A Jérusalem-Est, des Palestiniens ballottés entre deux élections

Des manifestants se rassemblent lors d'une manifestation anti-gouvernementale près de la résidence du Premier ministre israélien à Jérusalem, le 20 mars 2021, avant l'élection qui aura lieu le 23 mars. (Emmanuel DUNAND / AFP)
Des manifestants se rassemblent lors d'une manifestation anti-gouvernementale près de la résidence du Premier ministre israélien à Jérusalem, le 20 mars 2021, avant l'élection qui aura lieu le 23 mars. (Emmanuel DUNAND / AFP)
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Publié le Dimanche 21 mars 2021

A Jérusalem-Est, des Palestiniens ballottés entre deux élections

  • Les quelque 300.000 Palestiniens de Jérusalem-Est ont un statut à part: ils sont considérés par Israël, qui a annexé en 1967 cette partie palestinienne de la ville sainte, comme des résidents, mais pas comme des citoyens à part entière
  • Mais en devenant citoyens israéliens, ces Palestiniens perdent le droit de voter aux élections palestiniennes et ainsi aux premiers scrutins en près de 15 ans

JÉRUSALEM : Ils payent des impôts, travaillent et vivent en partie en Israël, mais les Palestiniens de Jérusalem-Est ne pourront pas voter aux législatives israéliennes de mardi à moins d'avoir "changé" de nationalité et de perdre ainsi le droit de voter aux élections palestiniennes.

Les quelque 300.000 Palestiniens de Jérusalem-Est ont un statut à part: ils sont considérés par Israël, qui a annexé en 1967 cette partie palestinienne de la ville sainte, comme des résidents, mais pas comme des citoyens à part entière.

Ils règlent leurs impôts à l'Etat hébreu, ont des droits sociaux, l'accès aux soins de santé, une carte de résident mais pas de passeport. Et ils ne peuvent voter qu'aux élections municipales, pas nationales.

Or les temps changent et des milliers de Palestiniens de Jérusalem-Est ont commencé ces dernières années - 1.800 Palestiniens pour la seule année 2020 - à briser un tabou en demandant la nationalité israélienne.

C'est le cas de Nour Dwayyat, enseignante de 34 ans de Jérusalem-Est, qui travaille dans la ville israélienne d'Abou Gosh. Après avoir obtenu sa nationalité en 2016, elle glissera pour la quatrième fois la semaine prochaine un bulletin dans une urne israélienne.

"J'habite dans ce pays, j'en fais partie, c'est mon droit de voter", estime cette habitante de Sur Baher, quartier palestinien de Jérusalem. 

Et pour qui votera-t-elle? "Pour celui qui agira pour le bien de la communauté arabe", souffle-t-elle, sans préciser davantage ses intentions avant le vote crucial du 23 mars pour l'avenir politique du Premier ministre Benjamin Netanyahu.

Avocat de Beit Hanina, quartier de Jérusalem-Est, Amer Nasser, 48 ans, a lui aussi demandé et obtenu ces dernières années la nationalité israélienne. Mais il se définit toujours comme "Palestinien", et c'est d'ailleurs ce qui dictera son choix aux législatives de mardi, reprochant à Benjamin Netanyahu de préférer la normalisation avec des pays arabes (Emirats arabes unis, Bahreïn, Soudan, Maroc) à la résolution du conflit israélo-palestinien. 

Pas sûrs de pouvoir voter

"Netanyahu est vraiment intéressé par le développement de relations avec des pays arabes mais il n'est pas vraiment intéressé par la paix avec les Palestiniens, malgré le fait qu'ils (les Palestiniens) viennent d'ici et vivent ici", dit-il. 

"Je vais donc voter pour la +Liste arabe unie+ en espérant (...) une coexistence pacifique entre Palestiniens et Israéliens", ajoute-t-il, en référence à la principale formation représentant les Arabes israéliens au Parlement israélien.

Mais en devenant citoyens israéliens, ces Palestiniens perdent le droit de voter aux élections palestiniennes et ainsi aux premiers scrutins en près de 15 ans -- les législatives prévues en mai et la présidentielle programmée en juillet.

En réalité, il n'est même pas certain que les Palestiniens de Jérusalem-Est puissent voter. Comme la partie orientale de la ville sainte est annexée, Israël doit en théorie donner son feu vert pour ce scrutin qui doit aussi se dérouler en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.

L'Autorité palestinienne a demandé à la communauté internationale de faire pression sur Israël pour permettre le vote à Jérusalem-Est. "Il n'y aura pas d'élections sans Jérusalem, c'est impossible", a martelé récemment le chef de la diplomatie palestinienne, Ryad al-Maliki, à des diplomates européens.  

Les Palestiniens envisagent différents scénarios (vote électronique, dans des villes palestiniennes voisines de Jérusalem ou dans des bureaux d'organisations internationales) en cas de refus israélien.

Mais même si elle pouvait, Nour Dwayyat ne voterait pas aux élections palestiniennes, car tous les détails administratifs de sa vie sont régis par l'Etat hébreu. "Si je participais, qu'est-ce que ça m'apporterait? Rien", dit-elle. 

"Divisé"

A Jérusalem-Est, on reste divisé sur les élections palestiniennes car dans les faits, l'Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas n'exerce son pouvoir que dans certaines zones de la Cisjordanie, et pas à Jérusalem. 

D'après l'avocat et analyste palestinien Moein Odeh, les Palestiniens de Jérusalem "n'en ont rien à faire de ces élections (palestiniennes) car elles n'ont pas d'impact sur la situation de la ville", entièrement gérée par Israël. 

Wafa Qawasmi-Bukhari, une Palestinienne de Jérusalem-Est, se souvient toutefois avec émotion d'avoir voté lors des dernières législatives palestiniennes, en 2006. 

A l'époque, juste après la seconde Intifada, il y avait "l'espoir" d'un changement. Mais aujourd'hui, si l'occasion se représentait, elle s'abstiendrait.

"Je voterais pour qui? (...) Je pensais qu'ils (les dirigeants palestiniens) feraient quelque chose, mais Israël a continué à démolir des maisons, judaïser l'éducation, et l'Autorité palestinienne n'a aidé personne et n'a aucun pouvoir de décision à Jérusalem", dit-elle.

Pour autant, Wafa n'entend pas rejoindre la cohorte de Palestiniens de Jérusalem-Est demandant la nationalité israélienne: "Aujourd'hui, je ne suis prête à donner ma voix à absolument personne".


Le Liban réforme le secret bancaire, une mesure clé pour ses bailleurs

Cette photo prise le 20 mai 2020 montre une vue de l'entrée fortifiée de la Banque du Liban, la banque centrale du Liban, dans la capitale Beyrouth. (AFP)
Cette photo prise le 20 mai 2020 montre une vue de l'entrée fortifiée de la Banque du Liban, la banque centrale du Liban, dans la capitale Beyrouth. (AFP)
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  • Le Liban a accordé jeudi, par un vote au Parlement, un accès plus large des organismes de contrôle aux informations bancaires, une réforme clé réclamée dans ce pays
  • Le gouvernement a indiqué que la loi s'appliquerait de manière rétroactive sur 10 ans

BEYROUTH: Le Liban a accordé jeudi, par un vote au Parlement, un accès plus large des organismes de contrôle aux informations bancaires, une réforme clé réclamée dans ce pays, plongé dans une grave crise économique, par les bailleurs internationaux, dont le FMI.

Le gouvernement a indiqué que la loi s'appliquerait de manière rétroactive sur 10 ans, couvrant donc le début de la crise économique lorsque les banquiers ont été accusés d'aider des personnalités à transférer des fonds importants à l'étranger.

Le Premier ministre libanais, Nawaf Salam, a salué une "étape indispensable vers la réforme financière" que son gouvernement a promis de réaliser et un "pilier essentiel d'un plan de reconstruction".

Cette mesure, a-t-il ajouté, est "fondamentale pour restaurer les droits des déposants et la confiance des citoyens et de la communauté internationale". Il a mis en avant que l'opacité financière, prévalant de longue date au Liban, n'était plus aussi attractive pour les investisseurs qu'elle avait pu l'être.

"Il ne faut pas croire qu'avec cette loi, n'importe qui va entrer dans une banque et demander des détails sur un compte", a tempéré le ministre des Finances, Yassine Jaber, en déplacement à Washington avec son collègue de l'Economie, Amer Bisat, et le nouveau gouverneur de la Banque centrale, Karim Souaid.

Ces responsables doivent se rendre à la Banque mondiale et au Fonds monétaire international (FMI).

Le Liban a longtemps été une plaque-tournante financière régionale, dont la législation stricte sur le secret bancaire était perçue comme un atout, jusqu'à la profonde crise économique et financière qui a éclaté en 2019 et terni sa réputation.

Depuis, les autorités sont sous pression, interne et internationale, pour réformer une législation accusée d'avoir permis une fuite de capitaux au déclenchement de la crise, alors que les simples déposants étaient privés de leur épargne et que la valeur de la monnaie locale plongeait.

- Loi rétroactive sur dix ans -

Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les changements votés jeudi autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations sans raison particulière".

Ces organismes pourront avoir accès à des informations comme le nom des clients et les détails de leurs dépôts, et enquêter sur d'éventuelles activités suspectes, selon Legal Agenda.

La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars et aider à la relance de l'économie libanaise, dont les maux sont imputés à la mauvaise gestion et à la corruption.

La récente guerre entre Israël et le mouvement libanais pro-iranien Hezbollah a aggravé la situation et le pays, à court d'argent, a besoin de fonds pour la reconstruction.

M. Salam a souligné que la réforme "ouvrait une page nouvelle" dans la lutte contre l'évasion fiscale, la corruption et le blanchiment.

Le ministre des Finances a relevé que la Banque centrale aura "plus de marge de manoeuvre" pour accéder à certains comptes.

Selon Alain Aoun, membre de la commission des finances du Parlement, une première réforme en 2022 avait été jugée insuffisante par le FMI. Les organismes de contrôle pourront désormais demander "l'information qu'ils veulent", a-t-il dit à l'AFP.

En avril 2022, le Liban et le FMI avaient conclu un accord sous conditions pour un prêt sur 46 mois de trois milliards de dollars, mais les réformes alors exigées n'ont pour la plupart pas été entreprises.

En février, le FMI s'est dit ouvert à un nouvel accord, et le nouveau gouvernement libanais a promis d'autres réformes. Il doit prochainement soumettre au Parlement un projet de loi pour restructurer le secteur bancaire.

Mercredi, le gouvernement a aussi signé un accord de 250 millions de dollars avec la Banque mondiale pour relancer son secteur électrique en déshérence, qui prive régulièrement les Libanais de courant.


Le Parlement libanais approuve un projet de loi sur le secret bancaire

Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri. (AFP)
Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri. (AFP)
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  • La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars afin d'aider à la relance de l'économie libanaise, plongée depuis 2019 dans une profonde crise
  • Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les amendements autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations" sans fournir de raison particulière

BEYROUTH: Le Parlement libanais a approuvé jeudi un projet de loi sur la levée du secret bancaire, une réforme clé réclamée par le Fonds monétaire international (FMI), au moment où des responsables libanais rencontrent à Washington des représentants des institutions financières mondiales.

Le Parlement a adopté des amendements à "la loi relative au secret bancaire" et à la législation monétaire, selon le bureau de son président, Nabih Berri.

La communauté internationale exige depuis longtemps d'importantes réformes pour débloquer des milliards de dollars afin d'aider à la relance de l'économie libanaise, plongée depuis 2019 dans une profonde crise imputée à la mauvaise gestion et à la corruption.

La récente guerre entre Israël et le Hezbollah a aggravé la situation et le pays, à court d'argent, a désormais besoin de fonds pour la reconstruction.

Selon le groupe de défense des droits libanais Legal Agenda, les amendements autorisent "les organes de contrôle et de régulation bancaire (...) à demander l'accès à toutes les informations" sans fournir de raison particulière.

Ces organismes pourront avoir accès à des informations telles que les noms des clients et les détails de leurs dépôts, et enquêter sur d'éventuelles activités suspectes, selon Legal Agenda.

Le Liban applique depuis longtemps des règles strictes en matière de confidentialité des comptes bancaires, ce qui, selon les critiques, rend le pays vulnérable au blanchiment d'argent.

En adoptant ce texte, le gouvernement avait précisé qu'il s'appliquerait de manière rétroactive pendant 10 ans. Il couvrira donc le début de la crise économique, lorsque les banquiers ont été accusés d'aider certaines personnalités à transférer d'importantes sommes à l'étranger.

Le feu vert du Parlement coïncide avec une visite à Washington des ministres des Finances, Yassine Jaber, et de l'Economie, Amer Bisat, ainsi que du nouveau gouverneur de la Banque centrale, Karim Souaid, pour des réunions avec la Banque mondiale et le FMI.

M. Jaber a estimé cette semaine que l'adoption des amendements donnerait un "coup de pouce" à la délégation libanaise.

En avril 2022, le Liban et le FMI ont conclu un accord sous conditions pour un programme de prêt sur 46 mois de trois milliards de dollars, mais les réformes alors exigées n'ont pour la plupart pas été entreprises.

En février, le FMI s'est dit ouvert à un nouvel accord avec Beyrouth après des discussions avec M. Jaber. Le nouveau gouvernement libanais s'est engagé à mettre en oeuvre d'autres réformes et a également approuvé le 12 avril un projet de loi pour restructurer le secteur bancaire.


Syrie: Londres lève ses sanctions contre les ministères de la Défense et de l'Intérieur

Abdallah Al Dardari, chef régional pour les Etats arabes au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), lors d'une interview avec l'AFP à Damas le 19 avril 2025. (AFP)
Abdallah Al Dardari, chef régional pour les Etats arabes au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), lors d'une interview avec l'AFP à Damas le 19 avril 2025. (AFP)
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  • "Les entités suivantes ont été retirées de la liste et ne sont plus soumises à un gel des avoirs: ministère de l'Intérieur, ministère de la Défense", indique notamment le communiqué du département du Trésor
  • Des agences de renseignement sont également retirées de la liste. La totalité d'entre elles ont été dissoutes par les nouvelles autorités en janvier

LONDRES: Le Royaume-Uni a annoncé jeudi avoir levé ses sanctions contre les ministères syriens de l'Intérieur et de la Défense ainsi que contre des agences de renseignement, qui avaient été imposées sous le régime de Bachar al-Assad.

"Les entités suivantes ont été retirées de la liste et ne sont plus soumises à un gel des avoirs: ministère de l'Intérieur, ministère de la Défense", indique notamment le communiqué du département du Trésor.

Des agences de renseignement sont également retirées de la liste. La totalité d'entre elles ont été dissoutes par les nouvelles autorités en janvier.

Ces autorités, issues de groupes rebelles islamistes, ont pris le pouvoir le 8 décembre.

Le Royaume-Uni avait début mars déjà levé des sanctions à l'égard de 24 entités syriennes ou liées à la Syrie, dont la Banque centrale.

Plus de trois cents individus restent toutefois soumis à des gels d'avoirs dans ce cadre, ainsi qu'une quarantaine d'entités, selon le communiqué du Trésor.

Les nouvelles autorités syriennes appellent depuis la chute d'Assad en décembre dernier à une levée totale des sanctions pour relancer l'économie et reconstruire le pays, ravagé après 14 années de guerre civile.