Israël s'oriente vers un gouvernement «du changement»: ce qu'il faut savoir

Yaïr Lapid a jusqu'à mercredi 23H59 pour obtenir le soutien de 61 députés, seuil pour prétendre à la formation d'un gouvernement succédant à celui de Benjamin Netanyahu. (Photo, AFP)
Yaïr Lapid a jusqu'à mercredi 23H59 pour obtenir le soutien de 61 députés, seuil pour prétendre à la formation d'un gouvernement succédant à celui de Benjamin Netanyahu. (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 31 mai 2021

Israël s'oriente vers un gouvernement «du changement»: ce qu'il faut savoir

  • M. Lapid doit donc encore trouver quatre voix, probablement chez les partis arabes israéliens, qui ne se sont cependant pas clairement positionnés
  • Pour Jonathan Rynhold, la «coalition du changement» ne devrait pas s'engager dans une relance du processus de paix

JERUSALEM: Le chef de l'opposition israélienne, le centriste Yaïr Lapid, pourrait être en mesure de former un nouveau gouvernement avec d'autres partis politiques, qui souhaitent comme lui tourner la page de l'ère Netanyahu, même s'ils ne partagent rien ou presque du point de vue idéologique.

Yaïr Lapid a en effet indiqué lundi qu'il y avait encore "beaucoup d'obstacles" avant la formation d'un gouvernement d'union susceptible de faire tomber Benjamin Netanyahu au pouvoir depuis plus d'une décennie.

"C'est notre premier test, de voir si nous pouvons trouver des compromis intelligents dans les jours qui viennent pour atteindre un but plus important", a-t-il ajouté lors d'une réunion de son parti centriste au Parlement à Jérusalem.

Mais de quels partis serait faite sa coalition? Pourraient-ils surmonter leurs différences idéologiques pour gouverner dans la durée? Quel impact aurait cette nouvelle équipe sur les rapports avec les Palestiniens?

La coalition «du changement» est-elle prête ?

Yaïr Lapid a jusqu'à mercredi 23H59 (20H59 GMT) pour obtenir le soutien de 61 députés, seuil pour prétendre à la formation d'un gouvernement succédant à celui de Benjamin Netanyahu, Premier ministre en poste depuis plus d'une décennie.

Mandaté début mai, il compte pour l'instant sur l'appui de 57 députés: outre ses alliés traditionnels de la gauche et du centre (51 voix), il a rallié dimanche le parti de droite radicale Yamina de Naftali Bennett.

Celui-ci a remporté sept sièges aux législatives de mars mais un de ses colistiers a d'ores et déjà annoncé qu'il ne le suivrait pas dans le camp anti-Netanyahu.

Pour former sa "coalition du changement", selon l'expression consacrée par les adversaires du Premier ministre sortant, Benjamin Netanyahu, M. Lapid doit donc encore trouver quatre voix, probablement chez les partis arabes israéliens, qui ne se sont cependant pas clairement positionnés.

Avec quels partis ?

Outre son parti, M. Lapid est soutenu par la gauche (le parti travailliste Avoda et le Meretz) et par la formation centriste "Bleu-Blanc" de l'ancien général Benny Gantz dont il a un temps fait partie.

Mais il a aussi rallié des soutiens à droite, à commencer par le parti nationaliste laïc d'Avigdor Lieberman (Israël Beiteinou) et la formation "Nouvel espoir" de Gideon Saar, ancien ténor du Likoud, le parti historique de la droite israélienne, celui de M. Netanyahu.

Dimanche, la droite radicale, sous la bannière du parti Yamina de Naftali Bennett, a aussi finalement rallié cette coalition.

Serait-elle tenable ? 

Inspirations libérales ou socialistes, pour ou contre la création d'un Etat palestinien, place de la religion dans l'Etat: sur ces questions fondamentales, les partis ralliés à M. Lapid divergent en tous points.

Mais ils sont tous "sincèrement convaincus que Netanyahu (inculpé pour corruption dans plusieurs affaires, NDLR) est un danger pour le pays, qu'il ne peut donc plus servir comme Premier ministre parce qu'il fait passer ses intérêts personnels avant ceux du pays", explique Jonathan Rynhold, professeur de sciences politiques à l'université Bar-Ilan.

Pour éviter l'effondrement de leur gouvernement, ils pourraient opter au moins dans un premier temps "pour un programme consensuel", portant sur la relance sociale et économique post-pandémie et répondant aux défaillances des systèmes de santé, de l'éducation et des transports, des sujets sur lesquels ils s'accordent, selon M. Rynhold.

"Les défis surviendront quand un évènement dérangera la base" de chaque parti, estime le professeur, pointant la colonisation israélienne dans les Territoires palestiniens. La gauche israélienne appelle à la création d'un Etat palestinien, tandis que la droite souhaite appliquer la souveraineté israélienne en Cisjordanie occupée et agite la menace d'une annexion partielle.

Le seul objectif de ces "rapprochements improbables": est d'empêcher M. Netanyahu de "revenir s'il devient chef de l'opposition", relève Denis Charbit, professeur de sciences politiques à l'Open University de Tel-Aviv.

Et pour le processus de paix avec les Palestiniens?

Les négociations avec les Palestiniens sont au point mort depuis 2014. 

Pour Jonathan Rynhold, la "coalition du changement" ne devrait pas s'engager dans une relance du processus de paix, en raison notamment des divergences entre les partis sur ce sujet.

"Ils s'accorderont sur le respect du statu quo", estime l'analyste. 

"Ils devront toutefois gérer le conflit de sorte qu'il n'y ait pas d'éruption de violences comme récemment", entre Israël et le Hamas du 10 au 21 mai. 

Et en cas de nouvelle explosion, ils pourront toutefois s'appuyer selon l'analyste sur le "consensus israélien", qui a prévalu pendant toutes les guerres depuis 2000. "Ils seront mis en difficulté mais parviendront à dépasser leurs différences", estime M. Rynhold.


Faisal ben Farhane estime que l'entrée de l'aide à Gaza ne peut être liée à un cessez-le-feu

Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Faisal ben Farhane, a déclaré que l'entrée de l'aide à Gaza ne pouvait être liée à un cessez-le-feu. (AFP)
Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Faisal ben Farhane, a déclaré que l'entrée de l'aide à Gaza ne pouvait être liée à un cessez-le-feu. (AFP)
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  • Le sommet extraordinaire conjoint arabe et islamique a discuté de l'évolution de la situation dans l'enclave, ainsi que des efforts visant à instaurer un cessez-le-feu immédiat et durable
  • Le ministre saoudien a déclaré que tout déplacement de Palestiniens était catégoriquement rejeté. Il a ajouté que le Royaume appréciait les efforts de l'Égypte et du Qatar dans les négociations sur le cessez-le-feu


ANTALYA : Le ministre saoudien des Affaires étrangères, Faisal ben Farhane, a déclaré que l'entrée de l'aide à Gaza ne pouvait être liée à un cessez-le-feu.

M. Ben Farhane a déclaré que la communauté internationale devait faire pression sur le gouvernement israélien pour qu'il autorise l'acheminement de l'aide à Gaza.

Le sommet extraordinaire conjoint arabe et islamique a discuté de l'évolution de la situation dans l'enclave, ainsi que des efforts visant à instaurer un cessez-le-feu immédiat et durable.

Le ministre saoudien a déclaré que tout déplacement de Palestiniens était catégoriquement rejeté. Il a ajouté que le Royaume appréciait les efforts de l'Égypte et du Qatar dans les négociations sur le cessez-le-feu.

La réunion a également souligné la nécessité de poursuivre les efforts pour permettre au peuple palestinien d'exercer ses droits inhérents.


A Gaza, la Défense civile annonce dix morts dont sept enfants dans une frappe israélienne

Sept enfants figurent au nombre des dix personnes âgées de 3 à 58 ans et tués dans une frappe aérienne vers 03H30 (00H30 GMT) à Khan Younès, a déclaré à l'AFP Mahmoud Bassal, le porte-parole de cette organisation de secouristes. (AFP)
Sept enfants figurent au nombre des dix personnes âgées de 3 à 58 ans et tués dans une frappe aérienne vers 03H30 (00H30 GMT) à Khan Younès, a déclaré à l'AFP Mahmoud Bassal, le porte-parole de cette organisation de secouristes. (AFP)
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  • L'armée israélienne a dit examiner ces informations. Dans un communiqué, elle a annoncé avoir frappé une quarantaine de "cibles terroristes" dans le territoire palestinien assiégé ces dernières 24 heures
  • A Genève, une porte-parole du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme, Ravina Shamdasani, a mis en cause les actions d'Israël, estimant qu'elles menaçaient la "possibilité pour les Palestiniens de continuer à vivre" dans ce territoire

GAZA: La Défense civile palestinienne a annoncé vendredi la mort de 10 membres d'une même famille victime d'une frappe israélienne nocturne dans le sud de la bande de Gaza, au moment où l'ONU constate que des dizaines de frappes ces dernières semaines entraînent la mort "uniquement des femmes et des enfants".

Sept enfants figurent au nombre des dix personnes âgées de 3 à 58 ans et tués dans une frappe aérienne vers 03H30 (00H30 GMT) à Khan Younès, a déclaré à l'AFP Mahmoud Bassal, le porte-parole de cette organisation de secouristes.

L'armée israélienne a dit examiner ces informations. Dans un communiqué, elle a annoncé avoir frappé une quarantaine de "cibles terroristes" dans le territoire palestinien assiégé ces dernières 24 heures.

A Genève, une porte-parole du Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme, Ravina Shamdasani, a mis en cause les actions d'Israël, estimant qu'elles menaçaient la "possibilité pour les Palestiniens de continuer à vivre" dans ce territoire.

Elle a pointé les destructions mais aussi "l'idée répétée que les Gazaouis devraient quitter complètement le territoire".

Vendredi, le ministre saoudien des Affaires étrangères, Fayçal ben Farhane, a appelé, à l'issue d'une réunion avec ses homologues régionaux en Turquie, à exercer une "pression maximale pour garantir" l'acheminement de l'aide vers Gaza, en proie à une crise humanitaire majeure.

Ramener les otages 

Mettant fin à une trêve de deux mois avec le Hamas, Israël a repris ses bombardements le 18 mars dans la bande de Gaza. Plus de 1.500 personnes ont été tuées depuis, portant à 50.912 le nombre de morts dans cette guerre déclenchée au lendemain de l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien en Israël le 7 octobre 2023.

Des efforts pour revenir à un cessez-le-feu sont restés infructueux.

Des médias israéliens ont cependant rapporté vendredi que l'Egypte et Israël avaient échangé des projets de documents portant sur un accord de cessez-le-feu et de libération d'otages.

Selon le Times of Israël, la proposition égyptienne prévoirait le retour en Israël de huit otages vivants et de huit corps en échange d'une trêve de 40 à 70 jours ainsi que de la libération d'un grand nombre de prisonniers palestiniens.

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a de son côté réaffirmé son engagement à ramener les otages capturés lors de l'attaque du Hamas et toujours retenus dans la bande de Gaza, dans un message pour Pessah, la Pâque juive.

Ces propos surviennent alors que Donald Trump a fait état de progrès dans les négociations sur la libération d'otages, le président américain ayant déclaré jeudi, lors d'une réunion de son cabinet, que "nous approchons du moment où nous pourrons les récupérer".

A Khan Younès, des images tournées par l'AFP vendredi sur les lieux de la frappe israélienne montrent des secouristes évacuant des corps dans des sacs blancs et des couvertures, et les transportant dans des ambulances vers un hôpital.

La maison de la famille al-Farra a été complètement éventrée, des gravats et objets personnels (une chaussure de sport, un ballon de football vert) jonchant le sol tout autour.

Des témoins ont aussi fait état de tirs continus et intensifs de chars israéliens dans la matinée de vendredi à Khan Younès.

"Uniquement des femmes et des enfants" 

Le porte-parole en langue arabe de l'armée israélienne, Avichay Adraee, a par ailleurs exhorté les habitants de plusieurs quartiers de la ville de Gaza, également dans le nord, à évacuer leur domicile.

"Au cours de la nuit, les troupes ont intensifié leurs opérations terrestres dans le couloir de Morag, tout en poursuivant leurs activités dans la région", a justifié l'armée dans un communiqué, faisant référence à la zone tampon récemment annoncée dans le sud entre les villes de Rafah et Khan Younès.

Le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme a aussi dénoncé vendredi l'impact des frappes israéliennes de ces dernières semaines, déplorant un "large pourcentage d'enfants et de femmes" parmi les victimes.

"Entre le 18 mars et le 9 avril 2025, il y a eu environ 224 frappes israéliennes sur des immeubles résidentiels et des tentes pour déplacés" et pour "36 frappes répertoriées et corroborées" par le Haut-Commissariat, les victimes "étaient uniquement des femmes et des enfants jusqu'à présent".

L'armée israélienne répète que les combattants palestiniens se réfugient parmi les civils utilisés selon elle comme boucliers, ce que le Hamas dément.


Saleh: «Le Yémen n'est pas un champ de bataille pour les règlements de comptes»

Le général de brigade Tariq Mohammed Abdallah Saleh, membre du Conseil présidentiel du Yémen, observe la patrouille des garde-côtes en mer Rouge, au large de Mokha, dans la province occidentale de Taïz, le 12 décembre 2023. (AFP)
Le général de brigade Tariq Mohammed Abdallah Saleh, membre du Conseil présidentiel du Yémen, observe la patrouille des garde-côtes en mer Rouge, au large de Mokha, dans la province occidentale de Taïz, le 12 décembre 2023. (AFP)
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  • Le général de brigade Tariq Mohammed Abdallah Saleh appelle à un renforcement du soutien aux forces yéménites sur le terrain afin de rétablir l'équilibre
  •  Il a précisé que le gouvernement yéménite travaillait en étroite coordination avec les partenaires internationaux ainsi que la coalition dirigée par l'Arabie saoudite

DUBAÏ: Le Yémen «n'est pas un champ de bataille pour régler des comptes, ni une partie d'un quelconque compromis extérieur», a déclaré un haut responsable du gouvernement à Asharq Al-Awsat dans un entretien exclusif.

Le général de brigade Tariq Mohammed Abdallah Saleh, membre du Conseil présidentiel du Yémen avec rang de vice-président, a également souligné que le fait de réduire le pays à un pion entre des nations puissantes engagées dans des jeux politiques compromettait sa souveraineté et la sécurité régionale.

«Le monde commettrait une erreur en acceptant que le Yémen serve de monnaie d'échange dans les négociations avec l'Iran», a déclaré M. Saleh, qui dirige également le bureau politique de la Résistance nationale. Il a également souligné l'importance stratégique du Yémen pour les routes maritimes mondiales.

M. Saleh est resté très discret depuis que les États-Unis ont intensifié leur campagne aérienne contre les Houthis, alliés de l'Iran, afin de mettre fin à la menace qu'ils font peser sur le transport maritime civil et les navires militaires dans la mer Rouge et le golfe d'Aden.

Il a également prévenu que le fait que le Yémen reste "une base pour les Gardiens de la révolution iraniens" menaçait non seulement les Yéménites, mais aussi les intérêts régionaux et internationaux.

M. Saleh a ajouté que pour parvenir à la stabilité dans ce pays ravagé par les conflits, il fallait soutenir un État national fondé sur la règle constitutionnelle et un véritable consensus populaire, et non des accords géopolitiques à court terme.

Il a appelé à renforcer le soutien aux forces yéménites sur le terrain pour rétablir l'équilibre, non pas comme un outil d'escalade, mais parce qu'il s'agit d'un impératif national pour protéger les civils et préserver les acquis durement gagnés.

Il a précisé que le gouvernement yéménite travaillait en étroite coordination avec les partenaires internationaux ainsi que la coalition dirigée par l'Arabie saoudite, qui soutient la légitimité au Yémen, dans le but d'obtenir un soutien accru pour la lutte nationale.

La coopération avec les partenaires régionaux et internationaux en vue de renforcer les garde-côtes du pays, en particulier en mer Rouge, artère stratégique pour le commerce mondial, se poursuit également, a déclaré le responsable yéménite.

La sécurité maritime est indissociable de la souveraineté nationale, et la défense des voies maritimes fait partie intégrante du rétablissement de l'autorité de l'État sur terre et en mer, a déclaré M. Saleh.

En ce qui concerne l'instauration de la paix au Yémen, M. Saleh a déclaré: «Tout règlement qui ne soumettrait pas les Houthis à la constitution yéménite et à l'État de droit n'aurait aucun sens. Il a écarté toute idée selon laquelle la milice pourrait être acceptée en dehors d'un cadre constitutionnel.»

«La paix ne peut être accordée à un groupe qui rejette l'État. Elle se forge lorsque l'État retrouve la capacité de faire respecter la loi et de protéger ses citoyens.»

Pour M. Saleh, la conclusion d'un accord de paix avec les Houthis – qu'il décrit comme un groupe sanguinaire qui ne s'engage pas à respecter les cadres nationaux et dont l'idéologie est ancrée dans un État ennemi – était pratiquement inexistante.

Il a accusé les Houthis de placer leurs dirigeants et les institutions liées au Corps des gardiens de la révolution iranien au-dessus des institutions de l'État yéménite.

«La gouvernance consiste à gérer les affaires du peuple sur la base de cadres communs», a déclaré M. Saleh. «Les Houthis ne respectent rien de tout cela.»

M. Saleh a directement accusé l'Iran de perpétuer le conflit par l'intermédiaire de ses mandataires armés et de faire du Yémen un otage de la violence et de la rébellion, bien que Téhéran ait toujours nié son implication.

M. Saleh a également reconnu les défis auxquels est confronté le Conseil présidentiel et a qualifié les désaccords internes de «naturels», compte tenu de la complexité de la crise au Yémen.

«En fin de compte, a-t-il déclaré, ce qui nous unit est plus important que toutes les différences.»

«Les désaccords sont naturels dans tout organe de direction, en particulier dans des conditions exceptionnelles comme celles du Yémen. Mais le plus important est notre capacité à gérer cette diversité et ces divergences tout en restant attachés à l'intérêt national.»