PARIS : L'écrivain français Michel Bussi, géographe devenu romancier, a démarré comme écrivain de terroir. Après 15 ans de succès, il s'attaque à la science-fiction parce que, "dans la littérature populaire, c'est intéressant de casser les genres".
Ce Normand refuse les étiquettes, qui lui resteraient de ses précédents livres: auteur régionaliste, de polar, d'intrigues sentimentales...
Dans "Nouvelle Babel" (éditions Presses de la Cité), qui sort jeudi, lui qui aime d'habitude balader ses personnages entre passé et présent se transporte donc dans un futur lointain.
En 2097, une révolution a modifié toute la condition humaine: la télétransportation pour tous. La planète n'est plus qu'un seul État, sans frontières. Chacun vit où il veut. L'espagnol est la langue de l'humanité.
"Mon statut d'écrivain qui vend beaucoup m'offre une immense liberté. Je ne sais pas si +Nouvelle Babel+ aurait été accepté par un éditeur à une autre époque. Non seulement il l'est, mais il sera défendu. Peu de bouquins de science-fiction bénéficieront d'un lancement comme celui-là. Et moi, c'est le roman auquel je crois", commente l'auteur.
«Le faux Houellebecq»
Sur ce terrain où on ne l'attendait pas, Michel Bussi noue une intrigue politique. Son roman d'anticipation démarre par un attentat inexplicable? On pense soudain à "Anéantir" de Michel Houellebecq. Mais la comparaison s'arrête là.
"J'ai écrit avant le confinement et, depuis, on a vu, comme dans le roman, les gens qui télétravaillaient déserter les villes", remarque le géographe. Pour autant, "je ne suis pas visionnaire, je ne vais pas faire le faux Houellebecq".
Michel Bussi, contrairement à l'autre Michel écrivain, accorde aux journalistes toutes les interviews qu'ils demandent. Son œuvre romanesque est quasi ignorée des universitaires, et rarement commentée par les critiques littéraires. Et il n'a pas la prétention de nourrir le débat politique sur l'avenir de la civilisation occidentale.
Même quand on vend comme lui 721 000 exemplaires par an (quatrième auteur le plus vendu en 2021), "on n'est pas reconnu dans la rue, on a une vie complètement anonyme", explique-t-il à l'AFP. "Dans mon quartier, je peux aller chercher mon pain tranquillement".
Pour être laissé en paix, il ne livre que peu d'éléments sur sa vie. Par exemple sur son parcours avant ses 40 ans, l'âge auquel il a publié son premier roman, alors qu'il était chercheur au CNRS, expert en géographie électorale.
«Pas fan de l'autobiographie»
Les différents portraits de lui dans la presse permettent de savoir qu'il est issu de "la classe moyenne", fils d'une institutrice "qui l'élevait seule" après "la mort brutale" de son père ouvrier en aciérie, quand il avait 10 ans.
Si la question de la filiation hante nombre de ses récits, il ne veut pas s'étendre sur le sujet. À ses fans, il en apprendra à peine plus dans "La Fabrique du suspense", premier titre d'une collection des éditions Le Robert où les écrivains racontent leur méthode.
Ce natif de la région de Rouen s'y décrit comme marqué par cette "campagne ouvrière" où "on passe en quelques pas d'une tour de château à une cheminée d'usine".
Dans ce livre à paraître le 3 mars, où il détaille sa technique de l'intrigue à rebondissements ("l'art du twist"), il dit avoir "écrit avec un peu moins de plaisir la partie biographique, je suis resté à la surface des choses, parce que je ne suis pas fan de l'autobiographie".
"Je comprends bien que c'est ce que les gens ont envie de lire, mais ce n'est pas ce que j'ai envie d'écrire", poursuit-il. Tout juste saura-t-on que "j'étais dans un milieu où il n'y avait pas vraiment de modèles en littérature. On ne m'imposait pas de classiques. Comme lecteur, je me suis fait tout seul".