Le gouvernement et Ennahdha feront-ils marche arrière dans l’affaire de la TAP ?

Les journalistes brandissent des pancartes indiquant en arabe (de droite à gauche) "la liberté de la presse est une ligne rouge", "le quatrième pouvoir ne se met pas à genoux" et "un gouvernement qui ne respecte pas la loi", alors qu'ils se rassemblent pour une manifestation à l'extérieur le siège de l'agence de presse nationale tunisienne Tunis Afrique Presse (TAP) dans la capitale le 15 avril 2021. FETHI BELAID / AFP
Les journalistes brandissent des pancartes indiquant en arabe (de droite à gauche) "la liberté de la presse est une ligne rouge", "le quatrième pouvoir ne se met pas à genoux" et "un gouvernement qui ne respecte pas la loi", alors qu'ils se rassemblent pour une manifestation à l'extérieur le siège de l'agence de presse nationale tunisienne Tunis Afrique Presse (TAP) dans la capitale le 15 avril 2021. FETHI BELAID / AFP
Short Url
Publié le Vendredi 16 avril 2021

Le gouvernement et Ennahdha feront-ils marche arrière dans l’affaire de la TAP ?

  • D’abord tentés par un passage en force pour imposer Kamel ben Younes comme PDG de l’agence de presse officielle, le chef du gouvernement et son principal soutien semblent hésiter
  • Les journalistes de l’agence de presse officielle s’opposent au parachutage de leur confrère en raison de son passé et de son présent politiques

TUNIS: D’abord tentés par un passage en force pour imposer Kamel ben Younes, un journaliste acquis au mouvement islamiste, comme PDG de l’agence de presse officielle, le chef du gouvernement et son principal soutien semblent hésiter. En effet, les journalistes rejettent fermement cette nomination en raison du passé et du présent politiques de leur confrère.

Mouna Mtibaa continue à travailler sereinement. Pourtant, au siège de l’Agence Tunis Afrique Presse (TAP), dont elle est la présidente directrice générale, l’ambiance n’est guère studieuse. Un sit-in a été instauré à l’initiative des journalistes depuis le 6 avril au rez-de-chaussée de l’agence de presse située à El Manar 2, un quartier résidentiel du nord-est de la capitale, Tunis, pour protester contre la nomination de leur confrère Kamel ben Younes au poste de PDG.

Face à cette fronde, Hichem Mechichi, chef du gouvernement, a déclaré le 13 avril dernier que le gouvernement ne ferait pas marche arrière. Le jour même, Kamel ben Younes a pu entrer au siège de la TAP et accéder à son bureau grâce au soutien de policiers en uniforme et en civil, mais il a dû ressortir aussitôt sous les insultes des journalistes de l’agence.

Une réunion du conseil d’administration de la TAP devait avoir lieu le 14 avril pour entériner la nomination et organiser la passation avec l’actuel PDG. Elle a finalement été reportée sine die.

Les journalistes de l’agence de presse officielle s’opposent au parachutage de leur confrère non parce qu’ils doutent, comme d’autres, qu’il ait les compétences requises pour son nouveau poste, mais en raison de son passé et de son présent politiques.

À l’École normale de Bizerte comme à celle de Tunis, Kamel ben Younes fut un cadre très actif du Mouvement de la tendance islamique (MTI – ce courant fut rebaptisé «mouvement Ennahdha» en 1989). Il a même été condamné à quatre ans de prison en raison de son engagement lors du premier procès des islamistes en 1981.

Mais le nouveau PDG de la TAP est devenu après 1987 un défenseur et un propagandiste zélé du régime Ben Ali. Il a notamment mené en 2001 l’offensive contre la Ligue tunisienne de défense des droits de l’homme. Son nom a été cité dans l’ouvrage Dispositif de la propagande sous le règne de Ben Ali: le livre noir, publié par la présidence de la République en 2013.

D’ailleurs, le site Kapitalis.com a produit le 7 avril 2021 des documents compromettants dont l’authenticité n’a pas été contestée par l’intéressé, prouvant que Kamel ben Younes avait été grassement payé pour les services rendus à l’ancien régime.

Après le 14 janvier 2011, Kamel ben Younes est retourné vers ses premières amours islamistes. Même s’il n’est pas encarté à Ennahdha, le nouveau PDG désigné de la TAP est l’un des partisans les plus engagés du mouvement et, selon nos sources, l’un des conseillers de Rached Ghannouchi, le président du mouvement et du Parlement: il trouve aujourd’hui sa récompense.

Après avoir accompagné M. Ghannouchi en Chine en septembre 2014, Kamel ben Younes a été nommé en avril 2017 directeur général de Zitouna FM, une radio religieuse confisquée après le 14 janvier 2011 à Sakhr el-Materi, le gendre de Ben Ali. Aujourd’hui, avec sa nomination à la tête de la TAP, il monte en grade.

Mais pourra-t-il garder ce poste? Ne cédera-t-il pas sous la pression, comme le fit Lotfi Touati, un cadre nahdhaoui nommé en août 2012 directeur général de Dar Assabah, un groupe de presse qui fut confisqué à MM. El-Materi et Touati, ce qui conduisit ce dernier à démissionner à la fin du mois d’octobre? Ou le gouvernement et le mouvement Ennahdha finiront-ils par se raviser face à l’élargissement du cercle des soutiens aux journalistes de la TAP, en Tunisie (UGTT, syndicat des journalistes, partis politiques) comme à l’étranger (Fédération internationale des journalistes et Reporters sans frontières)?


Dans Gaza affamée, des Palestiniens se rabattent sur la viande de tortue

(Photo AFP)
(Photo AFP)
Short Url
  • Faute de mieux, c'est la troisième fois que cette Palestinienne de 61 ans prépare un repas à base de tortue pour sa famille déplacée, qui vit aujourd'hui sous une tente à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza.
  • « La famine n'est pas seulement un risque, mais elle semble se développer rapidement dans presque toutes les régions de Gaza », a averti un collectif d'ONG internationales cette semaine.

KHAN YOUNES, TERROIRES PALESTINIENS : Dans une bande de Gaza où les protéines sont rares, certains se résignent à manger des tortues marines.

« Les enfants étaient réticents, on leur a dit que c'était aussi délicieux que du veau », explique Majida Qanan, qui surveille les morceaux de viande rouge mijotant sur un feu de bois.

« Certains en ont mangé, d'autres pas. »

Faute de mieux, c'est la troisième fois que cette Palestinienne de 61 ans prépare un repas à base de tortue pour sa famille déplacée, qui vit aujourd'hui sous une tente à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza.

Depuis 18 mois de guerre dévastatrice entre Israël et le mouvement islamiste Hamas, le territoire et ses 2,4 millions d'habitants se trouvent dans une situation humanitaire critique.

« La famine n'est pas seulement un risque, mais elle semble se développer rapidement dans presque toutes les régions de Gaza », a averti un collectif d'ONG internationales cette semaine.

Depuis le 2 mars, Israël bloque toute livraison humanitaire, accusant le Hamas de détourner l'aide. Le mouvement palestinien dément ces accusations et accuse en retour Israël d'utiliser « la famine comme arme de guerre ».

Selon le Bureau des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA), la bande de Gaza est aujourd'hui probablement plongée dans « la pire » situation humanitaire depuis le début de la guerre déclenchée le 7 octobre 2023 par une attaque sans précédent du Hamas contre Israël.

En juin dernier, les acteurs du secteur humanitaire avaient évoqué des Palestiniens si démunis qu'ils en étaient parfois réduits à se nourrir d'aliments pour animaux ou d'herbe, et à boire l'eau des égouts.

Entretemps, une trêve, entrée en vigueur le 19 janvier, a permis d'augmenter les livraisons humanitaires, jusqu'au nouveau blocage israélien du 18 mars, suivi de la reprise de ses opérations militaires.

Les tortues, elles, sont tuées selon les rites halal, c'est-à-dire conformément aux préceptes de la religion musulmane, affirme Abdul Halim Qanan.

« S'il n'y avait pas de famine, on n'en mangerait pas, mais il faut bien compenser le manque de protéines avec quelque chose ».


Le président syrien reçoit un membre républicain du Congrès américain

Le président Al-Sharaa rencontre Cory Mills, membre du Congrès américain, à Damas. (Courtesy : SANA)
Le président Al-Sharaa rencontre Cory Mills, membre du Congrès américain, à Damas. (Courtesy : SANA)
Short Url
  • En janvier, les États-Unis ont annoncé un allègement temporaire des sanctions pour « ne pas entraver » la fourniture de services essentiels à la population syrienne. Ils ont cependant précisé qu'ils n'envisageraient pas d'assouplir davantage les sanctions
  • C'est la première visite du genre pour un élu américain depuis la chute de Bachar al-Assad en décembre.

DAMAS : Le président syrien par intérim, Ahmad al-Chareh, s'est entretenu à Damas avec un membre du Congrès américain, a indiqué samedi la présidence syrienne, ce qui constitue la première visite du genre pour un élu américain depuis la chute de Bachar al-Assad en décembre.

Cory Mills, membre du parti républicain, est arrivé vendredi en Syrie, accompagné de Marlin Stutzman, également membre du parti de Donald Trump.

Le nouveau président a rencontré M. Mills au palais présidentiel à Damas en présence de son ministre des Affaires étrangères, Assaad al-Chaibani, a indiqué la présidence dans un communiqué.

Le président syrien par intérim, Ahmad al-Chareh, s'est entretenu à Damas avec un membre du Congrès américain, a indiqué samedi la présidence syrienne, ce qui constitue la première visite du genre pour un élu américain depuis la chute de Bachar al-Assad en décembre.

Cory Mills, membre du parti républicain, est arrivé vendredi en Syrie, accompagné de Marlin Stutzman, également membre du parti de Donald Trump.

Le nouveau président a rencontré M. Mills au palais présidentiel à Damas en présence de son ministre des Affaires étrangères, Assaad al-Chaibani, a indiqué la présidence dans un communiqué.

Peu après l'arrivée d'Ahmed Chareh, Washington avait annoncé ne plus proposer de récompense pour son arrestation, après avoir reçu des « messages positifs » lors de la première visite officielle de diplomates américains à Damas après l'éviction de M. Assad.

Le nouveau gouvernement syrien cherche à obtenir une levée des sanctions internationales imposées à l'époque de Bachar al-Assad afin de relancer l'économie du pays, exsangue après 14 années de guerre civile.

Toutefois, certains pays souhaitent attendre de voir si les nouvelles autorités vont respecter les droits humains. 

En janvier, les États-Unis ont annoncé un allègement temporaire des sanctions pour « ne pas entraver » la fourniture de services essentiels à la population syrienne. Ils ont cependant précisé qu'ils n'envisageraient pas d'assouplir davantage les sanctions tant que des progrès sur des priorités telles que la lutte contre le « terrorisme » n'auront pas été constatés.

Les sanctions économiques ont un impact lourd sur le pays, où 90 % des Syriens vivent sous le seuil de pauvreté, selon l'ONU.

Une délégation ministérielle syrienne et le gouverneur de la Banque centrale doivent participer à des réunions avec le Fonds monétaire international et la Banque mondiale à Washington la semaine prochaine, ont récemment indiqué deux sources proches des participants.

La visite des deux élus américains intervient alors que les États-Unis ont annoncé le retrait prochain d'environ un millier de soldats américains déployés en Syrie pour lutter contre les jihadistes.

Washington a également mis en garde le même jour contre le risque d'attaques « imminentes » en Syrie, selon un message diffusé sur le site de l'ambassade américaine, fermée depuis 2012.


Les États-Unis annoncent réduire de moitié leurs effectifs militaires en Syrie

Les États-Unis ont commencé à retirer des centaines de soldats du nord-est de la Syrie, a rapporté le New York Times jeudi. (AFP/File)
Les États-Unis ont commencé à retirer des centaines de soldats du nord-est de la Syrie, a rapporté le New York Times jeudi. (AFP/File)
Short Url
  • Cette décision intervient près de trois mois après l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, qui est défavorable depuis longtemps à la présence américaine sur place et prône un retour à une politique isolationniste des États-Unis.
  • La présence américaine en Syrie va être ramenée « à moins d'un millier de soldats dans les mois prochains », sur environ 2 000 actuellement, a déclaré Sean Parnell, le porte-parole du Pentagone, dans un communiqué.

WASHINGTON : Les États-Unis ont annoncé vendredi qu'ils allaient réduire de moitié leur présence militaire en Syrie, estimant avoir lutté avec « succès » contre le groupe État islamique (EI), même si des groupes djihadistes demeurent actifs dans un pays encore fragile.

Cette décision intervient près de trois mois après l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, qui est défavorable depuis longtemps à la présence américaine sur place et prône un retour à une politique isolationniste des États-Unis.

Les États-Unis sont présents sur le sol syrien depuis des années, notamment dans le cadre de la coalition internationale contre l'EI.

La présence américaine en Syrie va être ramenée « à moins d'un millier de soldats dans les mois prochains », sur environ 2 000 actuellement, a déclaré Sean Parnell, le porte-parole du Pentagone, dans un communiqué.

« Cette consolidation démontre les progrès considérables réalisés pour réduire l'attrait et les capacités opérationnelles du groupe Etat islamique, tant dans la région que dans le monde », a-t-il dit, évoquant plus globalement « le succès des États-Unis contre l'EI ».

Arrivé au pouvoir à Washington le 20 janvier, Donald Trump est depuis longtemps sceptique sur la présence militaire en Syrie. Et la chute fin décembre de Bachar al-Assad, remplacé à la tête du pays par une coalition menée par des islamistes, n'a pas changé la donne.

La prise de contrôle de pans entiers de la Syrie et de l'Irak par l'EI à partir de 2014 a déclenché l'intervention d'une coalition internationale menée par les États-Unis, dont l'objectif principal était de soutenir les unités de l'armée irakienne et les Kurdes qui combattaient l'EI au sol par les airs.

Mais Washington a alors aussi déployé des milliers de ses soldats pour soutenir ces troupes locales et mener ses propres opérations militaires.
« L'armée américaine va rester prête à mener des frappes contre ce qu'il reste de l'EI en Syrie », a déclaré vendredi le porte-parole du Pentagone, qui dit maintenir « des capacités importantes dans la région ».

Les États-Unis disposent actuellement d'environ 2 500 soldats en Irak, un chiffre appelé à diminuer.

La sécurité en Syrie reste précaire depuis la chute de Bachar al-Assad, après près de 14 ans d'une guerre déclenchée par la répression violente de manifestations antigouvernementales en 2011.

À la tête de forces de sécurité dominées par d'anciens rebelles islamistes, les autorités syriennes de transition ont la lourde tâche de maintenir la sécurité dans un pays multiethnique et multiconfessionnel où de nombreux groupes armés, parmi lesquels des djihadistes, sont encore présents.