Soudan: trois ans après la «révolution», la démocratie est encore loin

Des manifestants se rassemblent lors d'une manifestation exigeant un régime civil dans la ville d'Omdurman, le 13 décembre 2021. (Photo, AFP)
Des manifestants se rassemblent lors d'une manifestation exigeant un régime civil dans la ville d'Omdurman, le 13 décembre 2021. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Dimanche 19 décembre 2021

Soudan: trois ans après la «révolution», la démocratie est encore loin

  • Après le coup d'Etat militaire du 25 octobre et une répression qui a depuis fait 45 morts et des centaines de blessés
  • Nul ne sait quelle part de l'économie est entre les mains des militaires mais ils contrôlent de nombreuses entreprises allant de l'élevage de volailles à la construction

KHARTOUM : Trois ans après le début de la "révolution" au Soudan qui a renversé Omar el-Béchir après 30 ans de dictature, les pro-civils s'apprêtent à redescendre dans la rue dimanche contre le pouvoir de l'armée qui a suspendu la transition démocratique.

Après le coup d'Etat militaire du 25 octobre et une répression qui a depuis fait 45 morts et des centaines de blessés, les fers de lance de la "révolution" anti-Béchir veulent relancer un mouvement qui s'est essoufflé parmi les 45 millions de Soudanais englués dans une inflation à plus de 300%.

Le 19 décembre 2018, face au marasme économique dans lequel était plongé le Soudan de Béchir, sous embargo international, des centaines de milliers de Soudanais ont manifesté, forçant l'armée à démettre le dictateur quatre mois plus tard.

Si les Soudanais avaient choisi ce jour-là, c'est qu'en 1955, à la même date, le Parlement du pays toujours sous tutelle britannique avait proclamé l'indépendance.

Bien décidés à en finir avec ce qu'ils appellent l'"occupation" des militaires, les partisans d'un pouvoir civil appellent à de nouvelles manifestations dimanche face aux généraux, dont le plus haut gradé, le général Abdel Fattah al-Burhane, a mené le coup d'Etat qui a rétabli la prépondérance de l'armée.

Les manifestants défileront dans les rues sous le slogan "pas de partenariat, pas de négociation" avec l'armée.

 

Le Soudan depuis la révolte et la chute d'Omar el-Béchir

Pain et liberté

Le 19 décembre 2018, des centaines de Soudanais manifestent à Atbara, au nord-est de Khartoum, à Port-Soudan, principal port du pays dans l'Est, et à Nhoud, dans l'Ouest, contre la décision du gouvernement de tripler le prix du pain.

Dès le lendemain, les protestations s'étendent à d'autres régions dont la capitale du pays en plein marasme économique.

Béchir destitué

Le 6 avril 2019, sit-in de milliers de manifestants devant le quartier général de l'armée à Khartoum.

Le 11, Béchir, arrivé au pouvoir en 1989 par un coup d'Etat soutenu par des islamistes, est destitué et arrêté par l'armée. Un "Conseil militaire de transition" le remplace.

Des milliers de manifestants poursuivent leur sit-in, rejetant un "coup d'Etat".

Répression sanglante

Le 3 juin, le sit-in est dispersé par des hommes armés en tenue militaire. Une centaine de morts.

Une première enquête, ordonnée par le Conseil militaire, établit que des paramilitaires des Forces de soutien rapide (RSF) sont impliqués dans le bain de sang.

Au total, plus de 250 personnes ont été tuées dans la répression, selon un comité de médecins proche des manifestants.

Accord de transition

A la mi-juillet, un partage du pouvoir entre militaires et civils est adopté, prévoyant un Conseil de souveraineté pour mener le pays à un pouvoir civil sous trois ans.

En août, ce Conseil est formé, présidé par le général Abdel Fattah al-Burhane. Abdallah Hamdok, ancien économiste de l'ONU, devient Premier ministre.

Fin novembre, le parti du président déchu est dissout.  

Béchir condamné

Le 14 décembre, Béchir est condamné à deux ans de prison pour corruption.

Le 22, une enquête sur les crimes au Darfour est ouverte au Soudan contre l'ex-président, recherché depuis plus d'une décennie par la Cour pénale internationale (CPI) pour "génocide", "crimes de guerre" et "crimes contre l'humanité". En août 2021, le Soudan et la CPI signent un accord de coopération pour le remettre avec ses collaborateurs à ce tribunal.

Béchir est aussi jugé dans son pays dans un procès distinct pour le coup d'Etat l'ayant porté au pouvoir.

«Contrôle total» de l'armée

"Le coup d'Etat a coupé la route à la transition démocratique: avec lui, les militaires ont pris le contrôle total de la vie politique et économique", affirme à l'AFP Achraf Abdelaziz, patron du quotidien indépendant "Al-Jarida".

Bien avant le putsch, Khartoum reconnaissait que 80% des ressources du pays n'étaient toujours pas sous son contrôle. Nul ne sait quelle part de l'économie est entre les mains des militaires mais ils contrôlent de nombreuses entreprises allant de l'élevage de volailles à la construction.

Avec le putsch et la suppression de l'aide internationale en rétorsion, dit encore M. Abdelaziz, "l'appareil sécuritaire l'a emporté sur les institutions politiques, or, pour mener une transition démocratique, il faut que le politique soit le moteur".

L'armée a bien rétabli le Premier ministre civil, Abdallah Hamdok, et promis des élections libres en juillet 2023 mais n'a toujours pas formé de gouvernement. En face, les pro-civils, qui accusent M. Hamdok de "trahison", peinent à émerger politiquement: profondément divisés avant le coup d'Etat, ils continuent à ne pas s'entendre.

Pourtant pour Khaled Omer, ministre évincé lors du putsch et cadre des Forces de la liberté et du changement (FLC), le fer de lance civil de la "révolution", ce putsch donne "l'occasion de corriger les défauts du système d'avant" --cet attelage qui a rallié sous une même bannière anti-Béchir en 2019 civils, militaires et paramilitaires, rejoints en 2020 par les rebelles de régions reculées du pays.

 

Accord de paix et coup d'Etat

Accord de paix

Le 30 juin 2020, des dizaines de milliers de personnes manifestent pour réclamer la mise en oeuvre de réformes réclamées lors du soulèvement. 

Le 3 octobre, le gouvernement et des groupes rebelles signent à Juba, au Soudan du Sud, un accord de paix historique, qui doit mettre fin à 17 ans d'une guerre meurtrière.

Côté insurgé, l'accord est signé par le Front révolutionnaire du Soudan (FRS), une alliance de cinq groupes rebelles et quatre mouvements politiques, issus des régions du Darfour, du Kordofan-Sud et du Nil Bleu.

«Etat d'urgence économique»

Le 11 septembre, le gouvernement décrète l'"état d'urgence économique".

Le Soudan fait face à une sévère crise économique héritée de décennies de gestion désastreuse et accentuée par la pandémie de Covid-19, une inflation galopante et une dette colossale.

Le 14 décembre, les Etats-Unis retirent formellement le Soudan de leur liste des pays soutenant le terrorisme, moins de deux mois après que ce pays arabe a accepté de normaliser les relations avec Israël.

«Pire crise»

Le 8 février 2021, le Premier ministre dévoile un nouveau gouvernement comprenant sept ministres issus de groupes rebelles actifs sous l'ancien régime.

Le 22 juin, Abdallah Hamdok appelle à l'unité entre politiques et militaires, mettant en garde contre des fractures "profondément inquiétantes".

Le 17 septembre, des manifestants bloquent le principal port du pays à Port-Soudan (est).

Le 21, Khartoum annonce avoir déjoué une tentative putschiste.

A la mi-octobre, Abdallah Hamdok estime que la transition traverse sa "pire crise".

Les pro-armée plantent leurs tentes devant le palais présidentiel, entraînant en réaction des manifestations monstres en faveur d'un gouvernement civil.

Coup d'Etat

Le 25 octobre, le général Burhane dissout toutes les institutions et arrête la plupart des dirigeants civils, suscitant une avalanche de condamnations et des coupes dans l'aide internationale. Il assure toujours souhaiter "une transition vers un Etat civil et des élections libres en 2023".

Le 11 novembre, il nomme un nouveau Conseil de souveraineté, dont sont exclus les représentants du bloc réclamant un transfert du pouvoir aux civils.

Le 21, il signe un accord avec Abdallah Hamdok, qui retrouve son poste et sa liberté de mouvement, mais les manifestations continuent contre les militaires. 

Depuis le putsch, 45 manifestants ont été tués et des centaines blessés, selon un syndicat de médecins prodémocratie.

5 millions d'armes

Mais si l'union sacrée a fait long feu -- les civils entendaient récupérer seuls le pouvoir sous peu, les militaires ont imposé la prorogation pour deux ans du mandat du général Burhane à la tête de facto du pays -- les civils n'ont pas jusqu'ici présenté de plan d'action, ne cessent de répéter les diplomates qui les rencontrent régulièrement.

M. Omer lui-même en convient: "si les civils ne s'attellent pas à la tâche et si l'armée ne se retire pas de la politique, alors tous les scénarios sont possibles".

Au Soudan où, depuis des décennies, des conflits ont fait des centaines de milliers de morts, le scénario du pire pourrait déjà être enclenché, préviennent les observateurs, avec, officiellement selon Khartoum, cinq millions d'armes aux mains de civils.

Déjà, au Darfour, près de 250 civils ont été tués dans des heurts entre éleveurs et cultivateurs -- une question qui revient chaque année aux mêmes saisons et que les accords de paix avec les rebelles étaient censés régler.

Mais là aussi, la transition a péché, les forces locales qui devaient être déployées n'ont jamais été formées et "les tribus font engager leurs hommes dans les groupes armés ou paramilitaires" pour se protéger, accuse M. Abdelaziz.

De quoi, dit-il, "augmenter encore le nombre d'armes en circulation".


Le roi Salmane d’Arabie saoudite admis à l’hôpital pour un contrôle de routine

Le roi Salmane admis dans un hôpital de Djeddah pour un contrôle de routine. (Photo, SPA)
Le roi Salmane admis dans un hôpital de Djeddah pour un contrôle de routine. (Photo, SPA)
Short Url
  • Les tests devraient durer «quelques heures», a déclaré la Cour royale, citée par SPA
  • Le roi Salmane a assisté mardi à la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres

DJEDDAH: Le roi Salmane d’Arabie saoudite a été admis au King Faisal Specialist Hospital and Research Centre à Djeddah pour un contrôle de routine, a rapporté l’Agence de presse saoudienne (SPA).

Les tests devraient durer «quelques heures», a déclaré la Cour royale, citée par SPA.

Le roi Salmane a assisté mardi à la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 

 


«Nous ne ménagerons aucun effort pour protéger l’Unrwa», déclare le chef de l’agence

Le commissaire général de l’Office de secours et de travaux des nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (Unrwa), Philippe Lazzarini, s’exprime lors d’une réunion du Conseil de sécurité des nations unies sur l’Unrwa au siège de l’ONU à New York, le 17 avril 2024. (AFP)
Le commissaire général de l’Office de secours et de travaux des nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (Unrwa), Philippe Lazzarini, s’exprime lors d’une réunion du Conseil de sécurité des nations unies sur l’Unrwa au siège de l’ONU à New York, le 17 avril 2024. (AFP)
Short Url
  • Philippe Lazzarini soutient que de nombreux partisans des deux camps dans le conflit sont incapables de ressentir la moindre empathie pour ceux de l’autre
  • Il exige que les responsables du «mépris flagrant» témoigné à l’égard des locaux, du personnel et des opérations de l’ONU dans la bande de Gaza soient tenus responsables

NEW YORK: Le chef de l’agence des Nations unies qui fournit aide et développement aux réfugiés palestiniens a déclaré, mardi, à Arab News, qu’aucun effort ne serait épargné pour la protéger des «attaques féroces» de ses détracteurs.

Alors que les manifestations en lien avec la guerre à Gaza continuent de provoquer des frictions à travers le monde, notamment des querelles croissantes dans les universités américaines, Philippe Lazzarini, commissaire général de l’Office de secours et de travaux des nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (Unrwa), soutient que de nombreux partisans des deux camps dans le conflit sont incapables de ressentir la moindre empathie pour ceux de l’autre et les diabolisent donc.

«En soi, le processus de paix ne suffit pas», ajoute-t-il. «Nous avons surtout besoin d’apaisement.»

M. Lazzarini est étonné de constater que «l’empathie dans cette partie du monde est la plupart du temps unilatérale. Il s’agit soit d’empathie uniquement envers les Palestiniens, sans comprendre les Israéliens et le traumatisme que le 7 octobre a créé dans le pays, soit d’empathie uniquement envers les Israéliens, sans aucune forme d’empathie envers les Palestiniens.»

Son message principal aux étudiants américains est la nécessité de faire preuve de «compassion et d’empathie» envers les deux peuples, «parce qu’en fin de compte, nous espérons que les Israéliens et les Palestiniens vivront – et méritent d’ailleurs de vivre – en paix et en sécurité».

L’Unrwa n’a jamais été aussi souvent attaqué que ces derniers mois, poursuit M. Lazzarini.

«Jamais auparavant dix-huit pays n’avaient revu ou gelé simultanément leurs contributions», ajoute-t-il. «L’Unrwa n’a jamais été la cible d’une campagne ouverte en vue de démanteler totalement ses activités à Gaza, et peut-être au-delà. Ce que nous vivons est particulièrement brutal.»

Les membres du personnel de l’agence et les communautés qu’ils servent sont «profondément inquiets» quant à la possibilité qu’elle soit affaiblie, voire démantelée, précise-t-il, en faisant allusion à un sondage d’opinion au cours duquel entre 80 et 90% des Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie ont exprimé de telles craintes.

«Nous ne ménagerons aucun effort pour éviter le démantèlement de l’agence», affirme Philippe Lazzarini.

Il ajoute que c'est l'état d'esprit qui prévaut depuis que la crise à laquelle l’agence fait face a été portée à l’attention de l’Assemblée générale des nations unies en mars et qu’il s’est à nouveau manifesté la semaine dernière lors d’une réunion du Conseil de sécurité demandée par la Jordanie en réponse à des tentatives répétées des autorités israéliennes pour forcer l’agence à quitter Gaza.

«Nous étudions désormais le meilleur moyen de protéger l’organisation de ce type d’attaques», précise-t-il.

L’agence, qui fournit de l’aide et d’autres services à des millions de réfugiés palestiniens à Gaza et dans toute la région, a été plongée dans la crise au mois de janvier lorsque Israël a affirmé que douze employés de l’Unrwa avaient participé aux attaques menées par le Hamas contre Israël le 7 octobre.

Dans un rapport publié lundi, une équipe d’enquêteurs indépendants, dirigée par l’ancienne ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna, a rapporté que les autorités israéliennes n’avaient pas encore fourni de preuves pour étayer leurs allégations et n’avaient pas auparavant exprimé d’inquiétudes concernant les individus nommés sur les listes du personnel de l’Unrwa qu’ils reçoivent depuis 2011.

Immédiatement après les allégations israéliennes, les États-Unis, le plus grand bailleur de fonds de l’agence, et plusieurs autres donateurs majeurs ont immédiatement suspendu leur financement. Au total, dix-huit États membres de l’ONU ont suspendu leur financement, tandis que d’autres ont imposé des conditions, mettant en péril l’avenir même de l’agence. Beaucoup ont ensuite repris leur financement.

S’adressant aux journalistes à la fin de sa visite officielle à New York, M. Lazzarini a une fois de plus déclaré qu’il pensait que les attaques contre l’Unrwa n’étaient pas véritablement motivées par des préoccupations concernant la neutralité de son personnel, mais que leur objectif principal était plutôt de priver les Palestiniens de leur statut de réfugiés.

Israël accuse depuis longtemps l’agence de perpétuer délibérément le statut de réfugié de millions de Palestiniens, une allégation que Philippe Lazzarini qualifie d’«absurde».

«Au fond, c’est comme si l’on disait que la réponse humanitaire dans une zone de conflit perpétue le conflit», s’indigne-t-il.

«La réalité est que le conflit se perpétue en raison de l’absence de solution politique. L’Unrwa a été conçu comme une organisation temporaire, qui espérait mettre fin à ses activités le jour où une solution politique durable et juste serait trouvée. Et nous voici, soixante-quinze ans plus tard; ce n’est certainement pas l’Unrwa qui perpétue ce statut, mais notre incapacité collective à promouvoir une solution.»

«Si nous souhaitons sincèrement une solution à deux États et que nous réactivons la mise en œuvre d’une telle solution, le caractère temporaire de l’Unrwa peut être rétabli et l’agence pourra ainsi ouvrir la voie au futur État palestinien afin qu’il puisse lui-même assurer les services qu’elle fournit.»

Depuis le début de la guerre à Gaza en octobre, cent quatre-vingts membres du personnel de l’agence ont été tués, plus de cent soixante bâtiments de l’ONU ont été endommagés ou détruits et au moins quatre cents personnes ont été tuées alors qu’elles cherchaient refuge sous la bannière de l’ONU.

Les locaux que le personnel de l’Unrwa a été contraint d’abandonner auraient été repris et utilisés à des fins militaires par l’armée israélienne, le Hamas ou d’autres groupes armés. Plusieurs travailleurs intérimaires ont été arrêtés ou maltraités, certains ont même été torturés.

M. Lazzarini exhorte le Conseil de sécurité à mener une enquête indépendante. Il exige que les responsables du «mépris flagrant» témoigné à l’égard des locaux, du personnel et des opérations de l’ONU dans la bande de Gaza soient tenus responsables, afin «d’éviter de tels incidents dans les futures situations de conflit».

Les attaques contre l’Unrwa et ses activités se poursuivent même si les craintes selon lesquelles le réchauffement climatique entraînerait des maladies et d’autres risques pour la santé sont de plus en plus importantes. C’est particulièrement préoccupant dans le sud de Gaza – le dernier refuge de plus d’un million de personnes qui ont été contraintes de fuir d’autres parties du territoire en raison des combats. Philippe Lazzarini déclare que «le ramassage des ordures est devenu une priorité pour nos collègues afin de prévenir l’apparition de maladies», à la lumière de «l’anxiété majeure» au sein de la population face à la menace, «peut-être imminente, d’offensive militaire» d’Israël, «qui semble être remise sur la table».

Le rapport soumis par l’équipe de Colonna après son enquête, ordonnée par l’ONU pour évaluer si l’Unrwa faisait tout son possible pour garantir la neutralité de plus de trente-deux mille travailleurs, comprend plus de cinquante recommandations, notamment des améliorations du contrôle interne, un renforcement de la formation des personnes et un soutien supplémentaire des pays donateurs.

M. Lazzarini a salué le rapport et il s’est dit déterminé à mettre en œuvre ses recommandations. Il ressort clairement de ses conclusions, déclare-t-il, que «l’agence, en réalité, dispose déjà d'un certain nombre de systèmes pour traiter les questions de neutralité, bien en avance sur la moyenne des agences des Nations unies ou même des organisations non gouvernementales. En raison de la complexité de l’environnement dans lequel nous évoluons, nous devons être extrêmement vigilants et nous pouvons déployer toujours plus d’efforts.»

Il espère que, grâce au rapport et aux mesures qui seront mises en place, «le dernier groupe de donateurs aura la confiance nécessaire pour se tourner de nouveau» vers l’agence.

Cependant, il note que les États-Unis ne fourniraient plus de dons avant au moins mars 2025 en raison d’un manque de soutien politique à l’Unrwa à Washington. Il ajoute: «Ma tâche est désormais d’essayer de combler le déficit de financement qui existe actuellement» et «de faire en sorte que ce financement soit couvert jusqu'à la fin du mois de juin».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Gaza: une évacuation des civils de Rafah «  pas possible » actuellement, selon un responsable du CICR

Une évacuation de plus d'un million de civils de Rafah n'est "pas possible" dans les conditions actuelles, a prévenu mardi un responsable du CICR, alors qu'Israël menace de lancer une offensive terrestre contre cette ville de la bande de Gaza. (AFP).
Une évacuation de plus d'un million de civils de Rafah n'est "pas possible" dans les conditions actuelles, a prévenu mardi un responsable du CICR, alors qu'Israël menace de lancer une offensive terrestre contre cette ville de la bande de Gaza. (AFP).
Short Url
  • De nombreuses capitales étrangères et organisations humanitaires s'inquiètent des préparatifs en cours pour cette opération sur Rafah, dans le sud du territoire palestinien assiégé, considérée par Israël comme le dernier grand bastion du Hamas
  • "Quand on voit le niveau de destruction dans le secteur central (de Gaza) et dans le nord, on ne voit pas très bien vers où les gens pourraient être déplacés et où ils pourraient avoir des abris décents et des services de base"

DUBAI: Une évacuation de plus d'un million de civils de Rafah n'est "pas possible" dans les conditions actuelles, a prévenu mardi un responsable du CICR, alors qu'Israël menace de lancer une offensive terrestre contre cette ville de la bande de Gaza.

De nombreuses capitales étrangères et organisations humanitaires s'inquiètent des préparatifs en cours pour cette opération sur Rafah, dans le sud du territoire palestinien assiégé, considérée par Israël comme le dernier grand bastion du mouvement islamiste Hamas contre lequel il est en guerre.

"On ne voit pour l'instant aucun plan d'évacuation pour les civils" de Rafah, a déclaré Fabrizio Carboni, directeur du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), en marge d'une conférence d'aide à Dubaï, aux Emirats arabes unis.

Rafah accueille un million et demi de personnes, habitants et déplacés, confrontés à une situation humanitaire dramatique.

"Quand on voit le niveau de destruction dans le secteur central (de Gaza) et dans le nord, on ne voit pas très bien vers où les gens pourraient être déplacés et où ils pourraient avoir des abris décents et des services de base", a-t-il ajouté.

"Donc aujourd'hui, avec les informations dont on dispose (...), on ne considère pas possible une évacuation massive".

« Conséquences humanitaires dévastatrices »

Une guerre oppose depuis le 7 octobre dans la bande de Gaza Israël au Hamas, déclenchée par l'attaque sans précédent du mouvement islamiste sur le sol israélien qui a entraîné la mort de 1.170 personnes, essentiellement des civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes.

En riposte, Israël a promis de détruire le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007, et mène une offensive militaire qui a fait plus de 34.000 morts, majoritairement des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas.

Après avoir mené des bombardements aériens, l'armée israélienne a lancé fin octobre une offensive terrestre dans ce territoire, allant du nord au sud, mais elle n'est pas encore entrée à Rafah, à l'extrême sud du territoire, bombardée cependant quotidiennement par les airs.

Selon des responsables égyptiens, cités par le Wall Street Journal, en prévision à l'offensive Israël se prépare à déplacer les civils de Rafah vers la ville proche de Khan Younès, notamment, où il prévoit d'installer des abris et des centres de distribution de nourriture.

Cette opération d'évacuation durerait deux à trois semaines et serait menée en coordination avec les Etats-Unis, l'Egypte et d'autres pays arabes tels que les Emirats arabes unis, selon ces responsables.

Le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant a fait savoir qu'il étudiait une "série de mesures à prendre en préparation des opérations à Rafah, en particulier sur l'évacuation des civils".

"Une opération militaire (à Rafah) ne peut en aucun cas être menée sans conséquences humanitaires dévastatrices", a déclaré mardi à l'AFP M. Carboni lors de la Conférence internationale de Dubaï sur le développement et l'aide humanitaire (Dihad).

"Vu le niveau de destruction, la fatigue des gens, certains étant blessés ou malades, et l'accès limité à la nourriture et aux services de base, je vois (cette évacuation) comme extrêmement difficile", a-t-il ajouté.

« Aucune consultation »

Pour Jan Egeland, secrétaire général de l'ONG Norwegian Refugee Council (NRC), une offensive terrestre sur Rafah, "le plus grand camp de déplacés sur terre," conduirait à une "situation apocalyptique".

"Il n'y a aucune information (sur l'évacuation), aucune consultation avec les humanitaires", a-t-il dit à l'AFP lors de la Dihad.

Ce que les humanitaires entendent, "c'est que Netanyahu dit qu'il va attaquer mais pas de plan sur où les civils doivent aller, comment l'aide peut être fournie ou comment son acheminement peut être sécurisé".

"Il n'y a pas de stocks, il n'y a pas de carburant et plus important, il n'y a pas de liquidité. Il n'y a pas d'argent, on ne peut pas payer nos salariés", a en outre déploré le patron de NRC.

Pour les Palestiniens qui sont retournés dans des secteurs du nord de la bande de Gaza ces dernières semaines, "ce qui les attend, ce sont des ruines (...) des engins non explosés, et dans de nombreux cas davantage de bombardements", selon M. Egeland.

"Il n'y a aucun endroit sûr à Gaza si les gens quittent Rafah".