LONDRES : D’anciens et actuels dirigeants politiques de l'Europe et de l'Amérique du Nord se sont réunis lundi lors du Sommet mondial de l'Iran libre. Ils ont profité de l’événement annuel pour appeler à un changement de régime, condamner le nouveau président, et exhorter la communauté internationale à faire davantage pour aider le peuple iranien.
Le sommet virtuel, auquel a assisté Arab News, est organisé par le groupe d'opposition le Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI). Les participants ont critiqué le bilan du président Ebrahim Raïssi en matière de droits de l’homme, et ont insisté sur son implication directe dans les meurtres de milliers de prisonniers politiques.
Dans son allocution au début de l’événement de trois jours, l'ancien secrétaire d'État américain Mike Pompeo affirme que la révolution iranienne de 1979 a déclenché un nombre de conflits. Entre l'Iran et les États-Unis, rappelle-t-il, mais aussi entre le régime iranien et les États du Golfe, arabes sunnites.
«Mais le conflit le plus important à saisir, c’est celui qui vise à redonner à l'Iran la place qui lui revient dans l'histoire», déclare-t-il. «Le combat central se trouve dans les rues, dans les mosquées et dans l'esprit des Iraniens, il réside dans le fossé entre le peuple et l'opposition organisée d’une part, et qui recherchent la liberté et la démocratie, et l'ensemble du régime de l'autre».
«Le régime est, bien entendu, dirigé par (le chef suprême Ali) Khamenei, Raïssi et le Corps des gardiens de la révolution islamique. C’est son zèle qui est révolutionnaire. Il est brutal. Il est théocratique. Il est lâche et kleptocratique», poursuit-il.
Il a notamment nommé le ministre iranien des Affaires étrangères Javad Zarif, une figure clé du régime. Selon lui, il «porte un costume occidental» et «parle anglais et garde le sourire, mais c'est un terroriste qui tuerait son propre peuple pour sauver le régime».
Pompeo précise que le poids des sanctions économiques internationales place le régime «dans son état le plus faible depuis des décennies», et que le taux de participation historiquement bas lors de l'élection présidentielle de juin prouve à quel point «Téhéran est devenu faible».
«C'était un boycott», assure-t-il. « La participation a été la plus faible depuis 1979, et indique un rejet total du régime et de ses candidats. C'était un vrai boycott, et le régime en est conscient», dit-il.
L'ancien Premier ministre belge Guy Verhofstadt, autrefois chef de l'un des plus grands partis politiques de l'UE, aujourd'hui membre du Parlement européen, estime que «l'élection de Raïssi rendra l'Iran, la région et le monde plus dangereux et intolérants».
Raïssi «déteste nos valeurs démocratiques », dit-il. «N'oublions pas qu'il soumis à des sanctions américaines pour son passé entaché par l'exécution extrajudiciaire de milliers de prisonniers politiques. Et il serait, à mon avis, très difficile pour (le président américain Joe) Biden de défendre une entente avec un homme considéré comme un tueur de masse».
Raïssi, à l'époque procureur à Téhéran, était directement impliqué dans les «commissions de la mort» qui ont rendu des jugements sur des milliers de prisonniers politiques. Pour la plupart membres du groupe d'opposition des Moudjahiddines du peuple iranien, ils ont été sommairement exécutés en 1988, par décret de l'ayatollah Ruhollah Khomeini.
Les participants au sommet comptent des amis et des parents des prisonniers assassinés. Parmi eux figure Maryam Radjavi, la cheffe du CNRI, dont le mari est mort aux mains du régime iranien.
Radjavi condamne le «fascisme religieux» du régime, et exhorte l'ONU et les leaders du monde à traduire Raïssi et Khamenei en justice pour leur rôle dans les meurtres de 1988, qu’elle qualifie de «crimes contre l'humanité», faisant écho à Amnesty International.
Le CNRI plaide pour un Iran «démocratique, laïc et non nucléaire». Des dizaines de participants ont d’ailleurs promis leur soutien au groupe, décrit comme un «gouvernement iranien en attente».
Plus de 250 actuels et anciens hommes politiques d'Amérique du Nord et d'Europe ont assisté ou pris la parole lors du sommet. Parmi eux, des anciens premiers ministres d'Italie, de Belgique, de Suède et d'autres pays, ainsi que des dizaines de sénateurs américains et de membres d’institutions de sécurité nationale.
L'événement annuel ne manque pas de susciter l’ire Téhéran. En 2018, des agents ont tenté de bombarder le Sommet de l'Iran libre à Paris. Le diplomate iranien Assadollah Assadi, converti au terrorisme, a été condamné à 20 ans de prison par un tribunal belge pour son rôle dans l’attentat déjoué.
Un drame diplomatique s’est également produit cette année. Dimanche, le ministère iranien des Affaires étrangères a convoqué l'envoyé de la Slovénie au sujet de l’allocution préenregistrée de la Première ministre, Janez Jansa, actuelle présidente du Conseil de l'Union européenne.
Dans son discours, Jansa a appelé à une enquête indépendante sur les massacres de 1988. «Le peuple iranien mérite la démocratie, la liberté et les droits de l'homme, et doit être fermement soutenu par la communauté internationale», affirme-t-elle.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com