PARIS : L'Etat a été condamné mardi pour faute lourde, lors d'un contrôle d'identité de trois lycéens en 2017 par des policiers à la Gare du Nord à Paris, considéré comme "discriminatoire" par la cour d'appel de Paris, selon une décision consultée par l'AFP.
En mars 2017, trois lycéens d'Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis), Ilyas, Mamadou et Zakaria, sont contrôlés au retour d'un voyage scolaire à Bruxelles, devant leur classe et les passants.
"Humiliés" par ce contrôle, uniquement en raison de leur origine selon eux, ils attaquent l'Etat.
"Les caractéristiques physiques des personnes contrôlées, notamment leur origine, leur âge et leur sexe, ont été la cause réelle du contrôle et mettent en évidence une différence de traitement laissant présumer l'existence d'une discrimination", écrivent les juges dans leur arrêt mardi.
"Le contrôle d'identité est jugé discriminatoire et constitue une faute lourde de l'Etat", conclut la cour, en relevant que l'Etat n'a pas démontré "l'absence de différence de traitement".
La cour condamne l'Etat à payer 1 500 euros en réparation de préjudice moral pour chaque jeune.
En première instance, les trois lycéens avaient été déboutés, le tribunal judiciaire de Paris arguant que la composition de la classe, des élèves tous issus de "minorités visibles", ne permettait pas de considérer le contrôle comme discriminatoire.
Mais la cour d'appel a émis un "avis différent", comme elle l'explique dans un communiqué de presse: "elle a jaugé l'échantillon contrôlé non pas par rapport à l'effectif de la classe entière, mais par rapport à l'ensemble de la population qui, descendant du train, se trouvait sur le quai et n'a pas été contrôlée".
Par conséquent, elle considère qu'il y a "dans le ciblage de ces trois garçons un indice suffisant d'une sélection fondée sur leurs seules caractéristiques physiques".
"Les juges sont de plus en plus pertinents sur le sujet", s'est réjoui auprès de l'AFP l'avocat des trois lycéens, Me Slim Ben Achour, qui avait déjà obtenu une condamnation définitive de l'Etat en 2016 dans une affaire de contrôle au faciès.
Les juges "rappellent l'importance des études et statistiques sur la matière", poursuit l'avocat, citant celles du Défenseur des droits.
Contacté par l'AFP, l'avocat de l'Etat n'a pas souhaité faire de commentaire.
Au moment des faits, l'affaire avait fait grand bruit et des politiques avaient assisté à l'audience, tel l'actuel conseiller régional d'Ile-de-France Benoît Hamon (Génération·s) ou Eric Coquerel, député de Seine-Saint-Denis (LFI).