Au procès du 13-Novembre, la sincérité de Muhammad Usman en question

Muhammad Usman n'a pas réussi à rejoindre la France avec les autres membres des commandos. (AFP)
Muhammad Usman n'a pas réussi à rejoindre la France avec les autres membres des commandos. (AFP)
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Publié le Vendredi 28 janvier 2022

Au procès du 13-Novembre, la sincérité de Muhammad Usman en question

  • Lors de son interrogatoire mardi, Muhammad Usman s'était efforcé de minimiser son engagement au sein du groupe Etat islamique (EI)
  • S'il a reconnu avoir rejoint la Syrie en 2015 et s'être rendu à Falloujah en Irak, il a soutenu n'y avoir «rien fait»

PARIS : C'est l'accusé du procès des attentats du 13 novembre 2015 en France qui n'a rien fait, rien vu, rien su... Mais la sincérité du Pakistanais Muhammad Usman a été sérieusement remise en cause jeudi après la déposition d'un témoin, pourtant cité par la défense.

Mohamed Bakkali, le logisticien présumé des attentats du 13-Novembre, continuant de se murer dans le silence, la cour d'assises spéciale a entendu à sa place Raphaële C., l'ancienne directrice du quartier d’évaluation de la radicalisation (QER) de Fleury-Mérogis, où a été détenu Muhammad Usman.

Les QER, créés à la suite des attentats de 2015, ont pour mission d'évaluer le degré de radicalisation des détenus condamnés pour des faits de terrorisme islamiste. Muhammad Usman y est passé de la mi-février à la mi-mars 2020.

À la barre, Raphaële C. décrit un homme "correct" et "respectueux", "parfois influençable".

Muhammad Usman possède de "faibles connaissances religieuses", explique-t-elle. Il ne semble "pas ancré dans une idéologie violente".

Lors de son interrogatoire mardi, Muhammad Usman s'était efforcé de minimiser son engagement au sein du groupe Etat islamique (EI). S'il a reconnu avoir rejoint la Syrie en 2015 et s'être rendu à Falloujah en Irak, il a soutenu n'y avoir "rien fait".

Revenu en Syrie à Raqqa, la "capitale" de l'EI, il sera recruté, avec l'Algérien Adel Haddadi et les deux kamikazes irakiens du Stade de France, pour commettre un attentat-suicide en France. Interrogé à ce sujet, Muhammad Usman était resté vague en assurant qu'il n'avait jamais combattu et ne savait pas pourquoi il avait été recruté.

Muhammad Usman n'a pas réussi à rejoindre la France avec les autres membres des commandos.

Interpellé en Grèce avec Adel Haddadi en octobre 2015, il y sera détenu un mois avant de reprendre la route et d'être à nouveau arrêté en Autriche en décembre, un mois après les attentats.

Pour Raphaële C., l'accusé a une vision du monde assez "immature, enfantine". C'est un "naïf" qui "aurait pu faire une proie facile pour l'Etat islamique".

M. Usman a fait part de son "désengagement total" par rapport à l'idéologie de l'EI, poursuit-elle. "M. Usman portait beaucoup de paroles de regrets".

Juste «une hypothèse»

Dans quelle langue parliez-vous avec M. Usman, veut savoir le président. En français, répond le témoin. "En raison de la crise sanitaire, on n'avait pas d'interprète en ourdou", précise-t-elle.

Or, si M. Usman parle un peu le français, qu'il a appris en détention, son interrogatoire a démontré qu'il lui était difficile de se passer d'un interprète pour s'exprimer.

L'avocate générale Camille Hennetier aimerait savoir comment est déterminée la sincérité d'un détenu au QER.

"Par les faits observés, les appels téléphoniques, les courriers, les échanges avec les familles", détaille Mme C. 

"Mais, dans le cas de M. Usman, il n'y avait pas tout ça ! Pas de parloirs, pas de courriers... Comment huit entretiens en langue française avec lui vous permettent d'attester de sa sincérité ?", insiste l'avocate générale. "On était dans l'hypothèse", admet le témoin.

Les avocats des parties civiles s'engouffrent dans la brèche. Comment peut-on dire que l'accusé à une faible connaissance religieuse alors qu'il a étudié six ans dans une madrasa (école coranique), s'interroge Me Sylvie Topaloff.

"C'est une information transmise par un imam qui l'a vu en entretien", répond le témoin, qui confirme n'avoir pas eu accès au dossier de l'accusé.

"Les madrasas sont des écoles d'endoctrinement qui se félicitent d'avoir formé les cadres talibans", insiste l'avocate. "Vous l'avez cru ? Vous le croyez quand vous dites qu'il est dans une posture de repentir ?", poursuit l'avocate. "Non, c'est une hypothèse", répète une nouvelle fois le témoin.

Un autre avocat des parties civiles, Antoine Casubolo-Ferro, s'interroge sur l'aspect "influençable" de l'accusé. "Qu'est-ce que ça peut nous dire de sa dangerosité une fois en liberté ?", demande-t-il. Mme C. reconnaît que son rapport ne concerne que la période de détention et pas la suite.

"Quel crédit peut-on apporter au rapport du QER sur M. Usman ?", poursuit Me Casubolo-Ferro. "On n'est pas là pour chercher la vérité", concède le témoin.


Plusieurs centaines de personnes ont manifesté lors d'un rassemblement antifasciste à Paris

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  • Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées samedi après-midi à Paris contre le fascisme, après l'agression d'un homme à l'arme blanche devant une association culturelle turque la semaine passée.
  • « Nous sommes là car nous avons été attaqués. Nous sommes là pour montrer que Paris n'est pas à eux. Nous continuerons la lutte antifasciste et révolutionnaire », a lancé au micro un leader de Young Struggle.

PARIS : Plusieurs centaines de personnes étaient rassemblées samedi après-midi à Paris contre le fascisme, après l'agression d'un homme à l'arme blanche devant une association culturelle turque la semaine passée, pour laquelle six membres de l'ultradroite ont été inculpés, a constaté un journaliste de l'AFP.

« Paris, Paris, Antifa ! », « Pas de quartier pour les fachos, pas de fachos dans nos quartiers », « Nous sommes tous antifascistes », ont scandé les manifestants réunis place de la République. Un drapeau rouge « No pasaran » a été accroché sur un flanc de la statue, au centre de la place emblématique.

Ce rassemblement se tient six jours après l'agression à l'arme blanche d'un homme membre du collectif Young Struggle, qui se présente comme une « organisation de jeunesse socialiste » et adhérent au syndicat CGT. Il avait dû être hospitalisé quelques heures.

Dimanche dernier, « une vingtaine de personnes » appartenant à la mouvance d'ultradroite, « cagoulées et munies de tessons de bouteille » selon la préfecture de police, avaient pénétré dans la cour d'un immeuble où se situe une association culturelle de travailleurs immigrés de Turquie et agressé une personne avant de prendre la fuite.

Six jeunes hommes ont été inculpés pour violences volontaires aggravées. L'un d'eux, qui avait du sang sur ses vêtements et qui a reconnu sa participation, a été incarcéré.

« Nous sommes là car nous avons été attaqués. Nous sommes là pour montrer que Paris n'est pas à eux. Nous continuerons la lutte antifasciste et révolutionnaire », a lancé au micro un leader de Young Struggle, avant de faire siffler le nom de Bruno Retailleau, ministre français de l'Intérieur et connu pour ses positions très conservatrices.

« Partout, l'extrême droite se répand, encouragée par les saluts nazis de Elon Musk et Steve Bannon », a déclaré à sa suite Mathilde Panot, cheffe des députés du parti de gauche radicale LFI (La France Insoumise).

Steve Bannon, ancien conseiller de Donald Trump, a récemment été sous le feu des projecteurs pour un geste qualifié de salut nazi lors de la convention CPAC, la grand-messe des conservateurs américains près de Washington.

Il a brièvement tendu sa main en l'air après avoir déclaré devant les supporters de Donald Trump : « Nous n'allons pas reculer, nous n'allons pas capituler, nous n'allons pas abandonner. Luttez, luttez, luttez ! »

En janvier, le milliardaire Elon Musk, conseiller de Donald Trump, avait lui-même été épinglé pour un geste ambigu analogue.


Macron dira à Trump qu'entre alliés on ne peut pas "faire souffrir l'autre" avec des droits de douane

Le président français Emmanuel Macron (C) et la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard (D) écoutent des artisans du cuir lors de la journée d'ouverture et de l'inauguration par le président français du 61e Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 22 février 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron (C) et la ministre française de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire Annie Genevard (D) écoutent des artisans du cuir lors de la journée d'ouverture et de l'inauguration par le président français du 61e Salon international de l'agriculture au parc des expositions de la Porte de Versailles à Paris, le 22 février 2025. (AFP)
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  • "Entre alliés, on ne peut pas faire souffrir l'autre avec des tarifs" douaniers, a déclaré Emmanuel Macron samedi au premier jour de l'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris
  • Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a annoncé la mise en place de droits de douane réciproques

PARIS: "Entre alliés, on ne peut pas faire souffrir l'autre avec des tarifs" douaniers, a déclaré Emmanuel Macron samedi au premier jour de l'ouverture du Salon de l'agriculture à Paris alors que Donald Trump menace d'imposer des droits de douane sur de multiples produits européens.

"Je vais (lui) en parler parce qu'on a besoin d'apaiser tout ça", a relevé le président français qui doit rencontrer son homologue américain lundi à Washington.

"La filière agricole et agroalimentaire (française), c'est une grande filière d'exportation, donc il faut la défendre pour la rendre encore plus compétitive", a-t-il ajouté.

Depuis son retour à la Maison-Blanche, Donald Trump a annoncé la mise en place de droits de douane réciproques, c'est-à-dire que les États-Unis appliqueront le même niveau de droits de douane sur les produits en provenance d'un pays que le niveau appliqué dans ce pays aux produits américains.

Il a également annoncé le retour de droits de douane sur l'acier et l'aluminium. Et, s'il a déjà visé le Canada, le Mexique et la Chine, il a régulièrement assuré que les pays européens étaient également menacés.

En France, les viticulteurs sont particulièrement inquiets d'un retour des droits de douane américains sur le cognac et le vin, qu'ils exportent en masse vers les États-Unis, d'autant que le cognac souffre déjà d'un différend commercial entre l'UE et la Chine, son premier marché en valeur.

"Je suis déterminé sur tous les sujets pour avoir un échange" avec Donald Trump, a encore dit Emmanuel Macron. "On partagera nos accords, nos désaccords et j'espère surtout qu'on trouvera des solutions sur la question de l'Ukraine".

Le président américain est reparti à la charge vendredi contre son homologue ukrainien. Tout en estimant que Volodymyr Zelensky et Vladimir Poutine allaient "devoir se parler", pour "mettre fin au massacre de millions de personnes", il a jugé que la présence de l'Ukrainien n'était "pas importante" dans des négociations avec la Russie.

Il a ciblé par ailleurs Emmanuel Macron, et Keir Starmer, qui n'ont selon lui "rien fait" pour mettre un terme à la guerre. Le Premier ministre britannique est attendu jeudi à Washington.


Au Salon de l'agriculture, Macron attendu au tournant

Une femme marche devant une affiche sur laquelle on peut lire "Fiers et unis avec nos agriculteurs" à la veille de l'ouverture du 61e Salon international de l'agriculture (SIA), au parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris, le 21 février 2025. (AFP)
Une femme marche devant une affiche sur laquelle on peut lire "Fiers et unis avec nos agriculteurs" à la veille de l'ouverture du 61e Salon international de l'agriculture (SIA), au parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris, le 21 février 2025. (AFP)
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  • Le 61e Salon de l'agriculture est inauguré samedi à Paris par Emmanuel Macron, attendu au tournant par des agriculteurs toujours remontés et par des organisateurs aux aguets après sa visite chaotique de l'an dernier
  • Plus de 600.000 visiteurs sont attendus sur les neuf jours du Salon

PARIS: Visites politiques encadrées et les vaches seront bien gardées? Le 61e Salon de l'agriculture est inauguré samedi à Paris par Emmanuel Macron, attendu au tournant par des agriculteurs toujours remontés et par des organisateurs aux aguets après sa visite chaotique de l'an dernier.

Pas d'incitation à chahuter cette année, mais des appels au calme ambivalents de la part des principaux syndicats agricoles, qui doivent être reçus l'un après l'autre en début de matinée avant la traditionnelle coupe de ruban et la déambulation présidentielle.

Plus de 600.000 visiteurs sont attendus sur les neuf jours du Salon, qui ouvre ses portes au public à 09H00. En 2024, des milliers de personnes avaient été bloquées à l'extérieur pendant plusieurs heures en raison de heurts entre manifestants et CRS en marge de la venue d'Emmanuel Macron, entre huées, insultes, bousculades et violences.

Sécurité renforcée, commissariat mobile, chartes pour encadrer les visites politiques... Les organisateurs sont sur les dents pour ne pas voir se répéter le scénario catastrophe de l'an dernier.

L'entourage d'Emmanuel Macron lui a conseillé d'éviter une visite marathon, à l'image des 13 heures de déambulation de 2024 parmi les plus de 1.400 exposants et 4.000 animaux accueillis chaque année.

"Le président sera très probablement pris à parti", a averti Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, syndicat historique, qui l'attend sur les dossiers internationaux.

Cet automne, c'est l'opposition à l'accord de libre-échange UE-Mercosur qui a servi de cri de ralliement pour relancer les manifestations d'agriculteurs, qui dénoncent aussi les taxes douanières chinoises et craignent des mesures similaires de la nouvelle administration américaine.

"Je souhaite qu'il en parle à Donald Trump (...): arrêter les importations massives qui ne respectent pas nos normes, lever les contraintes qui nous empêchent d'être compétitifs", renchérit Pierrick Horel des Jeunes Agriculteurs, alliés de la FNSEA.

Pour Patrick Legras, porte-parole de la Coordination rurale, forte de sa percée aux élections professionnelles de janvier, "ça va être tendu". Selon lui, Emmanuel Macron va aussi avoir du mal à "expliquer qu'on négocie encore un accord pour importer du sucre ou du poulet d'Ukraine" — l'accord d'association UE-Ukraine, en cours de révision — évoquant des produits érigés en symboles d'une "concurrence déloyale".

Coutumière des actions coup de poing, la Coordination rurale a toutefois passé à ses sympathisants un message d'apaisement, dans l'espoir qu'Emmanuel Macron "aura vraiment quelque chose" à leur dire, selon sa président Véronique Le Floc'h.

- "Où sont les promesses?" -

Plus d'un an après la mobilisation qui avait bloqué routes et autoroutes, l'heure est au bilan des mesures obtenues par les agriculteurs qui réclament un revenu "décent", plus de considération et moins d'injonctions.

Pour le gouvernement, ses engagements ont été "honorés": "500 millions d'euros d'allégement de charges fiscales prévus dans le budget", "soutien à la trésorerie pour les agriculteurs en difficulté", "indemnisations à hauteur de 75 millions d'euros aux propriétaires du cheptel touché par les épizooties" ou encore "la mise en place du contrôle administratif unique en octobre dernier".

Surtout, deux jours avant le Salon, le Parlement a adopté la loi d'orientation agricole, attendue depuis trois ans par la profession. Ce texte érige l'agriculture au rang "d'intérêt général majeur", facilite les installations, la construction de bâtiments d'élevage et le stockage de l'eau, tout en dépénalisant certaines infractions environnementales.

"Un an après, où sont passés les prix plancher et ses promesses? Au Salon 2024, nous demandions des prix minimum garantis pour les producteurs: non seulement on n'a pas du tout avancé, mais la situation est pire aujourd'hui", s'indigne Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération paysanne, troisième syndicat.

Elle estime que les demandes de l'alliance FNSEA-JA et de la CR ont été privilégiées, au détriment d'une "réelle transition agroécologique". Un argument repris par la gauche à propos de la loi d'orientation agricole.

Les personnalités politiques de tous bords devraient se succéder auprès de la vache limousine Oupette, égérie de l'édition 2025. Le Premier ministre François Bayrou est attendu lundi.

Malgré la volonté des organisateurs de limiter les visites à une journée pour chaque parti, Jordan Bardella (RN) a prévu de s'y rendre dimanche et lundi avec une délégation, comme en 2024, où les demandes de "selfies" avec le chef du parti d'extrême droite avaient contrasté avec la visite présidentielle.

En novembre, à la veille de nouvelles mobilisations paysannes, il s'était affiché dans le Lot-et-Garonne avec des cadres de la Coordination rurale, qui faisait campagne de son côté pour "dégager la FNSEA" des chambres d'agriculture.