BEYROUTH: Ambassadrice de bonne volonté du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord (région Mena), elle est le nouveau visage de plusieurs marques de luxe italienne et présente depuis plus de dix ans Scoop with Raya, la plus ancienne émission consacrée au cinéma dans le monde arabe. Par ailleurs, elle anime l’émission télévisuelle Arabs Got Talent: Raya Abi Rached est décidément sur tous les fronts et c’est avec succès qu’elle enchaîne les projets.
Arab News en français a rencontré à Dubaï cette cinéphile dans l’âme dont le nom évoque Hollywood pour le monde arabe et qui ne possède pas moins de 4,5 millions de followers sur Instagram.
Vous présentez et produisez sur la chaîne MBC2 l’émission Scoop with Raya, dans laquelle vous interviewez les plus grandes stars. Quel événement a lancé votre carrière?
C’est un coup de chance. Jeune, j’avais déjà le cinéma pour passion et j’ai toujours rêvé d’aller au festival de Cannes. Et puis, un jour, j’ai obtenu une bourse pour m’y rendre avec des étudiants de mon âge. Ce fut mon premier festival. Je travaillais alors pour la chaine MTV au Liban tout en étant étudiante: on m’a donc demandé d’effectuer de petits reportages sur place. C’est ainsi, tout simplement, au fond, que tout a commencé.
Comment êtes-vous passée d’une émission libanaise locale à une chaîne panarabe regardée par des millions de téléspectateurs?
J’ai quitté le Liban pour faire mes études supérieures en Angleterre, un master de journalisme télévisé. Pour pouvoir rester à Londres, j’ai postulé, dans cette ville, à de nombreux postes dans le domaine de la télévision. À cette époque, la MBC y était implantée; comme mes premières années d’expérience avec la MTV m’avaient déjà permis d’effectuer quelques interviews, je savais que des opportunités pouvaient se présenter. J’ai travaillé très dur pendant ces années-là pour développer les contacts avec les studios et avec les stars, afin d’obtenir un maximum d’interviews. MBC étant une plate-forme beaucoup plus vaste que MTV, j’ai proposé à la chaîne un format d’émission qui serait consacré aux stars de cinéma. À vrai dire, au début, personne n’a cru à mon projet; mais, petit à petit, on a réussi à donner son empreinte à cette émission qui est devenue, en matière de cinéma dans le monde arabe, le programme phare de la chaîne depuis vingt ans. À partir de 2012, l’émission est passée de la MBC1 à MBC2 et Scoop with Raya s’est encore développé. Aujourd’hui, les téléspectateurs la considèrent comme une émission de référence sur le cinéma. Que des générations aient grandi en regardant ce programme me rend très fière.
Après toutes ces années passées à interviewer les plus grandes stars de Hollywood, avez-vous noué avec elles des relations amicales?
C’est difficile de partager des moments en dehors des interviews, parce que le monde du cinéma est très contrôlé et réglementé par les studios. Il est donc plutôt mal perçu d’essayer de développer des relations amicales avec des stars. D’ailleurs, ce n’est pas tout à fait mon style: je préfère que les rapports soient plus professionnels, même si je dois avouer que j’éprouve une alchimie particulière avec certains acteurs comme Will Smith ou Tom Cruise. Je ressens également une vraie complicité avec George Clooney, dont la femme est libanaise et dont les enfants ont le même âge que ma fille. Je le connais depuis des années, c’est une personne très sympathique.
À ce jour, 5 millions de personnes vous suivent sur Instagram. Gérez-vous vous-même vos réseaux sociaux ou y a-t-il une équipe qui s’en charge? Par ailleurs, vous sentez-vous investie d’une responsabilité éthique vis-à-vis de vos followers?
Il est certain qu’il s’agit d’un profil public qui a une large audience et que je fais particulièrement attention à ce que je partage sur les réseaux sociaux. Il est difficile de plaire à tout le monde et il peut arriver qu’on commette des erreurs, mais, de manière générale, je suis satisfaite, car ce profil reflète ma personnalité et il décrit la personne que je suis réellement. J’aime être spontanée et je tiens à ce que cela se voie. Je poste moi-même l’ensemble des publications – j’y attache beaucoup d’importance –, et il n’y a que moi qui ai accès à mon compte Instagram. Malgré tout, une équipe est là pour me conseiller, m’aider à choisir les images, procéder au montage de certaines vidéos…
Parlez-nous des looks que vous choisissez…
J’appelle cela en arabeدراما الفستان , «le drame de la robe»: il y a toujours beaucoup de drames autour d’un look de tapis rouge! Je ne suis pas une fashionista naturelle et j’ai besoin de toute mon équipe autour de moi. Je suis à cet égard très reconnaissante à mon styliste, Cédric, qui fait tout pour que les choses se passent au mieux. Ainsi, au sujet du look qu’on a choisi à l’occasion des Golden Globe de Dubaï pour le tapis rouge virtuel, la robe de Georges Hobeika est arrivée du Liban en plein confinement le jour même et l’équipe beauté est arrivée dans l’après-midi, de même que le photographe. Apres les séances photos, nous passons parfois des heures à sélectionner les clichés... C’est l’équipe qui fait toute la différence.
On vous a récemment vue déguisée en héroïne de films. Si on vous proposait de jouer dans un film, quel personnage aimeriez-vous être?
L’idée était de faire une séquence d’ouverture inédite de Scoop with Raya à l’occasion de la dixième saison de l’émission. Le rayonnement de ce programme est tel dans le milieu du cinéma que j’ai tenu à proposer une entrée en matière en forme de clin d’œil aux films qui sont populaires dans le Moyen-Orient. J’ai aimé tous les rôles que j’ai joués mais mes deux préférés sont celui de Harley Queen – j’adore son côté complétement fou – et celui d’une James Bond girl. La seule chose qui m’a gênée avec ce dernier personnage, c’est le port du pistolet, car je suis contre les armes; mais j’adore le côté glamour de cette héroïne.
Vous êtes la première femme arabe nommée ambassadrice de bonne volonté de l’UNHCR pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. Pouvez-vous nous parler de votre mission?
Il convient d’abord de dire que, chaque fois qu’une entité telle que l’UNHCR choisit des personnes publiques et leur demande de défendre sa cause, cela leur donne davantage de crédit qu’elles ne le méritent. En réalité, nous nous faisons les porte-paroles des gens qui s’occupent réellement des réfugiés et, parfois, nous rapportons les témoignages des réfugiés eux-mêmes. Bien sûr, nous avons une responsabilité, celle de les aider par tous les moyens. Et, même si je le fais avec tout mon cœur, je n’aide pas autant que les personnes qui œuvrent au sein de l’UNHCR. J’ai rencontré des gens vraiment épatants partout dans le monde arabe qui consacrent leur temps, leur énergie et leur affection pour secourir les réfugiés au quotidien. Je pense qu’il est très important d’aider à sa façon, mais on nous donne beaucoup trop de crédit. J’avais travaillé sur de nombreux projets au Liban et en Jordanie avec cette organisation; nous avions levé des fonds destinés à cinq cent cinquante familles dans des camps de réfugiés. Aujourd’hui que le défi est encore plus important, je reste plus que jamais attachée à défendre cette cause partout dans le monde.