiers que les bandes criminelles utilisent pour faire entrer des personnes illégalement.

Ils examineront également le fonctionnement des filières et chercheront à « établir un consensus mondial sur la lutte » contre le recrutement de migrants en ligne.

Les Britanniques souhaitent également voir avec la Chine comment elle peut cesser d'exporter des moteurs et d'autres pièces détachées de petits bateaux utilisés pour les traversées de la Manche.

Keir Starmer est sous pression, face à la montée du parti anti-immigration Reform UK de Nigel Farage, qui a obtenu environ quatre millions de voix lors des élections générales de juillet, un résultat sans précédent pour un parti d'extrême droite.

Le Premier ministre a comparé les passeurs d'immigrés clandestins à des « terroristes ». En réponse, son gouvernement a introduit un projet de loi conférant aux forces de l'ordre des pouvoirs comparables à ceux dont elles disposent en matière de lutte antiterroriste, afin de combattre ces réseaux.

En février, le gouvernement a durci les règles d'acquisition de la nationalité pour la rendre pratiquement impossible à une personne arrivée illégalement au Royaume-Uni.

Il a aussi annoncé des règles plus strictes en matière de droit du travail.

« Fermer les yeux sur le travail illégal fait le jeu des passeurs qui tentent de vendre des places sur des bateaux peu solides et surchargés en promettant un travail et une vie au Royaume-Uni », a déclaré dimanche Mme Cooper, citée dans un communiqué de son ministère.

Au total, plus de 157 770 migrants sont arrivés au Royaume-Uni en traversant la Manche à bord de petites embarcations depuis que le gouvernement a commencé à collecter des données en 2018.