LONDRES : L'Iran a désormais un «criminel international» comme président, selon un groupe d'experts qui prévient que ceci pourrait mener à son arrestation d'être s'il quitte le pays, en plus de l’empêcher de d'assister aux assemblées de l'ONU.
Lors d'un panel organisé jeudi par le Conseil national de la Résistance iranienne et auquel a assisté Arab News, des diplomates et des experts des droits de l'homme ont affirmé que le rôle d'Ebrahim Raïssi dans le massacre des prisonniers politiques en 1988 le rend coupable de crimes contre l'humanité. Une étiquette qui pourrait sérieusement nuire à sa position diplomatique au sein de la communauté internationale.
«Nous avons aujourd’hui un criminel international comme président... Il s’est rendu coupable de crimes contre l'humanité, vers la fin de 1988, à travers le massacre de milliers de prisonniers», martèle Geoffrey Robertson, anciennement juge d'appel à l'ONU et président du tribunal des crimes de guerre à Sierra Leone.
Robertson, qui a mené une enquête approfondie sur les massacres de 1988, explique que Raïssi et ses assistants du ministère de la Justice ont envoyé des prisonniers à la mort en «deux vagues».
Les premières victimes, révèle Robertson, étaient des membres, des alliés et des sympathisants des Moudjahidine du peuple (MEK). Ce groupe politique a participé à la révolution en 1979, mais le régime s’est plus tard retourné contre lui à la suite d'un désaccord politique, ajoute-t-il.
«La plupart d'entre eux avaient en fait déjà purgé leurs peines, mais ont quand même été exécutés sans pitié», se désole le magistrat.
«La deuxième vague se composait de dissidents théocratiques : des communistes, des athées et des gauchistes. Ils ont été exécutés pour s'être opposés à l'état théocratique de l'ayatollah (Rouhollah) Khomeini. (C’est ce cas) qui constitue un crime contre l'humanité».
La plupart des personnes tuées ont été détenues pour avoir participé à des manifestations au début des années 1980, selon Robertson. Ils ont ensuite été soumis à ce qu'Amnesty International qualifie de «commissions de la mort», au cours desquelles des responsables judiciaires dirigés par Raïssi, alors procureur à Téhéran, leur posaient des questions d’apparence anodines.
«Ces détenus ignoraient complètement les conséquences de leurs répliques, alors que leurs vies dépendaient de leurs réponses», dit-il. Ceux qui avouaient leur affiliation au MEK ou se disaient athées se voyaient bander les yeux et recevaient l’ordre «de rejoindre les prisonniers dans le couloir de la salle d’exécution», a-t-il ajouté.
«Ils ont été pendus des grues par groupes de quatre … Certains ont même été emmenés la nuit dans des casernes de l'armée où ils étaient sommés de rédiger leurs testaments, avant d’être abattus par un peloton d'exécution».
L'implication directe de Raïssi dans ces crimes pourrait se retourner contre l'Iran de manière inattendue, a averti Robertson.
«L'ONU devra faire face au fait qu'un de ses états membres est dirigé par un criminel international», a-t-il ajouté.
«Si jamais Raïssi quitte (le territoire iranien), tout pays démocratique aurait le droit, en vertu de sa loi – la compétence universelle comme nous l'appelons – de l'arrêter et le traduire en justice», déclare Robertson.
Nick Fluck, président émérite du Barreau d'Angleterre et du Pays de Galles, souligne que Raïssi a avoué lors de conférences de presse être «fier» de son rôle dans les massacres de 1988.
C’est une indication importante «que nous ne pouvons pas simplement observer en silence sans agir. Le silence et l'inaction ne produisent pas de changement, et dans ce cas, il est clair que le changement est devenu indispensable», a déclaré Fluck.
«C’est un leader qui sera largement, je l’espère, boudé. Tous ses futurs propos vont manquer de crédibilité», poursuit-il.
Fluck a de plus déclaré que la légitimité nationale de Raïssi fait aussi gravement défaut, à la suite d'une élection qui a vu une forte implication de l'État. Des centaines de candidats ont été empêchés de se présenter, et des millions d'Iraniens ont boycotté le scrutin.
«Les dissidents et les réformistes ont exhorté les électeurs à boycotter les élections. C'est peut-être pourquoi, bien qu’il ait inévitablement remporté les élections, il l'a fait avec un très faible taux de participation», a ajouté Fluck.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com