Débat à l’IMA: «Les Syriens demandaient d’avoir les moyens de se débarrasser du tyran»

Yassin al-Haj Saleh, Hala Kodmani et Jean-Pierre Filiu faisaient partie des invités de ce débat consacré aux dix ans de la révolution syrienne. Capture d'écran.
Yassin al-Haj Saleh, Hala Kodmani et Jean-Pierre Filiu faisaient partie des invités de ce débat consacré aux dix ans de la révolution syrienne. Capture d'écran.
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Publié le Lundi 29 mars 2021

Débat à l’IMA: «Les Syriens demandaient d’avoir les moyens de se débarrasser du tyran»

  • Yassin al-Haj Saleh et Hala Kodmani faisaient partie des invités de ce débat consacré aux dix ans de la révolution syrienne
  • La guerre syrienne a généré 5,5 millions de réfugiés et 6,6 millions de déplacés internes

PARIS : «Quand vous avez un monopole de la force aérienne et de l'artillerie d’un seul côté, vous avez un sentiment de faiblesse et de vulnérabilité du côté révolutionnaire qui est absolument terrible. Or, que se passe-t-il du côté révolutionnaire? On voulait construire, de manière concrète, une alternative à Assad. Et qu’est-ce que voulait Assad? Il voulait la détruire à tout prix pour faire savoir qu'on ne pouvait pas gouverner en Syrie sans lui», a expliqué l’historien Jean-Pierre Filiu lors du dernier «Jeudi de l’IMA» (Institut du monde arabe).

Yassin al-Haj Saleh, écrivain, militant et ancien prisonnier politique syrien, Hala Kodmani, Franco-Syrienne et journaliste à Libération, où elle couvre l’actualité du monde arabe depuis dix ans, participaient à ce débat consacré aux dix ans de la révolution syrienne et modéré par Pierre Haski.

Si l’ONU décrit la guerre syrienne comme «la pire catastrophe provoquée par l'homme depuis la Seconde Guerre mondiale», ce n’est pas pour rien. Le conflit a fait au moins 384 000 morts, avec plus de 116 000 civils tués, dont 22 enfants et 13 000 femmes environ, selon un bilan publié au mois de mars 2021 par l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

«Je me rappelle quand j’ai eu l’audace d'évoquer le précédent de la guerre d'Espagne et que j’ai dit que la Syrie était une autre guerre d’Espagne», se souvient Filiu, qui fut très critiqué d’avoir utilisé cette comparaison. «Comment comparer l’histoire arabe et l’histoire européenne? On ne mélange pas les torchons et les serviettes. La révolution est européenne; là-bas, ce sont les rebelles, les insurgés», poursuit-il. «La vérité est que les Syriennes et les Syriens demandaient simplement d’avoir les moyens de se débarrasser du tyran et que nous avons fait semblant de croire qu’ils voulaient qu’on fasse la guerre à leur place», affirme encore cet universitaire.

«On était dans la sidération»

«Il faut souligner les moments inédits de ces conflits syriens, car ce n’en est pas un. Il y a eu tant d’exceptions dans ces conflits. Il y a eu les attaques chimiques, il y a eu le bombardement de la population syrienne par leur propre armée. Ce n’est pas seulement la guerre d’Espagne, mais aussi la guerre d’Afghanistan et celle d’Irak qui ont été réunies en Syrie. Ce qui est totalement inédit, c’est que l'on puisse complètement fermer les yeux sur la situation actuelle. Mon sentiment était que nous, Syriens, nous étions tout le temps dans l'incrédulité. On ne croyait pas que la Russie allait intervenir, bombarder Alep et écraser sa population. On était dans la sidération. Même en ayant couvert ce conflit pendant dix ans, je trouve ça toujours incroyable» explique Hala Kodmani.

«Au début du soulèvement, cette révolution était pacifiste et, en face, il y avait un écrasement total. Donc les gens étaient extrêmement en colère car ils ne s’attendaient pas à être ainsi laissés, exposés et abandonnés. Et, pour revenir un peu sur ce que disait Hala, je parle de la révolution syrienne comme une révolution impossible car on a nous dans la mémoire de ma génération syrienne, une mémoire de dizaines de milliers de victimes qui ont essayé de s’opposer au régime, et qui ont été emprisonnés, massacrés. Elle est également impossible à cause de l'écrasement de la révolution.»

«Rhétorique des fasciste

La guerre syrienne a provoqué des catastrophes humaines. Elle a généré 5,5 millions de réfugiés et 6,6 millions de déplacés internes. D'après Ziad Majed, politologue et spécialiste de la Syrie, «les événements en Syrie commencent entre le 15 et le 18 mars 2011 par des soulèvements populaires. Cette révolution a été réprimée d'une manière extrêmement violente et féroce; elle a mené à une militarisation de la révolution. Le pays est donc entré en guerre, qualifiée de «guerre civile» par certains, tandis que d’autres parlent d’une guerre de libération d'un régime en place depuis 1970 et qui monopolise la représentation politique en s'imposant comme un État totalitaire.

La question syrienne se poursuit avec une troisième phase du conflit: l’intervention d’acteurs locaux qui vont servir des programmes régionaux et obéir à des intentions d’autres pays du monde. L’opposition, comme le régime, va bénéficier d’alliés. «La Russie et l'Iran se sont impliqués beaucoup plus activement du côté du régime que les prétendus amis du peuple syrien. Ces derniers ont certes soutenu les opposants, mais d'une manière qui ne suffisait pas à modifier le rapport de force», précise Ziad Majed. 

«L’indifférence d’un monde qui fait comme si de rien n'était»

Aujourd’hui, les acteurs locaux qui servent les acteurs régionaux ou internationaux ne sont plus les mêmes. On assiste à une invasion directe du sol syrien par la Russie ainsi qu’à une présence directe de l'Iran et de certaines milices chiites libanaises et irakiennes, voire afghanes. «Il ne faut pas oublier l'armée turque qui va envahir le  le nord du pays, ni le soutien militaire des Kurdes par les Américains dans le but de combattre Daech» rappelle le spécialiste de la Syrie. 

Avec les différents stades de cette catastrophe humaine, il n'y a qu'une constante: le peuple syrien a été tué, torturé, gazé, séparé et déplacé. Dans le dernier article d’Arab News en français sur la passivité du monde vis-à-vis du conflit syrien, le survivant d’une attaque chimique dénonce «l’indifférence d’un monde qui fait comme si de rien n'était» ainsi que l'impunité de ceux qui commettent des crimes contre l'humanité, comme Bachar al-Assad et son allié russe. La question de l'impunité est soulevée par l’historien Jean-Pierre Filiu, qui rappelle les événements dramatiques de 2013: le refus de sanctionner Bachar al-Assad malgré l’utilisation qu’il a faite des armes chimiques, ce qui représente un crime contre l'humanité. À partir de là, «l'impunité était au rendez-vous».

Propagande du régime

Hala Kodmani raconte que, durant sa dernière visite à Damas, au mois d’avril 2011, la propagande du régime était telle qu’il n'y avait pas de manifestations; les événements qui se produisaient étaient décrits comme étant provoqués par des «bandes de salafistes armés venus de l’étranger». Cette rhétorique constitue l’argument primaire du régime pour justifier ses crimes. «La peur des islamistes et surtout des jihadistes est compréhensible, vu ce qui s’est passé dans les autres pays du monde arabe, comme l’Irak. Cela dit, considérer qu’il est légitime de massacrer des gens, des hommes, des femmes, des enfants sous prétexte de lutter contre les islamistes et les jihadistes, ou pour protéger les minorités, est non seulement décadent éthiquement, mais il est en plus un des traits du discours fasciste aujourd'hui du régime syrien et ses relais», affirme Ziad Majed.


Finul: quatre soldats italiens blessés, Rome accuse le Hezbollah

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  • Dans un communiqué, le ministère italien de la Défense indique que "quatre soldats italiens ont été légèrement blessés après l'explosion de deux roquettes de 122 mm ayant frappé la base UNP 2-3 de Chamaa dans le sud du Liban
  • Selon un porte-parole de la Finul, la force onusienne a recensé plus de 30 incidents en octobre ayant entraîné des dommages matériels ou des blessures pour les Casques bleus

ROME: Quatre soldats italiens ont été légèrement blessés lors d'une nouvelle "attaque" contre la mission de maintien de la paix de l'ONU au Liban, la Finul, a indiqué vendredi le gouvernement italien, qui en a attribué la responsabilité au Hezbollah.

"J'ai appris avec profonde indignation et inquiétude que de nouvelles attaques avaient visé le QG italien de la Finul dans le sud du Liban (et) blessé des soldats italiens", a indiqué dans un communiqué la Première ministre Giorgia Meloni.

"De telles attaques sont inacceptables et je renouvelle mon appel pour que les parties en présence garantissent à tout moment la sécurité des soldats de la Finul et collaborent pour identifier rapidement les responsables", a-t-elle affirmé.

Mme Meloni n'a pas désigné le responsable de cette attaque, mais son ministre des Affaires étrangères Antonio Tajani a pointé du doigt le Hezbollah: "Ce devraient être deux missiles (...) lancés par le Hezbollah, encore une fois", a-t-il déclaré là la presse à Turin (nord-ouest).

Un porte-parole du ministère des Affaires étrangères a indiqué à l'AFP que Rome attendrait une enquête de la Finul.

Dans un communiqué, le ministère italien de la Défense indique que "quatre soldats italiens ont été légèrement blessés après l'explosion de deux roquettes de 122 mm ayant frappé la base UNP 2-3 de Chamaa dans le sud du Liban, qui abrite le contingent italien et le commandement du secteur ouest de la Finul".

"J'essayerai de parler avec le nouveau ministre israélien de la Défense (Israël Katz, ndlr), ce qui a été impossible depuis sa prise de fonction, pour lui demander d'éviter d'utiliser les bases de la Finul comme bouclier", a affirmé le ministre de la Défense Guido Crosetto, cité par le communiqué.

Selon un porte-parole de la Finul, la force onusienne a recensé plus de 30 incidents en octobre ayant entraîné des dommages matériels ou des blessures pour les Casques bleus, dont une vingtaine dus à des tirs ou des actions israéliennes.

Plus de 10.000 Casques bleus sont stationnés dans le sud du Liban, où la Finul est déployée depuis 1978 pour faire tampon avec Israël. Ils sont chargés notamment de surveiller la Ligne bleue, démarcation fixée par l'ONU entre les deux pays.

L'Italie en est le principal contributeur européen (1.068 soldats, selon l'ONU), devant l'Espagne (676), la France (673) et l'Irlande (370).


Syrie: le bilan des frappes israéliennes sur Palmyre s'élève à 92 morts

Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan. (AFP)
Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan. (AFP)
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  • Un dépôt d'armes proche de la zone industrielle de Palmyre a aussi été visé, selon l'OSDH, ONG basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie
  • Le bilan s'élève à "92 morts", a déclaré l'OSDH, parmi lesquels 61 combattants syriens pro-iraniens dont onze travaillant pour le Hezbollah libanais, "27 ressortissants étrangers" pour la plupart d'Al-Noujaba, et quatre membres du Hezbollah

BEYROUTH: Quatre-vingt-douze combattants pro-iraniens ont été tués dans des frappes israéliennes mercredi à Palmyre, dans le centre de la Syrie, a annoncé vendredi l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH) dans un nouveau bilan.

Mercredi, trois frappes israéliennes ont ciblé la ville moderne attenante aux ruines gréco-romaines de la cité millénaire de Palmyre. Une d'entre elles a touché une réunion de membres de groupes pro-iraniens avec des responsables des mouvements irakien d'Al-Noujaba et libanais Hezbollah, selon l'Observatoire.

Un dépôt d'armes proche de la zone industrielle de Palmyre a aussi été visé, selon l'OSDH, ONG basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un vaste réseau de sources en Syrie.

Le bilan s'élève à "92 morts", a déclaré l'OSDH, parmi lesquels 61 combattants syriens pro-iraniens dont onze travaillant pour le Hezbollah libanais, "27 ressortissants étrangers" pour la plupart d'Al-Noujaba, et quatre membres du Hezbollah.

L'ONG avait fait état la veille de 82 morts.

Ces frappes israéliennes sont "probablement les plus meurtrières" ayant visé la Syrie à ce jour, a déclaré jeudi devant le Conseil de sécurité Najat Rochdi, adjointe de l'envoyé spécial de l'ONU en Syrie.

Depuis le 23 septembre, Israël a intensifié ses frappes contre le Hezbollah au Liban mais également sur le territoire syrien, où le puissant mouvement libanais soutient le régime de Damas.

Depuis le début de la guerre civile en Syrie, Israël a mené des centaines de frappes contre le pays voisin, visant l'armée syrienne et des groupes soutenus par Téhéran, son ennemi juré. L'armée israélienne confirme rarement ces frappes.

Le conflit en Syrie a éclaté après la répression d'un soulèvement populaire qui a dégénéré en guerre civile. Il a fait plus d'un demi-million de morts, ravagé les infrastructures et déplacé des millions de personnes.

Située dans le désert syrien et classée au patrimoine mondial de l'Unesco, Palmyre abrite des temples gréco-romains millénaires.

 


Israël annonce mettre fin à un régime de garde à vue illimitée pour les colons de Cisjordanie

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  • Quelque 770 Palestiniens y ont été tués par des soldats ou des colons israéliens, selon des données de l'Autorité palestinienne
  • Dans le même temps, selon des données officielles israéliennes, 24 Israéliens, civils ou militaires, y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors de raids militaires israéliens

JERUSALEM: Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a annoncé vendredi que le régime dit de la détention administrative, équivalent d'une garde à vue quasi illimitée, ne serait désormais plus applicable aux colons israéliens en Cisjordanie.

Alors que "les colonies juives [en Cisjordanie] sont soumises à de graves menaces terroristes palestiniennes [...] et que des sanctions internationales injustifiées sont prises contre des colons [ou des entreprises oeuvrant à la colonisation], il n'est pas approprié que l'Etat d'Israël applique une mesure aussi sévère [la détention administrative, NDLR] contre des colons", déclare M. Katz dans un communiqué.

Israël occupe la Cisjordanie depuis 1967 et les violences ont explosé dans ce territoire palestinien depuis le début de la guerre entre Israël et le mouvement islamiste Hamas à Gaza, le 7 octobre 2023.

Quelque 770 Palestiniens y ont été tués par des soldats ou des colons israéliens, selon des données de l'Autorité palestinienne. Dans le même temps, selon des données officielles israéliennes, 24 Israéliens, civils ou militaires, y ont été tués dans des attaques palestiniennes ou lors de raids militaires israéliens.

Face à la montée des actes de violences commis par des colons armés, plusieurs pays occidentaux (Etats-Unis, Union européenne, Royaume-Uni et Canada notamment) ont au cours des douze derniers mois pris des sanctions (gel des avoirs, interdiction de voyager) contre plusieurs colons qualifiés d'"extrémistes".

Il y a quelques jours, les Etats-Unis ont sanctionné pour la première fois une entreprise israélienne de BTP active dans la construction de colonies en Cisjordanie.

La détention administrative est une procédure héritée de l'arsenal juridique de la période du Mandat britannique sur la Palestine (1920-1948), avant la création d'Israël. Elle permet aux autorités de maintenir un suspect en détention sans avoir à l'inculper, pendant des périodes pouvant aller jusqu'à plusieurs mois, et pouvant être renouvelées pratiquement à l'infini.

Selon le Club des prisonniers palestiniens, ONG de défense des Palestiniens détenus par Israël, plus de 3.430 Palestiniens se trouvaient en détention administrative fin août. Par comparaison, seuls huit colons juifs sont détenus sous ce régime à ce jour, selon le quotidien israélien de gauche Haaretz vendredi.

L'annonce de la fin de la détention administrative pour les colons survient au lendemain de l'émission par la Cour pénale internationale (CPI) de mandats d'arrêts internationaux contre le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, et son ex-ministre de la Défense Yoav Gallant recherchés par la justice internationale pour des "crimes de guerres" et "crimes contre l'humanité".

M. Netanyahu a rejeté catégoriquement la décision de la Cour comme une "faillite morale" et une mesure animée par "la haine antisémite à l'égard d'Israël".