NAIROBI: Reporters sans frontières (RSF) a appelé lundi à la libération immédiate de 12 journalistes éthiopiens arrêtés, selon l'ONG, pour « dissuader d’enquêter de manière indépendante sur le conflit dans la région du Tigré ».
La plupart des journalistes, dont l'un gère une chaîne YouTube critique à l'égard du gouvernement, ont été arrêtés le 30 juin à Addis Abeba, précise RSF dans ce communiqué.
RSF souligne qu'aucune explication à leur arrestation n'a été donnée jusqu'au 2 juillet, date à laquelle la police a « finalement soutenu que les journalistes étaient maintenus en détention en raison de leur affiliation à un ‘groupe terroriste’ récemment banni par le parlement éthiopien, le Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) ».
Ce parti, dont était issues les autorités régionales du Tigré, a été accusé par le Premier ministre Abiy Ahmed d'avoir orchestré des attaques militaires contre des bases de l'armée fédérale.
Ahmed a lancé en novembre une opération militaire dans cette région du nord du pays pour désarmer et capturer les dirigeants du TPLF. Après huit mois d'affrontement, l'armée s'est retirée fin juin face à l'avancée de ces troupes pro-TPLF.
« Nous condamnons ces arrestations massives de journalistes qui visent clairement à les dissuader d'enquêter de manière indépendante sur le conflit dans la région du Tigré », a déclaré le responsable Afrique de RSF, Arnaud Froger.
« Ces arrestations effectuées dans la plus grande opacité sont d'autant plus choquantes que le parlement éthiopien a voté, il y a seulement quelques mois, une nouvelle loi sur les médias qui décriminalise la plupart des délits de presse. RSF exige la libération immédiate et sans condition de ces journalistes », ajoute-t-il.
Au cours du week-end, la Commission éthiopienne des droits humains (EHRC), un organisme indépendant mais rattaché au gouvernement, a exprimé de « graves » inquiétudes s'agissant de ces arrestations, affirmant que « les détenus n'ont pas obtenu de droit de visite de leur avocat et de leur famille ».
Le gouvernement éthiopien a imposé de rudes conditions aux journalistes qui ont couvert le conflit au Tigré.
En mai, les autorités éthiopiennes ont expulsé le correspondant dans le pays du New York Times, Simon Marks, après avoir révoqué sa licence pour sa couverture « déséquilibrée » de la guerre au Tigré.
Plusieurs journalistes et traducteurs travaillant pour des médias internationaux - dont l'AFP, Reuters, la BBC et le Financial Times - ont été détenus ces derniers mois dans le cadre de leur métier.
L'Ethiopie occupe actuellement le 101e rang sur 180 pays dans le classement de la liberté de la presse établi chaque année par RSF.