Timing « révélateur » de la visite de Nechirvan Barzani en Turquie

Le président turc Recep Tayyip Erdogan, à droite, et Nechirvan Barzani, président de la région kurde autonome du nord de l'Irak, se préparent pour des photos avant une réunion à Ankara, en Turquie, le vendredi 4 septembre 2020 (Photo, AP).
Le président turc Recep Tayyip Erdogan, à droite, et Nechirvan Barzani, président de la région kurde autonome du nord de l'Irak, se préparent pour des photos avant une réunion à Ankara, en Turquie, le vendredi 4 septembre 2020 (Photo, AP).
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Publié le Mardi 08 septembre 2020

Timing « révélateur » de la visite de Nechirvan Barzani en Turquie

  • Le gouvernement régional kurde « accorde beaucoup de valeur depuis longtemps à son indépendance en matière de politique étrangère et à son équilibre entre divers acteurs »
  • Samuel Ramani, analyste du Moyen-Orient à l'Université d'Oxford, pense que la relation entre la Turquie et le Kurdistan irakien est indépendante de ses hostilités militaires contre les Kurdes syriens ainsi que de la relation plus vaste Turquie-Irak

ANKARA: La Turquie a envoyé un signal clair sur son intention de contester les ambitions de la France dans la région en organisant des réunions avec le leader kurde irakien Nechirvan Barzani le 4 septembre.

Le timing choisi par Barzani pour la visite était révélateur, deux jours seulement après celle du président français Emmanuel Macron à Bagdad, venu montrer son soutien à la souveraineté irakienne.

 La Turquie et la France sont devenues des rivales régionales suite à leurs grandes divergences à l’égard des enjeux en Méditerranée orientale et concernant les droits sur le gaz en mer.

Dans ce contexte, Barzani, président du Gouvernement régional kurde d’Irak (GRK), a mené une délégation en Turquie où il a tenu une série de réunions. « Les deux parties ont souligné le désir de développer les relations entre la région du Kurdistan et la Turquie, notamment en augmentant le volume des échanges et la coordination économique commune. Ils ont exprimé l'importance des investissements turcs dans divers secteurs de la région du Kurdistan », a déclaré vendredi la présidence de la région du Kurdistan.

L'accord pétrolier entre le GRK et la Turquie autorisant les exportations vers le marché turc a déclenché un conflit entre Bagdad et Erbil concernant les mécanismes de partage des revenus pétroliers.

Selon les médias kurdes irakiens, Barzani a transmis le message du Premier ministre irakien à Erdogan demandant le retrait des troupes turques d’Irak et partageant les détails d’un accord pétrolier bilatéral avec Bagdad. Ankara n'a pas fait de commentaires sur l’issue de la visite.

Samuel Ramani, spécialiste du Moyen-Orient à l’université d’Oxford, pense que les relations de la Turquie avec le Kurdistan irakien sont indépendantes de ses hostilités militaires envers les Kurdes syriens, ainsi que des relations plus vastes qui lient les deux états turc et irakien.

« L'engagement entre Barzani et la Turquie n'est pas très surprenant. Le facteur important est la France. Sous la présidence Macron, elle a tenté de reprendre son rôle d'arbitre entre l'Irak et le GRK.

Paris a cherché à tirer parti des récentes frappes transfrontalières de la Turquie en Irak, qui ont été mal accueillies par Bagdad et considérées comme une violation de leur souveraineté » a-t-il déclaré à Arab News.

Selon Ramani, la France espérait que cetengagement diplomatique - avec trois réunions distinctes entre les responsables irakiens et français ce mois-ci - rapprocherait le GRK de son bercail irakien tout en l’éloignant de la Turquie.

« Mais le GRK accorde, depuis longtemps, beaucoup d’importance à son indépendance en matière de politique étrangère, en tentant constamment d’obtenir un équilibre dans ses relations avec les différents acteurs. Le GRK a fait l'éloge de Qassem Soleimani après sa mort et a parallèlement cultivé des liens avec l'Iran et Israël. Il compte conserver cette position de neutralité vis-à-vis de ce conflit franco-turc. »

Cependant, la visite de Barzani a suscité des critiques de la part de la communauté kurde de Turquie qui lui reproche d’avoir mis l’accent sur le renforcement des relations commerciales plutôt que de tenter de résoudre l’ancestral problème kurde.

Ankara a lancé une opération transfrontalière dans le nord de l'Irak à la mi-juin contre les repaires du Parti clandestin des travailleurs du Kurdistan (PKK), ce qui a provoqué l’ire de Bagdad. Barzani a quant à lui été menacé récemment par le PKK en raison de ses liens avec la Turquie.

Abdulla Hawez, un chercheur indépendant d'Erbil, a déclaré que « la visite semble avoir été planifiée brusquement après la visite de Macron ; c'est un message clair d'Erdogan indiquant que les dirigeants kurdes irakiens resteront dans son orbite et qu'ils ne pourront pas être utilisés par la France dans sa querelle régionale avec la Turquie ».

Bekir Aydogan, spécialiste turc du Kurdistan irakien, confirme. « Compte tenu de la rencontre du président français à Bagdad avec des responsables irakiens, dont Barzani, et de l'accent mis par Macron sur la souveraineté de l'Irak lors de sa visite, il n'est pas exagéré de dire que la Turquie, en accueillant Barzani à Ankara, voulait rappeler à la France qu’elle entretient des relations étroites avec le GRK ».

Le ministère turc des Affaires étrangères a également été sévèrement critiqué pour avoir masqué le drapeau kurde dans les publications faites sur les réseaux sociaux au sujet de la réunion, afin de satisfaire le partenaire nationaliste du gouvernement turc, le MHP (Le Parti d'action nationaliste). Alors que les photos partagées par le ministre des Affaires étrangères Mevlut Cavusoglu sur Twitter ne montrait que des drapeaux turcs et irakiens, celles que Barzani a publié montraient que le drapeau kurde était également présent.

Pour Aydogan, les liens étroits de Barzani avec Ankara et son opposition à la présence du PKK au GRK indiquent que l'emprise de la Turquie sur le Gouvernement Régional Kurde (GRK) est de plus en plus forte. « Malgré le fort sentiment anti-kurde au sein de la politique intérieure turque, comme en témoignent les débats sur la présence du drapeau officiel du GRK lors de la réunion, cette visite a rappelé à Ankara que la région du Kurdistan irakien est toujours un acteur indispensable dans la région », a-t-il conclu.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur www.arabnews.com


Manipulation médiatique et instrumentalisation de Forbes France au service de la propagande royale du Maroc

Le bâtiment des galeries du magazine Forbes. 62, 5th avenue, Manhattan, New York, NYC, USA. (Photo par : -/VW Pics/Universal Images Group via Getty Images)
Le bâtiment des galeries du magazine Forbes. 62, 5th avenue, Manhattan, New York, NYC, USA. (Photo par : -/VW Pics/Universal Images Group via Getty Images)
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  • Les chiffres sont accablants : sur 49 articles publiés par Forbes France sur le Maroc, près de la moitié sont des contenus payants étiquetés « Brandvoice », financés directement ou indirectement par des proches du régime marocain.
  • Dominique Busso, le PDG de l’édition française, ne cache pas que ces transactions douteuses sont monnaie courante.

RIYAD : L’enquête explosive menée par Marianne, complétée par les révélations incisives d’Africa Intelligence, lève le voile sur un système d’influence sophistiqué dans lequel le Maroc, sous couvert de soft power, orchestre une propagande méthodique via des relais médiatiques internationaux.

Forbes France, autrefois symbole d’excellence journalistique, apparaît aujourd’hui comme un instrument docile entre les mains des autorités marocaines.

Les chiffres sont accablants : sur 49 articles publiés par Forbes France sur le Maroc, près de la moitié sont des contenus payants étiquetés « Brandvoice », financés directement ou indirectement par des proches du régime de Mohammed VI.

Ces textes déguisés en journalisme peignent un portrait idyllique du royaume, occultant sciemment la répression des libertés individuelles, les inégalités criantes et les réalités économiques sombres du pays. Il s'agit d'une véritable mascarade qui sape l’intégrité journalistique et trompe délibérément les lecteurs.

Forbes France : un média au service de la propagande royale

Plus qu’un simple complice passif, le magazine semble s’être vendu au plus offrant, troquant son indépendance contre des millions d’euros provenant des cercles de pouvoir marocains.

Dominique Busso, le PDG de l’édition française, ne cache pas que ces transactions douteuses sont monnaie courante. Pire, selon des sources internes, le Maroc achète régulièrement des articles pour redorer l’image de son régime monarchique, tout en évitant toute transparence sur les financements réels.

Abdelmalek Alaoui, présenté comme un analyste ou un économiste, mais qui n'est en réalité qu'un agent de la Direction générale des études et de la documentation (DGED), est identifié comme un rouage clé de cette machinerie propagandiste.

Des courriels internes obtenus par Marianne montrent comment Alaoui et d’autres agents influencent directement la ligne éditoriale de ces articles en faveur de la monarchie marocaine. Forbes France ne serait rien d’autre qu’un outil au service de cette désinformation orchestrée depuis Rabat.

Un documentaire sous influence : glorification du règne de Mohammed VI

Les tentacules de cette stratégie de manipulation s’étendent bien au-delà de la presse écrite. Africa Intelligence révèle qu’un documentaire diffusé sur Public Sénat à l’approche d’une visite officielle d’Emmanuel Macron au Maroc a été conçu comme une véritable opération de communication. 

Réalisé par des proches de l’élite politique marocaine et française, ce film, présenté comme un travail journalistique, n’est rien d’autre qu’une glorification du roi Mohammed VI.

Tout en vantant les prétendus succès du roi, notamment en matière de condition féminine et de développement économique, le documentaire escamote les critiques concernant les inégalités sociales et la répression des libertés. Il s'agit là d'une manipulation éhontée, à peine voilée, où les consignes éditoriales semblent avoir été dictées par Rabat pour protéger l’image royale.

Le Maroc : un État stratège du mensonge médiatique

Ce qui se dévoile ici est bien plus qu’un simple scandale médiatique. Il s’agit d’une stratégie délibérée et agressive de soft power, dans laquelle le Maroc utilise des moyens financiers considérables pour infiltrer et manipuler les récits médiatiques internationaux.

En contrôlant la narration sur des plateformes influentes telles que Forbes France, le royaume impose une version réécrite et aseptisée de la réalité, tout en muselant les voix dissidentes.

Ces pratiques immorales révèlent la complicité choquante de médias qui, en échange d'avantages financiers, renoncent à leur devoir d'informer honnêtement. Ce brouillage systématique de la frontière entre journalisme et propagande constitue une attaque directe contre l’intégrité de l’information.

Un appel urgent à l’éthique journalistique

Les révélations de Marianne et d’Africa Intelligence mettent en lumière le manque de diligence de la part d'acteurs tels que Forbes France.

Il est désormais impératif de mener une enquête indépendante sur ces pratiques. En effet, tant que des médias accepteront de se vendre au plus offrant, les citoyens continueront à être trompés par des récits soigneusement fabriqués pour servir des intérêts politiques. 

L’intégrité de la presse n’est pas à vendre, il est temps de le rappeler.


Les États-Unis débloquent 117 millions de dollars pour les Forces libanaises

Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
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  • Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».
  • C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

WASHINGTON : Lles États-Unis ont annoncé  samedi le transfert de 117 millions de dollars destinés à soutenir les forces de l'ordre et l'armée libanaises, à l'issue d'une réunion de donateurs internationaux, jeudi.

Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».

C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

Un cessez-le-feu a pris effet fin novembre entre le mouvement islamiste pro-iranien Hezbollah et Israël, après plus d'un an de bombardements de part et d'autre, ainsi qu'une incursion des forces israéliennes en territoire libanais à partir de fin septembre.

L'enveloppe annoncée samedi par le département d'État « démontre son engagement à continuer à travailler avec ses partenaires et alliés pour s'assurer que le Liban bénéficie du soutien nécessaire pour renforcer la sécurité du pays et de la région ».

Samedi, le président libanais, Joseph Aoun, a réclamé le retrait de l'armée israélienne « dans les délais fixés » par l'accord de cessez-le-feu.

Ce dernier prévoit le déploiement de l'armée libanaise aux côtés des Casques bleus dans le sud du pays et le retrait de l'armée israélienne dans un délai de 60 jours, soit d'ici au 26 janvier.

Le Hezbollah doit, pour sa part, retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 km de la frontière libano-israélienne. 


Manifestation pour revendiquer la libération de l'opposante Abir Moussi

Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
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  • Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.
  • Soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

TUNIS : Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.

Brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Liberté pour Abir » ou « Nous sommes des opposants, pas des traîtres ! », ils étaient entre 500 et 1 000, selon des journalistes de l'AFP. Beaucoup portaient des drapeaux tunisiens et des photos de la dirigeante du PDL.

Ils ont critiqué virulemment à la fois le président Kaïs Saied et le parti islamo-conservateur d'opposition Ennahdha. Mme Moussi, ex-députée de 49 ans, est en détention depuis son arrestation le 3 octobre 2023 devant le palais présidentiel, où, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de M. Saied.

Mme Moussi fait l'objet de plusieurs accusations, dont celle particulièrement grave de tentative « ayant pour but de changer la forme de l'État », soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

Les manifestants ont dénoncé le décret 54 sur les « fausses nouvelles », en vertu duquel Mme Moussi est poursuivie dans cette affaire, et dont l'interprétation très large a entraîné l'incarcération depuis septembre 2022 de dizaines de politiciens, d'avocats, de militants ou de journalistes.

Pour Thameur Saad, dirigeant du PDL, emprisonner Mme Moussi pour des critiques envers l'Isie « n'est pas digne d'un pays se disant démocratique ». « Les prisons tunisiennes sont désormais remplies de victimes du décret 54 », a renchéri à l'AFP Karim Krifa, membre du comité de défense de Mme Moussi.

D'autres figures de l'opposition, dont le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, sont également emprisonnées.

Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, l'opposition et les ONG tunisiennes et étrangères ont déploré une régression des droits et des libertés en Tunisie. Le chef de l'État a été réélu à une écrasante majorité de plus de 90 % des voix le 6 octobre, lors d'un scrutin marqué toutefois par une participation très faible (moins de 30 %).