PARIS: L'Assemblée nationale débat vendredi des quelque 20 milliards d'euros supplémentaires posés sur la table par le gouvernement dans son budget rectificatif pour 2021, afin d'éviter que le déconfinement ne rime avec déconfiture pour certaines entreprises et salariés.
Ce projet de loi de finances rectificative prolonge au moins jusqu'à fin août les aides d'urgence à destination des entreprises, avec une rallonge de 15,5 milliards d'euros pour financer leur sortie progressive.
Dernière étape du "quoi qu'il en coûte"? C'est ce qu'a promis le ministre de l'Economie Bruno Le Maire qui défend un "texte de transition entre protection maximale (...) et retour à la normale" avec des aides plus "ciblées et dégressives".
Mi-mai, l'exécutif avait déjà été puiser 7,2 milliards de crédits, grâce à un décret d'avance. Un montant exceptionnel.
En continuant à maintenir sous perfusion l'économie française, l'exécutif creuse le taux d'endettement public qui atteindrait 117,2% du PIB à la fin de l'année.
Deuxième force de la majorité, le Modem s'est inquiété de "l'énorme déficit" de la France, avec environ "220 milliards" prévus dans le budget rectificatif 2021, à 9,4% du PIB.
"On ne peut pas se permettre d'avoir un déficit comme celui-là en 2022. On est prêt à travailler sur la dépense publique", insiste le centriste Christophe Jerretie.
Dans les Echos, Bruno Le Maire a promis de "définir une stratégie de désendettement claire", tandis que dans l'opposition, le député LR Eric Woerth, président de la commission des Finances, s'inquiète d'une "ambiance dépensière".
Avec ce premier budget rectificatif pour 2021 - en 2020 les parlementaires en avaient voté quatre, un record - l'exécutif joue aussi la prudence alors que l'économie de l'Hexagone, suspendue au progrès de la vaccination de la population, espère éviter une 4e vague épidémique.
Le gouvernement n'a d'ailleurs pas relevé sa prévision de croissance, attendue à 5% cette année.
Sur les 15,5 milliards d'euros supplémentaires destinés aux dispositifs d'aide d'urgence, 6,4 milliards sont programmés pour le maintien de l'activité partielle, 3,4 milliards pour le fonds de solidarité et 4 milliards iront à la compensation d'exonérations de charges.
Gazole et cultes
Certains secteurs comme l'hôtellerie-restauration mais aussi les voyagistes, le transport aérien ou l'événementiel ont été durement éprouvés par des mois de confinement et ressortent économiquement lessivés, avec des perspectives de reprise très variables.
A ces dépenses s'ajoutent 1,4 milliard d'euros pour financer plusieurs annonces récentes. Dont 700 millions d'euros pour le maintien des places d'hébergement d'urgence, près de 400 millions d'euros pour les indemnisations d'agriculteurs, notamment ceux touchés par le gel début avril, ainsi que 400 millions d'euros pour le "Pass'Sport" à destination des jeunes, une aide à la collectivité de Nouvelle Calédonie ou encore le financement de l'opération "Quartiers d'été", destinée à animer les quartiers défavorisés.
Quelque 480 amendements ont été déposés sur le projet de loi.
L'un d'eux déposé par le gouvernement devrait faire grincer quelques dents à l'heure où Emmanuel Macron tente de verdir son bilan.
Il s'agit de décaler du 1er juillet 2021 au 1er janvier 2023 la hausse des tarifs du gazole non routier, utilisé principalement dans le bâtiment et les travaux publics, afin de tenir compte des conséquences de la crise sanitaire.
Autre point de crispation, un inédit geste fiscal pour les dons aux cultes. La déduction fiscale sur les dons passera de 66 % à 75 % jusqu'à fin 2022, dans une limite de 554 euros.
"Les cultes ont particulièrement souffert" dans la période" "parce qu'ils n'ont pas été aidés au nom de la séparation des églises et de l'Etat", a expliqué le patron du groupe LREM Christophe Castaner pour justifier cette modulation de la déduction fiscale.
La disposition sera combattue par la gauche de l'hémicycle: LFI, le PS mais aussi le groupe Libertés et Territoires ont déposé des amendements de suppression.
De leur côté, les LR mettront sur la table les pertes colossales de La Poste en raison du déficit du service universel postal que la crise n'a fait qu'accroître. Les élus de droite proposeront une importante exemption fiscale.