GENÈVE: Economie de guerre, partage des vaccins, traité sur les pandémies... Chefs d'Etat, de gouvernements et de l'ONU ont présenté lundi à l'OMS leurs idées pour stopper la Covid et préparer la réponse aux prochaines pandémies.
Cette 74e Assemblée mondiale de la Santé (du 24 mai au 1er juin) se tient en ligne alors que la communauté internationale s'efforce d'accélérer la vaccination des pays pauvres, très en retard, pour mettre un terme à la pandémie et relancer l'économie mondiale.
« Nous sommes en guerre contre un virus. Nous avons besoin de la logique et de l'urgence d'une économie de guerre, pour renforcer la capacité de nos armes », a relevé le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres à l'ouverture des débats.
Le principal enjeu de cette assemblée, qualifiée par le directeur général de l'OMS Tedros Adhanom Ghebreyesus comme « l'une des plus importantes de l'histoire de l'OMS », est la réforme de l'agence et de sa capacité à coordonner la réponse aux crises sanitaires mondiales et prévenir de futures épidémies.
Plusieurs pays, en particulier européens, réclament une organisation plus puissante, capable de mener des enquêtes indépendantes et mieux dotée financièrement, alors que seulement 16% du budget provient des cotisations obligatoires des Etats.
OMS, « boussole » de la santé globale
L'OMS « doit être le coeur, la boussole de notre santé globale », a déclaré le président français Emmanuel Macron, réclamant une organisation « robuste en temps de crise, suffisamment agile pour réagir en urgence, solide face aux polémiques, totalement transparente pour inspirer la confiance, avec une gouvernance claire et transparente pour ne subir aucune pression diplomatique ».
La chancelière allemande Angela Merkel a souligné que « la priorité doit être de permettre au monde de répondre aux menaces pandémiques le plus rapidement possible », et soutenu l'idée de créer un Conseil mondial des menaces sanitaires afin d'améliorer la prévention et la riposte.
Malgré le sentiment d'urgence, certains craignent que les résultats de la réunion soient insignifiants en raison des désaccords entre pays, notamment sur la question des pouvoirs à conférer à l'OMS.
Plusieurs rapports d'experts mandatés par l'OMS réclament de vastes réformes des systèmes d'alerte et prévention, alors que trop de pays ne disposent toujours pas des capacités de santé publique nécessaires pour protéger leurs propres populations et alerter en temps utile la communauté internationale sur d'éventuels risques sanitaires.
Ces rapports demandent aussi que l'OMS puisse enquêter sur le terrain en cas de crise sans attendre le feu vert des pays, mais cette proposition risque de se heurter aux susceptibilités de certains Etats.
L'OMS ne peut pour l'instant enquêter de son propre chef dans un pays. Il lui aura fallu plusieurs mois de discussions avec la Chine pour qu'une équipe de scientifiques indépendants, mandatée par l'organisation onusienne, puisse se rendre sur place pour étudier l'origine de la Covid.
Un des rapports demande que l'autorité du chef de l'OMS soit renforcée par un mandat unique de sept ans sans possibilité de réélection (contre un mandat actuel de 5 ans reconductible), afin qu'il échappe aux pressions politiques.
Alertes régionales?
Un projet de résolution sur le renforcement de l'OMS est bien sur la table mais il se contente de demander la création d'un groupe de travail chargé d'étudier l'ensemble des propositions des experts, avant de faire des recommandations pour la prochaine assemblée.
Le texte appelle aussi le chef de l'OMS à faire des propositions pour améliorer le système d'alerte sanitaire, à travers notamment un éventuel dispositif régional.
Il envisage également le lancement d'un projet pilote de mécanisme d'évaluation du niveau de préparation aux pandémies de chaque Etat par ses pairs, comme au Conseil des droits de l'homme de l'ONU.
Les 194 membres de l'OMS pourraient aussi décider de lancer des négociations sur un traité sur les pandémies, destiné à mieux affronter les futures crises et éviter le chacun pour soi mis en lumière par la Covid.
Loin d'avoir déclenché un élan de solidarité, la crise a accru les tensions comme le montre l'inégalité vaccinale, jugée « scandaleuse » par le chef de l'OMS, qui a demandé qu'au moins 10% de la population de chaque pays soit vaccinée d'ici septembre et au moins 30% avant la fin de l'année.
« Avec l'appui actif de l'OMC, il faudra éliminer tous les obstacles commerciaux qui empêchent la production de ces vaccins », a également souligné le chef du gouvernement espagnol Pedro Sanchez.