L'avancée jihadiste au Mozambique inquiète l'Afrique australe

Les personnes déplacées internes (PDI) de Palma se rassemblent au centre sportif de Pemba pour recevoir une aide humanitaire. (Photo, AFP)
Les personnes déplacées internes (PDI) de Palma se rassemblent au centre sportif de Pemba pour recevoir une aide humanitaire. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 09 avril 2021

L'avancée jihadiste au Mozambique inquiète l'Afrique australe

  • L'attaque du 24 mars contre la ville de Palma, au Mozambique, marque un tournant dans les violences infligées par les groupes armés jihadistes depuis 2017
  • Le raid sanglant et minutieusement préparé a endeuillé cette ville portuaire, à seulement quelques kilomètres d'un mégaprojet gazier du groupe français Total

JOHANNESBURG : L'attaque contre Palma dans le nord-est du Mozambique, tournant dans les violences infligées par les groupes armés jihadistes depuis 2017, inquiète l'Afrique australe sur les risques d'instabilité sécuritaire pour la région. 

Le 24 mars, un raid sanglant et minutieusement préparé a endeuillé cette ville portuaire de 75 000 habitants, à seulement quelques kilomètres du méga projet gazier du groupe français Total sur la péninsule d'Afungi.

Officiellement, des dizaines de civils, policiers et militaires ont été tués, le bilan réel n'est pas encore connu.

Six présidents de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) se sont réunis en urgence jeudi à Maputo. Ils ont appelé à une « réponse régionale proportionnée ».

Selon les participants, une équipe technique sera immédiatement déployée à Maputo, mais aucun détail n'a été fourni sur sa composition et sa mission.

Rencontrant la presse après les discussions, le président du Zimbabwe Emmerson Mnangagwa a indiqué que le sommet avait décidé de « réactiver la force de la SADC et de la doter immédiatement des capacités lui permettant d'intervenir ».

Les dirigeants du Mozambique, du Malawi, de la Tanzanie, du Botswana, d'Afrique du Sud et du Zimbabwe ont participé au sommet.

Cette semaine, les seize membres de la SADC ont condamné l'attaque de Palma, la qualifiant d'« affront » à la paix et à la sécurité du Mozambique, de la région et au-delà. 

Selon plusieurs analystes, la sécurité régionale est désormais en jeu. Tout comme l'avenir du projet gazier de plusieurs milliards d'euros opéré par Total, le plus gros investissement sur le continent africain.

Convaincre le président mozambicain, Filipe Nyusi, d'arrêter sa « politique de souveraineté » et de coopérer avec le bloc régional serait la clé pour contrecarrer la rébellion islamiste, estime Piers Pigou, spécialiste de l'Afrique subsaharienne pour l'International Crisis Group. 

Mais le chef d'Etat a insisté mercredi que toute aide extérieure viendrait « nous soutenir », mais pas « nous remplacer ». Il a par ailleurs affirmé que les djihadistes avaient été « chassés » de Palma.

« La question est de savoir s'il est possible d'étouffer dans l'œuf » l'avancée des groupes armés « avant qu'ils ne s'étendent », affirme Piers Pigou, rappelant que jusqu'à présent, le Mozambique n'a sollicité que des aides bilatérales avec certains pays membres de la SADC.

« Si le Mozambique devait s'effondrer, il pourrait être utilisé comme point d'entrée pour affecter la région », met en garde Adriano Nuvunga, directeur d'un centre de recherches à Maputo.

Le pays, qui s'étend le long de l'océan Indien sur plus de 2 000 km, est frontalier du Malawi, du Zimbabwe, de l'Afrique du Sud, la Tanzanie, la Zambie et l'Eswatini.

« À notre porte »

« Les frontières avec le Mozambique sont immenses et pas faciles à gérer », relève l'analyste indépendant tanzanien Kennedy Mmari, qui craint une « accélération » de l'extrémisme dans son pays.

Les jihadistes mozambicains ont déjà pris pour cible des villes et villages du sud de la Tanzanie. Un raid meurtrier a notamment touché la ville de Mtwara en octobre. 

Ces groupes armés, très opaques, se composent principalement de Mozambicains mais aussi de nombreux Tanzaniens, selon plusieurs experts, et sans doute d'autres étrangers. 

« C'est à notre porte », met en garde Liesl Louw-Vaudran, chercheuse à l'Institut sud-africain d'études de sécurité. Selon elle, les pays les plus vulnérables sont ceux proches de la province mozambicaine du Cabo Delgado, qui concentre ces violences. 

Mais pour l'instant, les djihadistes semblent plus préoccupés par l'idée de gagner du terrain à l'intérieur du Mozambique, souligne la chercheuse. 

Un autre enjeu est l'avenir des immenses gisements de gaz naturel de la région. Le site de Total devait être opérationnel en 2024 et ces richesses étaient censées faire du Mozambique un « géant de l'énergie », rappelle M. Nuvunga.

Or les spécialistes craignent que les troubles ne poussent les entreprises internationales et les investisseurs à abandonner la région. 

Les flux commerciaux sont également menacés, selon les spécialistes, notamment les échanges maritimes par le canal du Mozambique, et terrestres avec le Malawi, la Zambie et le Zimbabwe enclavés.

« Si les violences ne sont pas combattues et gagnent en intensité, elles risquent d'empêcher le développement de la région », avertit M. Nuvunga.

Mais les forces gouvernementales « sont loin d'avoir repris le contrôle », met en garde M. Pigou. « Reste à voir la capacité de manœuvre de la SADC dans ce contexte ».

 


L'Otan en plein doute sur son avenir face à la tempête Trump

Le secrétaire général de l'OTAN, Mark Rutte, s'exprime lors d'une conférence et d'une réunion avec des étudiants de l'École d'économie de Varsovie (SGH), à Varsovie (Pologne), le 26 mars 2025. (Photo Wojtek RADWANSKI / AFP)
Le secrétaire général de l'OTAN, Mark Rutte, s'exprime lors d'une conférence et d'une réunion avec des étudiants de l'École d'économie de Varsovie (SGH), à Varsovie (Pologne), le 26 mars 2025. (Photo Wojtek RADWANSKI / AFP)
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  • Sous les coups de butoir de Donald Trump et de son équipe, l'Organisation du traité de l'Atlantique nord, vieille dame de plus de 75 ans, doit rapidement changer.
  • les États-Unis restent membres de l'OTAN, y compris pour la dissuasion nucléaire, mais se désengagent des forces conventionnelles, comme l'a évoqué le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth. 

BRUXELLES : Les tirs de barrage américains contre les pays européens de l'Otan ébranlent jusqu'aux fondements de l'Alliance atlantique, qui a cependant toutes les peines du monde à imaginer un avenir sans les États-Unis.

Sous les coups de butoir de Donald Trump et de son équipe, l'Organisation du traité de l'Atlantique nord, vieille dame de plus de 75 ans, doit rapidement changer. Un diplomate interrogé sous couvert d'anonymat décrit l'agressivité de la nouvelle administration américaine comme un « traumatisme ».

Ce changement se fera-t-il avec ou sans les États-Unis ? La question agite les couloirs du siège de l'Alliance à Bruxelles.

« On connaît la direction : moins d'États-Unis et plus d'Europe », résume un diplomate sous couvert d'anonymat. Cependant, de nombreuses questions restent en suspens.

En deux mois, Donald Trump s'en est pris au Canada qu'il entend voir devenir le 51ᵉ État américain, et au Danemark, dont il revendique l'un des territoires, le Groenland. 

Plusieurs responsables américains, dont le vice-président J. D. Vance, n'ont pas caché leur mépris à l'égard des Européens, considérés comme des « profiteurs » et des passagers clandestins d'une alliance où, dénoncent-ils, ils ne paient pas leur dû.

Depuis le 20 janvier, date du retour de Donald Trump à la Maison Blanche, « l'optimisme est de moins en moins de mise », confie un diplomate. « Les États-Unis n'ont pas encore pris de décisions concrètes, mais on dirait que chaque jour est porteur d'un nouveau coup contre les fondations de l'Alliance. »

- Transition « désordonnée » -

Pour Camille Grand, ancien secrétaire général adjoint de l'Otan et chercheur auprès de l'ECFR, trois scénarios sont possibles.

Celui de la transition ordonnée : les Américains se désengagent, mais en bon ordre, à la suite d'une négociation qui donne aux Européens le temps de se préparer. « Cela permet d'éviter les incertitudes », assure-t-il dans un entretien avec l'AFP.

Celui de la transition « désordonnée » : les États-Unis restent membres de l'OTAN, y compris pour la dissuasion nucléaire, mais se désengagent des forces conventionnelles, comme l'a évoqué le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth. 

Le retrait se fait « en mode crise », avec des « menaces et des annonces désordonnées ». C'est « le scénario dominant » aujourd'hui, estime l'analyste.

Il y a aussi le scénario cauchemar pour nombre d'Alliés : le retrait « de facto ou de jure ». Les États-Unis se désintéresseront de la défense du continent européen.

Donald Trump exige que les Européens et les Canadiens consacrent au moins 5 % de leur PIB à cette défense, alors qu'ils sont à moins de 2 % pour l'Italie ou l'Espagne. La marche est très haute. Mais tous savent qu'il faudra « annoncer » quelque chose au sommet de l'OTAN en juin, selon un diplomate.

Le Secrétaire général de l'Alliance Mark Rutte a évoqué un chiffre entre 3,5 et 3,7 %. Ce sera difficile, mais c'est une question de priorités dans les dépenses nationales, ajoute-t-il. 

Personne ne sait si ce chiffre sera suffisant pour Donald Trump.

- "Cinq ans" -

En attendant, beaucoup à Bruxelles et dans les autres capitales européennes s'interrogent sur un "après" Etats-Unis.

"Nous avons toujours su que le moment viendrait où l'Amérique se retirerait en quelque sorte et où l'Europe devrait faire davantage", rappelle ainsi Jamie Shea, ancien porte-parole de l'Otan et expert auprès du think tank londonien Chatam House.

Et le calendrier est très serré. Les Européens ont "cinq ans" pour recréer une dissuasion face à la menace russe, juge ainsi Camille Grand. Un calcul basé sur le temps jugé nécessaire, selon plusieurs services de renseignement, pour que la Russie reconstitue son armée et soit en mesure de menacer un pays de l'Otan, explique-t-il. 

Selon cet expert français, les Européens en sont capables, même si un investissement substantiel sera nécessaire pour combler l'apport américain en termes de renseignement, de satellites ou de logistique. « Il n'y a pas de raison que 500 millions d'Européens ne puissent pas dissuader 140 millions de Russes », assure-t-il.

Plusieurs pays en doutent. « Les États-Unis restent indispensables pour une dissuasion crédible », estime ainsi un diplomate européen auprès de l'Otan.


Le Wisconsin, théâtre d'une première défaite électorale pour Trump et Musk

 Donald Trump et Elon Musk. (Photo AFP)
Donald Trump et Elon Musk. (Photo AFP)
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  • Le président américain Donald Trump a essuyé mardi son premier revers électoral avec l'élection d'une juge démocrate dans le Wisconsin,
  • En Floride, deux législatives partielles ont également eu lieu mardi dans des circonscriptions solidement ancrées à droite et qui resteront dans l'escarcelle des républicains, selon les projections de plusieurs médias

WASHINGTON : Le président américain Donald Trump a essuyé mardi son premier revers électoral avec l'élection d'une juge démocrate dans le Wisconsin, un scrutin habituellement d'ampleur locale, marqué cette fois-ci par la forte implication d'Elon Musk.

Selon les projections de plusieurs médias américains, Susan Crawford, soutenue par les démocrates, a remporté un siège pour dix ans à la Cour suprême de cet État de la région des Grands Lacs.

Elle faisait face à Brad Schimel, soutenu par Donald Trump et par le multimilliardaire Elon Musk, et dont la victoire aurait fait basculer la haute instance du Wisconsin du côté conservateur.

En Floride, deux législatives partielles ont également eu lieu mardi dans des circonscriptions solidement ancrées à droite et qui resteront dans l'escarcelle des républicains, selon les projections de plusieurs médias.

Mardi soir, le président a mis à profit sa plateforme Truth Social pour se féliciter des deux « larges » victoires de son camp en Floride, mettant en avant son « soutien » aux candidats.

Il n'a en revanche pas commenté le résultat pour la Cour suprême du Wisconsin, préférant y retenir l'adoption, par un référendum organisé le même jour, d'une mesure obligeant les électeurs à présenter une pièce d'identité avec photo afin de pouvoir voter.

« C'est une grande victoire pour les républicains, peut-être la plus grande de la soirée », a-t-il écrit.

« Le plus important » 

Elon Musk n'a pas non plus réagi à la défaite de Brad Schimel, et a plutôt salué l'issue du référendum local. « C'était le plus important », a-t-il affirmé sur son réseau social X.

Le patron de Tesla et Space X s'inquiétait d'un potentiel rééquilibrage par la Cour suprême locale dans le découpage des circonscriptions électorales, en faveur des démocrates. État pivot, le Wisconsin avait été remporté par Donald Trump à la présidentielle de novembre.

« C'est l'une de ces situations étranges où une petite élection en apparence pourrait déterminer le destin de la civilisation occidentale », avait lancé Elon Musk mardi.

Le président républicain avait, lui, publié lundi sur Truth Social un message de soutien à Brad Schimel. Il s'en était surtout pris à Susan Crawford, qui serait, selon lui, « un désastre pour le Wisconsin et pour les États-Unis d'Amérique ».

Un peu plus de deux mois après le début de son mandat, les enquêtes d'opinion indiquent une baisse relative de la popularité de Donald Trump. Ces élections dans le Wisconsin et en Floride étaient les premières véritables épreuves auxquelles il faisait face dans les urnes depuis novembre.

Campagne onéreuse 

Mardi, le trumpiste Randy Fine a bien remporté le siège en jeu à la Chambre des représentants face au démocrate Josh Weil, mais avec une avance bien plus mince qu'il y a quelques mois.

Ces résultats ont « de quoi donner des sueurs froides à mes collègues républicains », a déclaré sur la chaîne MSNBC Hakeem Jeffries, responsable de la minorité démocrate à la Chambre des représentants. Cela fait écho à la difficulté de l'opposition à se faire entendre depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche.

Dans le Wisconsin, les deux camps avaient sorti l'artillerie lourde pour une élection qui, d'ordinaire, passe inaperçue dans le reste du pays.

Selon le Centre Brennan de l'université de New York, c'est « le scrutin judiciaire le plus coûteux de l'histoire américaine », avec plus de 98 millions de dollars déversés dans la campagne, dont 53 millions en faveur du candidat conservateur.

Elon Musk n'est pas étranger à cela.

« Il a dépensé plus de 25 millions de dollars pour essayer de m'empêcher de siéger à la Cour suprême du Wisconsin », a lancé dimanche Susan Crawford lors d'un rassemblement.

Son équipe de campagne avait récemment accusé Elon Musk de vouloir « acheter un siège à la Cour suprême du Wisconsin afin d'obtenir une décision favorable » dans des poursuites engagées par Tesla, son entreprise de véhicules électriques, contre les autorités du Wisconsin.


Amnesty International demande à la Hongrie d'arrêter M. Netanyahou

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou. (Photo d'archives de l'AFP)
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou. (Photo d'archives de l'AFP)
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  • Le Premier ministre israélien doit se rendre cette semaine dans un pays membre de la Cour pénale internationale
  • Cette visite " ne doit pas devenir un indicateur de l'avenir des droits humains en Europe "

LONDRES : Amnesty International a demandé à la Hongrie d'arrêter le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, à la suite d'informations selon lesquelles il se rendra dans cet État membre de l'UE mercredi à l'invitation de son homologue hongrois Viktor Orban.

M. Netanyahou fait l'objet d'un mandat d'arrêt délivré en novembre par la Cour pénale internationale en raison de la conduite d'Israël à Gaza.

M. Orban, proche allié de M. Netanyahu, a déclaré qu'il n'exécuterait pas le mandat. En tant qu'État membre, la Hongrie est tenue d'exécuter tout mandat d'arrêt délivré par la CPI.