Le parrain du régime Assad emporte les secrets de Rafic Hariri dans sa tombe

Abdel Halim Khaddam est mort à Paris. (JOHN THYS/AFP)
Abdel Halim Khaddam est mort à Paris. (JOHN THYS/AFP)
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Publié le Samedi 11 juillet 2020

Le parrain du régime Assad emporte les secrets de Rafic Hariri dans sa tombe

  • Abdel-Halim Khaddam, mort à l’âge de 88 ans, avait prévenu le Premier ministre libanais avant son assassinat en 2005.
  • Pendant trois décennies, Abdel Halim Khaddam fut la personnalité la plus proche de la famille el-Assad en Syrie

PARIS: La mise en garde de Abdel Halim Khaddam au Premier ministre libanais Rafic Hariri était sans équivoque : « Méfie-toi de ces gens-là ! Ils sont fous et peuvent te faire du mal. »

L’homme qui a passé trente ans dans les hautes sphères du gouvernement syrien, sous le règne de Hafez el-Assad puis de son fils, Bachar, savait de quoi il parlait ; en février 2005, Hariri fut assassiné à Beyrouth par des terroristes liés au régime syrien.

Khaddam, ancien Premier ministre syrien qui a succombé à une crise cardiaque mardi matin à l’âge de 88 ans, avait raconté une nouvelle fois cette histoire à Saad Hariri, le fils de la victime, quand il lui avait rendu visite à son domicile à Paris, quelques mois après l’assassinat.

En mai 2015, Abdel Halim Khaddam a ouvertement accusé le Hezbollah et des membres du régime syrien d’être derrière cet assassinat. Khaddam a de même été interrogé à Paris par des représentants du tribunal chargé de juger les responsables de l’assassinat de Hariri.

Pendant trois décennies, Abdel Halim Khaddam fut la personnalité la plus proche de la famille el-Assad en Syrie. Le Syrien sunnite baasiste était issu d’une famille de classe moyenne de la ville baleinière de Banias, au bord de la Méditerranée.

Autrefois considéré comme le successeur de Hafez, Khaddam a aidé Bachar à resserrer sa prise après son arrivée au pouvoir en juin 2000. Dans les jours qui ont suivi la mort du père, il a promu Bachar, par des décrets, au grade militaire de général et commandant en chef des forces armées syriennes - une initiative-clé dans le processus incertain de succession.

Avocat de formation, Khaddam a occupé le poste de ministre des Affaires étrangères pendant 14 ans avant de devenir vice-président en 1984. Il a également participé à forger la politique de la Syrie au Liban. L’ancien ambassadeur de France en Syrie, Jean Claude Cousseran, a confié à Arab News que Khaddam était le politicien radical le plus proche de Hafez el-Assad et l’homme qui a géré le dossier libanais d’une main de fer. De nombreux Libanais détestaient Khaddam parce qu’il représentait l’occupation syrienne avec toutes les conséquences tragiques qu’elle a entrainées. 

Yves Aubin de la Messuzière, un autre ancien ambassadeur de France qui dirigeait le bureau du Moyen-Orient au ministère français des Affaires étrangères, se souvient quand Khaddam a accompagné Bachar el-Assad lors d’une visite d’Etat à Paris en 2000, suite à une invitation qui lui avait été adressée par le Président Jacques Chirac après le décès de son père.

De la Messuzière, arabiste, se rappelle avoir attendu avec Khaddam les deux présidents lors de leur rencontre en tête à tête. Dans une salle adjacente au palais de l’Elysée, Khaddam paraissait furieux et impatient : “Pourquoi est-ce si long? Que font-ils ?” demandait-il à haute voix.

En 2005, Khaddam a critiqué ouvertement l’assassinat de Hariri ainsi que la politique étrangère de la Syrie en général, et a démissionné du parti Baas. En décembre de la même année, il s’est établi à Paris, à l’élégante avenue Foch, sous prétexte de suivre un traitement médical. Sa maison était surveillée nuit et jour par la police française.

En 2011, il est devenu l’un des principaux opposants au régime de Bachar el-Assad et de la guerre que ce dernier menait contre son peuple. Depuis sa base à Paris, Khaddam a tenté de se tailler un rôle au sein de l’opposition syrienne, mais a eu des difficultés à gagner la confiance d’autres dissidents qui se méfiaient de son long passé au service du parti Baas, pendant plusieurs décennies.

En plein soulèvement populaire, Khaddam a déclaré que les Syriens seraient contraints de prendre les armes pour se défendre eux-mêmes, si la communauté internationale ne réagissait pas pour les protéger. Il a accusé Assad et sa famille d’inciter les affrontements sectaires en Syrie.

L’opinion publique française était hostile à la présence de Khaddam à Paris, critiquée par de nombreux politiciens français qui s’étaient opposés dans le passé à sa politique au Liban. Son opposition franche à Bachar el-Assad, toutefois, l’a en quelque sorte acquitté.

Khaddam sera enterré en France et les obsèques seront organisées par la municipalité de la ville de Paris. Son fils Jihad est bloqué en Turquie en raison de la pandémie de Covid-19. Son fils Jamal, lui, est en période de convalescence à Paris après une opération à cœur ouvert.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur ArabNews.com le 1 avril 2020.


Au Liban, la plupart des sites militaires du Hezbollah ont été cédés à l'armée dans le sud du pays

L'armée libanaise est entrée mercredi dans la ville de Hawsh Al-Sayyid Ali, à la frontière orientale du Liban avec la Syrie. (X/@mdbarakat)
L'armée libanaise est entrée mercredi dans la ville de Hawsh Al-Sayyid Ali, à la frontière orientale du Liban avec la Syrie. (X/@mdbarakat)
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  • « Sur les 265 positions militaires du Hezbollah identifiées au sud du fleuve Litani, le mouvement en a cédé environ 190 à l'armée », a indiqué la source, qui a requis l'anonymat.
  • Le président libanais, Joseph Aoun, dont l'élection a été permise par l'affaiblissement du Hezbollah, a affirmé lundi que la question devait être résolue « par le dialogue », car le « Hezbollah est une composante libanaise ».

BEYROUTH : Selon une source proche du mouvement pro-iranien, l'AFP a appris samedi que la plupart des sites militaires du Hezbollah dans le sud du Liban avaient été placés sous le contrôle de l'armée libanaise.

« Sur les 265 positions militaires du Hezbollah identifiées au sud du fleuve Litani, le mouvement en a cédé environ 190 à l'armée », a indiqué la source, qui a requis l'anonymat.

Dimanche, une émissaire américaine en visite à Beyrouth a exhorté les autorités libanaises à accélérer le désarmement du Hezbollah.

« Nous continuons d'exhorter le gouvernement à aller jusqu'au bout pour mettre fin aux hostilités, ce qui inclut le désarmement du Hezbollah et de toutes les milices », a déclaré Morgan Ortagus sur la chaîne locale LBCI. 

Le président libanais, Joseph Aoun, dont l'élection a été permise par l'affaiblissement du Hezbollah, a affirmé lundi que la question devait être résolue « par le dialogue », car le « Hezbollah est une composante libanaise ».

« Nous allons bientôt élaborer une stratégie de défense nationale dans ce cadre », a-t-il ajouté.

Le Hezbollah est le seul groupe libanais à avoir conservé ses armes après la fin de la guerre civile en 1990, au nom de la « résistance » contre Israël.

Depuis le début de la guerre à Gaza, le Hezbollah a ouvert un front contre Israël en tirant des roquettes à partir du sud du Liban pour soutenir son allié palestinien.

Ces hostilités ont dégénéré en guerre ouverte en septembre 2006 avec des bombardements israéliens intenses au Liban, principalement contre les bastions du Hezbollah, dont la direction a été quasiment décimée. La guerre a fait plus de 4 000 morts.

Israël, qui a maintenu sa présence militaire au Liban dans cinq points « stratégiques » le long de la frontière, continue de mener régulièrement des frappes au Liban, disant viser des infrastructures et des membres du Hezbollah.


Gaza : une délégation du Hamas est attendue au Caire samedi pour discuter d'une trêve

Des Palestiniens prient pour l'Aïd Al-Adha près des ruines de la mosquée Al-Al Rahma détruite par les frappes aériennes israéliennes à Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 juin 2024. Le Hamas a déclaré qu'il était prêt à conclure un accord global pour la paix à Gaza. (Reuters)
Des Palestiniens prient pour l'Aïd Al-Adha près des ruines de la mosquée Al-Al Rahma détruite par les frappes aériennes israéliennes à Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 juin 2024. Le Hamas a déclaré qu'il était prêt à conclure un accord global pour la paix à Gaza. (Reuters)
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  • « Nous espérons que cette rencontre permettra d'avancer concrètement vers un accord mettant fin à la guerre a déclaré ce responsable sous couvert d'anonymat.
  • « Mais les contacts et les discussions avec les médiateurs sont en cours », a-t-il affirmé.

LE CAIRE : Une délégation du Hamas est attendue samedi au Caire pour des discussions avec les médiateurs égyptiens en vue d'une nouvelle trêve dans la bande de Gaza, a indiqué à l'AFP un responsable du mouvement islamiste palestinien.

« Nous espérons que cette rencontre permettra d'avancer concrètement vers un accord mettant fin à la guerre et à l'agression, et garantissant le retrait complet des forces d'occupation de la bande de Gaza », a déclaré ce responsable sous couvert d'anonymat, en référence à Israël.

Selon lui, le Hamas n'a reçu aucune nouvelle offre de trêve, malgré des informations de médias israéliens rapportant que l'Égypte et Israël avaient échangé des projets de documents portant sur un accord de cessez-le-feu et de libération d'otages.

« Mais les contacts et les discussions avec les médiateurs sont en cours », a-t-il affirmé.

La délégation est conduite par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du Hamas, a-t-il précisé.

Selon le Times of Israel, la proposition égyptienne prévoirait le retour en Israël de 16 otages, huit vivants et huit morts, en échange d'une trêve de 40 à 70 jours ainsi que de la libération d'un grand nombre de prisonniers palestiniens.


Reconnaissance de l'État palestinien : de nombreuses conditions à réunir pour que la France agisse

Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique » (Photo AFP)
Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique » (Photo AFP)
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  • - Le projet du président français : « Je défends le droit légitime des Palestiniens à un État et à la paix, comme celui des Israéliens à vivre en paix et en sécurité, l'un et l'autre reconnus par leurs voisins », a résumé Emmanuel Macron. 
  • Il a dévoilé le projet d'une telle reconnaissance par Paris dans une « dynamique collective », impliquant la reconnaissance de l'État d'Israël par les pays avoisinants.

PARIS : Toute reconnaissance de l'État palestinien par la France ne contribuera à mettre la solution des deux États avec Israël sur les rails que si elle réunit une myriade de conditions qui semblent pour le moment inatteignables.

Emmanuel Macron a répété vendredi dans un message posté sur X en français, anglais, arabe et hébreu que la seule solution au conflit israélo-palestinien était « politique ». Les obstacles sont de taille.

- Le projet du président français : « Je défends le droit légitime des Palestiniens à un État et à la paix, comme celui des Israéliens à vivre en paix et en sécurité, l'un et l'autre reconnus par leurs voisins », a résumé Emmanuel Macron. 

L'an passé, il avait déclaré que la reconnaissance d'un État palestinien n'était pas un tabou, à condition que ce geste symbolique soit « utile ».

Mercredi, il a dévoilé le projet d'une telle reconnaissance par Paris dans une « dynamique collective », impliquant la reconnaissance de l'État d'Israël par les pays avoisinants.

La conférence pour les deux États, prévue en juin à New York sous l'égide de la France et de l'Arabie saoudite, doit être « un tournant », a-t-il dit. 

Des frontières à définir 

« Les attributs juridico-politiques de l'État palestinien en question n'existent pas aujourd'hui. C'est une pure fiction diplomatique », souligne néanmoins David Khalfa, de la Fondation Jean-Jaurès à Paris.

« Pour qu'un État palestinien soit viable, il faut une continuité territoriale entre Gaza et la Cisjordanie », note Karim Bitar, enseignant à Sciences Po Paris. Or, « on ne voit pas aujourd'hui le gouvernement israélien accepter d'entamer un processus de décolonisation, de mettre un terme à l'occupation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est, et de demander aux 700 ou 800 000 colons israéliens de quitter ces territoires occupés », dit-il. 

Une autre question épineuse est celle du désarmement du Hamas, qui a perpétré les attentats sanglants du 7 octobre 2023 en Israël et provoqué les représailles meurtrières de l'armée israélienne à Gaza.

Israël a fait de l'éradication du groupe sa priorité. 

Démilitarisation du Hamas et exfiltration

Quoiqu'affaibli, le groupe « a réussi à recruter des milliers de jeunes miliciens » et dispose encore d'un arsenal lui permettant de « mener des actions de guérilla contre les soldats israéliens et de réprimer dans le sang les leaders de la contestation anti-Hamas à Gaza », observe-t-il.

S'agissant de l'exfiltration de certains cadres du Hamas, la question est complexe à explorer avec ceux qui parlent au Hamas, reconnaît-on à Paris. Comment les exfiltrer et vers quelle destination, en plus du Qatar et de la Turquie ? Des interrogations  qui restent sans réponse actuellement. 

Revitaliser l'Autorité Palestinienne

« Les Israéliens doivent être convaincus que le Hamas va être désarmé, qu'il est exclu de la gouvernance de Gaza et que l'Autorité palestinienne va réellement se réformer », a expliqué à l'AFP une source diplomatique française.

Cela passe par le renforcement de la légitimité de l'Autorité palestinienne, alors que la popularité du Hamas augmente au sein de la population. 

Normalisation avec Israël

Selon Hasni Abidi, enseignant au Global Studies Institute de l'Université de Genève, il faut un changement de personnel politique en son sein pour qu'une Autorité palestinienne revitalisée soit en mesure d'assurer une gouvernance crédible dans la bande de Gaza. Or, ses dirigeants ne manifestent aucun désir de passer la main, ce qui permet à Israël d'entretenir l'idée qu'ils n'ont pas d'interlocuteur crédible.

La source diplomatique rappelle que la normalisation est un processus et pas un acte isolé. Elle souligne que ce processus peut se faire progressivement et que d'autres pays peuvent participer. Cependant, la France est réaliste et ne s'attend pas à un règlement immédiat du conflit israélo-palestinien.