Exclusif: Le président arménien se félicite d’ouvrir une «nouvelle page» avec l’Arabie saoudite

Le président arménien Armen Sarkissian remercie le monde arabe d’avoir accueilli son peuple après le génocide (Photo, Arab News)
Le président arménien Armen Sarkissian remercie le monde arabe d’avoir accueilli son peuple après le génocide (Photo, Arab News)
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Publié le Jeudi 23 décembre 2021

Exclusif: Le président arménien se félicite d’ouvrir une «nouvelle page» avec l’Arabie saoudite

  • L’Iran ne joue aucun rôle sécuritaire ou militaire en Arménie
  • Le prince héritier saoudien «mène l’Arabie saoudite dans la bonne direction»

EREVAN: Lorsqu’il décrit sa vision pour l’Arménie, Armen Sarkissian aime répéter la phrase «petit pays, État mondial». En tant que président de la République, il ne mâche pas ses mots lorsqu’il s’agit des forces, des faiblesses et des opportunités de son pays ainsi que des menaces auxquelles il est confronté.

Avec une superficie de 29 743 km2, l’Arménie est comparable en taille à la Belgique ou à l’État américain du Maryland. Cependant, si le pays compte moins de trois millions de citoyens, la diaspora arménienne dans le monde est estimée entre cinq et sept millions, les États-Unis en comptant à eux seuls jusqu’à 1,5 million d’Arméniens.

Réputés pour leurs contributions au niveau mondial, notamment dans le monde arabe, les Arméniens ont laissé leur empreinte dans les domaines de la science, de la politique, du sport, de la culture et du divertissement. C’est probablement la raison pour laquelle Sarkissian ne considère pas seulement la diaspora de son pays comme un atout majeur, mais va jusqu’à dire que les Arméniens de l’étranger sont une ressource nationale aussi importante que le pétrole pour les pays du Golfe. En fait, il croit tellement à cette idée qu’il souhaite que la constitution de son pays soit modifiée, afin de permettre à davantage d’Arméniens vivant à l’étranger de participer au gouvernement.

«Selon la constitution, un Arménien de l’étranger ne peut pas devenir ministre à moins de vivre les quatre dernières années en Arménie, et de ne posséder qu’un passeport arménien, ce que je considère comme une absurdité totale dans ce nouveau monde», a-t-il déclaré à Arab News dans sa première interview avec un média saoudien. «Cela devrait être l’inverse. Il faut faire venir des gens qui ont beaucoup de succès dans le monde entier. Il y a des centaines de milliers de personnes expérimentées mais nous ne les utilisons pas. Imaginez un État du Golfe qui déciderait de ne pas utiliser le pétrole.»

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Armen Sarkissian (à droite) assis près du prince héritier, Mohammed ben Salmane (à gauche), lors de la conférence de la Future Investment Initiative. (Photo, SPA)

En outre, Sarkissian pense qu’il faut investir massivement dans le capital humain au niveau national et il est fier de ce que l’Arménie a réalisé dans les domaines de la technologie et de la science, chose que, selon lui, toutes les nations intelligentes, comme l’Arabie saoudite, le Qatar et les Émirats arabes unis, font déjà.

Mais malgré cette vision prometteuse, l’ambiance n’est pas si positive à Erevan, car les citoyens sont parfaitement conscients des faiblesses de leur pays et des menaces auxquelles il est confronté. Les ombres géopolitiques du passé semblent hanter le présent, tout comme la flamme éternelle au cœur de Tsitsernakaberd, le mémorial du génocide dédié à la vie des 1,5 million d’Arméniens qui ont péri aux mains de l’Empire ottoman en 1915-1916.

La Turquie actuelle — l’un des quatre voisins de l’Arménie, avec l’Iran, la Géorgie et l’Azerbaïdjan — ne reconnaît toujours pas le génocide et reste en désaccord avec Erevan. L’année dernière, une deuxième guerre a éclaté entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Une fois encore, le conflit portait sur la région contestée du Haut-Karabakh, internationalement reconnue comme azérie. La Turquie a publiquement soutenu Bakou, tandis que l’Iran aurait discrètement soutenu l’Arménie, bien que cela soit contesté par certains universitaires et analystes à Erevan.

La guerre s’est achevée par une victoire azérie et un cessez-le-feu négocié par la Russie, laissant l’Arménie confrontée à une lutte pour empêcher les dures réalités géopolitiques du présent d’interférer avec sa vision ambitieuse de l’avenir.

C’était un défi pour Sarkissian, mais cela signifiait aussi la découverte de nouveaux horizons et de nouvelles opportunités nécessaires pour l’Arménie. Une opportunité évidente était l’Arabie saoudite qui, depuis l’année dernière, plaide pour une solution pacifique entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.

Une visite historique

Sarkissian a marqué l'histoire en octobre lorsqu'il est devenu le premier président arménien à se rendre en Arabie saoudite depuis l'indépendance de son pays en 1991. Bien que les deux pays n'aient jamais été hostiles l'un à l'autre, ils n'ont pas non plus de relations diplomatiques depuis que Riyad a soutenu la position de l'Azerbaïdjan dans la première guerre du Karabakh de 1988 à 1994.

Sarkissian affirme que cette situation est «regrettable» et que l'un de ses «premiers objectifs» en devenant président en 2018 était d'établir des liens diplomatiques avec le Royaume, qu'il décrit comme un «État très important, très influent et très éminent, ainsi que le gardien de la foi de l'Islam».

Lors de sa visite, Sarkissian s'est assis à côté du prince héritier, Mohammed ben Salmane, à la conférence de la Future Investment Initiative, souvent appelée «Davos du désert.» Il a révélé à Arab News la teneur de ses discussions avec le prince héritier, qui, selon lui, n’ont pas été longues, mais «très spécifiques».

«Tout d'abord, il s'agissait d'une discussion sur le respect des deux parties l'une pour l'autre en tant que nations, en tant qu'États, et en tant qu’individus. Le deuxième sujet que nous avons évoqué était celui de nos relations diplomatiques, et nous sommes convenus qu'en réalité nos liens diplomatiques ont commencé avec cette visite. J'ai ainsi invité le ministre d'État et le ministre des Affaires étrangères d'Arabie saoudite, et bien sûr Son Altesse Royale, à visiter l'Arménie.

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Sarkissian (à gauche) a confié à Abbas (à droite) que l’échange d’ambassadeurs et l’ouverture d’ambassades n’est qu’une question de temps qui relève des départements concernés de son gouvernement et du ministère saoudien des Affaires étrangères. (Photo, Ziad al-Arfaj)

«La troisième partie la plus importante de notre discussion était axée sur l'avenir, et j'ai été très heureux de constater lors de mes entretiens avec Son Altesse Royale qu'il était très concentré sur l'avenir de son pays, sur l'avenir de la région, sur l'avenir du Golfe et l'avenir du monde.»

Sarkissian a déclaré que l’échange d'ambassadeurs et l'ouverture d'ambassades n’est qu’une question de temps qui relève des départements concernés de son gouvernement et du ministère saoudien des Affaires étrangères. «Pour être honnête, pour moi c'est secondaire, car ce dont nous sommes convenus, c'est de considérer que nous avons ouvert une nouvelle page dans nos relations», a-t-il précisé.

Sarkissian regrette que sa visite ait été limitée à une seule journée. Il a toutefois rencontré de nombreuses personnes – et le principal facteur d'influence pour lui a été sa conversation avec le prince héritier. «Je crois en sa sincérité en tant que dirigeant, et en la direction dans laquelle il mène son pays, et c'est tout à fait la bonne direction», a-t-il déclaré.

Cependant, l'Arménie entretient également des relations amicales avec l'Iran, un régime tristement célèbre pour s'ingérer dans les affaires de ses voisins et influencer les décisions pour servir ses intérêts. Cela découragerait-il toute perspective de normalisation des relations avec l'Arabie saoudite et les États arabes modérés? «Non, pas du tout», répond Sarkissian. L’Arménie n’est pas un État religieux et entretient déjà «d’excellentes relations» avec les pays arabes ainsi qu’avec l’Iran, qui «n’a pas emprunté la voie de la destruction du patrimoine ou des églises arméniennes – le gouvernement a en fait financé la restauration des églises arméniennes en Iran».

Il explique qu'il est dans l'intérêt de son pays d'entretenir de bonnes relations avec Téhéran. «Nous sommes un État enclavé», et Erevan a déjà des relations problématiques avec deux voisins (la Turquie et l'Azerbaïdjan). Il ne peut donc pas se permettre de perturber les relations qu'il entretient avec les deux autres, l'Iran et la Géorgie, qu'il décrit comme la porte de son pays vers la Russie et la mer Noire.

Néanmoins, Sarkissian comprend ce qu'il appelle les «préoccupations» de l'Arabie saoudite. «Je comprends et je vois les tensions, je comprends et je vois l'Iran et le Golfe, l'Iran et le Liban, d'accord, et je vois ce que l'Arabie saoudite fait dans la région et le Golfe.»

Mais quelle est exactement l’étendue des relations arméno-iraniennes? Téhéran joue-t-il un rôle militaire ou s’ingère-t-il dans les affaires de sécurité ou de politique, comme il le fait avec presque tous ses voisins?

«Je comprends les préoccupations de l’Arabie saoudite. Je comprends et je vois les tensions, je comprends et je vois l’Iran et le Golfe, l’Iran et le Liban»

«Ils n'interfèrent pas dans les domaines militaire ou sécuritaire», insiste Sarkissian. «Ils ont leurs intérêts dans ce qui se passe actuellement dans le sud de l'Arménie, ce qui intéresse bien sûr l'Iran.» Erevan et Téhéran entretiennent des relations historiques et culturelles et ont des intérêts mutuels tels que l'énergie et le commerce, affirme-t-il.

Mais qu'en est-il de la perception du soutien secret de Téhéran à l'Arménie pendant la récente guerre du Karabakh? Et comment le président Sarkissian interprète-t-il les exercices militaires iraniens près de la frontière azérie?

«C'est leur propre politique, ils n'interfèrent pas en Arménie», répond-il. «Je pense […] que s'ils sentent qu'un danger se produit à leurs frontières, c'est leur problème interne.»

Sarkissian rejette également fermement l’idée selon laquelle le conflit du Karabakh n'était pas seulement un litige territorial, mais aussi une guerre de religion entre l'Arménie à majorité chrétienne et l'Azerbaïdjan à majorité musulmane. «Le conflit n'a jamais été une guerre de religion», soutient-il. «L'Arménie entretient d’excellentes relations avec de nombreux pays où l'Islam est une religion majeure, des pays où l'Islam est la seule religion, ou des pays qui ont l'Islam comme religion d'État.»

«L'autre partie (se référant à l'Azerbaïdjan et à la Turquie) aime parfois utiliser cela (la description de la «guerre de religion») afin d'obtenir le soutien du monde islamique, mais l'Arménie n'a jamais essayé d'obtenir le soutien des pays chrétiens.»

Par ailleurs, plusieurs analystes arméniens ont critiqué ce qu'ils décrivent comme le soutien ouvert et idéologique du Pakistan à l'axe azerbaïdjano-turc, et affirment que les exercices militaires conjoints avec la partie azérie compliquent encore la situation. Sarkissian précise qu'Erevan n'a pas de relations diplomatiques avec le Pakistan: «J'essaie de les établir, parce que je ne suis pas d’avis que si quelqu'un soutient mon concurrent ou l'ennemi, je ne dois pas lui parler.

«Le Pakistan n'est pas un pays que nous pouvons ignorer. Nous ne sommes pas en mesure d'entrer en guerre avec le Pakistan, c'est complètement absurde. Nous devrions essayer de dialoguer et de voir où cela nous mène, et encore une fois, je ne vois aucune contradiction entre le fait d’avoir un dialogue avec le Pakistan et nos profondes et étroites relations avec l'Inde.»

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La paix dans le Caucase du Sud

Le vice-président turc, Fuat Oktay, a déclaré la semaine dernière qu'Ankara s’efforçait de faire progresser le dialogue avec l'Arménie, en coordination avec l'Azerbaïdjan. «La Turquie défend non seulement la normalisation des relations avec l'Arménie, mais aussi la paix et la stabilité dans l’ensemble du Caucase», a-t-il révélé. La Turquie s'est engagée dans une série de conflits régionaux ces dernières années, et son économie s'est maintenant détériorée à des niveaux sans précédent. Bien qu’il ne s’agisse pas de la première tentative de combler le fossé entre les deux voisins, de nombreux observateurs estiment que les difficultés politiques et économiques d'Ankara représentent une véritable opportunité pour l'Arménie.

Alors, Erevan accueille-t-elle ces développements? Cette bonne volonté arménienne exprimée par son président s'étend-elle à la Turquie, son grand rival?

«L'Arménie est politiquement divisée, surtout après la guerre, comme vous pouvez l'imaginer», explique Sarkissian. «Quand vous avez une guerre, que vous la perdez et qu’autant de tension se fait sentir, l’État n'est pas homogène dans son comportement. Je ne dirais jamais que je parle au nom de tous les Arméniens.

«Je suis le président d'une république parlementaire, je suis le chef de l'État, mais je ne suis pas le pouvoir exécutif qui gère les affaires courantes du gouvernement. C'est le gouvernement qui doit répondre à la partie turque et à l'offre.» Il aurait tort de commenter ou de juger à ce stade, dit-il.

«Tout accord… doit passer par un processus formel de présentation au Parlement», explique-t-il. «Je m’exprimerai à son arrivée sur ma table. En tant que président de la République, je peux soit signer tout ce qui a été convenu – si je considère que c'est en harmonie avec l'intérêt national de l'État et du peuple arménien – soit j'ai la possibilité de ne pas le signer, et de l'envoyer, par exemple, à la cour constitutionnelle afin que les meilleurs juristes puissent discuter de cette question et me donner des conseils.»

Quant à l'Azerbaïdjan, étant donné que la communauté internationale a reconnu le Karabakh comme azéri et que les tentatives de résolution du problème se poursuivent, Sarkissian voit-il un rôle pour des organismes régionaux ou religieux influents tels que le Conseil de coopération du Golfe ou l'Organisation de coopération islamique dans le soutien des efforts de paix dans le Caucase?

«Mon conseil serait le suivant: essayons de trouver une solution logique qui serait acceptable pour les deux parties. Toute solution forcée ne durera pas», signale-il. Sarkissian soutient que ce sont les Azéris qui devraient proposer des compromis pour assurer une paix durable. «Il n'y a pas grand-chose sur lequel la partie arménienne peut faire des compromis aujourd'hui», dévoile-il. «Nous aurions pu faire des compromis à partir de 1994, lorsque nous étions victorieux… C'était le moment de faire des compromis et de parvenir à une solution diplomatique plutôt qu'à une solution de guerre. C'est un grand regret, car des milliers de jeunes vies ont été perdues pour quelque chose qui aurait pu être obtenu par des voies diplomatiques.»

«Essayons de trouver une solution logique qui serait acceptable pour les deux parties. Toute solution forcée ne durera pas»

Néanmoins, la guerre n’a pas été une perte totale pour l'Arménie. Sarkissian établit une analogie intéressante avec la Turquie, et explique pourquoi il y a encore beaucoup d'opportunités pour son pays.

«Pendant la guerre, nous avons perdu. Mais la devise arménienne, le dram, était stable. Elle a perdu un peu, mais après la guerre, elle est devenue plus forte qu'avant. Par rapport au dollar américain, la livre turque a baissé de façon spectaculaire.»

La principale différence, selon Sarkissian, est que l'Arménie a sauvegardé l'indépendance de sa banque centrale, contrairement à la Turquie. «Il y a quelque chose que nous avons fait au début des années 1990; nous avons reconstruit notre secteur bancaire. Nous avions plus de 150 banques et, comme dans toutes les républiques soviétiques, la plupart étaient des systèmes pyramidaux, mais nous avons réussi à faire venir des banques internationales.

«La première banque était la HSBC, je suis fier de dire que je les ai fait venir ici, et ils nous ont aidés à mettre en place nos lois dans le secteur bancaire. Et en Arménie, nous avons une banque centrale qui est vraiment indépendante du gouvernement.»

Le secteur banquier n'est pas le seul secteur dont Sarkissian est fier. Il fait l'éloge des secteurs technologique et agricole de l'Arménie, et même de l'eau naturelle de son pays. Sirotant une bouteille d'eau plate d'origine locale, il explique à quel point son pays est riche en eau naturelle et insiste sur le fait qu'il peut en distinguer les différents goûts, comme un connaisseur en vin.

L'Arménie a rejoint l'Union économique eurasienne en 2015, mais entretient également de solides relations économiques avec l'UE. Selon Sarkissian, les alignements fiscaux et douaniers qui en découlent constituent une opportunité pour les entreprises du Golfe et d'autres pays de s'enregistrer en Arménie et d’y gérer leurs affaires. «Plusieurs pays, dont Singapour, souhaitent approfondir leurs relations avec l'Union économique eurasienne, et l'Arménie peut être une porte d'entrée», ajoute-il.

Un message au monde arabe

Sarkissian rappelle le rôle crucial joué par les États du Golfe et le monde arabe dans l'accueil des Arméniens qui ont échappé au génocide de 1915-1916.

«Ils ont trouvé refuge en Syrie, au Liban, en Égypte, dans les États du Golfe, dont l'Arabie saoudite», explique-il. «Je profite de cette occasion pour remercier ces nations, et les chefs d'État de tous ces États du Moyen-Orient, en particulier les États arabes, qui ont été si fraternels avec nous.

«Ce sont des États où la religion principale est l'islam, ou la seule religion est l'islam, et ils ont accueilli des Arméniens sans abri qui étaient chrétiens comme leurs frères et sœurs. C'est donc l'occasion de les remercier.»

De manière significative, plus de cent ans plus tard, cette migration se produit en sens inverse, les Arméniens fuyant leur situation désespérée dans des pays comme la Syrie et le Liban. Sarkissian estime que, certainement dans le cas du Liban, il serait préférable d’aider la communauté arménienne à rester dans son pays d'adoption.

«Il y a cinq ou dix ans, c'était un pays qui vivait en harmonie», déclare-il. «Bien sûr, il y avait des ingérences, mais ce qu'ils ont mal fait, c’était l’aspect financier, à cause de la structure de la constitution et de la façon dont ils géraient leurs affaires.

«Mais j'aimerais bien aider notre communauté arménienne là-bas à rester, car il y a beaucoup de culture, beaucoup de présence, et ils sont importants, tout comme nos communautés arméniennes dans de nombreux autres endroits.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Manipulation médiatique et instrumentalisation de Forbes France au service de la propagande royale du Maroc

Le bâtiment des galeries du magazine Forbes. 62, 5th avenue, Manhattan, New York, NYC, USA. (Photo par : -/VW Pics/Universal Images Group via Getty Images)
Le bâtiment des galeries du magazine Forbes. 62, 5th avenue, Manhattan, New York, NYC, USA. (Photo par : -/VW Pics/Universal Images Group via Getty Images)
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  • Les chiffres sont accablants : sur 49 articles publiés par Forbes France sur le Maroc, près de la moitié sont des contenus payants étiquetés « Brandvoice », financés directement ou indirectement par des proches du régime marocain.
  • Dominique Busso, le PDG de l’édition française, ne cache pas que ces transactions douteuses sont monnaie courante.

RIYAD : L’enquête explosive menée par Marianne, complétée par les révélations incisives d’Africa Intelligence, lève le voile sur un système d’influence sophistiqué dans lequel le Maroc, sous couvert de soft power, orchestre une propagande méthodique via des relais médiatiques internationaux.

Forbes France, autrefois symbole d’excellence journalistique, apparaît aujourd’hui comme un instrument docile entre les mains des autorités marocaines.

Les chiffres sont accablants : sur 49 articles publiés par Forbes France sur le Maroc, près de la moitié sont des contenus payants étiquetés « Brandvoice », financés directement ou indirectement par des proches du régime de Mohammed VI.

Ces textes déguisés en journalisme peignent un portrait idyllique du royaume, occultant sciemment la répression des libertés individuelles, les inégalités criantes et les réalités économiques sombres du pays. Il s'agit d'une véritable mascarade qui sape l’intégrité journalistique et trompe délibérément les lecteurs.

Forbes France : un média au service de la propagande royale

Plus qu’un simple complice passif, le magazine semble s’être vendu au plus offrant, troquant son indépendance contre des millions d’euros provenant des cercles de pouvoir marocains.

Dominique Busso, le PDG de l’édition française, ne cache pas que ces transactions douteuses sont monnaie courante. Pire, selon des sources internes, le Maroc achète régulièrement des articles pour redorer l’image de son régime monarchique, tout en évitant toute transparence sur les financements réels.

Abdelmalek Alaoui, présenté comme un analyste ou un économiste, mais qui n'est en réalité qu'un agent de la Direction générale des études et de la documentation (DGED), est identifié comme un rouage clé de cette machinerie propagandiste.

Des courriels internes obtenus par Marianne montrent comment Alaoui et d’autres agents influencent directement la ligne éditoriale de ces articles en faveur de la monarchie marocaine. Forbes France ne serait rien d’autre qu’un outil au service de cette désinformation orchestrée depuis Rabat.

Un documentaire sous influence : glorification du règne de Mohammed VI

Les tentacules de cette stratégie de manipulation s’étendent bien au-delà de la presse écrite. Africa Intelligence révèle qu’un documentaire diffusé sur Public Sénat à l’approche d’une visite officielle d’Emmanuel Macron au Maroc a été conçu comme une véritable opération de communication. 

Réalisé par des proches de l’élite politique marocaine et française, ce film, présenté comme un travail journalistique, n’est rien d’autre qu’une glorification du roi Mohammed VI.

Tout en vantant les prétendus succès du roi, notamment en matière de condition féminine et de développement économique, le documentaire escamote les critiques concernant les inégalités sociales et la répression des libertés. Il s'agit là d'une manipulation éhontée, à peine voilée, où les consignes éditoriales semblent avoir été dictées par Rabat pour protéger l’image royale.

Le Maroc : un État stratège du mensonge médiatique

Ce qui se dévoile ici est bien plus qu’un simple scandale médiatique. Il s’agit d’une stratégie délibérée et agressive de soft power, dans laquelle le Maroc utilise des moyens financiers considérables pour infiltrer et manipuler les récits médiatiques internationaux.

En contrôlant la narration sur des plateformes influentes telles que Forbes France, le royaume impose une version réécrite et aseptisée de la réalité, tout en muselant les voix dissidentes.

Ces pratiques immorales révèlent la complicité choquante de médias qui, en échange d'avantages financiers, renoncent à leur devoir d'informer honnêtement. Ce brouillage systématique de la frontière entre journalisme et propagande constitue une attaque directe contre l’intégrité de l’information.

Un appel urgent à l’éthique journalistique

Les révélations de Marianne et d’Africa Intelligence mettent en lumière le manque de diligence de la part d'acteurs tels que Forbes France.

Il est désormais impératif de mener une enquête indépendante sur ces pratiques. En effet, tant que des médias accepteront de se vendre au plus offrant, les citoyens continueront à être trompés par des récits soigneusement fabriqués pour servir des intérêts politiques. 

L’intégrité de la presse n’est pas à vendre, il est temps de le rappeler.


Les États-Unis débloquent 117 millions de dollars pour les Forces libanaises

Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
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  • Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».
  • C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

WASHINGTON : Lles États-Unis ont annoncé  samedi le transfert de 117 millions de dollars destinés à soutenir les forces de l'ordre et l'armée libanaises, à l'issue d'une réunion de donateurs internationaux, jeudi.

Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».

C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

Un cessez-le-feu a pris effet fin novembre entre le mouvement islamiste pro-iranien Hezbollah et Israël, après plus d'un an de bombardements de part et d'autre, ainsi qu'une incursion des forces israéliennes en territoire libanais à partir de fin septembre.

L'enveloppe annoncée samedi par le département d'État « démontre son engagement à continuer à travailler avec ses partenaires et alliés pour s'assurer que le Liban bénéficie du soutien nécessaire pour renforcer la sécurité du pays et de la région ».

Samedi, le président libanais, Joseph Aoun, a réclamé le retrait de l'armée israélienne « dans les délais fixés » par l'accord de cessez-le-feu.

Ce dernier prévoit le déploiement de l'armée libanaise aux côtés des Casques bleus dans le sud du pays et le retrait de l'armée israélienne dans un délai de 60 jours, soit d'ici au 26 janvier.

Le Hezbollah doit, pour sa part, retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 km de la frontière libano-israélienne. 


Manifestation pour revendiquer la libération de l'opposante Abir Moussi

Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
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  • Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.
  • Soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

TUNIS : Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.

Brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Liberté pour Abir » ou « Nous sommes des opposants, pas des traîtres ! », ils étaient entre 500 et 1 000, selon des journalistes de l'AFP. Beaucoup portaient des drapeaux tunisiens et des photos de la dirigeante du PDL.

Ils ont critiqué virulemment à la fois le président Kaïs Saied et le parti islamo-conservateur d'opposition Ennahdha. Mme Moussi, ex-députée de 49 ans, est en détention depuis son arrestation le 3 octobre 2023 devant le palais présidentiel, où, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de M. Saied.

Mme Moussi fait l'objet de plusieurs accusations, dont celle particulièrement grave de tentative « ayant pour but de changer la forme de l'État », soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

Les manifestants ont dénoncé le décret 54 sur les « fausses nouvelles », en vertu duquel Mme Moussi est poursuivie dans cette affaire, et dont l'interprétation très large a entraîné l'incarcération depuis septembre 2022 de dizaines de politiciens, d'avocats, de militants ou de journalistes.

Pour Thameur Saad, dirigeant du PDL, emprisonner Mme Moussi pour des critiques envers l'Isie « n'est pas digne d'un pays se disant démocratique ». « Les prisons tunisiennes sont désormais remplies de victimes du décret 54 », a renchéri à l'AFP Karim Krifa, membre du comité de défense de Mme Moussi.

D'autres figures de l'opposition, dont le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, sont également emprisonnées.

Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, l'opposition et les ONG tunisiennes et étrangères ont déploré une régression des droits et des libertés en Tunisie. Le chef de l'État a été réélu à une écrasante majorité de plus de 90 % des voix le 6 octobre, lors d'un scrutin marqué toutefois par une participation très faible (moins de 30 %).