HANOÏ, Vietnam : Dans l'atmosphère chaude et étouffante de son atelier, à Hanoï, Tran Thanh Thuc découpe de petites pièces de tissu dans un précieux foulard de soie afin de les coller pour en faire des œuvres d'art.
Depuis quarante ans, elle recrée des paysages vietnamiens avec des morceaux de tissus aux couleurs vives, découpés dans des écharpes, dans des "ao dai" traditionnels (la longue robe traditionnelle vietnamienne fendue) ou tout autre tissu amassé pendant les années 80, lorsqu'elle vivait dans la plus grande précarité.
"À l'époque, je cherchais des bouts de laine, du tissu en velours ou d'autres pièces très simples pour réaliser mes premiers tableaux", raconte-t-elle. "Maintenant, il m'arrive de les découper dans les très beaux foulards en soie envoyés par mes amis vivant à l'étranger".
Utilisant souvent des centaines de milliers de morceaux de tissu pour représenter des arbres, des rivières, le ciel... l'artiste de 61 ans n'ose pas utiliser un ventilateur ou la climatisation, même quand la chaleur est accablante, au coeur de l'été, dans la capitale vietnamienne.
"Si le ventilateur est allumé, les morceaux s'envolent", dit-elle. "Alors quand je travaille, dans un environnement compliqué... il n'y a que moi et le tissu".
Elle a longtemps cumulé cette activité artistique avec son emploi de fonctionnaire. Elle s'adonnait à sa passion la nuit.
Son destin a commencé à changer lorsqu'un collectionneur américain a acheté une de ses œuvres en 2000, elle a alors été invitée à des expositions à travers tout le Vietnam. Aujourd'hui, ses créations se vendent entre 850 et 4.300 euros.
"Je suis heureuse car cela me permet d'avoir une vie assez confortable et je suis libre de faire ce que je veux", dit-elle. "Mes oeuvres résument l'amour et la beauté que je ressens après avoir voyagé à travers le pays".