L’Iran passé maître dans l’art de manipuler la faiblesse américaine

L'ancien secrétaire d'État américain Mike Pompeo a parlé, dans une interview exclusive avec Arab News, de la menace sérieuse que représente le régime iranien. (Photo Arab News/ capture d'écran)
L'ancien secrétaire d'État américain Mike Pompeo a parlé, dans une interview exclusive avec Arab News, de la menace sérieuse que représente le régime iranien. (Photo Arab News/ capture d'écran)
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Publié le Jeudi 11 mars 2021

L’Iran passé maître dans l’art de manipuler la faiblesse américaine

  • L’ancien secrétaire d’État estime que protéger les soldats américains au Moyen-Orient nécessite une réponse américaine ferme à l’Iran
  • Refuser aux Saoudiens «le droit de se défendre est tout simplement de la folie, et pourtant, c’est bien la direction que semble prendre cette administration»

RIYAD : L'administration américaine a la responsabilité de s’opposer aux efforts qui tentent d’affaiblir l'Arabie saoudite, a déclaré l'ancien Secrétaire d'État américain Mike Pompeo dans une interview exclusive à Arab News. Il ajoute que refuser aux Saoudiens «le droit de se défendre est tout simplement de la folie, et pourtant, c’est bien la direction que semble prendre cette administration».

Il a affirmé que «les dirigeants iraniens savent comment tirer profit de la faiblesse américaine» et que pour dissuader le régime, il faudra «un message cohérent et solide» et «la volonté de lui en faire payer le prix».

Pompeo s’oppose fermement au retrait de la désignation de terroriste à la milice yéménite Houthi par l’administration Biden. Il rappelle que «personne ne conteste le fait que les Houthis soit des terroristes, et personne ne conteste non plus le fait que les Iraniens les soutiennent».

Au cours de l'interview, l’ancien secrétaire a abordé un certain nombre de questions importantes, notamment la montée en flèche des attaques contre les zones peuplées et les infrastructures pétrolières saoudiennes, la perception iranienne des mesures de politique étrangère de l'administration Biden, le rôle des Houthis dans l'aggravation de la crise humanitaire au Yémen, et la gestion par l'administration Trump des relations américano-saoudiennes.

«En fin de compte, les dirigeants iraniens, le (guide suprême) l'ayatollah (Ali Khamenei) et son entourage comprennent une chose: ils comprennent le langage de la force. Et quand ils agissent, et qu'ils voient des faiblesses ou qu'ils voient un apaisement ou qu'ils s'attendent à ce qu'il y ait un apaisement, ils vont continuer à agir», a déclaré Pompeo.

Tirant la sonnette d’alarme, il a précisé: «Donc, que ce soit par les frappes de missiles que (les Iraniens) ont entreprises, ou les efforts qu'ils ont déployés pour continuer à faire pression sur l'Agence Internationale de l'Energie Atomique (AIEA) pour réfuter ce que nous savons tous, leur programme clandestin, les sites clandestins où ils détenaient des armes de destruction massive qui n'ont pas été déclarées - voilà le genre de choses que nous continuerons de constater, jusqu’à ce que le monde, pas uniquement les États-Unis, mais le monde entier, l'E3 (Royaume-Uni, France, Allemagne) inclus, dise que «cela suffit, nous n'allons plus permettre que cela se produise.»

Pompeo, originaire du Kansas, était membre du Congrès. Il a ensuite été directeur de la CIA sous la présidence de Donald Trump, avant d'être nommé et confirmé comme Secrétaire d'État en 2018. Sous sa direction, les États-Unis ont adopté une campagne de «pression maximale» pour isoler le régime iranien, tout en gardant ouverte l'option d'une frappe militaire pour «assurer la sécurité des Américains».

Depuis son départ en janvier, Pompeo a continué à prendre la parole et a refusé d'exclure une éventuelle candidature à la présidentielle de 2024 si son ancien patron, Trump, ne se présente pas. En plus de nous faire part de ses projets d’aider les Républicains et de militer pour les conservateurs, Pompeo a critiqué la nouvelle administration américaine pour avoir refusé de donner la priorité à l'Amérique, en particulier dans le contexte du Moyen-Orient.

Pompeo assure à Arab News que ce qui le préoccupe, ce ne sont pas seulement les «messages envoyés par l'administration (Biden); mais l’orientation politique qu’elle dit avoir l’intention de suivre».

«L’administration Biden a clairement indiqué qu’elle préfère s’engager à nouveau des négociations étroitement liées au PAGC de 2015», a-t-il déclaré, faisant référence au Plan d’action global conjoint, communément appelé «accord nucléaire iranien».

L'accord a été conclu en juillet 2015 entre l'Iran et le P5 + 1 (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, plus l'Allemagne) ainsi que l'Union Européenne. L'administration Trump a retiré les États-Unis du PAGC en mai 2018, invoquant les failles de son caractère temporaire, son manque de contrôle sur le programme de missiles balistiques de l'Iran et le «comportement malveillant» de l'Iran en Syrie et ailleurs au Moyen-Orient.

«Examinons les actions. Jusqu'à présent, l'administration a retiré de la liste une organisation terroriste. Personne ne conteste, personne ne conteste le fait que les Houthis sont des terroristes. Et personne ne conteste le fait que les Iraniens les soutiennent», a affirmé Pompeo.

«Cette administration dit: «Nous allons les retirer de la liste. «Cette administration a travaillé aux côtés de l'AIEA pour dire: «Non, nous n'allons pas publier de rapport sur ce matériel qui a été (trouvé) dans des endroits non déclarés».

«Ils vont maintenant permettre à l'argent du FMI et de la République de Corée d’affluer dans les coffres iraniens. C’est ce genre de concessions avant qu’il n’y ait eu de discussions sur la possibilité même d’entrer dans une négociation. Cela fait montre de faiblesse et, je vous en assure, les dirigeants iraniens savent comment tirer profit de la faiblesse américaine».

Décrivant l'Arabie saoudite comme «un important partenaire de sécurité» pour les États-Unis, Pompeo a déclaré: «Pendant très longtemps, je pense que nous avons négligé ce fait. Lorsque nous y parviendrons, nous pourrons envoyer un nombre moins important de nos jeunes hommes et femmes, jeunes hommes et femmes américains, au Moyen-Orient, confrontés à des risques, et nous pourrons les soutenir.

Expliquant comment cela pourrait être réalisé, il a précisé: «Cela commence toujours par un engagement, un engagement diplomatique, un engagement du président des États-Unis, qui affirme que nous comprenons que vous, en Arabie saoudite, avez le droit de vous défendre alors que des missiles sont lancés contre votre pays. Leur ôter le droit de se défendre est tout simplement de la folie, et pourtant, c’est bien la direction que semble prendre cette administration».

«Deuxièmement, nous avons travaillé avec le Royaume d'Arabie saoudite sur un plus large éventail de questions, notamment la vente d'armes, éléments visant à la sécurité de la population du Royaume d'Arabie saoudite», rappelle-t-il.

Pompeo a rejeté les critiques selon lesquelles l'administration Trump a bafoué les droits de l’homme dans le processus. «Rien ne pourrait être plus loin de la vérité», a-t-il dit. «Nous avons soutenu le Royaume d'Arabie saoudite alors qu'il commençait à s'ouvrir de l'intérieur, pour permettre aux femmes d'être plus actives et de s’adonner à des activités qui leur étaient interdites depuis très longtemps. De réels progrès ont été réalisés».

Il a fait valoir que l'administration Trump a adressé des remontrances aux Royaume lorsque des erreurs s’étaient produites. Dans le dossier de l’assassinat de Jamal Khashoggi, l'administration a sanctionné les agents impliqués dans l’affaire.

À l'époque, le Royaume avait admis qu'en 2018, un certain nombre d'agents avaient outrepassé leur autorité et fini par tuer le journaliste au consulat saoudien à Istanbul, en Turquie. Un procès a vu cinq Saoudiens ont condamnés à mort, et trois autres à des peines de prison, à la suite de cet assassinat.

Néanmoins, Pompeo a réitéré le fait qu'avoir une «relation de sécurité approfondie avec le Royaume était lié à la sécurité de l'Amérique et à la sécurité de tout le Moyen-Orient».

Il a établi un contraste saisissant entre la politique de Trump au Moyen-Orient et celle de son successeur. «Nous avions trois principaux axes d'efforts. Le premier était de mettre en place une coalition contre le plus grand État commanditaire du terrorisme au monde, le régime iranien. Et nous l'avons fait», a déclaré Pompeo.

«Nous avons mis en place une coalition comprenant Arabes et Israéliens. Elle comprenait également d'autres pays qui étaient prêts à nous aider à patrouiller dans le détroit d'Ormuz. Nous avons bâti une véritable coalition mondiale contre l'Iran pour le dissuader d’effectuer des attaques militaires».

«En second lieu, nous avons exercé une énorme pression économique sur le régime iranien. Nous l’avons sanctionné; nous nous sommes assurés que les Iraniens ne pourraient pas vendre leur pétrole brut dans le monde - toutes choses qui forceraient le régime iranien à prendre des décisions difficiles sur la façon de dépenser ses ressources.»

«Si vous voulez financer le Hezbollah, vous allez avoir moins d’argent pour nourrir votre peuple et en prendre soin. Si vous voulez soutenir les milices irakiennes, si vous voulez aider le régime d'Assad en Syrie... Nous avons imposé de lourdes contraintes financières, dans l'espoir qu'ils en tireraient la conclusion que réaliser leur programme nucléaire et leur programme de missiles n’est pas dans le meilleur intérêt de leur pays».

Pompeo a poursuivi: «La troisième chose que nous avons faite, est d’avoir soutenu le peuple iranien. C'est différent de ce que l'administration Obama a fait. Nous étions conscients du fait que le peuple iranien lui-même souhaitait vivre une vie qui ne soit pas très différente de celle que vivent les gens du monde entier - et que les théocrates, les kleptocrates au pouvoir en Iran aujourd'hui, pouvaient avoir les systèmes d'armement, mais pas les cœurs et l’esprit du peuple iranien.

«Nous avons donc fait tout notre possible pour soutenir le peuple iranien. Ces trois piliers clés de notre politique marquaient la bonne direction. Ils représentaient le meilleur moyen de dissuader l’Iran d’attaquer les pays arabes, de sorte que l’intention déclarée par l’Iran de rayer Israël de la carte ne se concrétise pas.»

Pompeo affirme qu’il n’y a aucune raison de remettre en question l’état d’esprit du régime iranien. «Ils ont clairement indiqué qu’ils étaient prêts à faire des choses dans le monde entier, avec ce qu’ils considéraient comme étant la garantie de leurs droits dans le monde», a-t-il déclaré à Arab News.

«Lorsque j'étais Secrétaire d'État, j'ai beaucoup parlé de leurs efforts pour mener des campagnes d'assassinats dans toute l'Europe».

«Certains de leurs agents ont été arrêtés et emprisonnés en Europe. Cela m’a toujours déconcerté de voir l’E3 continuer à se rapprocher des Iraniens et de l’accord du PAGC pour dire «Non, c’est la bonne direction», alors qu’en fait, les Iraniens essayaient de tuer des gens à l’intérieur de chacun de leurs pays».

«Nous le constatons également ici aux États-Unis. N'oublions pas qu'il n'y a pas si longtemps, les Iraniens avaient comploté pour tuer l'ambassadeur saoudien ici même, pas très loin de l'endroit où je suis assis aujourd'hui, à Washington D.C.

«Ils ont une campagne mondiale, une campagne mondiale d’espionnage, un effort mondial d’assassinats, le tout pour défendre une poignée de hauts dirigeants à l’intérieur de l’Iran, qui siphonnent les fonds restants à la disposition des Iraniens. Nous ne pouvons pas continuer à souscrire à cela.»

«Nous ne pouvons pas lever ces sanctions tant que l’Iran n’a pas libéré tous les prisonniers américains, tant que l’Iran n’a pas compris qu’il est inacceptable de se livrer à ce genre de comportement. Nous ne pouvons pas récompenser ça, les récompenser avec des ressources financières, les inciter à continuer à agir ainsi et leur fournir les capitaux nécessaires pour poursuivre ces programmes.»

S'agissant de sa décision de désigner les Houthis comme une «organisation terroriste étrangère», Pompeo a affirmé à Arab News: «Bien sûr. C'était une simple mesure qui a été appliquée par l'administration (Trump). C'était simple. Il n’a pas fallu beaucoup de travail pour y parvenir».

«Mais, voyez-vous, l’administration (Biden) ne peut pas nier qu’il s’agit de terroristes, bien qu’elle affirme maintenant que les Houthis n’étaient pas des terroristes. Je comprends les préoccupations du monde face aux défis humanitaires au Yémen. L’administration Trump a effectivement dépensé une grande partie de l’argent des contribuables américains pour faire en sorte que les citoyens ordinaires du Yémen ne souffrent pas de la famine, et nous avons convaincu les Saoudiens et les Émiratis de faire de même».

«Nous avons travaillé très sur ce sujet. Nous nous sommes assurés, du mieux que nous le pouvions, que la nourriture entre dans ce pays. Mais les personnes qui empêchaient l'aide mondiale d'atteindre ceux qui avaient réellement besoin de cette nourriture et de ces médicaments étaient, en fait, les Houthis.

Faisant allusion à la décision du président Joe Biden de retirer la qualification de «terroriste» de la milice, il a déclaré: «Les Houthis ont maintenant démontré que si vous continuez à bloquer les routes de transit, si vous continuez à menacer les ports, si vous continuez à tenter de gagner du terrain, comme ils essaient de le faire à Marib aujourd'hui, s'ils continuent dans cette voie, ils seront récompensés par un allégement des sanctions. C’est la mauvaise direction. Ils ne comprennent que le langage de la force. Nous avons maintenant démontré que nous sommes prêts à leur donner quelque chose, alors qu’en fait, ils n’ont fait aucune concession.»

La semaine dernière, les cours à terme sur le Brent ont bondi au-dessus de 70 dollars pour la première fois en plus d'un an, après que les installations pétrolières saoudiennes ont été ciblées par des missiles et des drones. Un parc de réservoirs de pétrole dans l'un des plus grands ports de transport de pétrole au monde a été attaqué par un drone, tandis qu'un missile balistique ciblait les installations de Saudi Aramco, selon l'agence de presse officielle SPA. Les éclats du missile intercepté sont tombés près des zones résidentielles de la ville de Dhahran.

«Souvenez-vous que lorsque l’installation de Saudi Aramco a été prise pour cible durant notre administration, j’ai indiqué très clairement la provenance de ces missiles. Ils ne venaient pas du Yémen. C'étaient des missiles iraniens lancés par les Iraniens», a précisé Pompeo à Arab News.

«Cet effort continu pour déstabiliser le Royaume d'Arabie saoudite et pour menacer les gens, qu'ils soient à Dhahran - où se trouvent beaucoup, beaucoup d'Américains - ou à Riyad, constitue une menace réelle pour la stabilité dans tout le Moyen-Orient. Notre administration ici en Amérique, les administrations de toute l'Europe, ont la responsabilité de lutter contre cela et de faire payer aux Iraniens le prix de ce genre d’inconduite. Il est vraiment étrange que, d’une certaine façon, le lancement de missiles iraniens soit devenu, du moins pour cette administration, quelque chose qui n’est pas considéré comme exigeant une réponse directe», insiste-t-il.

«Il y a peu d'endroits dans le monde où cela serait autorisé sans une réaction sérieuse du monde occidental, et cela supposerait une réponse sérieuse, au moins pour la forme, de la part de l'ONU. J'espère que cela aura lieu». Pompeo dit qu’il est «difficile de savoir au jour le jour» si le risque aujourd'hui est plus élevé qu'il ne l’était il y a une semaine ou deux. Nous le savons: dissuader le régime iranien nécessite un message cohérent et solide et une volonté d’imposer un coût aux dirigeants iraniens.»

Alors, que pense Pompeo des frappes militaires américaines en Syrie le mois dernier, sur un site utilisé par deux milices irakiennes soutenues par l'Iran, apparemment en réponse à des attaques à la roquette contre les forces américaines en Irak? Le président Biden a décrit la frappe comme un message à l’Iran: «Vous ne pouvez pas agir en toute impunité, faites attention».

Pompeo a affirmé que «si la réponse à l'agression iranienne était de lancer des missiles dans le désert, ou de frapper un bâtiment d'approvisionnement en Syrie, ce qui n'a pratiquement pas d’effet sur le régime iranien lui-même, si ce sont là les réponses, alors il est peu probable de pouvoir établir des moyens de dissuasion pour protéger et défendre nos soldats qui sont stationnés dans tout le Moyen-Orient, pas seulement en Arabie saoudite, mais dans tout le Moyen-Orient».

De son point de vue, «nous avons l’obligation de bien faire les choses et il faudra une forte réponse américaine pour les dissuader d’agir de cette façon».

Encouragés peut-être par la campagne réussie visant à amener Biden à retirer la désignation de «terroriste» appliquée aux Houthis durant l'ère Trump, certains dirigeants religieux, politiques, et humanitaires, ont récemment signé une lettre appelant le président américain à lever les sanctions économiques contre la Syrie. Mais Pompeo considère que la loi César sur la protection des civils en Syrie est «vraiment importante».

«La bonne nouvelle est que c'était un effort émanant des deux partis, ce n'était pas seulement l'administration Trump», a-t-il précisé à Arab News. «Cela m'a donné le pouvoir, en tant que Secrétaire d'État à ce moment, de prendre des mesures concrètes et de répondre sous l'autorité de la loi César. C'était très efficace. Cela a mis la pression sur les hommes d'affaires syriens qui avaient des liens étroits avec l'Iran. Cela a mis la pression sur le Hezbollah et les hommes d'affaires qui soutenaient le Hezbollah.»

«C'était incroyablement efficace. J'espère que la loi César et son application par l'administration se poursuivront».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur arabnews.com   


Manipulation médiatique et instrumentalisation de Forbes France au service de la propagande royale du Maroc

Le bâtiment des galeries du magazine Forbes. 62, 5th avenue, Manhattan, New York, NYC, USA. (Photo par : -/VW Pics/Universal Images Group via Getty Images)
Le bâtiment des galeries du magazine Forbes. 62, 5th avenue, Manhattan, New York, NYC, USA. (Photo par : -/VW Pics/Universal Images Group via Getty Images)
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  • Les chiffres sont accablants : sur 49 articles publiés par Forbes France sur le Maroc, près de la moitié sont des contenus payants étiquetés « Brandvoice », financés directement ou indirectement par des proches du régime marocain.
  • Dominique Busso, le PDG de l’édition française, ne cache pas que ces transactions douteuses sont monnaie courante.

RIYAD : L’enquête explosive menée par Marianne, complétée par les révélations incisives d’Africa Intelligence, lève le voile sur un système d’influence sophistiqué dans lequel le Maroc, sous couvert de soft power, orchestre une propagande méthodique via des relais médiatiques internationaux.

Forbes France, autrefois symbole d’excellence journalistique, apparaît aujourd’hui comme un instrument docile entre les mains des autorités marocaines.

Les chiffres sont accablants : sur 49 articles publiés par Forbes France sur le Maroc, près de la moitié sont des contenus payants étiquetés « Brandvoice », financés directement ou indirectement par des proches du régime de Mohammed VI.

Ces textes déguisés en journalisme peignent un portrait idyllique du royaume, occultant sciemment la répression des libertés individuelles, les inégalités criantes et les réalités économiques sombres du pays. Il s'agit d'une véritable mascarade qui sape l’intégrité journalistique et trompe délibérément les lecteurs.

Forbes France : un média au service de la propagande royale

Plus qu’un simple complice passif, le magazine semble s’être vendu au plus offrant, troquant son indépendance contre des millions d’euros provenant des cercles de pouvoir marocains.

Dominique Busso, le PDG de l’édition française, ne cache pas que ces transactions douteuses sont monnaie courante. Pire, selon des sources internes, le Maroc achète régulièrement des articles pour redorer l’image de son régime monarchique, tout en évitant toute transparence sur les financements réels.

Abdelmalek Alaoui, présenté comme un analyste ou un économiste, mais qui n'est en réalité qu'un agent de la Direction générale des études et de la documentation (DGED), est identifié comme un rouage clé de cette machinerie propagandiste.

Des courriels internes obtenus par Marianne montrent comment Alaoui et d’autres agents influencent directement la ligne éditoriale de ces articles en faveur de la monarchie marocaine. Forbes France ne serait rien d’autre qu’un outil au service de cette désinformation orchestrée depuis Rabat.

Un documentaire sous influence : glorification du règne de Mohammed VI

Les tentacules de cette stratégie de manipulation s’étendent bien au-delà de la presse écrite. Africa Intelligence révèle qu’un documentaire diffusé sur Public Sénat à l’approche d’une visite officielle d’Emmanuel Macron au Maroc a été conçu comme une véritable opération de communication. 

Réalisé par des proches de l’élite politique marocaine et française, ce film, présenté comme un travail journalistique, n’est rien d’autre qu’une glorification du roi Mohammed VI.

Tout en vantant les prétendus succès du roi, notamment en matière de condition féminine et de développement économique, le documentaire escamote les critiques concernant les inégalités sociales et la répression des libertés. Il s'agit là d'une manipulation éhontée, à peine voilée, où les consignes éditoriales semblent avoir été dictées par Rabat pour protéger l’image royale.

Le Maroc : un État stratège du mensonge médiatique

Ce qui se dévoile ici est bien plus qu’un simple scandale médiatique. Il s’agit d’une stratégie délibérée et agressive de soft power, dans laquelle le Maroc utilise des moyens financiers considérables pour infiltrer et manipuler les récits médiatiques internationaux.

En contrôlant la narration sur des plateformes influentes telles que Forbes France, le royaume impose une version réécrite et aseptisée de la réalité, tout en muselant les voix dissidentes.

Ces pratiques immorales révèlent la complicité choquante de médias qui, en échange d'avantages financiers, renoncent à leur devoir d'informer honnêtement. Ce brouillage systématique de la frontière entre journalisme et propagande constitue une attaque directe contre l’intégrité de l’information.

Un appel urgent à l’éthique journalistique

Les révélations de Marianne et d’Africa Intelligence mettent en lumière le manque de diligence de la part d'acteurs tels que Forbes France.

Il est désormais impératif de mener une enquête indépendante sur ces pratiques. En effet, tant que des médias accepteront de se vendre au plus offrant, les citoyens continueront à être trompés par des récits soigneusement fabriqués pour servir des intérêts politiques. 

L’intégrité de la presse n’est pas à vendre, il est temps de le rappeler.


Les États-Unis débloquent 117 millions de dollars pour les Forces libanaises

Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
Drapeau américain agitant isolément sur fond blanc (Photo iStock)
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  • Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».
  • C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

WASHINGTON : Lles États-Unis ont annoncé  samedi le transfert de 117 millions de dollars destinés à soutenir les forces de l'ordre et l'armée libanaises, à l'issue d'une réunion de donateurs internationaux, jeudi.

Selon un communiqué du département d'État, ces fonds doivent aider les Forces armées libanaises (FAL) et les Forces de sécurité intérieure (FSI, chargées du maintien de l'ordre) à « garantir la souveraineté du Liban dans tout le pays ».

C'est ce dernier qui est à l'origine de la réunion des donateurs internationaux qui a eu lieu jeudi « avec partenaires et alliés pour évoquer le soutien crucial à la sécurité du Liban afin de pérenniser la cessation des hostilités avec Israël ».

Un cessez-le-feu a pris effet fin novembre entre le mouvement islamiste pro-iranien Hezbollah et Israël, après plus d'un an de bombardements de part et d'autre, ainsi qu'une incursion des forces israéliennes en territoire libanais à partir de fin septembre.

L'enveloppe annoncée samedi par le département d'État « démontre son engagement à continuer à travailler avec ses partenaires et alliés pour s'assurer que le Liban bénéficie du soutien nécessaire pour renforcer la sécurité du pays et de la région ».

Samedi, le président libanais, Joseph Aoun, a réclamé le retrait de l'armée israélienne « dans les délais fixés » par l'accord de cessez-le-feu.

Ce dernier prévoit le déploiement de l'armée libanaise aux côtés des Casques bleus dans le sud du pays et le retrait de l'armée israélienne dans un délai de 60 jours, soit d'ici au 26 janvier.

Le Hezbollah doit, pour sa part, retirer ses forces au nord du fleuve Litani, à environ 30 km de la frontière libano-israélienne. 


Manifestation pour revendiquer la libération de l'opposante Abir Moussi

Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
Des partisans d'Abir Moussi, chef du Parti Destourien Libre (PDL), participent à une manifestation demandant sa libération, à Tunis le 18 janvier 2025. (Photo FETHI BELAID / AFP)
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  • Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.
  • Soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

TUNIS : Plusieurs centaines de sympathisants du Parti destourien libre (PDL), qui revendique l'héritage des autocrates Bourguiba et Ben Ali, ont manifesté samedi en Tunisie pour réclamer la libération de leur dirigeante, l'opposante Abir Moussi.

Brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Liberté pour Abir » ou « Nous sommes des opposants, pas des traîtres ! », ils étaient entre 500 et 1 000, selon des journalistes de l'AFP. Beaucoup portaient des drapeaux tunisiens et des photos de la dirigeante du PDL.

Ils ont critiqué virulemment à la fois le président Kaïs Saied et le parti islamo-conservateur d'opposition Ennahdha. Mme Moussi, ex-députée de 49 ans, est en détention depuis son arrestation le 3 octobre 2023 devant le palais présidentiel, où, selon son parti, elle était venue déposer des recours contre des décrets de M. Saied.

Mme Moussi fait l'objet de plusieurs accusations, dont celle particulièrement grave de tentative « ayant pour but de changer la forme de l'État », soupçonnée d'avoir voulu rétablir un pouvoir similaire à celui de Zine El Abidine Ben Ali, renversé en 2011 par la première révolte du Printemps arabe.

Les manifestants ont dénoncé le décret 54 sur les « fausses nouvelles », en vertu duquel Mme Moussi est poursuivie dans cette affaire, et dont l'interprétation très large a entraîné l'incarcération depuis septembre 2022 de dizaines de politiciens, d'avocats, de militants ou de journalistes.

Pour Thameur Saad, dirigeant du PDL, emprisonner Mme Moussi pour des critiques envers l'Isie « n'est pas digne d'un pays se disant démocratique ». « Les prisons tunisiennes sont désormais remplies de victimes du décret 54 », a renchéri à l'AFP Karim Krifa, membre du comité de défense de Mme Moussi.

D'autres figures de l'opposition, dont le chef d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, sont également emprisonnées.

Depuis le coup de force de M. Saied à l'été 2021, l'opposition et les ONG tunisiennes et étrangères ont déploré une régression des droits et des libertés en Tunisie. Le chef de l'État a été réélu à une écrasante majorité de plus de 90 % des voix le 6 octobre, lors d'un scrutin marqué toutefois par une participation très faible (moins de 30 %).