BEYROUTH: Les représentants de deux compagnies allemandes ont dévoilé vendredi à Beyrouth un projet de plusieurs milliards de dollars pour reconstruire le port de la capitale libanaise et des quartiers adjacents, soulignant toutefois que sa mise en oeuvre restait tributaire d'énormes réformes.
Le port de Beyrouth et plusieurs quartiers proches ont été détruits le 4 août 2020 lors d'une explosion gigantesque survenue dans un hangar contenant d'importantes quantités de nitrate d'ammonium stockées sans mesures de précaution.
L'explosion, imputée à la corruption et la négligence des autorités libanaises, a fait plus de 200 morts.
Le plan proposé vendredi envisage d'éloigner du centre-ville l'essentiel de l'activité portuaire et de réurbaniser les quartiers les plus endommagés.
S'exprimant lors d'une conférence de presse, Hermann Schnell, de la société Colliers, a cité entre autres "des logements abordables pour des particuliers, des espaces verts et de bonnes infrastructures".
Le projet envisage également l'aménagement de plages et d'un grand parc au milieu d'un patrimoine architectural restauré, le tout devant générer 50 000 emplois.
Il s'agit d'une "opportunité pour (construire) une nouvelle ville", a ajouté M. Schnell, citant des exemples réussis selon lui de ports réaménagés comme Le Cap ou Bilbao.
L'objectif, selon Lars Greiner de Hamburg Port Consulting (HPC), est de transformer Beyrouth "en un port de niveau mondial".
D'autres compagnies internationales, dont le géant français du transport maritime CMA CGM, ont déjà soumis ou sont en cours d'élaboration de plans alternatifs ou complémentaires.
Le projet allemand, le premier de cette envergure pour Beyrouth après l'explosion, a été accueilli avec scepticisme par certains observateurs locaux.
"Je ne vois pas ces propositions (...) devenir réalité de sitôt", a affirmé à l'AFP l'économiste Jad Chaaban.
"Qui est aujourd'hui prêt à investir un sou dans un pays en plein effondrement, qui n'a pas de gouvernement et qui a fait défaut sur sa dette?", a-t-il demandé.
Le Liban est en proie à une grave crise économique depuis plus d'un an. Sa monnaie est en chute libre et l'inflation a explosé tout comme la pauvreté.
Le projet envisage la création d'un fonds fiduciaire pour gérer les financements de la Banque européenne d'investissement et d'autres investisseurs.
"Un projet d'une telle envergure (...) ne peut être construit que s'il existe responsabilité et transparence", a déclaré de son côté l'ambassadeur allemand à Beyrouth Andreas Kindl lors de la conférence de presse.
Or la classe dirigeante libanaise est accusée d'incompétence et de corruption par la rue et plusieurs ONG internationales.
"Ne rêvons pas (...) Si certaines conditions préalables ne sont pas remplies et ne permettent pas une transparence totale, cela ne fonctionnera pas", a ajouté à l'AFP Souheil Mahayni, directeur général de HPC.