CHASSENEUIL-DU-POITOU: Pour répondre au malaise des magistrats et aux critiques sur la lenteur de la machine judiciaire, le président français Emmanuel Macron a lancé lundi des »États généraux de la justice », chargés de proposer des réformes pour « remettre à plat » le système.
Dans un discours d'ouverture prononcé depuis le Palais des congrès de Poitiers (centre-ouest), le chef de l'État a énuméré les difficultés: délais trop longs, inflation des normes, judiciarisation des relations sociales, défaut d'information des justiciables.
Il a aussi souhaité une plus grande responsabilité des magistrats. Mais sans suggérer de nouveaux moyens pour la justice, ce qu'attendent beaucoup de professionnels.
Autant de pistes que devront examiner dans les quatre mois ces États généraux, avant de formuler d'ici février 2022 des propositions de réforme « systémique » de la justice qui ne pourraient se concrétiser que dans un prochain quinquennat, l'élection présidentielle française ayant lieu en avril.
Dans son intervention, Emmanuel Macron a insisté sur « les lenteurs » et les « lourdeurs du service public de la justice ». « Nous sommes dans un monde où on peut suivre le colis que l'on a commandé à la minute et où ce qui est le cœur de notre vie, ce qui nous empêche de dormir, on ne sait pas où ça en est », a regretté le chef de l'État.
« Les lenteurs sont un sujet mais notamment lié au manque criant de personnel, qui n'a pas été évoqué », a réagi Céline Parisot, présidente de l'Union syndicale des magistrats français (USM). « Il y a beaucoup trop de chantiers ouverts en même temps(...) Comment remettre à plat toute l'organisation judiciaire de A à Z en quatre mois ? », a-t-elle ajouté.
Cette vaste consultation va réunir pendant plusieurs mois tout l'écosystème de la justice (juges, procureurs, greffiers, auxiliaires, avocats, mandataires huissiers, surveillants pénitentiaires...) ainsi que des citoyens volontaires.
Elle sera pilotée par une commission indépendante présidée par le haut fonctionnaire Jean-Marc Sauvé - par ailleurs président de la commission d'enquête qui a publié début octobre un rapport accablant sur les agressions sexuelles sur mineurs dans l'Église catholique.
Le chef de l'État avait annoncé ces États généraux en juin, après avoir reçu les deux plus hauts magistrats de France, Chantal Arens, la première présidente de la Cour de cassation, et François Molins, le procureur général de la Cour de cassation.
Inquiets des « mises en cause systématiques de la justice », critiquée pour sa lenteur et son laxisme supposés par des syndicats de police et des responsables politiques, ils lui avait exprimé le malaise des magistrats et réclamé cet exercice. Un malaise accentué par la mise en examen du ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti pour prise illégale d'intérêt.
A quelques mois de l'élection présidentielle, Emmanuel Macron - pas encore officiellement candidat à sa réélection - a condamné dans son discours les remises en cause du droit européen, une « vieille maladie française », en allusion aux attaques en ce sens de plusieurs candidats de droite déjà déclarés.