MILAS: Le feu a atteint mercredi une centrale thermique qui a dû être évacuée dans le sud de la Turquie, alors que les incendies sans précédent auxquels fait face le pays depuis plus d'une semaine mettent à l'épreuve le pouvoir du président Erdogan.
Une équipe de l'AFP a pu voir des pompiers, la police et des habitants fuir la centrale thermique située près de la ville de Milas, tandis que les flammes s'approchaient.
Les autorités locales avaient auparavant indiqué que les réservoirs d'hydrogène utilisés pour refroidir la centrale, qui fonctionne au fuel et au charbon, avaient été vidés et emplis d'eau par précaution.
Des images mises en ligne par le maire de Milas, Muhammet Tokat, montraient un feu violent aux portes de la centrale.
"La centrale est en cours d'évacuation totale", a tweeté M. Tokat.
Le feu avait d'abord pu être maîtrisé mercredi grâce à deux avions bombardiers d'eau envoyés par l'Espagne et à des hélicoptères, qui avaient déversé de l'eau sur les sommets boisés et zones résidentielles proches. Mais les flammes sont reparties dans l'après-midi.
"On vous supplie et vous avertit depuis des jours. L'incendie a encerclé la centrale", avait tweeté dans la journée le maire de Milas, demandant "qu'un avion bombardier d'eau soit envoyé ici de manière urgente".
Erdogan
Critiqué sur sa gestion de ces incendies, qui ont déjà fait huit morts, le président Recep Tayyip Erdogan, qui donnait une interview à la télévision dans la soirée, a admis que la centrale "risquait d'être détruite par le feu".
Plus de 180 feux ont ravagé des forêts et des terres agricoles, ainsi que des zones habitées sur les côtes méditerranéennes de la Turquie depuis mercredi dernier.
Les incendies ont aussi gravement touché les sites touristiques qui avaient récemment pu reprendre leurs activités après des mois de restrictions liées à la pandémie de la Covid-19.
Selon le service de surveillance par satellite de l'Union européenne, la "puissance radiative" des incendies en Turquie a atteint une intensité "sans précédent" depuis 2003.
L'opposition a reproché au président Erdogan d'avoir échoué à maintenir sa flotte de bombardiers d'eau et d'avoir mis du temps à accepter l'aide internationale.
Le Haut Conseil turc de l'audiovisuel (RTUK en turc) a de son côté mis en garde les chaînes de télévision contre la diffusion d'informations sur les incendies qui pourraient "provoquer la peur et l'inquiétude" au sein de la population.
M. Erdogan, dans son interview à la télévision, a accusé l'opposition de tenter de tirer un bénéfice politique de la situation, alors que des pays voisins comme la Grèce sont aussi touchés par les incendies.
"Les feux de forêt sont une menace internationale tout comme la pandémie de Covid-19", s'est-il défendu.
"Comme partout dans le monde, il y a eu une forte augmentation des feux de forêt dans notre pays. Il ne devrait pas y avoir de place pour la politique dans cette question", a-t-il ajouté.
Une guerre
Lors des premiers jours des incendies, des chroniqueurs sur les médias pro-gouvernementaux avaient accusé le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), une organisation considérée comme terroriste par la Turquie et ses alliés occidentaux, d'en être responsable.
Mais les autorités citent désormais la vague de chaleur extrême qui continue de frapper le sud de la Turquie.
Selon des experts, le changement climatique dans des pays comme la Turquie augmente la fréquence et l'intensité des incendies de forêt.
Le ministre turc de l'Agriculture, Bekir Pakdemirli, a déclaré que les températures dans la ville égéenne de Marmaris avaient atteint un record historique de 45,5 degrés cette semaine.
"Nous menons une guerre", a déclaré le ministre aux journalistes. "Nous devons garder notre moral et notre motivation. J'exhorte tout le monde à être patient", a-t-il ajouté.