Afghanistan: la saison de bouzkachi commence avec la bénédiction des talibans

Un nuage de poussière tourbillonne au-dessus de la mêlée mettant aux prises une trentaine de chevaux massifs, qui s'adonnent au sport national afghan (Photo, AFP).
Un nuage de poussière tourbillonne au-dessus de la mêlée mettant aux prises une trentaine de chevaux massifs, qui s'adonnent au sport national afghan (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 02 novembre 2021

Afghanistan: la saison de bouzkachi commence avec la bénédiction des talibans

  • Dans cette région du pays où les montagnes de l'Hindou Kouch rencontrent les plaines d'Asie centrale, les tchopendoz, les cavaliers de bouzkachi, sont vénérés comme des héros
  • Jeu violent, mêlant force, bravoure et vitesse, il consiste à s'emparer de la lourde carcasse d’un animal et à cavaler avec autour du terrain pour la déposer dans le «cercle de justice» tracé à la chaux

QARA SHABAGH: Haji Mohammad Pahlawan fait tourner bride à son étalon gris après avoir jeté la carcasse de veau au sol, et brandit sa cravache en l'air en signe de victoire. La saison de bouzkachi a commencé dans les steppes du nord de l'Afghanistan, avec pour l'instant l'assentiment des talibans.

Un nuage de poussière tourbillonne au-dessus de la mêlée mettant aux prises une trentaine de chevaux massifs, qui s'adonnent au sport national afghan sur une plaine de la province de Samangan.

Dans cette région où les montagnes de l'Hindou Kouch rencontrent les plaines d'Asie centrale, les tchopendoz, les cavaliers de bouzkachi, sont vénérés comme des héros.

Quand Haji Mohammad, tout sourire, vient récupérer les 500 dollars (430 euros) accordés au vainqueur, il est acclamé par près de 3.000 spectateurs, tous masculins.

Le bouzkachi, dont le nom signifie en persan "traîner la chèvre", est joué depuis des siècles en Asie centrale, avec de légères variations selon les pays.

Jeu violent, mêlant force, bravoure et vitesse, il consiste à s'emparer de la lourde carcasse et à cavaler avec autour du terrain pour la déposer dans le "cercle de justice" tracé à la chaux.

Il avait été banni sous le régime fondamentaliste des talibans (1996-2001), qui le considéraient comme "immoral", et avec leur retour au pouvoir mi-août, les passionnés craignaient pour son avenir.

Mais s'ils doivent encore officialiser leur politique concernant les différents sports, les islamistes ont pour l'heure laissé la saison de bouzkachi débuter dans le nord, sans créer de difficultés.

Pour l'un des premiers tournois de la saison la semaine dernière à Qara Shabagh, à quelques kilomètres de capitale provinciale Aybak, des talibans figuraient parmi les spectateurs et un commandant local était même de la partie. 

Le bouzkachi, dont le nom signifie en persan "traîner la chèvre", est joué depuis des siècles en Asie centrale (Photo, AFP).

«Un jeu dangereux»

"Je m'en sors avec toute la gloire", savoure auprès de l'AFP Haji Mohammad, 29 ans, la tête sanglée dans un casque de tankiste datant de l'époque soviétique et le visage recouvert d'une épaisse couche de poussière.

Même si les récompenses n'atteignent plus les montants distribués lorsque les chefs de guerre régnaient encore sur la région, comme le célèbre Abdul Rachid Dostom, pour ces cavaliers endurcis gagner reste une question d'honneur.

"L'une des oreilles de mon cheval est comme le vin, et l'autre comme de la viande grillée", poétise Najibullah, le frère d'Haji Mohammad, en enfourchant son étalon bai.

"Si tu gagnes, tu t'enivres, et si tu perds, tu brûles comme une brochette de viande", ajoute le cavalier, âgé de 35 ans, et originaire du district local de Feroz Nakhchir.

Quand Haji Mohammad et ses cinq frères, tous joueurs de bouzkachi, ne sont pas sur le terrain, ils prennent soin de leurs chevaux, les nourrissant de céréales, melons ou raisins, et les préparant pour les tournois hivernaux.

Avec son 1,92 m et ses 110 kilos, Najibullah est un vrai géant, doté d'une poigne à en briser les os, mais aussi d'un sourire désarmant.

"Le bouzkachi est un jeu très dangereux", avoue-t-il, avant d'énumérer les blessures subies au fil des ans: crâne fracturé, pouces cassés, jambes tordues, lèvres éclatées et "une centaine de dents cassées".

"Mais je me sens toujours très bien et je n'ai pas peur", s'empresse-t-il d'ajouter.

Le bouzkachi attire des spectateurs en provenance de toutes les provinces septentrionales. Ils sont venus en voiture, à vélo, à pied, ou entassés à l'arrière de pickups et de pousse-pousse.

Un guerrier taliban assiste au spectacle (Photo, AFP).

Une somme conséquente

Certains arrivent tôt pour voir les tchopendoz harnacher leurs montures. Quand le tournoi commence, la foule s'amasse autour de l'aire de jeu rectangulaire, dans laquelle une cinquantaine de cavaliers ferraillent.

Quand les spectateurs surexcités referment trop le cercle, des talibans armés les repoussent à distance.

Khasta Gul, 45 ans, est l'un des plus enthousiastes. Il s'élance vers le terrain pour congratuler son tchopendoz préféré, pulvérise de l'eau dans les airs et raconte des blagues à ses voisins.

Pour récompenser son ardeur, un cavalier lui glisse même 500 afghanis (4,70 euros). "Je suis vraiment passionné par ce sport", confie-t-il. "Je soutiens nos cavaliers et aime les encourager".

Parmi les cavaliers agrippant leurs cravaches de bois et cuir se trouve un commandant taliban local, Abu Do Jana. Mais il n'est pas de taille à lutter avec le vainqueur.

Le capitaine de l'équipe des frères Pahlawan est aussi un taliban, le gouverneur du district de Feroz Nakhchir, dénommé Abbas Bromand.

"Tout le monde devrait soutenir les sportifs et cavaliers", estime-t-il. "Nous allons tenter d'organiser plus de tournois à travers le pays".

Tous les gains du jour d'Haji Mohammad s'élèvent à 800 dollars, soit plus de cinq fois le revenu mensuel moyen en Afghanistan, une somme conséquente dans un pays confronté à de graves crises économique et humanitaire.

Ses frères et lui joueront au bouzkachi chaque semaine jusqu'en avril, si les talibans continuent à le leur permettre. "Ceux qui n'ont pas d'espoir sont des perdants", lâche-t-il. "La saison s'annonce bien". 


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.


Selon une source ukrainienne , Zelensky ne serait pas prêt à signer un accord sur les minerais avec Washington

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'est « pas prêt » à signer un accord avec les États-Unis qui leur offrirait un accès préférentiel aux minerais du pays, a affirmé samedi à l'AFP une source ukrainienne proche du dossier, alors que les deux pays sont en pleines tensions.

Donald Trump réclame depuis plusieurs semaines l'équivalent de 500 milliards de dollars de terres rares, en guise de dédommagement, selon lui, du soutien américain à Kiev face à l'invasion russe, une condition qu'Ukraine ne peut accepter pour l'instant.

« Le président ukrainien n'est pas prêt à accepter le projet dans sa forme actuelle. Nous essayons toujours de faire des changements de manière constructive », a expliqué cette source ukrainienne qui a requis l'anonymat.

« Ils veulent nous soutirer 500 milliards de dollars », a-t-elle accusé.

« Quel genre de partenariat est-ce là ? (...) Et pourquoi devons-nous donner 500 milliards, il n'y a pas de réponse », a-t-elle encore dit, affirmant que Kiev avait « proposé des amendements. Ils ont été soumis ».

Depuis l'appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine le 12 février, Moscou et Washington ont exprimé leur volonté de repartir sur de nouvelles bases, et le président américain a complètement renversé la position de son pays concernant la guerre en Ukraine, en reprenant la rhétorique du Kremlin sur la responsabilité de Kiev.

Le 24 février 2022, l'Ukraine a été envahie par la Russie, le Kremlin affirmant agir pour protéger le pays contre la menace de l'OTAN et empêcher un élargissement de l'organisation.

Donald Trump souhaite négocier un accord avec l'Ukraine afin d'obtenir un accès à 50 % de ses minerais stratégiques, en guise de compensation pour l'aide militaire et économique déjà fournie à Kiev.

Le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, Mike Waltz, s'est montré très pressant vendredi.

« Le président Zelensky va signer cet accord, et vous le verrez à très court terme, et c'est bon pour l'Ukraine », a-t-il insisté lors d'un rassemblement de conservateurs près de Washington.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté avec vigueur la première proposition américaine d'accord, arguant qu'il ne pouvait « pas vendre » son pays.

Il a toutefois laissé la porte ouverte à des « investissements » américains en échange de telles garanties.

De son côté, Donald Trump affirme que les États-Unis ont dépensé 350 milliards de dollars pour s'engager dans une guerre qui ne pouvait pas être gagnée. Or, selon l'institut économique IfW Kiel, l'aide américaine globale à l'Ukraine, financière, humanitaire et militaire, a atteint 114,2 milliards d'euros (près de 120 milliards de dollars au cours actuel) entre début 2022 et fin 2024, dont 64 milliards d'euros en assistance militaire.

Le 1er février, M. Zelensky a assuré que l'Ukraine n'avait reçu à ce stade que 75 des 177 milliards de dollars d'aide votée par le Congrès américain.