La Turquie, refuge de moins en moins sûr pour les Ouïghours

Abdullah Abdulrahman, 46 ans, un Ouïghour qui a fui la Chine, a trouvé refuge en Turquie en 2014 après 20 ans de prison dans son pays d'origine. Les législateurs turcs n'ont pas encore débattu du traité, mais les Ouïghours se plaignent déjà de l'intensification des raids de la police sur leurs maisons, obligeant certains à emballer à nouveau leurs affaires et à chercher refuge plus à l'ouest en Europe. Ozan KOSE / AFP
Abdullah Abdulrahman, 46 ans, un Ouïghour qui a fui la Chine, a trouvé refuge en Turquie en 2014 après 20 ans de prison dans son pays d'origine. Les législateurs turcs n'ont pas encore débattu du traité, mais les Ouïghours se plaignent déjà de l'intensification des raids de la police sur leurs maisons, obligeant certains à emballer à nouveau leurs affaires et à chercher refuge plus à l'ouest en Europe. Ozan KOSE / AFP
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Publié le Jeudi 11 mars 2021

La Turquie, refuge de moins en moins sûr pour les Ouïghours

  • "Si la Turquie me renvoie (en Chine), les Chinois ne me laisseront pas en vie. Nous avons peur d'être expulsés"
  • Les Ouïghours vivant à Istanbul dénoncent un climat de plus en plus hostile qui a poussé plusieurs milliers d'entre eux à plier bagage pour aller en Occident

ISTANBUL : Après avoir croupi pendant 20 ans dans une prison chinoise, Abdullah Abdulrahman a trouvé refuge en Turquie, longtemps un havre pour des dizaines de milliers d'Ouïghours, une minorité musulmane persécutée en Chine.

Mais alors qu'Ankara est dépendant des investissements de Pékin et du vaccin chinois contre le nouveau coronavirus, ce réfugié âgé de 46 ans redoute d'être renvoyé en Chine, pays accusé d'avoir interné plus d'un million d'Ouïghours.

"Nous ne sommes plus en sécurité ici", regrette M. Abdulrahman, qui participe depuis deux mois à des manifestations quotidiennes devant le consulat chinois à Istanbul.

"Si la Turquie me renvoie (en Chine), les Chinois ne me laisseront pas en vie", ajoute-t-il. "Nous avons peur d'être expulsés".

Ces craintes ont été renforcées depuis la ratification en décembre par le Parlement chinois d'un accord d'extradition avec la Turquie datant de 2017.

Les députés turcs ne se sont pas exprimés sur ce texte, mais les Ouïghours vivant à Istanbul dénoncent un climat de plus en plus hostile qui a poussé plusieurs milliers d'entre eux à plier bagage pour aller en Occident.

"Tous nos espoirs"

Emprisonné en Chine dans les années 1990 pour avoir pris part à des manifestations contre le régime, M. Abdurrahman a rejoint la Turquie en 2014.

A Istanbul, il a trouvé paix et sécurité au sein de la diaspora ouïghoure, qui partage avec la population turque des racines culturelles et linguistiques.

Mais le répit a été de courte durée: depuis 2018, sa vie est de nouveau plongée dans l'incertitude. 

Arrêté par des policiers turcs le soupçonnant d'"activités terroristes", ce dont l'accusent les autorités chinoises, il a été enfermé pendant un an dans un centre de rétention pour migrants dans l'ouest de la Turquie.

Malgré son acquittement par un tribunal turc, M. Abdurrahman s'est vu refuser le renouvellement de son permis de résidence, indispensable pour se faire soigner, utiliser les transports en commun ou ouvrir un compte en banque.

"Beaucoup se retrouvent sans papiers comme moi, à cause des pressions de la Chine", dit-il.

"Nous avons fui la Chine et placé nos espoirs dans la Turquie. Si la Turquie nous expulse, personne ne nous protégera, sauf Allah", ajoute-t-il.

Vaccins contre influence

Le chef de la diplomatie turque Mevlüt Cavusoglu a bien tenté de rassurer les réfugiés en affirmant qu'une ratification du traité d'extradition par Ankara ne signifierait pas "que la Turquie va renvoyer les Ouïghours en Chine".

Mais Ankara est déjà accusé d'expulser des Ouïghours de façon détournée, en les envoyant vers des pays tiers, comme le Tadjikistan, d'où ils sont ensuite emmenés en Chine.

Le président Recep Tayyip Erdogan, qui était autrefois l'un des seuls dirigeants à dénoncer le traitement des musulmans par Pékin, allant jusqu'à l'accuser en 2009 de "génocide", est aujourd'hui muet sur cette question.

Son silence contraste avec l'indignation publiquement exprimée par des pays occidentaux, alors que la situation des Ouïghours est de plus en plus documentée.

Après l'avoir initialement niée, la Chine a fini par admettre l'existence des camps au Xinjiang,  les présentant comme des "centres de formation professionnelle".

Pour Seyit Tumturk, militant indépendantiste ouïghour, la Chine utilise le levier des vaccins contre le coronavirus --le seul disponible en Turquie à ce jour-- et l'érosion des relations entre Ankara et l'Occident pour "élargir son influence".

Exode

Selon lui, quelque 3.000 Ouïghours ont quitté la Turquie depuis 2019, redoutant une dégradation de leur situation dans ce pays. 

Obul Tevekkul, un agent immobilier dans le district stambouliote de Sefakoy, où vivent de nombreux Ouïghours, a l'impression que sa communauté est devenue un "instrument politique".

Il se dit "déçu par ces accords commerciaux et politiques (sur le vaccin et l'extradition) avec la Chine".

Malgré tout, Semsinur Gafur, âgée de 48 ans, espère encore que M. Erdogan endossera le rôle de défenseur des musulmans opprimés qu'il affecte tant.

Les larmes aux yeux, elle évoque le coup d'éclat du président turc qui, en 2009, avait accusé Israël de "tuer des enfants palestiniens" lors du forum de Davos. "One minute!" ("une minute"), s'était exclamé M. Erdogan alors que le modérateur voulait le couper.

Mme Gafur éclate en sanglots. "Tout ce que nous voulons, c'est que le président turc dise +One minute!+ à la Chine."


Meta accepte de payer 25 millions de dollars à Trump après sa plainte sur la suspension de ses comptes

Le PDG de Meta, Mark Zuckerberg (C), assiste à la cérémonie d'investiture de Donald Trump en tant que 47e président des États-Unis dans la rotonde du Capitole à Washington, DC, le 20 janvier 2025. (AP)
Le PDG de Meta, Mark Zuckerberg (C), assiste à la cérémonie d'investiture de Donald Trump en tant que 47e président des États-Unis dans la rotonde du Capitole à Washington, DC, le 20 janvier 2025. (AP)
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  • Meta a accepté de payer 25 millions de dollars de dédommagements à Donald Trump pour mettre fin à ses poursuites engagées après la suspension en 2021 de ses comptes Facebook et Instagram
  • Le président américain avait porté plainte contre Meta et son fondateur, Mark Zuckerberg, en estimant être victime de censure après avoir été exclu de Facebook et d'Instagram le 7 janvier 2021

WASHINGTON: Meta a accepté de payer 25 millions de dollars de dédommagements à Donald Trump pour mettre fin à ses poursuites engagées après la suspension en 2021 de ses comptes Facebook et Instagram, a annoncé mercredi à l'AFP un porte-parole du groupe.

Le président américain avait porté plainte contre Meta et son fondateur, Mark Zuckerberg, en estimant être victime de censure après avoir été exclu de Facebook et d'Instagram le 7 janvier 2021, lors de son premier mandat, pour avoir encouragé ses partisans lors de l'assaut du Capitole à Washington la veille.

Le Wall Street Journal a été le premier à faire état de cet accord, dont un porte-parole de Meta a ensuite confirmé la teneur à l'AFP.

La décision sans précédent de Meta avait été imitée à l'époque par la plupart des réseaux sociaux grand public, dont Twitter.

Meta avait annoncé deux ans plus tard mettre fin à la suspension des comptes de Donald Trump.

Depuis son retour à la Maison Blanche le 20 janvier, le républicain a beaucoup misé sur les magnats de la technologie, oubliant sa rancune à l'égard de Mark Zuckerberg, qui a assisté à sa cérémonie d'ouverture.

Le patron du groupe californien a multiplié les annonces ce mois-ci pour aligner sa société avec la nouvelle administration américaine.

Il a nommé plusieurs alliés du président à des postes clefs et mis fin à des programmes (anti-désinformation, pro-diversité, pro-modération des contenus) très critiqués par les conservateurs.


Suède: l'homme ayant brûlé des exemplaires du Coran en 2023 tué par balles

Salwan Momika, un Irakien de 38 ans qui avait organisé plusieurs incendies et profanations de Coran en Suède, a été tué lors d'une fusillade. (FILE/AFP)
Salwan Momika, un Irakien de 38 ans qui avait organisé plusieurs incendies et profanations de Coran en Suède, a été tué lors d'une fusillade. (FILE/AFP)
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  • Salwan Momika, qui avait déclenché des manifestations de colère dans des pays musulmans en 2023 en brûlant des exemplaires du Coran en Suède, a été tué par balles au sud-ouest de Stockholm dans la nuit de mercredi à jeudi
  • Une enquête pour meurtre a été ouverte et la police a annoncé en milieu de matinée que cinq personnes avaient été arrêtées

STOCKHOLM: Salwan Momika, qui avait déclenché des manifestations de colère dans des pays musulmans en 2023 en brûlant des exemplaires du Coran en Suède, a été tué par balles au sud-ouest de Stockholm dans la nuit de mercredi à jeudi.

Un tribunal de Stockholm devait rendre son jugement jeudi sur les accusations d'incitation à la haine portées contre lui. Il a indiqué avoir reporté sa décision au 3 février "suite à la confirmation du décès de M. Momika".

La police a expliqué avoir été appelée pour des tirs mercredi soir dans un immeuble d'habitation à Sodertälje, à 40 km au sud-ouest de Stockholm, où vivait cet Irakien de confession chrétienne.

A son arrivée dans l'immeuble, elle a trouvé "un homme touché par balles qui a été emmené à l'hôpital", avant d'indiquer plus tard qu'il était mort, sans citer son nom.

Une enquête pour meurtre a été ouverte et la police a annoncé en milieu de matinée que cinq personnes avaient été arrêtées.

"Je peux confirmer que nous enquêtons sur le meurtre de Salwan Momika", a dit de son côté le procureur Rasmus Öman à l'AFP.

"Nous n'en sommes qu'au stade initial, cela ne fait même pas 24 heures. Il y a donc beaucoup d'informations à recueillir. Cinq personnes soupçonnées d'être impliquées dans cette affaire ont été arrêtées", a-t-il ajouté.

Selon plusieurs médias, Momika était en direct sur les réseaux sociaux et son meurtre a peut-être été filmé. Le quotidien Aftonbladet affirme que le meurtrier a pu s'infiltrer dans l'immeuble par le toit.

En août, Momika, ainsi qu'un autre homme, Salwan Najem, ont été renvoyés en jugement pour "agitation contre un groupe ethnique" à quatre reprises au cours de l'été 2023.

Selon l'acte d'accusation, le duo a profané le Coran, y compris en le brûlant tout en faisant des remarques désobligeantes sur les musulmans, notamment une fois à l'extérieur d'une mosquée de Stockholm.

"Je suis le prochain sur la liste", a dit Salwan Najem sur X après la mort de Momika.

-Permis de séjour révoqué-

En mars 2023, Momika s'était rendu en Norvège après la révocation de son permis de séjour suédois mais il avait été expulsé du pays et était revenu en Suède.

L'agence suédoise des Migrations avait révoqué le permis de séjour de Momika, disant qu'il leur avait fourni de fausses informations lors de sa demande d'asile. Un permis temporaire lui avait cependant été octroyé, faute de pouvoir le renvoyer en Irak.

Les relations entre la Suède et plusieurs pays du Moyen-Orient se sont déteriorées à l'été 2003 en raison des actes de profanation du Coran perpétrés par les deux hommes.

En juillet 2023, des manifestants irakiens ont pris d'assaut l'ambassade de Suède à Bagdad à deux reprises, déclenchant la seconde fois des incendies dans l'enceinte de la représentation diplomatique.

En août de la même année, le service de renseignement suédois Sapo avait relevé son niveau de menace à quatre sur une échelle de cinq, les profanations du Coran ayant fait du pays une "cible prioritaire".

Le gouvernement suédois a condamné ces profanations tout en rappelant que la liberté d'expression et de réunion était protégée par la Constitution.

En octobre 2023, un tribunal suédois a reconnu un homme coupable d'incitation à la haine pour avoir brûlé le Coran en 2020, première condamnation de ce type.

Auparavant, la justice estimait qu'un tel geste était protégé par la liberté d'expression mais depuis lors, il peut également être considéré comme une "agitation contre un groupe ethnique".

Le meurtre de Momika intervient en pleine vague de violence en Suède, marquée par une recrudescence d'attaques à l'explosif. Plus de 30 attaques à l'engin explosif ont été commises depuis le début de l'année, liées selon la police à des tentatives d'extorsion et d'intimidation.


Un avion avec 64 personnes et un hélicoptère s'écrasent dans un fleuve à Washington

Un témoin cité par CNN, Ari Schulman, a déclaré qu'il "pens(ait) avoir vu la collision", avec une "lumière jaune très brillante" -- ressemblant au flash d'une explosion -- lorsqu'il roulait en voiture sur une voie rapide qui sillonne le long du Potomac, entre Washington et la Virginie. (AFP)
Un témoin cité par CNN, Ari Schulman, a déclaré qu'il "pens(ait) avoir vu la collision", avec une "lumière jaune très brillante" -- ressemblant au flash d'une explosion -- lorsqu'il roulait en voiture sur une voie rapide qui sillonne le long du Potomac, entre Washington et la Virginie. (AFP)
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  • Dans la nuit de mercredi à jeudi, plusieurs heures après la pire catastrophe aérienne aux Etats-Unis depuis plus d'une décennie, les autorités n'ont fourni aucun bilan humain
  • Dans un message sur sa plateforme Truth Social, Donald Trump a jugé que l'accident sans précédent à Washington "aurait dû être évité", si l'hélicoptère avait manœuvré, sous la direction des contrôleurs aériens

WASHINGTON: Un avion d'American Airlines avec 64 personnes à bord et un hélicoptère militaire se sont écrasés mercredi soir dans le fleuve Potomac après une collision au-dessus de Washington, déclenchant une opération de recherches "extrêmement difficiles".

Dans la nuit de mercredi à jeudi, plusieurs heures après la pire catastrophe aérienne aux Etats-Unis depuis plus d'une décennie, les autorités n'ont fourni aucun bilan humain.

Dans un message sur sa plateforme Truth Social, Donald Trump a jugé que l'accident sans précédent à Washington "aurait dû être évité", si l'hélicoptère avait manœuvré, sous la direction des contrôleurs aériens, pour ne pas se trouver dans la "trajectoire d'approche parfaite" de l'avion.

La capitale fédérale est sans cesse survolée par des avions et hélicoptères à très basse altitude, avec son aéroport Ronald-Reagan au bord du Potomac, fleuve qui sépare la ville de l'Etat de Virginie à l'est.

"Profond chagrin" 

"Les deux appareils sont dans l'eau", a dit lors d'une conférence de presse depuis l'aéroport la maire de Washington Muriel Bowser.

Transportant 60 passagers et quatre membres d'équipage, l'avion appartient à la compagnie PSA, une filiale régionale d'American Airlines.

Son patron, Robert Isom, a exprimé dans une vidéo son "profond chagrin".

La police de Washington a souligné qu'il n'y avait "à ce stade aucune information confirmée sur des victimes".

Une très vaste opération de recherche et de secours avec policiers, pompiers, et garde-côtes est en cours sur les lieux de l'accident, dans les eaux glaciales et boueuses du Potomac, par une nuit noire.

"Les conditions sont extrêmement difficiles" pour les secouristes, dont des plongeurs, a reconnu John Donnelly, chef des pompiers de la ville.

Il a évoqué le "froid", un "vent fort" et de "la glace" sur le Potomac, les températures ayant chuté fin janvier jusqu'à -12°C.

Le Washington Post a évoqué plusieurs personnes sorties de l'eau sans que l'on sache si elles étaient vivantes ou décédées.

Depuis l'accident, des hélicoptères survolent le fleuve, balayant les eaux avec des faisceaux lumineux. Autour de l'aéroport, des dizaines de gyrophares sont visibles depuis les rives du Potomac, à Washington et en Virginie, selon des journalistes de l'AFP.

On voit aussi dans la nuit des dizaines de camions de pompiers dont certains avec des remorques tirant des canots pneumatiques à proximité de l'aéroport, dont les pistes sont au bord du fleuve.

"Lumière jaune très brillante" 

Un témoin cité par CNN, Ari Schulman, a déclaré qu'il "pens(ait) avoir vu la collision", avec une "lumière jaune très brillante" -- ressemblant au flash d'une explosion -- lorsqu'il roulait en voiture sur une voie rapide qui sillonne le long du Potomac, entre Washington et la Virginie.

Le régulateur américain de l'aviation (FAA) a donné les premiers éléments sur les deux appareils impliqués dans l'accident: un avion du constructeur Bombardier exploité par PSA "entré en collision à altitude moyenne" avec un hélicoptère Sikorsky H-60 au moment de l'approche pour atterrir à l'aéroport Ronald-Reagan.

L'avion venait de Wichita, au Kansas, et devait atterrir à Washington à 21H00 (02H00 GMT jeudi).

Un responsable du Pentagone a précisé que trois militaires étaient à bord de l'hélicoptère et une porte-parole de l'armée a confirmé que l'appareil effectuait "un vol d'entraînement", selon un message relayé sur les réseaux sociaux par le nouveau ministre de la Défense Pete Hegseth.

Evoquant un "incident aérien" sur son compte X, l'aéroport Ronald-Reagan a annoncé avoir "suspendu" tous les décollages et atterrissages jusqu'au moins jeudi matin.

Tout près de l'accident de mercredi soir, un Boeing 737-222 d'Air Florida avait percuté un pont enjambant le Potomac pendant une tempête de neige et s'y était abîmé, le 13 janvier 1982. L'accident avait fait 78 morts, dont quatre automobilistes qui se trouvaient sur le pont.