LA MECQUE : Le Puits de Hima continue de fasciner les chercheurs et les archéologues. Intact et inaltéré, ce site constitue l'une des plus anciennes et importantes haltes le long des anciennes routes commerciales d'Arabie.
A environ 140 km au nord de la ville de Najran, ce site est en effet bien préservé et offre un tableau de ce qui était jadis une ancienne route empruntée par les caravanes voyageant du sud au nord de la péninsule arabique. Ces images sont illustrées grâce à l'art rupestre en grande partie intact que l’on retrouve à cet endroit et qui dépeint des humains, des animaux, des outils de chasse, des arcs, des lances et bien d'autres encore.
Dans un entretien avec Arab News, Saleh Al-Muraih, chercheur historique spécialisé dans le tourisme et l'archéologie de la province de Najran, a déclaré que « Le Puits de Hima fait partie des sites historiques les plus importants du Royaume et renferme de nombreuses inscriptions rupestres et des dessins qui remontent à avant l'an 3000 avant Jésus-Christ ».
« Sept puits d'eau douce répartis sur 30 km forment ce site qui compte plus de 200 lieux présentant des inscriptions et des dessins rupestres, des tombes, des cercles de pierres et des puits historiques », précise-t-il.
Selon M. Al-Muraih, « c'est autour des puits de Hima que se rassemblaient les caravanes commerciales avant d'emprunter l'une des deux routes principales. La première conduisait à la Mésopotamie en passant par Al-Faw (appelée aussi Qariah, une ancienne ville située aux abords du Quartier Vide), site archéologique des régions de Kindah et Al-Yamama, connues de nos jours sous le nom de Najd. La deuxième route menait jadis au Levant et à l'Égypte en passant par la région du Hijaz ».
Les gravures rupestres abondantes du Puits de Hima ont été léguées, au fil des ans, par les centaines de caravanes qui partaient d'Al-Okhdood, dans le sud, et passaient devant le puits. L'ancienne écriture sud-arabique (Musnad), le langage sud-arabique et thamudique figurent sur ces gravures aux côtés des illustrations de la faune et de la flore.
« Le gouvernement saoudien a bien entretenu le Puits de Hima, et voilà que des clôtures fantastiques sont en cours d'installation. Ces travaux viennent s'ajouter aux recherches scientifiques continues visant à examiner le site et nous espérons que ces travaux permettront d'ajouter le site à la liste du patrimoine mondial de l'Unesco », a déclaré M. Al-Muraih.
« Cette région a fait l'objet de nombreuses études de terrain et de nombreux projets de conservation. Heureusement, la région de Hima a été épargnée de toute forme de dégradation et ses monuments ont été préservés. Les habitants de la région sont bien informés quant à la protection de ces sites et à la préservation des monuments historiques importants », a-t-il ajouté.
Le Puits de Hima, l'un des 86 sites historiques de Najran, concilie patrimoine et tourisme dans un même endroit. Guides touristiques, communauté locale et organismes publics coopératifs sont tous prêts à évoquer l'importance historique du puits.
Dr Salma Hawsawi, professeur d'histoire antique à l'Université du Roi Saoud, a confié à Arab News que « le Royaume compte bon nombre de sites archéologiques et de villes historiques qui ont été le théâtre de constructions pendant des milliers d'années. Ces sites méritent pourtant d'être préservés et développés pour répondre aux exigences de notre époque ».
Elle ajoute que « les villes historiques sont nombreuses, quelles que soient leur histoire et leurs origines. Citons notamment la ville de Najran, dans le sud-ouest du pays, citée par de nombreux historiens classiques tels que Strabon. Dans son livre ‘Géographie’, il l'a nommée Negrana, alors qu'il abordait les campagnes romaines dans la péninsule arabique dans les années 24-25 avant J.-C. L’astronome Ptolémée, lui, l'a appelée la Métropole Negara ».
« L’historien musulman Yaqut Al-Hamawi a raconté dans son livre que la ville tire son nom de la première personne qui l'a habitée, Najran ben Zaydan ben Sabaa. De plus, ce qui confirme que cette ville était très ancienne, c'est que son nom a été mentionné dans les inscriptions de souverains sabéens tels que Karib'il, Samah Ali Yanuf et Yitha'amar Bayyin », ajoute-t-elle.
Toujours selon le Dr Hawsawi, le sud-ouest du Royaume revêt une grande importance géographique puisqu'il est situé entre l'Afrique et l'Asie. À cela s'ajoute l'importance de la région côtière sur le plan des migrations, et l'on a découvert que certains habitats remontent au premier siècle avant J.-C. jusqu'à l'ère islamique.
« Les fouilles archéologiques menées par le ministère du tourisme d'Arabie saoudite (SCTH) ont révélé que la ville de Najran compte parmi les lieux habités les plus anciens. Cela a été possible grâce aux indices archéologiques recueillis sur divers sites correspondant à différentes périodes de l'histoire, depuis l'âge de la pierre jusqu'à l'ère islamique », a-t-elle déclaré.
Pour Mme Hawsawi, « l'art rupestre et les inscriptions sont les éléments les plus caractéristiques des monuments de la région, dans la mesure où ils nous ont apporté de nombreuses informations concernant les vêtements, les accessoires, les armes, les poêles en pierre, les structures rectangulaires et coniques et les réservoirs, particulièrement autour de la zone de Hima Well ».
En effet, la plus grande partie des dessins rupestres de la région présente des chameaux, des vaches, des chèvres et des oies, ainsi que certains animaux prédateurs tels que des lions et des loups, explique Dr Hawsawi. « Les autruches ont fait l'objet d'une attention particulière au niveau de leur ornementation et de leur taille, surtout parce qu'elles sont dessinées dans différentes positions, ce qui souligne leur importance ».
Par ailleurs, les dessins représentent des batailles à cheval, où les chevaliers se servaient de lances, ainsi que quelques scènes de chasse, où l'on faisait appel à des chiens pour chasser des chèvres, a-t-elle précisé avant de faire remarquer que « certains dessins d'humains sont plus grands que la normale, et certains d'entre eux avaient la tête couverte. La barbe des hommes était bien visible. Les hommes portaient des chaînes et des colliers, ou des bracelets aux chevilles permettant de produire des sons adaptés aux mouvements de danse et à la musique. La tenue consistait en de courtes robes enroulées au milieu. D'autres dessins montraient des personnes qui dansaient en portant des instruments de musique qui ressemblent au rabâb ».
Dr Hawsawi affirme qu’ « on a trouvé dans la région de nombreuses écritures thamudiques, suivies par l'ancienne écriture sud-arabique et l'écriture coufique, qui remonte à l'ère islamique. La multitude d'écritures trouvées dans la région met en lumière les différentes civilisations qui se sont succédé. En outre, les inscriptions en alphabet sud-arabique ancien trouvées gravées au-dessus d'inscriptions thamudiques soulignent l'ancienneté de l'alphabet thamudique ».
« La plupart des inscriptions comprennent des noms tels que 'Saad', 'Awathat' et 'Rafadat', et des dieux tels que 'Al' et 'Kahl', et les inscriptions ont été gravées à côté de dessins d'animaux », poursuit-elle.
Selon le Dr Hawsawi, « parmi les longues inscriptions, on trouve une inscription de 12 lignes attribuée au roi ‘Dhu Nuwas’, dans laquelle il décrit sa victoire contre les Ethiopiens en 512 ».
À ce jour, on a découvert dans la région 1 293 dessins représentant des humains, 5 121 dessins d'animaux, 3 616 inscriptions thamudiques, 2 775 inscriptions en écriture sud-arabique ancienne et trois inscriptions nabatéennes. Les travaux de recherche et de fouille se poursuivent dans tout le Royaume et dans cette région en particulier, dans le but de dégager davantage de monuments et de sites culturels historiques.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com.
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À ce jour, on a découvert dans la région 1 293 dessins représentant des humains, 5 121 dessins d'animaux, 3 616 inscriptions thamudiques, 2 775 inscriptions en écriture sud-arabique ancienne et trois inscriptions nabatéennes. Les travaux de recherches et de fouilles se poursuivent dans tout le Royaume et dans cette région en particulier, dans le but de dégager davantage de monuments et de sites culturels historiques.