BOMBAY : Treize malades du Covid-19 sont décédés vendredi matin dans l'incendie d'un hôpital de la banlieue de Bombay, un drame ajoutant à la catastrophe sanitaire qui accable l'Inde où le nombre de contaminations bat des records.
Le feu, désormais éteint, s'est déclenché à environ 03H00 (21H30 GMT jeudi) et ses causes sont en cours d'investigation, a indiqué à l'AFP un responsable des pompiers.
"Dix-sept patients étaient dans l'unité de soins intensifs de l'hôpital Vijay Vallabh quand un incendie s'est déclaré, 13 sont décédés et quatre autres ont été transférés dans d'autres établissements", a déclaré Morrison Khavari, un responsable des pompiers.
Deux jours plus tôt, 22 patients atteints du Covid-19 sont décédés dans un autre hôpital du même État du Maharashtra en raison d'une coupure d'alimentation en oxygène de respirateurs pendant une demi-heure.
Quatre malades étaient également morts, début avril, dans l'incendie d'une clinique privée du Maharashtra alors qu'en mars, un feu dans un hôpital avait fait onze morts à Bombay.
Le Premier ministre indien Narendra Modi doit participer vendredi à au moins trois réunions de crise consacrées notamment à l'approvisionnement en oxygène et à la disponibilité des médicaments de première nécessité.
La capitale New Delhi continue d'être parmi les zones les plus sévèrement frappées par la pandémie, avec des centaines de milliers de nouvelles contaminations ces derniers jours.
"SOS"
Les hôpitaux de la ville lancent des appels à l'aide quotidiens au gouvernement de l'État et au gouvernement national à l'aide en raison de l'épuisement des réserves d'oxygène.
"SOS - Moins d'une heure d'approvisionnement en oxygène au Max Smart Hospital et au Max Hospital Saket. Nous attendons les nouveaux approvisionnements promis par INOX depuis 1 heure du matin (...) Plus de 700 patients admis ont besoin d'une assistance immédiate", a tweeté Max Healthcare, l'une des plus grandes chaînes d'hôpitaux privés, tôt vendredi matin.
D'autres hôpitaux privés de la région publient des messages vidéo et lancent des appels semblables sur les réseaux sociaux depuis des jours.
Au moins six hôpitaux ont manqué d'oxygène dans la capitale indienne tard dans la nuit de jeudi à vendredi, quand d'autres ne disposaient plus que quelques heures de stock.
De nombreuses vies menacées
"Vingt-cinq patients les plus malades sont morts au cours des dernières 24 heures. Plus que deux heures d'oxygène (...) Une crise majeure est probable. La vie de 60 autres patients les plus atteints sont en danger, une intervention urgente est nécessaire", a averti le directeur médical de l'hôpital Sir Gangaram de New Delhi dans un communiqué.
L'Inde a enregistré près de quatre millions de nouveaux cas sur ce seul mois d'avril, réduisant à néant les espoirs du début de l'année d'avoir peut-être surmonté le pire de la pandémie.
En conséquence, le pays se trouve également confronté à une pénurie d'oxygène, de médicaments et de lits d'hôpitaux.
Cette recrudescence exponentielle a été en partie imputée à la "double mutation" du virus et à des événements de masse, tels que le long festival Kumbh Mela à Haridwar, dans l'Etat de l'Uttarakhand (nord), où environ 25 millions de pèlerins hindous, la plupart sans masque ni distanciation physique, se rassemblent depuis janvier jusqu'à la fin du mois.
Crise du Covid-19 en Inde : la faute à quoi ? à qui ?
NEW DELHI : L'Inde, frappée par une violente vague de Covid-19, est confrontée à une grave pénurie de lits, d'oxygène et de médicaments ébranlant son système de santé vétuste et sous-financé.
Alors que cette recrudescence ravageuse fait plus de 2.000 morts chaque jour dans le deuxième pays le plus peuplé du monde avec son 1,3 milliard d'habitants, l'AFP fait le point sur les facteurs qui ont conduit à cette crise.
Fort recul des cas
Quand la pandémie frappait violemment nombre de pays dans le monde au début de 2021, l'Inde voyait avec soulagement le nombre de ses contaminations quotidiennes culminer à seulement 9.000 cas et moins de 80 décès.
Cette accalmie en Inde, qui compte pourtant certaines des villes les plus densément peuplées de la planète, a permis de croire un temps que l'on était peut-être déjà venu à bout de la pandémie.
L'immunité collective
Des études sérologiques ont suggéré qu'une forte proportion de la population présentait des anticorps et que l'Inde avait peut-être atteint l'"immunité collective".
Il a aussi été suggéré que la jeunesse de la population indienne et la grande exposition à d'autres agents pathogènes aient augmenté sa résistance au virus.
Optimisme prématuré
Le pic épidémique atteint en septembre, le reflux des contaminations a encouragé les gouvernements central et des États à autoriser un retour quasiment à la normale de l'ensemble des activités, tous empressés de rattraper le temps et l'argent perdus pendant le confinement.
"Je pense qu'une déclaration prématurée de la victoire a bercé la population dans un sentiment erroné d'autosatisfaction", a déclaré à l'AFP Ramanan Laxminarayan, du Center for Disease Dynamics, Economic and Policy.
Rassemblement de foules
Des dizaines de milliers d'agriculteurs ont manifesté contre les nouvelles lois agricoles du gouvernement nationaliste hindou. Les meetings politiques bondés et les élections régionales ont sans doute leur part de responsabilité dans ce regain épidémique.
Sans compter les foules drainées par les festivals religieux tels que Durga Puja, Dussehra mais surtout celui de Kumbh Mela à Haridwar, dans l'Etat de l'Uttarakhand (nord), où ont afflué 25 millions de pèlerins hindous depuis janvier et qui dure jusqu'à la fin d'avril.
Aucune anticipation
Les autorités n'ont pas profité de l'accalmie pour renforcer le système de santé indien.
Il aurait fallu à ce moment-là anticiper et "créer des stock de médicaments antiviraux, mais cela ne s'est pas produit", estime Raman Gaikwad, spécialiste des maladies infectieuses à l'hôpital Sahyadri de Pune.
Les experts avait prévenu depuis longtemps que l'Inde, comme tant de pays pauvres, manquait cruellement d'oxygène médical, vital pour traiter les cas graves de Covid-19.
La diplomatie des vaccins
Forte du recul du virus dans le pays, dans un élan de générosité et de "diplomatie vaccinale", l'Inde a exporté des dizaines de millions de vaccins AstraZeneca fabriqués dans le pays.
Le variant
Face à cette recrudescence exponentielle, avec quatre millions de nouvelles contaminations recensées sur le seul mois d'avril, d'aucuns mettent volontiers en cause "la double mutation" du virus.