A Tunis, les islamo-conservateurs d'Ennahdha pointés du doigt

Des députés du parti Ennahda à l’Assemblée des représentants du peuple, à Tunis, le 26 janvier 2021. Archives / AFP
Des députés du parti Ennahda à l’Assemblée des représentants du peuple, à Tunis, le 26 janvier 2021. Archives / AFP
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Publié le Samedi 31 juillet 2021

A Tunis, les islamo-conservateurs d'Ennahdha pointés du doigt

  • Membre de toutes les coalitions gouvernementales depuis la révolution de 2011, le principal parti de l'assemblée crie au «coup d'Etat». Mais après dix ans aux responsabilités, Ennahdha rencontre une hostilité croissante de la population
  • «Corrompus», «hypocrites», «menteurs»: dans la vieille ville de Tunis, l'immense majorité des habitants croisés par l'AFP tiennent ce parti islamo-conservateur comme le principal responsable des déboires du pays, confronté à une triple crise

TUNIS : Sous le soleil de plomb de Tunis, Radhi Al-Chawich partage tranquillement une cigarette avec quelques clients. Mais lorsque ce cafetier avoue être un soutien du parti d'inspiration islamiste Ennahdha, qui cristallise le mécontentement de nombreux Tunisiens, un orage politique éclate.

Les habitués présents éructent. A cinq contre un, ils se liguent tous contre le sexagénaire. "Tu racontes n'importe quoi!" La scène concentre tout ce qui agite ce petit pays d'Afrique du Nord depuis le coup de force du président Kais Saied. Après des mois de conflit ouvert avec Ennahdha, le chef de l'Etat a pris le pouvoir dimanche et suspendu le Parlement pour un mois. 

Membre de toutes les coalitions gouvernementales depuis la révolution de 2011, le principal parti de l'assemblée crie au "coup d'Etat". Mais après dix ans aux responsabilités, Ennahdha rencontre une hostilité croissante de la population.

"Corrompus", "hypocrites", "menteurs": dans la vieille ville de Tunis, l'immense majorité des habitants croisés par l'AFP tiennent ce parti islamo-conservateur comme le principal responsable des déboires du pays, confronté à une triple crise, politique, sociale et sanitaire.

Un parfum de dégagisme qui attriste M. Al-Chawich. Avec le coup de force du président, "on est revenu au temps de la dictature", estime ce commerçant. Ennahdha est "un parti reconnu, (...) arrivé deuxième en 2014, premier en 2019", rappelle-t-il. En cas de contestation, "c'est l'urne qui doit décider."

Face au risque d'escalade, le moustachu confie avoir "peur pour le pays: Je ne veux pas qu'il sombre dans le chaos." Si la communauté internationale s'inquiète également de voir le berceau des printemps arabes régresser vers l'autoritarisme, voire la violence, c'est le calme qui règne pour l'instant à Tunis.

Après avoir réuni quelques centaines de partisans devant le Parlement lundi, Ennahdha joue désormais la carte de l'apaisement. La formation réclame un "dialogue national" et propose d'organiser de nouvelles élections législatives et présidentielle pour sortir de l'impasse. 

Electeurs déçus

Une attitude pragmatique, selon le politologue Selim Kharrat. La manifestation de lundi démontre "l'échec d'Ennahdha à mobiliser sa base", estime-t-il, et "un rapport de force raté avec le président." "Ennahdha a toujours été prêt aux compromis car le parti est obsédé par sa survie, hanté par la possibilité d'une nouvelle interdiction comme sous la dictature de Ben Ali", poursuit-il.

En dix ans de pouvoir, il n'a jamais réussi à obtenir la majorité absolue, ce qui l'a forcé à contracter des alliances contre-nature avec des partis libéraux dans un hémicycle désormais très fragmenté. De quoi dérouter nombre de ses électeurs: entre 2011 et 2019, le parti a perdu plus d'un million de voix.

Dans les ruelles pavées de la médina, Ismael Mazigh fait partie des déçus. Lors des premières élections de la toute nouvelle démocratie tunisienne en 2011, cet ancien ouvrier textile s'est laissé séduire par ce parti qui exaltait l'identité arabo-musulmane et promettait aux Tunisiens sécurité, développement et justice.

"Ils ont fait beaucoup, beaucoup de promesses, et en fait c'était des mensonges", râle le quadragénaire, au chômage depuis dix ans: "Ils ont travaillé uniquement pour leurs intérêts personnels, rien de plus." Naguère uni autour de son chef, Rached Ghannouchi, Ennahdha se divise désormais aussi en interne, entre démissions de cadres et critiques ouvertes entre membres. 

L'image du parti a été écornée début juillet, lorsqu'en plein rebond de l'épidémie de Covid-19, un de ses dirigeants, Abdelkarim Harouni, a lancé un ultimatum au gouvernement pour accélérer le dédommagement des victimes de la dictature. Une demande indécente vu les crises en cours, selon de nombreux Tunisiens.

La formation a également subi un nouveau coup dur mercredi, avec l'annonce d'une enquête visant le parti pour corruption, basée sur des soupçons de financements étrangers de sa campagne électorale de 2019. Electeur resté fidèle à Ennahdha depuis la révolution, Taoufik Ben Hmida jure qu'on ne l'y reprendra plus. Pour ce marchand de vêtements de 47 ans, "ils ont baissé la tête, alors que la corruption est partout en Tunisie."


Les États-Unis débloquent 117 millions de dollars pour les Forces libanaises

Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
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  • Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».
  • C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

WASHINGTON : Lles États-Unis ont annoncé  samedi le transfert de 117 millions de dollars destinés à soutenir les forces de l'ordre et l'armée libanaises, à l'issue d'une réunion de donateurs internationaux, jeudi.

Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».

C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

Un cessez-le-feu a pris effet fin novembre entre le mouvement islamiste pro-iranien Hezbollah et Israël, après plus d'un an de bombardements de part et d'autre, ainsi qu'une incursion des forces israéliennes en territoire libanais à partir de fin septembre.

L'enveloppe annoncée samedi par le département d'État « démontre son engagement à continuer à travailler avec ses partenaires et alliés pour s'assurer que le Liban bénéficie du soutien nécessaire pour renforcer la sécurité du pays et de la région ».

Samedi, le président libanais, Joseph Aoun, a réclamé le retrait de l'armée israélienne « dans les délais fixés » par l'accord de cessez-le-feu.

Ce dernier prévoit le déploiement de l'armée libanaise aux côtés des Casques bleus dans le sud du pays et le retrait de l'armée israélienne dans un délai de 60 jours, soit d'ici au 26 janvier.

Le Hezbollah doit, pour sa part, retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 km de la frontière libano-israélienne. 


Manifestation pour revendiquer la libération de l'opposante Abir Moussi

Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
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  • Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.
  • Soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

TUNIS : Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.

Brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Liberté pour Abir » ou « Nous sommes des opposants, pas des traîtres ! », ils étaient entre 500 et 1 000, selon des journalistes de l'AFP. Beaucoup portaient des drapeaux tunisiens et des photos de la dirigeante du PDL.

Ils ont critiqué virulemment à la fois le président Kaïs Saied et le parti islamo-conservateur d'opposition Ennahdha. Mme Moussi, ex-députée de 49 ans, est en détention depuis son arrestation le 3 octobre 2023 devant le palais présidentiel, où, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de M. Saied.

Mme Moussi fait l'objet de plusieurs accusations, dont celle particulièrement grave de tentative « ayant pour but de changer la forme de l'État », soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

Les manifestants ont dénoncé le décret 54 sur les « fausses nouvelles », en vertu duquel Mme Moussi est poursuivie dans cette affaire, et dont l'interprétation très large a entraîné l'incarcération depuis septembre 2022 de dizaines de politiciens, d'avocats, de militants ou de journalistes.

Pour Thameur Saad, dirigeant du PDL, emprisonner Mme Moussi pour des critiques envers l'Isie « n'est pas digne d'un pays se disant démocratique ». « Les prisons tunisiennes sont désormais remplies de victimes du décret 54 », a renchéri à l'AFP Karim Krifa, membre du comité de défense de Mme Moussi.

D'autres figures de l'opposition, dont le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, sont également emprisonnées.

Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, l'opposition et les ONG tunisiennes et étrangères ont déploré une régression des droits et des libertés en Tunisie. Le chef de l'État a été réélu à une écrasante majorité de plus de 90 % des voix le 6 octobre, lors d'un scrutin marqué toutefois par une participation très faible (moins de 30 %).


L'Égypte annonce que 50 camions-citernes de carburant entreront chaque jour dans la bande de Gaza

Le ministère palestinien de la Santé a déclaré qu'une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée, a tué cinq personnes mardi, l'armée israélienne confirmant avoir mené une attaque dans la région. (Photo d'archives de l'AFP)
Le ministère palestinien de la Santé a déclaré qu'une frappe aérienne israélienne sur le camp de réfugiés de Jénine, en Cisjordanie occupée, a tué cinq personnes mardi, l'armée israélienne confirmant avoir mené une attaque dans la région. (Photo d'archives de l'AFP)
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  • Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a annoncé samedi que 50 camions-citernes chargés de carburant devaient entrer dans la bande de Gaza à partir de dimanche, marquant le début du cessez-le-feu.
  • M. Abdelatty, dont le pays, le Qatar et les États-Unis ont servi de médiateur, a déclaré que l'accord prévoyait « l'entrée de 600 camions par jour dans la bande, dont 50 de carburant ».

LE CAIRE : Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a annoncé samedi que 50 camions-citernes chargés de carburant devaient entrer dans la bande de Gaza à partir de dimanche, marquant le début du cessez-le-feu.

M. Abdelatty, dont le pays, le Qatar et les États-Unis ont servi de médiateur, a déclaré que l'accord prévoyait « l'entrée de 600 camions par jour dans la bande, dont 50 de carburant ».

La trêve devrait entrer en vigueur dimanche à 13 h 30 GMT, ouvrant ainsi la voie à un afflux massif d'aide, selon les médiateurs.

Des centaines de camions sont garés du côté égyptien du poste frontière de Rafah, un point d'entrée autrefois vital pour l'aide humanitaire, fermé depuis mai, lorsque les forces israéliennes ont pris le contrôle du côté palestinien du point de passage.

Au cours d'une conférence de presse conjointe avec son homologue nigérian, M. Abdelatty a déclaré : « Nous espérons que 300 camions se rendront au nord de la bande de Gaza », où des milliers de personnes sont bloquées dans des conditions que les agences humanitaires qualifient d'apocalyptiques.

Les travailleurs humanitaires ont mis en garde contre les obstacles monumentaux qui pourraient entraver les opérations d'aide, notamment la destruction des infrastructures qui traitaient auparavant les livraisons.