PARIS: Les Français préféreront-ils les "quatre saisons"? L'équipement en pneus adaptés aux routes enneigées, qui devient obligatoire dans de nombreuses communes de montagne, pourrait profiter davantage à ces pneus polyvalents qu'aux pneus hiver, selon des professionnels du secteur.
A partir du 1er novembre, dans les communes désignées par les préfets, les voitures doivent désormais soit détenir des chaînes à neige, soit être équipées de quatre pneus hiver ou toutes saisons (marqués "M+S", "M.S" ou "M&S"), et ce jusqu'au 31 mars.
Si le gouvernement a décrété pour cet hiver une saison de tolérance, ce décret pourrait profiter à ces pneus toutes saisons, plus polyvalents que les pneus hiver.
Déjà vendu par Goodyear à la fin des années 1970, le pneu "toutes saisons" présente une sculpture à lamelles assez proche du pneu hiver, et reste performant entre -10°C et +30 °C. Il permet donc de garder la même monte toute l'année, évitant le changement de pneus aux premiers frimas.
"Le +all season+ a commencé à se faire une place en 2018, et on constate depuis l'année dernière son explosion en Italie, en France, en Belgique", indique Alejandro Recasens, directeur France et Europe de l'ouest chez Pirelli. "Il pèse 20% du marché français en volume cette année, soit 7 millions de pneus. Cette année, la loi Montagne va le catapulter: on prévoit d'atteindre 25% en 2022".
Les pneus hiver pèsent cette année 13% du marché et devraient atteindre 14-15% l'année prochaine, selon Pirelli. Une bonne nouvelle pour le chiffre d'affaires des pneumaticiens, le "quatre saisons" étant 10 à 15% plus cher qu'un pneu été.
C'est aussi un coup de projecteur sur les pneumatiques, dont l'entretien est plutôt délaissé dans le sud de l'Europe, alors que les automobilistes nordiques s'équipent pour conduire par mauvais temps.
"On repart enfin sur du conseil", se félicite Gérald Tisseur, responsable de trois centres Point-S entre Lyon et les Alpes. "Si vous allez une fois au ski, mettez du 4 saisons, si vous montez souvent voir vos parents, mettez du pneu hiver".
Il explique que les professionnels de la route, les commerciaux, les flottes se pressent depuis quelques semaines pour s'équiper dans ses magasins, "avant les particuliers qui montent à l'assaut des magasins avant les vacances".
«Bon compromis», mais moindre performance
"C'est un bon compromis pour les personnes résidentes des zones concernées mais qui n'évoluent pas forcément sur un terrain enneigé type haute montagne", souligne de son côté le distributeur Carter Cash.
Comme tous les compromis, il a ses inconvénients: les meilleurs restent moins performants sur la neige qu'un pneu hiver, mais montrent aussi des "performances en freinage légèrement en retrait par rapport à celles des meilleurs pneus été" sur des routes mouillées ou sèches, au-dessus de 7°C, et peuvent augmenter la consommation, explique Michelin.
"Il y a un effet de mode mais ce n'est pas encore un pneu abouti: on est au début du quatre saisons", estime Gérald Tisseur.
Chez Michelin, le marché "toutes saisons" a progressé de 30 à 50% par an en France depuis 2015. "Ce marché a été le seul à continuer à progresser pendant la pandémie", a souligné Scott Clark, directeur du business automobile chez le groupe clermontois.
Le Bibendum, qui a renouvelé sa gamme "CrossClimate" en septembre, prévoit que le pneu "toutes saisons" représentera à terme 30% du marché.
Parmi les pionniers de ce pneu, le fabricant hollandais Vredestein prévoit de son côté des ventes en hausse de 10% l'année prochaine en France, et +25% pour ses ventes de "toutes saisons".
"C'est un pneu plus pointu, plus coûteux, en termes de technologie, de recherche", souligne M. Recasens chez Pirelli, qui a aussi renouvelé sa gamme "Cinturato" cette année.
"Cela va bénéficier davantage aux fabricants qui ont un ADN technologique qu'aux marques qui ont une stratégie de rapport qualité-prix, comme les importations asiatiques", selon lui.