En Cisjordanie, être militant des droits humains et craindre pour sa vie

Le militant palestinien des droits humains Issa Amro se promène dans le marché de la vieille ville d'Hébron en Cisjordanie occupée, le 27 juin 2021. EMMANUEL DUNAND / AFP
Le militant palestinien des droits humains Issa Amro se promène dans le marché de la vieille ville d'Hébron en Cisjordanie occupée, le 27 juin 2021. EMMANUEL DUNAND / AFP
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Publié le Mercredi 30 juin 2021

En Cisjordanie, être militant des droits humains et craindre pour sa vie

  • Issa Amro partageait bien des points communs avec Nizar Banat, dont la mort a provoqué une vague de colère en Cisjordanie occupée contre l'Autorité palestinienne
  • Sur leurs réseaux sociaux, ils racontaient ce que peu osent dire tout haut: les interpellations mais aussi la "corruption" au sein de l'AP

HEBRON : Issa Amro a passé une sombre semaine. Brièvement détenu le 22 juin par les forces palestiniennes, l'influent militant des droits humains apprenait moins de 48 heures plus tard la mort de son "ami" Nizar Banat aux mains de l'Autorité palestinienne, dont il était aussi un détracteur.

Issa Amro partageait bien des points communs avec Nizar Banat, dont la mort a provoqué une vague de colère en Cisjordanie occupée contre l'Autorité palestinienne (AP), cadenassée par le président Mahmoud Abbas, 86 ans, dont le mandat devait se terminer en 2009.

Tous les deux sont originaires de Hébron, ville poudrière du sud de la Cisjordanie où vivent environ 1.000 colons juifs sous haute protection militaire israélienne parmi plus de 200.000 Palestiniens. Les deux hommes partageaient le même engagement pour la liberté d'expression, et ne comptaient plus les arrestations jugées arbitraires.

Sur leurs réseaux sociaux, ils racontaient ce que peu osent dire tout haut: les interpellations mais aussi la "corruption" au sein de l'AP, et plus largement les violations des droits humains par les forces palestiniennes.

Lors de sa dernière détention de plusieurs heures le 22 juin, après une publication sur Facebook critiquant les arrestations "politiques", Issa Amro "a pensé à (son) ami Nizar".

"Quand ils m'ont arrêté sur des accusations infondées, je me suis dit qu'ils étaient déterminés à se débarrasser de nous", explique à l'AFP le militant, libéré en l'absence de charges.

Mais dans le cas de Nizar Banat, sa famille accuse les forces de sécurité de l'avoir battu et "assassiné".

"Je ne pense pas qu'ils prévoyaient de le tuer, je pense qu'ils ont utilisé la violence pour le faire taire", estime Issa Amro.

Sollicitée par l'AFP à la mort du militant, la police palestinienne n'a pas souhaité commenter. L'AP a promis une enquête "transparente et professionnelle".

«Peur»

Dans un rapport de 2018, l'ONG Human Rights Watch (HRW) s'alarmait déjà des "arrestations arbitraires" menées par l'AP et estimait que "la pratique systématique de torture pourrait relever d'un crime contre l'humanité".

Issa Amro dit avoir été lui-même "torturé" en 2017 lors de sa détention d'une semaine, enfermé dans une pièce minuscule où il a été frappé, empêché de voir ses avocats, menacé de voir sa "tête coupée".

Aujourd'hui encore, "l'environnement n'est pas sûr pour moi", dit ce défenseur des droits humains de 41 ans, que tout le monde salue sur son passage dans la vieille ville de Hébron: "J'ai peur d'être tué, mais je n'arrêterai pas".

"Mahmoud Abbas est (à la tête) d'une dictature", accuse-t-il, ajoutant devoir "parler des prisonniers politiques de l'Autorité palestinienne, des personnalités publiques qui sont corrompues et qui oppressent leur propre peuple".

Quelque 84% des Palestiniens estiment que l'AP est corrompue, selon une enquête publiée à la mi-juin par un institut de sondage à Ramallah.

Les dirigeants palestiniens ont peur "parce que ma voix porte à l'étranger, alors qu'ils veulent être la seule voix du peuple palestinien", considère M. Amro.

Issa Amro est notamment soutenu par Amnesty International, qui n'a eu de cesse ces dernières années de condamner le "harcèlement" dont il fait objet de la part des autorités palestiniennes mais aussi israéliennes.

«Contre les colonies»

Car la vie d'Issa Amro ne se résume pas à dénoncer les agissements de l'AP, qui exerce des pouvoirs limités sur environ 40% de la Cisjordanie, territoire palestinien occupé depuis 1967 par l'Etat hébreu.

Son engagement est né dans les années 2000 contre la colonisation israélienne -- illégale au regard du droit international -- à Hébron, où il a créé l'ONG "La jeunesse contre les colonies".

Il a été arrêté à des dizaines de reprises, "parfois au rythme de deux fois par semaine, parfois deux fois par jour", avant d'être relâché, dit-il.

En février 2021, il a été condamné à trois mois de prison avec sursis et 3.500 shekels d'amende (900 euros) par un tribunal militaire israélien pour "avoir organisé et participé à des manifestations pacifiques", avance-t-il, des charges "motivées par des intérêts purement politiques", selon Amnesty.

D'après la justice israélienne, ces manifestations étaient "illégales" et Issa Amro s'est "opposé physiquement" à des soldats au moment son arrestation.

Autorité palestinienne et Israël, "j'ai peur des deux". "Mais je considère l'Autorité palestinienne comme un sous-traitant d'Israël", la première ne pouvant agir sans coordination avec le second, juge-t-il.


Le prince héritier saoudien rassure la nation sur l’état de santé du roi lors d’une réunion du Conseil des ministres

Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane a présidé la réunion du cabinet mardi (Photo, SPA).
Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane a présidé la réunion du cabinet mardi (Photo, SPA).
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  • Le roi Salmane suit un traitement pour une inflammation des poumons
  • Le prince héritier a également informé le Conseil des ministres des résultats du sommet de la Ligue arabe

RIYAD: Le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, a tenu des propos rassurants sur la santé du roi Salmane lors d’une réunion du Conseil des ministres aujourd’hui, rapporte l’agence de presse saoudienne (SPA).

Dimanche, le roi a subi des examens médicaux dans les cliniques royales du palais Al-Salam après avoir souffert de fortes fièvres et de douleurs articulaires, selon SPA.

On lui a diagnostiqué une inflammation des poumons et on lui a prescrit un traitement antibiotique au palais de Djeddah.

Le prince héritier a également informé le Conseil des ministres des résultats du sommet de la Ligue arabe, soulignant l’engagement du Royaume à l’égard des questions arabes, du développement de l’action commune, du renforcement de la sécurité régionale et de la défense des intérêts arabes.

Le ministre de l’Information, Salmane ben Youssef al-Dosari, a déclaré après la réunion que le Conseil avait discuté des activités récentes de l’État, en particulier des efforts visant à renforcer la coopération régionale et internationale.

Le Conseil a réaffirmé l’engagement du Royaume dans la coopération internationale en matière de lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et la corruption.

Le Cabinet saoudien a également autorisé le ministre de l’Énergie, le prince Abdelaziz ben Salmane, à finaliser un protocole d’accord avec le Pakistan sur la coopération énergétique.

Le Cabinet a par ailleurs approuvé l’adhésion du Royaume à un accord international sur les zones humides d’importance internationale, notamment en tant qu’habitats pour les oiseaux d’eau.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Qui sont les chefs du Hamas visés par les mandats réclamés par le procureur de la CPI?

Ismail Haniyeh, chef du bureau politique du mouvement islamiste palestinien Hamas basé à Doha, alors qu'il s'adresse à la presse à Téhéran le 26 mars 2024, et présumé chef militaire palestinien du mouvement radical Hamas, Mohammed Deif (au centre) et chef de Yahya Sinwar, l'aile politique du mouvement palestinien Hamas dans la bande de Gaza (Photo, AFP).
Ismail Haniyeh, chef du bureau politique du mouvement islamiste palestinien Hamas basé à Doha, alors qu'il s'adresse à la presse à Téhéran le 26 mars 2024, et présumé chef militaire palestinien du mouvement radical Hamas, Mohammed Deif (au centre) et chef de Yahya Sinwar, l'aile politique du mouvement palestinien Hamas dans la bande de Gaza (Photo, AFP).
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  • Mechaal, M. Haniyeh, 60 ans, s'était fait connaître aux yeux du monde en 2006 en devenant Premier ministre de l'Autorité palestinienne
  • Chef des Brigades Ezzedine al-Qassam, la branche militaire du Hamas, c'est lui qui a annoncé dans un enregistrement diffusé par le mouvement, le 7 octobre au matin

JERUSALEM: Trois dirigeants du Hamas sont visés par des mandats d'arrêt réclamés par le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) pour des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité présumés commis depuis l'attaque sanglante du mouvement islamiste palestinien en territoire israélien le 7 octobre.

Voici leurs portraits:

Ismaïl Haniyeh, le leader politique:

Elu chef du bureau politique du Hamas en 2017 pour succéder à Khaled Mechaal, M. Haniyeh, 60 ans, s'était fait connaître aux yeux du monde en 2006 en devenant Premier ministre de l'Autorité palestinienne après la victoire surprise de son mouvement aux législatives.

Mais la cohabitation avec Fatah, le parti du président Mahmoud Abbas, fut de courte durée. Le Hamas l'a évincé par la force de la bande de Gaza en 2007, deux ans après le retrait unilatéral d'Israël de ce territoire.

M. Haniyeh, qui vit en exil volontaire entre le Qatar et la Turquie, plaide de longue date pour concilier résistance armée et combat politique au sein du mouvement, considéré comme "terroriste" par les Etats-Unis, l'Union européenne et Israël.

Connu pour son calme et son discours posé, M. Haniyeh, le visage rond encadré par une barbe poivre et sel, entretient de bonnes relations avec les chefs des différents mouvements palestiniens, y compris rivaux.

Il a été emprisonné à plusieurs reprises par Israël et expulsé pour six mois vers le sud du Liban.

Sur des images diffusées par les médias du Hamas peu après le déclenchement de l'attaque sanglante contre Israël, on peut voir M. Haniyeh discuter sur un ton jubilatoire avec d'autres chefs du Hamas, dans son bureau à Doha, en train de regarder le reportage d'une télévision arabe montrant des commandos du Hamas s'emparer de jeeps de l'armée israélienne.

Alors que plus de sept mois de guerre ont laissé des pans entiers de Gaza en ruines, M. Haniyeh a insisté à plusieurs reprises sur le fait que le groupe ne libérerait les otages que si les combats cessaient définitivement.

Mohammed Deif, le «chef d'état-major»?

Chef des Brigades Ezzedine al-Qassam, la branche militaire du Hamas, c'est lui qui a annoncé dans un enregistrement diffusé par le mouvement, le 7 octobre au matin, le début de l'opération "Déluge d'Al-Aqsa".

Sur l'enregistrement, illustré par une photo de Mohammed Deif dans la pénombre comme le fait toujours le Hamas pour qu'il ne soit pas identifié, on l'entend annoncer que "les positions et les fortifications de l'ennemi ont été visées par 5.000 roquettes et obus lors des 20 premières minutes" de l'attaque.

L'attaque a fait plus de 1.170 morts, majoritairement des civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes. Le Hamas a pris en otage 252 personnes.

Celui que le Hamas présente comme "le chef d'état-major de la résistance" est une cible pour Israël depuis de nombreuses années. Il a échappé à au moins six tentatives d'élimination connues.

La plus récente a eu lieu en 2014 lorsqu'un raid aérien israélien le visant dans la bande de Gaza a entraîné la mort de son épouse et de l'un de leurs enfants.

Depuis près de 30 ans, l'homme, né en 1965 dans le camp de réfugiés de Khan Younès (sud de la bande de Gaza), est mêlé aux coups les plus durs portés contre Israël: enlèvements de soldats, attentats suicide, tirs de roquettes...

Désigné en 2002 à la tête de la branche armée du Hamas, après la mort de son prédécesseur Salah Chéhadé, tué dans un raid israélien, Mohammed Deif a une longue histoire militante et clandestine entamée dans les années 1980.

En 2000, au début de la Seconde Intifada dans les territoires palestiniens contre l'occupation israélienne, il s'est échappé -- ou a été libéré -- d'une prison de l'Autorité palestinienne de Yasser Arafat. Au grand dam des Israéliens qui l'avaient dans le collimateur.

Juste après son accession au commandement des Brigades al-Qassam, il est la cible d'une tentative d'élimination par Israël dont il sort grièvement blessé, une paraplégie étant évoquée mais non confirmée.

Il gagne chez ses ennemis le surnom de "chat aux neuf vies" et devient aux yeux des Palestiniens une figure légendaire, aussi résolu dans son combat contre Israël que mystérieux.

Il a été inscrit en 2015 sur la liste américaine des "terroristes internationaux".


Syrie: l'épouse du président Bachar al-Assad atteinte de leucémie

Asma Assad, épouse du président syrien Bashar al-Assad (Photo, AFP).
Asma Assad, épouse du président syrien Bashar al-Assad (Photo, AFP).
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  • Elle a précisé que l'épouse du président syrien, âgée de 48 ans, allait subir un traitement spécialisé
  • En août 2019, l'épouse du président syrien, mère de deux garçons et d'une fille, avait annoncé être totalement guérie d'un cancer du sein

BEYROUTH: L'épouse du chef de l'Etat syrien Bachar al-Assad, Asma, qui s'était rétablie d'un cancer du sein, est atteinte de leucémie, a annoncé mardi la présidence du pays ravagé par 13 ans de guerre.

"Après avoir présenté différents symptômes et signes cliniques, et à la suite d'une série d'examens médicaux, la première dame, Asma al-Assad, a été diagnostiquée d'une leucémie myéloïde aiguë", a indiqué la présidence dans un communiqué.

Elle a précisé que l'épouse du président syrien, âgée de 48 ans, allait subir un traitement spécialisé pendant lequel elle allait renoncer à ses engagements publics.

En août 2019, l'épouse du président syrien, mère de deux garçons et d'une fille, avait annoncé être totalement guérie d'un cancer du sein au terme d'un an de traitement.

Elle apparaît souvent, selon les images sur les réseaux sociaux, rendant visite à des blessés de guerre ou menant des activités caritatives, comme elle a accompagné le président syrien au cours de ses récentes visites à l'étranger.

Qualifiée de "Rose du désert" par le magazine américain Vogue avant le déclenchement de la guerre en Syrie en 2011, Asma al-Assad a ensuite été vivement critiquée pour son silence face à la répression sanglante des manifestations prodémocratie puis de la rébellion.

Plus d'un demi-million de personnes ont été tuées depuis le soulèvement pacifique de 2011 qui a dégénéré en guerre civile et a morcelé la Syrie.

Née en 1975 en Grande-Bretagne d'un père cardiologue et d'une mère diplomate, Asma al-Assad travaillait avant son mariage pour JP Morgan à Londres, où elle avait fait la connaissance de Bachar al-Assad.

En 2000, il avait succédé à son père, Hafez al-Assad, à la mort de ce dernier, et Asma avait tenté de moderniser l'image de la première dame syrienne, avant l'éclatement de la guerre.

Elle a fondé l'organisation caritative Syria Trust for Development, basée à Damas et qui est l'une des rares organisations de ce type autorisées à travailler dans les zones contrôlées par le gouvernement.

Au cours des dernières années, elle a également consolidé son influence sur les milieux d'affaires syriens, selon ses détracteurs.

"Le secteur humanitaire en Syrie est devenu de plus en plus rentable, en particulier pour des personnes sanctionnées comme Asma", écrivait en 2023 la revue économique en ligne Syria report.

Elle fait l'objet de sanctions américaines depuis 2020 dans le cadre de la "loi César", aux côtés d'autres personnes et entités parmi lesquelles le président syrien et de nombreux membres de sa famille.

Elle avait alors été présentée par le secrétaire d'Etat américain de l'époque, Mike Pompeo, comme "l'une des plus célèbres profiteuses de la guerre en Syrie".

César est le pseudonyme d'un ex-photographe de la police militaire syrienne qui a fait défection en 2013 en emportant 55.000 images illustrant la brutalité et les abus commis dans les prisons syriennes.