En Turquie, les livres deviennent un luxe

La doctorante turque Gulfer Ulas visite une librairie de l'avenue Istiklal à Istanbul, le 6 décembre 2021.(AFP)
La doctorante turque Gulfer Ulas visite une librairie de l'avenue Istiklal à Istanbul, le 6 décembre 2021.(AFP)
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Publié le Mercredi 29 décembre 2021

En Turquie, les livres deviennent un luxe

  • Le secteur de l'édition, très dépendant des importations de papier, est frappé de plein fouet par la crise monétaire. Au risque de faire taire certaines des voix encore dissonantes du pays.
  • La livre a perdu un quart de sa valeur face au dollar sur l'année

ISTANBUL : Gulfer Ulas est désespérée. Avec la chute de la monnaie, la doctorante peine à s'offrir les ouvrages nécessaires à sa thèse et plus encore les romans qu'elle adore. En Turquie, les livres deviennent un luxe.

Le secteur de l'édition, très dépendant des importations de papier, est frappé de plein fouet par la crise monétaire. Au risque de faire taire certaines des voix encore dissonantes du pays.

La livre a perdu un quart de sa valeur face au dollar sur l'année - avec un gouffre encore plus éprouvant de moins 58% mi-décembre - et l'inflation annuelle dépasse 21%: un sérieux coup porté au pouvoir d'achat des Turcs les plus modestes.

"Le prix des livres explose. J'étudie les relations internationales et je dépense près de 1.000 livres turques par mois en bouquins" (environ 75 euros, soit un tiers du salaire minimum turc), confie Gulfer Ulas, rencontrée dans une librairie populaire du centre d'Istanbul.

"Lire des romans est une de mes passions", poursuit la trentenaire, un ouvrage de l'écrivain allemand Thomas Mann en main. Mais ce loisir a atteint un coût exorbitant: "La première édition de ce livre coûtait 33 livres. Désormais, il est à près de 70 livres".

"Avant, j'aimais acheter les livres en plusieurs exemplaires pour les offrir à mes amis. Mais c'est devenu trop cher", regrette de son côté Ibrahim Ozcay. "Ils disent que c'est à cause des pénuries de papier. Ca ne me surprend pas, en Turquie tout est importé désormais."

En l'espace d'un an, "le prix du papier est passé de 700-800 dollars à 1.500 dollars" la tonne, une hausse subite qui se répercute chez les libraires, explique à l'AFP Haluk Hepkon, propriétaire de la maison d'édition Kirmizi Kedi.

« Toucher le fond »

"Imaginons que vous publiiez un livre qui coûte 30 livres. S'il se vend bien et qu'il est réédité une semaine plus tard, le prix montera à 35 livres. Et Dieu seul sait combien il coûtera après une troisième ou quatrième réimpression", poursuit l'éditeur.

"Au final, les gens seront obligés de se concentrer sur l'essentiel et de laisser tomber les livres", craint M. Hepkon, pour qui le secteur de l'édition risque de "toucher le fond" dans un pays où les ventes sont traditionnellement faibles.

Autre conséquence possible: les éditeurs, en difficultés financières, pourraient décider de publier moins.

Certaines maisons d'édition turques ont déjà présenté des excuses à leurs lecteurs pour ne pas avoir imprimé certains livres récents en raison des coûts d'impression trop élevés.

La Turquie importe pour quelque 3 milliards de dollars de papier par an, selon une étude menée en 2018 par la Chambre de commerce d'Istanbul. 

Le prix de la pâte à papier a augmenté partout dans le monde, mais la situation est particulièrement difficile en Turquie depuis la privatisation puis le démantèlement du principal groupe de papeteries du pays (SEKA) à partir des années 2000, affirme Kenan Kocaturk, président de l'Association des éditeurs turcs.

Pour lui, "la Turquie paie aujourd'hui de ne pas avoir vu le papier comme un bien stratégique".

"Les papeteries turques ont été vendues, seules deux d'entre elles continuent de produire. Dans les autres, les machines ont été cédées au prix de la ferraille et les terrains vendus", ajoute M. Kocaturk. 

"La crise de la livre touche l'ensemble des secteurs... Malheureusement, la Turquie a échoué depuis de longues années à produire davantage de matières premières et de biens intermédiaires", explique à l'AFP l'économiste Murat Sagman.  

Pour Rober Koptas, de la maison d'édition stambouliote Aras, le secteur du livre va forcément souffrir de la crise quand certains Turcs peinent à s'offrir leur repas quotidien.

"Beaucoup de maisons d'édition arrêtent ou réduisent l'impression de livres... Les gens qui travaillent dans le secteur, ouvriers, typographistes, employés de bureaux, éditeurs ou traducteurs vont en subir les conséquences financières", prédit-il.

Or, fait valoir Rober Koptas, les éditeurs incarnent une forme de "résistance" en Turquie, où "la quasi-totalité de la presse parle d'une même voix et [où] les universités ont été réduites au silence". 

"Chaque maison d'édition donne voix à la diversité intellectuelle du pays", insiste-t-il, craignant que leur affaiblissement "accentue le déclin culturel".

Pour Haluk Hepkon, "le secteur de la culture est aussi important que l'alimentation". "Voire plus, car il faut éduquer les gens pour qu'ils puissent résoudre les problèmes économiques."


«Effroi» du Festival de Cannes après la mort d'une photojournaliste palestinienne

La photojournaliste de 25 ans, Fatima Hassouna, est au centre du documentaire "Put your soul on your hand and walk" de la réalisatrice iranienne Sepideh Farsi. L'Acid (Association du cinéma indépendant pour sa diffusion), l'une des sélections parallèles au Festival de Cannes, avait annoncé mardi 15 avril avoir retenu ce film.  "Le lendemain, (Fatima Hassouna) ainsi que plusieurs membres de sa famille, ont été tués par un missile qui a frappé leur habitation", a rappelé le Festival de Cannes dans une déclaration à l'AFP. (AFP)
La photojournaliste de 25 ans, Fatima Hassouna, est au centre du documentaire "Put your soul on your hand and walk" de la réalisatrice iranienne Sepideh Farsi. L'Acid (Association du cinéma indépendant pour sa diffusion), l'une des sélections parallèles au Festival de Cannes, avait annoncé mardi 15 avril avoir retenu ce film. "Le lendemain, (Fatima Hassouna) ainsi que plusieurs membres de sa famille, ont été tués par un missile qui a frappé leur habitation", a rappelé le Festival de Cannes dans une déclaration à l'AFP. (AFP)
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  • La photojournaliste de 25 ans, Fatima Hassouna, est au centre du documentaire "Put your soul on your hand and walk" de la réalisatrice iranienne Sepideh Farsi
  • Elle "s'était donné pour mission de témoigner, par son travail, son engagement et malgré les risques liés à la guerre dans l'enclave palestinienne, de la vie quotidienne des habitants de Gaza en 2025

PARIS: Le Festival de Cannes a exprimé mercredi "son effroi et sa profonde tristesse" après la mort d'une photojournaliste palestinienne, protagoniste d'un film qui doit être présenté cette année sur la Croisette et de plusieurs membres de sa famille, tués par un missile à Gaza.

La photojournaliste de 25 ans, Fatima Hassouna, est au centre du documentaire "Put your soul on your hand and walk" de la réalisatrice iranienne Sepideh Farsi. L'Acid (Association du cinéma indépendant pour sa diffusion), l'une des sélections parallèles au Festival de Cannes, avait annoncé mardi 15 avril avoir retenu ce film.

"Le lendemain, (Fatima Hassouna) ainsi que plusieurs membres de sa famille, ont été tués par un missile qui a frappé leur habitation", a rappelé le Festival de Cannes dans une déclaration à l'AFP.

Elle "s'était donné pour mission de témoigner, par son travail, son engagement et malgré les risques liés à la guerre dans l'enclave palestinienne, de la vie quotidienne des habitants de Gaza en 2025. (Elle) est l'une des trop nombreuses victimes de la violence qui embrase la région depuis des mois".

"Le Festival de Cannes souhaite exprimer son effroi et sa profonde tristesse face à cette tragédie qui a ému et choqué le monde entier. Si un film est bien peu de chose face à un tel drame, (sa projection à l'Acid à Cannes le 15 mai) sera, en plus du message du film lui-même, une manière d'honorer la mémoire (de la jeune femme), victime comme tant d'autres de la guerre", a-t-il ajouté.

La réalisatrice Sepideh Farsi a rendu hommage jeudi dernier à la jeune femme, qui lui racontait, par appels vidéo, la vie à Gaza. "Je demande justice pour Fatem (ou Fatima, NDLR) et tous les Palestiniens innocents qui ont péri", a-t-elle écrit.

Reporters sans Frontières avait dénoncé sa mort, regrettant que son nom "s'ajoute aux près de 200 journalistes tués en 18 mois".

La guerre a été déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, laquelle a entraîné la mort de 1.218 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles. Sur les 251 personnes enlevées ce jour-là, 58 sont toujours retenues à Gaza, dont 34 sont mortes, selon l'armée israélienne.

Selon le ministère de la Santé du Hamas, 51.266 Palestiniens ont été tués à Gaza depuis le début de la guerre.


La danse des dauphins, vedette des îles Farasan

L'observation des dauphins renforce l'attrait croissant des îles Farasan pour l'écotourisme. (SPA)
L'observation des dauphins renforce l'attrait croissant des îles Farasan pour l'écotourisme. (SPA)
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  • L'observation de 5 espèces de dauphins met en évidence la biodiversité
  • Il est vital de coexister avec la vie marine, déclare un pêcheur local

RIYADH : L'observation de plus de cinq espèces de dauphins a renforcé la réputation des îles Farasan en tant que lieu de visite incontournable pour les amateurs de nature et d'animaux sauvages, a récemment rapporté l'agence de presse saoudienne.

Parmi les espèces observées, les grands dauphins et les dauphins à long bec volent la vedette. Les dauphins à long bec, connus pour leur nature enjouée, s'approchent souvent des croisières de loisir, ravissant les gens par leur charme.

Le pêcheur saoudien Mohammed Fursani, qui navigue dans ces eaux depuis longtemps, y voit un lien plus profond.


Le pianiste Igor Levit va donner un concert de plus de 16 heures à Londres

L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)
L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19. (AFP)
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  • Le centre Southbank, qui organise le concert, le présente comme "un exploit d'endurance"
  • "Vexations" du compositeur français Erik Satie (1866-1925) est une partition d'une seule page destinée à être jouée 840 fois d'affilée

LONDRES: Le pianiste Igor Levit va donner jeudi et vendredi à Londres un concert unique, prévu pour durer plus de 16 heures, en jouant en solo "Vexations" d'Erik Satie, sous la direction de l'artiste Marina Abramovic, connue pour ses performances radicales.

Le centre Southbank, qui organise le concert, le présente comme "un exploit d'endurance".

"Vexations" du compositeur français Erik Satie (1866-1925) est une partition d'une seule page destinée à être jouée 840 fois d'affilée. Elle se traduit ainsi par une performance durant entre 16 et 20 heures. Habituellement, plusieurs pianistes se succèdent pour jouer ce morceau sans interruption.

L'Allemand Igor Levit, qui est à 38 ans l'un des pianistes virtuoses de sa génération, avait déjà fait sensation en jouant "Vexations" dans son studio à Berlin pendant 20 heures d'affilée lors du confinement. L'objectif de cet événement filmé en direct était de lever des fonds pour les musiciens freelance touchés par la pandémie de Covid-19.

C'est la première fois qu'il va jouer ce morceau en intégralité en public.

Le public va être "témoin (d'un moment) de silence, d'endurance, d'immobilité et de contemplation, où le temps cesse d'exister", a commenté Marina Abramovic, artiste serbe de 78 ans. "Igor interprète +Vexations+ avec des répétitions infinies, mais une variation constante", a-t-elle ajouté.

Le rôle de Marina Abramovic, connue pour ses performances qui poussent les spectateurs dans leurs retranchements, est de "préparer le public à cette expérience unique".

Erik Satie avait lui écrit à propos du morceau à l'adresse des pianistes: "Pour jouer 840 fois de suite ce motif, il sera bon de se préparer au préalable, et dans le plus grand silence, par des immobilités sérieuses".

Dans une interview au quotidien britannique The Guardian, Igor Levit a encouragé son public à "se laisser aller". "C'est juste un espace vide, alors plongez dedans", a-t-il dit.

Les spectateurs pourront assister au concert soit pour une heure soit dans sa totalité. Il commencera jeudi à 10H00 (09H00 GMT).